Le Quotidien du 24 avril 2018 : Avocats

[Brèves] Condamnation de la France pour ingérence disproportionnée dans le droit à la liberté d’expression d’un avocat

Réf. : CEDH, 19 avril 2018, Req. 41841/12 (N° Lexbase : A3327XLS)

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[Brèves] Condamnation de la France pour ingérence disproportionnée dans le droit à la liberté d’expression d’un avocat. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/45455658-breves-condamnation-de-la-france-pour-ingerence-disproportionnee-dans-le-droit-a-la-liberte-dexpress
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par Aziber Seïd Algadi

le 23 Avril 2018

Les propos tenus par l’avocat, qui s’inscrivent dans le cadre d’un débat d’intérêt général relatif au fonctionnement de la justice pénale dans le contexte médiatique d’une affaire, replacés dans leur contexte, ne constituent pas une accusation injurieuse ou à connotation raciale mais portent sur l’impartialité et la représentativité du jury d’assises, soit une assertion générale sur l’organisation de la justice criminelle. Susceptibles de choquer, ces propos constituent, néanmoins, un jugement de valeur reposant sur une base factuelle suffisante et participant de la défense pénale du client de l’avocat. Par conséquent, la condamnation de l’avocat même à un simple avertissement doit s’analyser comme une ingérence disproportionnée dans le droit à la liberté d’expression de l’intéressé et comme étant non nécessaire dans une société démocratique.

Telle est la substance d’un arrêt de la CEDH, rendu le 19 avril 2018 (CEDH, 19 avril 2018, Req. 41841/12 N° Lexbase : A3327XLS ; cf., également, CEDH, 15 décembre 2011, Req. 28198/09 N° Lexbase : A6142IAQ).

 

En l’espèce, un jeune homme, issu d’une communauté d’origine étrangère et résidant dans un quartier populaire, fut, dans la nuit du 2 mars 2003, tué par un gendarme lors d’une course poursuite. Renvoyé devant la cour d’assises pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner, le gendarme fut acquitté le 1 er octobre 2009.

Dans les minutes qui suivirent le prononcé du verdict l’avocat du père de la victime, indiqua devant des journalistes qu’il avait «toujours su qu’il [le sens du verdict] était possible. Un jury blanc, exclusivement blanc, où les communautés ne sont pas toutes représentées [...] la voie de l’acquittement était la voie royalement ouverte, ce n’est pas une surprise».

Le 2 avril 2010, l’avocat reçut une convocation à comparaître devant le conseil de discipline des barreaux du ressort de la cour d’appel de Montpellier pour avoir gravement manqué aux principes déontologiques essentiels de la profession d’avocat, notamment de délicatesse et de modération en tenant publiquement, des propos imputant à la cour et au jury une partialité raciale et xénophobe. Pour autant, il fut relaxé le 11 juin 2010.

 

Saisie par le procureur général, la cour d’appel jugea, par un arrêt du 17 décembre 2010 (CA Montpellier, 17 décembre 2010, n° 10/04734 N° Lexbase : A7162GNL et lire N° Lexbase : N0346BRA), que les faits constituaient un manquement aux obligations déontologiques de l’avocat. Compte tenu de la nature et du degré des faits reprochés, la cour d’appel prononça à son encontre un avertissement, soit la peine la plus légère. Le 5 avril 2012, la Cour de cassation rejeta son pourvoi estimant notamment qu’en dehors du prétoire, l’avocat ne bénéficie pas de l’immunité judiciaire prévue dans le cadre de l’exercice de ses fonctions (Cass. civ. 1, 5 avril 2012, n° 11-11.044, FS-P+B+I N° Lexbase : A1218IIX).

Invoquant l’article 10 (liberté d’expression) de la CESDH (N° Lexbase : L4743AQQ), le requérant a soutenu devant la CEDH que la sanction prononcée par les juridictions nationales, en raison des propos qu’il avait tenus, constituait une atteinte injustifiée à son droit à la liberté d’expression.

 

A juste titre. Enonçant les principes susvisés, la Cour européenne retient la violation de l’article 10 de la CESDH et dit que le constat de violation constitue en soi une satisfaction équitable suffisante (cf. l’Ouvrage «La profession d’avocat» N° Lexbase : E6573ETM).

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