Il appartient au juge judiciaire de rechercher, à la demande d'un syndicat, si la pratique d'une caisse de retraite ne crée pas de discrimination indirecte en désavantageant particulièrement des personnes d'un sexe par rapport à des personnes de l'autre sexe, et, dans l'affirmative, si elle peut être justifiée par des raisons objectives, étrangères à toute discrimination et si le moyen mis en oeuvre était approprié et nécessaire à la réalisation de l'objectif poursuivi. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 30 septembre 2013 (Cass. soc., 30 septembre 2013, n° 12-14.752, FS-P+B+R
N° Lexbase : A3269KMZ).
Dans cette affaire, deux syndicats ont saisi la juridiction judiciaire pour que soit, notamment, reconnue l'existence d'un usage permettant aux techniciens de plateau de l'Opéra national de Paris de bénéficier d'un âge d'ouverture du droit à pension à 55 ans, l'âge légal étant fixé à 60 ans par l'article 6 du décret n° 68-382 du 5 avril 1968. Le personnel de l'Opéra de Paris dispose, en effet, d'un régime de retraite spécial. Les syndicats estiment qu'il y a rupture dans l'égalité de traitement entre les techniciens de plateau et le personnel des services habillement et perruques-maquillage. Ils font valoir une discrimination illicite fondée sur le sexe, puisque les salariés des services habillement et perruques-maquillage sont majoritairement des femmes. La cour d'appel de Paris (CA Paris, Pôle 6, 2ème ch., 1 septembre 2011, n° 10/08520
N° Lexbase : A4159HXC) les déboute de leurs demandes dirigées à la fois contre l'employeur et contre la caisse de retraite. Elle retient que la différence de traitement en matière d'ouverture des droits à la retraite entre les salariés relevant des services techniques de plateau, d'une part, et le personnel des services d'habillement, d'autre part, ne résulte pas d'un texte réglementaire pris en application du décret du 5 avril 1968, ni d'un usage, elle est, par conséquent, imputable à la seule autorité administrative, dont le juge judiciaire n'a pas le pouvoir de contrôler les actes. La Haute juridiction casse l'arrêt, elle rappelle que le juge national chargé d'appliquer les dispositions du droit de l'Union européenne a l'obligation d'en assurer le plein effet en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire. Ainsi, en l'espèce le judiciaire doit contrôler s'il y a ou non discrimination indirecte (sur la prohibition de discriminations liées au sexe, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E5347EXC).
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