Aux termes d'un arrêt rendu le 5 février 2014, la Cour de justice de l'Union européenne retient qu'un impôt sur le chiffre d'affaires qui englobe, dans son assiette, le chiffre d'affaires réalisé par des entreprises liées sises dans d'autres Etats membres peut constituer une restriction injustifiée à la liberté d'établissement (CJUE, Grande chambre, 5 février 2014, aff. C-385/12
N° Lexbase : A5802MDA). En l'espèce, une société qui exploite en Hongrie des magasins d'articles de sport fait partie d'un groupe d'entreprises dont la société mère est établie dans un autre Etat membre. En vertu de la législation hongroise, la société doit s'acquitter d'une fraction de l'impôt spécial dû par l'ensemble des entreprises du groupe. Toutefois, cela a pour effet de la soumettre à un taux moyen d'imposition nettement supérieur à celui qui s'appliquerait si seul le chiffre d'affaires de ses magasins était pris en compte. En effet, en matière d'impôt sur le chiffre d'affaires du commerce de détail en magasin, les assujettis qui, au sein d'un groupe de sociétés, constituent des entreprises liées, doivent additionner leurs chiffres d'affaires avant d'appliquer un taux d'imposition fortement progressif et de répartir le montant d'impôt ainsi obtenu au
prorata de leurs chiffres d'affaires réels. Le juge hongrois demande à la CJUE si une telle loi n'est pas contraire à la liberté d'établissement. La Cour relève, tout d'abord, que la loi hongroise opère une distinction entre les redevables de l'impôt sur le chiffre d'affaires en fonction de leur appartenance ou non à un groupe de sociétés. Cette distinction a pour effet de défavoriser les entreprises liées par rapport aux entreprises qui ne font pas partie d'un groupe de sociétés. Sans prendre de position sur les faits de la cause, le juge de l'UE renvoie à la juridiction nationale le soin de vérifier si l'utilisation d'une assiette consolidée joue en défaveur des entreprises faisant partie d'un groupe. Si le juge local décide que c'est le cas, alors il y aura discrimination négative, et la loi hongroise devra être écartée, puisque l'Etat membre n'a présenté aucune justification à la restriction à la liberté de l'établissement. La Cour ajoute, à cet égard, qu'elle n'aurait accepté ni la protection de l'économie du pays, ni le rétablissement de l'équilibre budgétaire par l'accroissement de recette fiscales, comme motifs de restrictions. Si la Cour fait application ici du critère de subsidiarité, en laissant au juge local entière appréciation des situations de fait, il semble pourtant bien que dans tous les cas, l'impôt étant assis sur le chiffre d'affaires et non sur le résultat imposable, la situation jouera au détriment des entreprises liées. En effet, une assiette composée de chiffre d'affaires ne peut que s'élargir en cas de prise en compte de plusieurs entreprises, un tel chiffre ne pouvant être négatif, contrairement à un résultat fiscal.
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