La lettre juridique n°451 du 1 septembre 2011 : Télécoms

[Textes] Transposition du "paquet télécom" et autres nouveautés de rentrée en matière de communications électroniques

Réf. : Ordonnance n° 2011-1012 du 24 août 2011, relative aux communications électroniques (N° Lexbase : L0014IRX)

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par Vincent Téchené, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition affaires

le 01 Septembre 2011

Le "paquet télécom" de 2002 est constitué de l'ensemble des textes communautaires relatifs au secteur des communications électroniques (1). Le 25 novembre 2009, le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne ont arrêté deux Directives et un Règlement révisant et complétant ce dispositif. D'une part, le Règlement n° 1211/2009 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 (N° Lexbase : L1051IGZ) institue l'Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE), nouvelle instance de dialogue et d'échanges entre les différents régulateurs nationaux et la Commission européenne, ainsi que l'Office, qui apporte un soutien aux travaux conduits par l'ORECE. Ce texte, d'application directe, est entré en vigueur le 7 janvier 2010.
D'autre part, la Directive 2009/140/CE du 25 novembre 2009, dite Directive "mieux réguler" (N° Lexbase : L1209IGU), a modifié les Directives "cadre", "accès" et "autorisation", tandis que la Directive 2009/136/CE du même jour, dite Directive "droits des citoyens" (N° Lexbase : L1208IGT), a modifié les Directives "service universel" et "vie privée". Outre le renforcement de la coopération au niveau communautaire, les objectifs des Directives réside essentiellement dans :
- le renforcement de l'indépendance et des pouvoirs des "autorités réglementaires nationales" (les ARN) ;
- le renforcement de la protection et des garanties accordées à l'ensemble des utilisateurs finals ;
- et la meilleure gestion du spectre.
L'article 17 de la loi n° 2011-302 du 22 mars 2011, portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques (N° Lexbase : L8628IPA), a ainsi autorisé le Gouvernement à prendre, par ordonnance, les dispositions législatives nécessaires à la transposition des Directives 2009/136/CE et 2009/140/CE. Allant au-delà, il l'autorise également à prendre les dispositions nécessaires à l'accroissement de l'efficacité de la gestion des fréquences radioélectriques, à la lutte contre les faits susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances dans le domaine des communications électroniques et au respect des règles permettant de répondre aux menaces et prévenir et réparer les atteintes graves à la sécurité des systèmes d'information des autorités publiques et des opérateurs dits "d'importance vitale", à la correction et à la clarification des dispositions législatives du code des postes et des communications électroniques, ainsi qu'à leur extension à la Nouvelle-Calédonie et aux collectivités d'outre-mer.
Tel est donc l'objet de l'ordonnance du 24 août 2011, publiée au Journal officiel du 26 août 2011, qui met en oeuvre ces différentes habilitations. Cae texte se compose de cinq titres :
- le titre Ier transpose les Directives 2009/136/CE et 2009/140/CE dans le Code des postes et des communications électroniques (chapitre Ier), dans le Code de la consommation (chapitre II), dans la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés (N° Lexbase : L8794AGS), et dans le Code pénal (chapitre III) ;
- le titre II des dispositions non explicitement requises par la transposition des Directives européennes mais poursuivant les mêmes objectifs et destinées à lutter contre les brouillages et à encourager le marché secondaire des fréquences ;
- le titre III contient les dispositions ne relevant pas de la transposition mais contribuant à renforcer les systèmes d'information des autorités publiques et des opérateurs dits "d'importance vitale" ;
- le titre IV comporte des modifications des dispositions législatives du Code des postes et des communications électroniques à des fins de correction et de clarification ;
- le titre V prévoit, enfin, les dispositions transitoires et finales.

Nous nous proposons en conséquence de reprendre le plan de l'ordonnance pour une présentation simplifiée et pédagogique de ce nouveau dispositif.

