La lettre juridique n°989 du 27 juin 2024 : Baux d'habitation

[Brèves] Pouvoir souverain du juge pour apprécier les mesures de cessation d’un trouble de jouissance

Réf. : Cass. civ. 3, 13 juin 2024, n° 22-21.250, FS-B N° Lexbase : A78835HG

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par Julien Laurent, Professeur à l'Université Toulouse Capitole, Agrégé des facultés, Centre IEJUC

le 26 Juin 2024

Le juge, qui constate l'existence de troubles de jouissance subis par un locataire, apprécie souverainement les mesures propres à les faire cesser en faisant injonction à leur auteur de procéder à des travaux.

Par cette décision, la Cour de cassation rappelle que le juge apprécie souverainement les mesures propres à réparer le préjudice résultant de l’inexécution de l’obligation de faire jouir paisiblement le locataire.

En l’espèce, l'Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP) avait consenti à une société d'économie mixte, la Semads, une promesse de bail à construction. Bénéficiaire d'un droit au bail sur plusieurs logements, l'AP-HP en avait sous-loué un certain nombre. Un de ses locataires, se plaignant de nuisances sonores en provenance du local de chaufferie, situé en dessous de son appartement, avait assigné l'AP-HP en condamnation à réaliser des travaux de nature à faire cesser son trouble de jouissance, en application de l’article 1719 du Code civil N° Lexbase : L8079IDL.

L'AP-HP a alors appelé la Semads, aux droits de laquelle vient la SOHP, en intervention forcée.

La SOHP critiquait l’arrêt d’appel de l’avoir condamné sous astreinte à réaliser des travaux de transfert de la chaufferie, nécessaires à la suppression des nuisances acoustiques, alors « que le débiteur d'une obligation ne peut se voir imposer les modalités d'exécution de celle-ci ».

En d’autres termes, le demandeur reprochait aux juges du fond d’avoir décidé des modalités d’exécution spécifiques de son obligation de faire jouir paisiblement le preneur, en application de l’article 1719 du Code civil, sans lui laisser le choix des moyens pour parvenir aux mêmes résultats.

La Cour de cassation rejette le pourvoi, en décidant que « le juge, qui constate l'existence de troubles de jouissance subis par un locataire, apprécie souverainement les mesures propres à les faire cesser en faisant injonction à leur auteur de procéder à des travaux ».

La solution est conforme à une jurisprudence constante : dans le prolongement de leur pouvoir souverain d’appréciation du préjudice (v. par ex., Cass. civ. 1, 20 février 1996, n° 94-17029, publié au bulletin N° Lexbase : A9948AB3), la Cour de cassation reconnaît aux juges du fond celui d’apprécier les modalités propres à en assurer la réparation intégrale (v. préc., Cass. civ. 2, 11 juillet 1983, n° 82-12.590, publié au bulletin N° Lexbase : A0718CH3 ; v. surtout, en matière de mesures propres à faire cesser un trouble de voisinage, Cass. civ. 2, 12 novembre 1997, n° 96-10.603, publié au bulletin N° Lexbase : A0999ACY).

Deux limites cependant, que n’évoque pas l’arrêt à cette latitude : d’une part, le contrôle qu’exerce la Cour de cassation sur la motivation adoptée par les juges du fond, qui doivent rendre des décisions motivées exemptes d'insuffisance ou de contradiction de motifs, ce dont il résulte que la mesure choisie doit apparaître au minimum comme adaptée à la réparation du préjudice ; d’autre part, les juges ne peuvent, en toute hypothèse, opter pour une modalité de réparation manifestement excessive pour le débiteur, qui contreviendrait aux dispositions de l’article 1221 du Code civil N° Lexbase : L1985LKQ.

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