La clause, contenue au sein d'une convention de successeur, qui interdit à l'avocat cédant, notamment, de "conseiller" ou "assister" un des clients visés par la convention, le contraignant à refuser un dossier qu'un client souhaite lui confier, est nulle en ce qu'elle porte atteinte au droit fondamental de choisir l'avocat de son choix. Telle est la solution d'un arrêt de la cour d'appel de Versailles rendu le 23 février 2017 (CA Versailles, 23 février 2017, n° 15/08001
N° Lexbase : A0016TPB). Dans cette affaire, un avocat qui entendait "céder" sa clientèle s'était engagé, auprès de son successeur, à ne pas prospecter, conseiller, proposer ses services ou s'intéresser directement ou indirectement ou par personne ou société interposée, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit (salarié ou travailleur indépendant notamment en tant qu'avocat) auprès de tout client de sa SCP. Son engagement était pris pour une durée de trois années à compter de la cessation de ses fonctions au sein du cabinet. La convention de successeur contenait, en outre, une liste de 62 clients actifs et des états d'encours portant sur 92 dossiers. L'avocat successeur reprochait au cédant de ne pas avoir respecté son engagement de non concurrence. Par arrêt du 10 septembre 2015 (Cass. civ. 1, 10 septembre 2015, n° 14-24.541, F-D
N° Lexbase : A9373NNH, lire
N° Lexbase : N9005BU3), la Cour de cassation a rappelé que pour annuler cette clause, il convenait de rechercher si cette obligation de non-concurrence était proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, dès lors qu'elle ne concernait que les clients de la SCP, définis comme les personnes physiques ou morales destinataires des factures établies par celle-ci au cours des douze derniers mois précédant la signature de la convention de présentation de clientèle. La cour de renvoi conclut à la nullité de la clause litigieuse après avoir rappelé que cette clause a pour conséquence d'interdire à un de ces clients de choisir le cédant comme conseil ; or, le droit au conseil de son choix est consubstantiel au droit à un procès équitable au sens de l'article 6 § 1 de la CESDH (
N° Lexbase : L7558AIR). Le Conseil constitutionnel rappelle également ce principe et le Conseil national des barreaux énonce que le libre choix de l'avocat est un droit fondamental. Seuls des motifs exceptionnels peuvent justifier l'atteinte au principe du libre choix de l'avocat : de tels motifs ne peuvent résulter d'une convention de succession d'avocat (cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E3552E4C).
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