I - La transposition du nouveau cadre européen des communications électroniques

Il convient d'abord de relever que les nouvelles Directives de 2009 ne bouleversent pas le cadre juridique national car les changements introduits ne modifient pas les principes généraux mais constituent plutôt des aménagements du cadre juridique européen de 2002. Les principaux ajustements s'articulent autour de trois thèmes :
- assurer une meilleure régulation du secteur des communications électroniques ;
- permettre une gestion du spectre plus efficace et faciliter en conséquence l'accès des différents utilisateurs aux fréquences radioélectriques ;
- et renforcer la protection des consommateurs et des données personnelles.

A - Définition et objectifs généraux

L'ordonnance complète d'abord les définitions et les objectifs généraux fixés aux pouvoirs publics par le Code des postes et des communications électroniques afin de tenir compte, notamment, des adaptations nécessaires aux nouveaux enjeux et, principalement, favoriser le déploiement des nouveaux réseaux et garantir la neutralité des réseaux. L'article 2 modifie en conséquence l'article L. 32 du Code des postes et communications pour redéfinir la notion de "Service téléphonique au public" (7°) et ajouter celles de "Ressources associées" (19°) et de "Services associés" (20°). L'article 3 de l'ordonnance modifie, quant à lui, l'article 32-1 du même code, relatif aux objectifs assignés au ministre chargé des communications électroniques et à l'ARCEP.

B - Indépendance et compétences de l'ARCEP

L'ordonnance contient, par ailleurs, de nombreuses dispositions qui visent à donner des garanties supplémentaires concernant l'indépendance de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes sont introduites et l'extension de ses compétences.

  • Indépendance

Il est inséré par l'article 31 de l'ordonnance un nouvel alinéa à l'article L. 131 dans le CPCE, aux termes duquel "les membres et agents de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes exercent leurs fonctions en toute impartialité, sans recevoir d'instruction du Gouvernement, ni d'aucune institution, personne, entreprise ou organisme".

  • Pouvoirs du régulateur

Circonscrite aux litiges entre opérateurs, la compétence des ARN a été étendue, par l'article 20 de la Directive "cadre", aux litiges entre "ces entreprises et d'autres entreprises de l'Etat membre bénéficiant d'obligations d'accès et/ou d'interconnexion découlant de la présente directive ou des directives particulières". Concrètement et comme le relève l'avis de l'ARCEP sur le projet d'ordonnance (ARCEP, avis n° 2011-0524 du 10 mai 2011, portant sur un projet d'ordonnance relative aux communications électroniques N° Lexbase : X9583AIR), cette dernière pourra, désormais, régler des différends opposant un prestataire de la société de l'information (PSI) et un opérateur de communications électroniques. L'ordonnance complète, en conséquence le II de l'article L. 36-8 du CPCE, énumérant l'objet de certains différends dont l'Autorité peut être saisie, par un 5° ainsi rédigé : "Les conditions réciproques techniques et tarifaires d'acheminement du trafic entre un opérateur et une entreprise fournissant des services de communication au public en ligne". Parallèlement ses pouvoirs d'enquête sont élargies, puisqu'elle peut dès lors, recueillir auprès des personnes fournissant des services de communication au public en ligne les informations ou documents concernant les conditions techniques et tarifaires d'acheminement du trafic appliquées à leurs services (C. postes et com. électr., art. L. 32-4)

Concernant l'accroissement des ses pouvoirs, on relèvera, en outre, qu'elle dispose, désormais, et conformément à l'article 13 bis de la Directive "accès", de la possibilité d'imposer à un opérateur verticalement intégré et réputé exercer une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques l'obligation d'organiser ses activités de fourniture en gros des produits concernés dans le cadre d'une entité économique fonctionnellement indépendante, lorsque d'importants problèmes de concurrence ou des défaillances du marché subsistent (C. postes et com. électr., art. L. 38-2). De même et en application de l'article 13 ter de la même Directive, l'article L. 38-2-1 du CPCE prévoit désormais les conditions dans lesquelles une entreprise qui déciderait la séparation fonctionnelle de ses activités doit en informer l'ARCEP, laquelle opère un contrôle sur l'impact des cessions des installations et équipements de réseau d'accès local sur la régulation mise en oeuvre

Elle est également dorénavant en mesure de fixer des obligations aux opérateurs puissants susceptibles d'exercer un effet de levier sur un segment de marché non régulé (C. postes et com. électr., art. L. 37-2 et L. 38).

