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par Vincent Vantighem
le 13 Mai 2024
Il y a une quinzaine d’années, il était assez évident de penser que l’avenir des époux Balkany se jouerait devant les tribunaux, tant les enquêtes les visant s’accumulaient. Mais il aurait été présomptueux de prédire, avec certitude, le nombre de fois où ils auraient à se présenter à la barre d’une juridiction pénale. Et ce n’est pas terminé. Mardi 7 mai, la Cour de cassation a relancé, encore une fois, la roue de la fortune judiciaire pour les anciens barons de la droite alto-séquanaise. La plus haute juridiction française a, en effet, ordonné un nouveau procès dans la tentaculaire affaire de fraude fiscale et de blanchiment qui poursuit les époux Balkany. Le but ? Réexaminer la question des dommages-intérêts accordés à l’État dans ce dossier.
Car pour le reste, la Cour de cassation a validé les peines définitives prononcées, en janvier 2023. Quatre ans et demi de prison, 100 000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité à l’encontre de Patrick Balkany. Trois ans et demi et les mêmes peines complémentaires à l’encontre de son épouse, Isabelle. Après un procès en premier instance, un procès en appel, une cassation et un nouveau procès en appel, la Cour de cassation n’a donc pas mis un point final à ce dossier, en demandant une nouvelle audience, cette fois, sur la question des dommages-intérêts.
Lors de la seconde audience en appel, les époux Balkany et leur fils avaient, en effet, été condamnés à verser 400 000 euros de dommages-intérêts à l’État. Dans le détail : 300 000 euros pour le préjudice matériel, l’État ayant dû dégager des moyens considérables auprès du fisc pour tenter de démêler l’écheveau de cette affaire de fraude fiscale et les montages complexes (Liechtenstein, Suisse, Singapour, Hong-Kong, etc.) mis en place par les anciens édiles de Levallois-Perret ; et 100 000 euros de préjudice moral, au surplus.
Mais voilà, la cour d’appel n’a pas suffisamment motivé sa décision sur ce point, a estimé dans son arrêt la Cour de cassation. Celle-ci a donc ordonné un nouveau procès qui aura lieu, dans les prochains mois, devant la cour d’appel de Paris autrement composée, selon la formule consacrée. L’occasion pour les époux Balkany de plaider une nouvelle fois leur cause.
L’épineuse question du moulin de Cossy à Giverny…
Car pour le reste, la Cour de cassation a donc validé les points essentiels de la lourde condamnation infligée à ce couple politique ayant mis en place une fraude fiscale « d’une ampleur considérable », y compris l’épineuse question de la confiscation de l’usufruit du moulin de Cossy, à Giverny (Eure) où ils vivent désormais.
Il y a quelques années, les époux Balkany avaient en effet donné ce fameux moulin à leurs enfants tout en conservant l’usufruit des lieux, ce qui leur permet d’y résider. Après des débats sans fin et de multiples audiences, la justice a fini par ordonner la confiscation de l’usufruit de ce moulin, estimant que cela faisait partie de leur peine et surtout des moyens leur permettant de rembourser leur dette à la société. La Cour de cassation a rejeté les recours déposés par les Balkany sur ce point et donc validé le dispositif pénal.
Cela promet une situation inédite. Désormais, les enfants du couple Balkany se retrouvent propriétaires d’un bien immobilier de 1 300 m² comprenant onze chambres, neuf salles de bains, une piscine de 100 m², un pull-house et un terrain de tennis. Mais l’usage de ce bien (le droit d’en jouir précisément) revient à l’État. « Allez comprendre… », a simplement réagi l’ancien Bâtonnier Pierre-Olivier Sur qui défend les Balkany.
Comment sortir de cette impasse ? La solution la plus logique serait que l’État fasse évaluer le montant de cet usufruit et propose aux enfants Balkany de le racheter pour pouvoir y loger leurs parents. Mais quelle évaluation ? Celle menée lors de l’instruction lorsque ce bien exceptionnel était fortement valorisé ? Ou au cours actuel alors qu’il est désormais un peu défraîchi et aurait besoin d’être rénové ? Quand bien même : les enfants Balkany ont-ils les moyens de racheter cet usufruit aujourd’hui ? Autant de questions qui risquent de se poser dans les mois et les années à venir si l’État fait valoir ses droits…
À moins qu’il ne décide de jeter un voile pudique sur toute cette affaire et de laisser les anciens barons des Hauts-de-Seine, 75 et 76 ans désormais, couler tranquillement leurs vieux jours dans leur moulin et faire face aux derniers procès de leurs vies ?
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