Par ailleurs, l'article 10 de la Directive "autorisation" a modifié le pouvoir de sanction des ARN pour le rendre plus effectif. Ainsi, le délai dans lequel la mise en demeure adressée doit être respecté par la personne mise en cause est librement déterminé par l'ARN, de manière raisonnable. L'ordonnance supprime donc la durée minimale d'un mois accordée à la personne mise en cause pour respecter la mise en demeure, à l'article L. 36-11 du CPCE. On relèvera, toutefois que l'ordonnance ne tire pas toutes les conséquences des nouvelles dispositions communautaires, en ne transposant pas la possibilité, pour l'Autorité, de prononcer des astreintes à l'encontre des personnes sanctionnées, comme l'a soulevé l'ARCEP dans son avis du 10 mai 2011.

Afin de faciliter le déploiement des réseaux de nouvelle génération, des dispositions sont introduites pour réguler l'accès aux infrastructures physiques et aux câbles des opérateurs de communications électroniques (C. postes et com. électr., art. L. 34-8-4). Il est en substance prévu la possibilité pour l'ARCEP d'imposer aux opérateurs le partage des infrastructures actives et passives et la coordination des travaux de génie civil. Dans la même perspective le nouvel article L. 46 et L. 47-1 du CPCE encadre les délais de réponse aux demandes des opérateurs pour accéder au domaine public routier et non routier : l'autorité concessionnaire ou gestionnaire du domaine public concerné doit se prononcer dans les deux mois suivant la demande.

Enfin, l'ordonnance reconnaît au régulateur la possibilité de fixer des exigences minimales de qualité de service (C. postes et com. électr., art. L. 36-6), conformément à l'article 22 de la Directive "service universel". Elle doit informer au préalable la Commission européenne et l'organe des régulateurs européens des communications électroniques des motifs et du contenu de ces exigences et doit tenir le plus grand compte des avis ou recommandations de la Commission européenne lorsqu'elle prend sa décision.

Au demeurant et dans le but d'harmoniser les pratiques des régulateurs nationaux au sein du marché intérieur, des mécanismes de coopération renforcés, un contrôle par les pairs et par la Commission européenne est institué (C. postes et com. électr., art. L. 36-5, L. 36-8 et L. 37-3).

C - La protection des consommateurs

Les dispositions communautaires relatives aux utilisateurs, qui figurent au chapitre IV de la Directive "service universel", intitulé "Intérêts et droits des utilisateurs finals", concernent, principalement, l'information à destination des utilisateurs finals, les garanties des utilisateurs handicapés et la qualité de service.

  • L'information à destination des utilisateurs finals

Les articles 33, 34 et 35 de l'ordonnance du 24 août 2011 procèdent à un renforcement des obligations relatives à l'information des consommateurs. Ainsi l'article L. 121-83 du Code de la consommation, relatif à l'information contractuelle, modifié pour compléter de façon substantielle la liste des mentions obligatoires, est complété par un nouvel article L. 121-83-1, relatif à l'information extracontractuelle, imposant aux fournisseurs de services de communications électroniques de mettre à la disposition des consommateurs et de tenir à jour dans ses points de vente et par un moyen téléphonique ou électronique accessible en temps réel à un tarif raisonnable un certain nombre de données.

La Directive "service universel" met à la charge des opérateurs l'obligation de fournir l'ensemble de ces informations aux "utilisateurs finals", notion qui recouvre au sens des textes communautaires les consommateurs et les autres utilisateurs. Or, faute de définition légale en droit français, la Cour de cassation a jugé, à la lumière du droit communautaire, que la notion de consommateur ne vise que les personnes physiques (Cass. civ. 1, 15 mars 2005, n° 02-13.285, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2950DHQ). La transposition des dispositions de la Directive "service universel" dans le seul Code de la consommation, ne pouvait donc suffire pour couvrir le champ d'application couvert par la notion d'utilisateurs finals. L'ordonnance a donc modifié l'article L. 33-1 du Code des postes et télécommunications électroniques qui prévoit, désormais, que les utilisateurs professionnels peuvent exiger que le contrat qu'ils concluent avec un opérateur comporte les informations mentionnées à l'article L. 121-83 du Code de la consommation relatives aux prestations qu'ils ont souscrites ainsi que l'obligation, pour les fournisseurs, de mettre à disposition des utilisateurs les informations mentionnées à l'article L. 121-83-1 du Code de la consommation.

Or cet éclatement des obligations d'information entre le Code de la consommation et le Code des postes et communications électroniques a été pointé du doigt par l'ARCEP dans son avis du 10 mai 2011 qui dénonce un choix non conforme à la Directive et dépourvu de cohérence. En effet, les textes communautaires imposent un contrôle du respect des nouvelles obligations informations extracontractuelles par des "autorités réglementaires nationales". Or, sauf exception expresse l'ARCEP ne peut exercer son pouvoir de sanction qu'en cas de méconnaissance des seules dispositions du CPCE et de celles prises pour son application. Le choix de la transposition dans le Code de la consommation entraînerait donc, ipso facto, l'exclusion de toute responsabilité de l'ARCEP dans la mise en oeuvre des prescriptions de la Directive. L'Autorité verrait donc sa compétence circonscrite au contrôle du respect des obligations d'information extracontractuelle aux seules relations avec les utilisateurs professionnels et exclurait celles concernant des consommateurs et des utilisateurs non professionnels.

  • Les utilisateurs handicapés

La révision du "paquet télécom" a renforcé les garanties en faveur des utilisateurs handicapés. L'article 33-1 du CPCE pose, en conséquence, le principe d'un accès des utilisateurs handicapés à des services de communications électroniques et aux services d'urgence équivalent à celui dont bénéficient la majorité des utilisateurs, l'ARCEP devant inclure dans son rapport annuel le bilan des mesures prises à cette fin (article 56 de l'ordonnance, non codifié).

Dans son avis préalable, l'ARCEP a indiqué au Gouvernement qu'il serait opportun de prévoir des mesures concrètes permettant d'atteindre les objectifs fixés dans la Directive concernant les utilisateurs handicapés, mesures qui, compte tenu de l'atteinte à la liberté d'entreprendre qu'elles entraînent, ressortent, selon l'Autorité, de la compétence législative. Toutefois, l'ordonnance publiée au Journal officiel du 26 août 2011 ne contient aucune disposition en ce sens.

  • Dispositions en matière de numérotation

L'une des nouveautés du "paquet télécom" directement perceptible par les utilisateurs finals réside dans le délai dans lequel les abonnés peuvent transférer leur numéro d'un opérateur vers un autre, réduit à un jour, en application de l'article 30 de la Directive "service universel". L'ordonnance en parfaite conformité avec les textes communautaire prévoit donc à l'article L. 44 que "le délai de portage est d'un jour ouvrable, sous réserve de la disponibilité de l'accès, sauf demande expresse de l'abonné". Dans son avis du 10 mai 2011, l'ARCEP a souligné la nécessité de préciser, le cas échéant, par voie réglementaire, que ce délai d'un jour ne courra qu'à compter du moment où l'ancien opérateur a donné son accord au nouvel opérateur, par la transmission des informations nécessaires pour procéder à la mise en oeuvre technique de la conservation du numéro.

Par ailleurs, il est prévu, toujours à l'article L. 44 que "Sans préjudice des dispositions contractuelles relatives aux durées minimales d'engagement, le portage effectif du numéro entraîne de manière concomitante la résiliation du contrat qui lie cet opérateur à l'abonné". Cette précision peut apparaître en contradiction avec les dispositions de l'article L. 121-84-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L5746H9P), selon lesquelles la durée du préavis en vue de la résiliation de son contrat de services de communications électroniques par un abonné ne peut excéder dix jours. En effet, une contradiction pourrait apparaître entre le délai maximum de dix jours applicables à toutes les résiliations de contrats de services de communications électroniques, en vertu du Code de la consommation, et le délai maximum d'un jour, applicable uniquement à celles des résiliations qui sont assorties d'une demande de conservation du numéro. Dans son avis, l'ARCEP a ainsi appelé de ses voeux une modification de ce texte du Code de la consommation.

Toujours en matière de numérotation, la compétence du régulateur est, en outre, élargie pour que celle-ci puisse fixer les principes de tarification et puisse participer à la lutte contre les services frauduleux ou abusifs et les numéros qui permettent d'y accéder (C. postes et com. électr., art. L. 44, L. 44-2 et L. 44-3).

  • La médiation

L'ordonnance impose, enfin, aux fournisseurs d'un service de communications électroniques d'instituer un médiateur impartial et compétent auquel ses clients peuvent s'adresser en cas de différend relatif aux conditions de leur contrat ou à l'exécution de leur contrat. En outre, les modalités d'intervention du médiateur doivent être facilement accessibles, rapides, transparentes pour les deux parties et confidentielles (C. consom., art. L. 121-84-9)

D - La gestion du spectre

  • Les principes de neutralité technologique et de neutralité de services

L'un des objectifs de la révision du "paquet télécom" était une évolution des procédures en matière de gestion du spectre, en particulier afin de renforcer la mise en oeuvre des principes de neutralité technologique et à l'égard des services. Ainsi les points 3 et 4 de l'article 9 de la Directive "cadre" posent-ils une obligation de moyens à la charge des Etats membres de veiller à ce que tous les types de technologies utilisés pour les services de communications électroniques, d'une part, et tous les types de services de communications électroniques, d'autre part, "puissent être utilisés dans les bandes de fréquences déclarées disponibles pour les services de communications électroniques". Il ne peut être dérogé aux principes de neutralité ainsi posés que pour des motifs, notamment d'intérêt général, énumérés par la Directive.

L'ordonnance transpose l'ensemble du dispositif communautaire à l'article 42 du CPCE qui renforce donc le principe de neutralité technologique et introduit le principe de neutralité de services, pour ce qui concerne leurs dispositions pérennes. En effet, la Directive "cadre" a également introduit des dispositions transitoires permettant la mise en conformité progressive des conditions et autorisations dans le domaine de la fréquence qui se retrouvent à l'article 59 de l'ordonnance et ne sont pas codifiées.

Concernant l'article 42 du CPCE celui-ci mentionne les motifs permettant de déroger au principe de neutralité. Ainsi, l'ARCEP peut déroger au principe de neutralité technologique pour :
- éviter les brouillages préjudiciables ;
- protéger la santé publique ;
- assurer la qualité technique du service ;
- optimiser le partage des fréquences radioélectriques ;
- préserver l'efficacité de l'utilisation du spectre ; ou
- et réaliser les objectifs assignés à l'ARCEP et au ministre chargé des Communications électroniques.

De même, l'ARCEP peut déroger au principe de neutralité de services pour :
- la sauvegarde de la vie humaine ;
- la promotion de la cohésion sociale, régionale ou territoriale ;
- la préservation de l'efficacité de l'utilisation du spectre ;
- après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, la promotion de la diversité culturelle et linguistique ainsi que, après avis conforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel, du pluralisme des médias.

Dans tous les cas, ces restrictions sont proportionnées et non discriminatoires.

  • Usages des fréquences radioélectriques

Afin d'assouplir et d'améliorer l'efficacité de l'usage des fréquences radioélectriques, plusieurs dispositions sont introduites dans le Code des postes et des communications électroniques. Le principe de la délivrance d'autorisations générales est, tout d'abord, réaffirmé à l'article L. 41-1 du CPCE, sous réserve de certaines dérogations, mentionnées à l'article 33-3, dans sa nouvelle rédaction (cf. infra II).

  • Utilisation du spectre

Enfin, des mesures destinées à améliorer l'efficacité de l'utilisation du spectre en permettant à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes de fixer un délai maximum dans lequel les fréquences attribuées doivent être utilisées, sous peine d'abrogation des autorisations délivrées, est prévu (C. postes et com. électr., L. 42-1). Ce même article favorise également l'innovation en permettant explicitement la délivrance d'autorisations à des fins expérimentales.

E - Protection de la vie privée et des données personnelles dans le cadre des services de communications électroniques

S'agissant de la protection de la vie privée et des données personnelles dans le cadre des services de communications électroniques, le Code des postes et des communications électroniques, le Code de la consommation et la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés sont complétés par de nouvelles obligations. Les opérateurs sont dorénavant contraints de notifier les éventuelles violations de données personnelles (C. postes et com. électr., L. 34-1 et loi n° 78-17, art 34 bis). En outre, il est interdit d'installer sur l'équipement d'un utilisateur des logiciels qui observent sa navigation sur internet tant qu'il n'a pas été informé et n'a pas donné son accord (loi n° 78-17, art. 32, II) et un dispositif visant à lutter contre les communications non sollicitées est institué. Ainsi l'article L. 121-15-1 du Code de la consommation est complété par une phrase qui imposent que ces message indiquent une adresse ou moyen électronique permettant effectivement au destinataire de transmettre une demande visant à obtenir que ces publicités cessent, et l'article 34-5 du CPCE interdit expressément la prospection directe au moyen de systèmes automatisés d'appel ou de communication, d'un télécopieur ou de courriers électroniques utilisant les coordonnées d'une personne physique, abonné ou utilisateur, qui n'a pas exprimé préalablement son consentement à recevoir des prospections directes par ce moyen.

G - Sécurité du réseau

Pour renforcer la sécurité et l'intégrité des réseaux publics, de nouvelles dispositions introduisent pour les opérateurs de communications électroniques l'obligation de notification des atteintes à la sécurité (C. postes et com. électr, L. 33-1) et l'obligation de se soumettre, à la demande du ministre, à un contrôle de sécurité effectué par un tiers (C. postes et com. électr., art. L. 33-10).

H - Service universel

Enfin, en matière de service universel, des modifications du code des postes et des communications électroniques ont été introduites, d'une part, pour tenir compte de la possibilité de désigner des opérateurs distincts en charge du raccordement au réseau et de la fourniture de service téléphonique et, d'autre part, pour introduire l'obligation d'informer le régulateur pour un opérateur désigné, en cas de cession d'une activité impactant la fourniture du service universel (C. postes et com. électr., art. L. 35-1 et L. 35-2).

II - Dispositions non explicitement requises par la transposition des directives européennes mais poursuivant les mêmes objectifs : lutte contre les brouillages et encouragement du marché secondaire des fréquences

Tout d'abord, et afin de mettre les dispositions du Code des postes et des communications électroniques en conformité avec l'acquis communautaire et de garantir la sécurité publique, il est prévu d'abroger le régime de libre utilisation des installations radioélectriques permettant de rendre inopérants les téléphones mobiles dans les salles de spectacles et d'encadrer strictement, conformément aux dispositions de la Directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 1999 (N° Lexbase : L9134AUT), l'importation, la publicité, la cession à titre gratuit ou onéreux, la mise en circulation, l'installation, la détention et l'utilisation de tous les types de brouilleurs, en vue de ne les autoriser que pour les besoins de l'ordre public, notamment dans les salles de spectacles, de la défense et la sécurité nationale ou du service public de la justice (C. postes et com. électr., art. L. 33-3 et L. 33-3-1). Toutefois, ce nouveau régime est applicable dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente ordonnance et une période transitoire de cinq ans est instaurée pour les salles de spectacles déjà équipées (article 57 de l'ordonnance).

D'autres dispositions du même code sont, par ailleurs, modifiées afin de renforcer le dispositif de sanctions pénales existant en cas de brouillages, que ceux-ci soient dus à l'utilisation d'équipements électriques ou électroniques, au non- respect des conditions de l'autorisation d'utilisation d'une fréquence radioélectrique ou encore à l'absence de possession d'un certificat d'opérateur lorsque celui-ci est obligatoire (C. postes et com. électr., art. L. 39-1).

A titre préventif, il est prévu de renforcer le dispositif de recueil des réclamations et de traitement des brouillages en permettant à l'Agence nationale des fréquences d'instruire les cas de brouillages qui lui sont signalés et de préconiser des solutions pour y mettre fin. L'agence se voit également confier un pouvoir d'enquête dans le cadre de l'accomplissement de ses missions lorsqu'une personne est présumée ne pas respecter les obligations qui lui sont imposées par application du Code des postes et des communications électroniques ou des textes pris pour son application (C. postes et com. électr., art. L. 43).

Enfin, afin d'encourager le développement du marché secondaire des fréquences radioélectriques, le code des postes et des communications électroniques introduit la possibilité pour le ministre chargé des communications électroniques d'arrêter pour une bande de fréquence la liste des services de communications électroniques dont les autorisations d'utilisation de fréquences radioélectriques peuvent faire l'objet d'une cession et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes doit rendre publics les projets de cessions qui lui sont notifiés (C. postes et com. électr., art. L. 42-3).

III - Dispositions ne relevant pas de la transposition mais contribuant à renforcer les systèmes d'information des autorités publiques et des opérateurs dits "d'importance vitale"

Ces dispositions ont, d'abord, pour objet de renforcer, dans le Code des postes et des communications électroniques, la possibilité d'imposer aux opérateurs des mesures de sécurité exceptionnelles pour parer à des menaces informatiques détectées ou pour prévenir et limiter les conséquences de telles attaques sur des systèmes d'information dont l'indisponibilité risquerait de diminuer de façon importante la sécurité de la nation (C. postes et com. électr.., art L. 33-1).

Par ailleurs, les sanctions prévues par l'article 226-3 du Code pénal en cas de défaut d'autorisation et de publicité des appareils permettant de porter atteinte à la vie privée ou au secret des correspondances sont aggravées, les peines prévues précédemment (un an d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende) étant insuffisamment lourdes au regard des risques que peuvent présenter ces matériels pour la sécurité des réseaux de communications électroniques au sein desquels ils sont mis en oeuvre. Pour les mêmes raisons, cet article est complété par une nouvelle infraction consistant à prévoir les mêmes sanctions en cas de non-respect des obligations prescrites par l'autorisation précitée. Ces infractions sont désormais punies de cinq ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende.

Enfin, pour permettre un contrôle efficace du respect de ce dispositif, l'article 45 de l'ordonnance prévoit que les agents de l'Agence nationale de sécurité des systèmes d'information sont habilités à rechercher et constater les infractions prévues par l'article 226-3 du Code pénal dans les mêmes conditions que celles fixées par l'article 36 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004, pour la confiance dans l'économie numérique (N° Lexbase : L2600DZC).

IV - Clarification des dispositions du Code des postes et télécommunication

Le titre IV de la présente ordonnance comporte des modifications des dispositions législatives du code des postes et des communications électroniques à des fins de correction et de clarification. Il s'agit pour l'essentiel d'adopter la terminologie la plus appropriée afin d'éviter toute ambiguïté dans l'application des dispositions en cause.

V - Dispositions transitoires

Les dispositions transitoires et finales de la présente ordonnance sont enfin prévues au titre V. Les dispositions transitoires prévues au chapitre Ier ont principalement pour objet de transposer les dispositions des Directives qui prévoient la mise en oeuvre différée de certaines obligations relatives à la gestion des fréquences radioélectriques. Les dispositions finales figurant au chapitre II rendent applicables dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie les modifications apportées par la présente ordonnance aux dispositions du Code des postes et des communications électroniques, du Code pénal, de la loi du 6 janvier 1978 précitée et de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée, relative à la liberté de communication (N° Lexbase : L8240AGB) qui y sont d'ores et déjà applicables.


(1) Le "paquet télécom" de 2002 est composé des cinq Directives suivantes :
- la Directive 2002/19/CE du 7 mars 2002, relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées ainsi qu'à leur interconnexion, dite Directive "accès" (N° Lexbase : L7190AZC) ;
- la Directive 2002/20/CE du 7 mars 2002, relative à l'autorisation de réseaux et de services de communications électroniques, dite Directive "autorisation" (N° Lexbase : L7187AZ9) ;
- la Directive 2002/21/CE du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, dite directive "cadre" (N° Lexbase : L7188AZA) ;
- la Directive 2002/22/CE du 7 mars 2002, concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques, dite directive "service universel" (N° Lexbase : L7189AZB) ;
- la Directive 2002/58/CE du 12 juillet 2002, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques, dite Directive "vie privée et communications électroniques" (N° Lexbase : L6515A43).

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