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N8582BZU
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par Éric Dibas-Franck, Assistant à l’Université Marien Ngouabi de Brazzaville, et Mon-espoir Mfini, Chargé d’enseignement à l’Université d’Angers, Rédacteur en chef de la Revue africaine de droit des affaires
le 29 Février 2024
Résumé : De lege lata, les effets de l’ouverture des procédures collectives à l’égard de la gestion du patrimoine du débiteur peuvent se traduire par le dessaisissement en cas de liquidation. C’est dire que le débiteur, confronté à un traitement curatif des difficultés des entreprises, voit ses droits encadrés. Cette restriction de ses pouvoirs en liquidation se manifeste, sur le fondement de l’article L. 641-9-1 du Code de commerce N° Lexbase : L3693MBE et de l’article 53 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif N° Lexbase : L0547LGD, par le dessaisissement de l’administration et de la disposition de ses biens. La portée du dessaisissement a été progressivement restreinte par la multiplication de droits propres du débiteur dessaisi. Dès lors, il est opportun de consacrer une analyse au dessaisissement et aux droits propres sous le prisme du droit français et du droit de l’OHADA, même si l’analyse de ces notions en droit de l’OHADA s’avère complexe du fait d’un important vide doctrinal et parfois jurisprudentiel.
Les procédures collectives sont des procédures judiciaires ouvertes lorsque le débiteur, personne physique ou morale, n’est plus en mesure de faire face à des dettes, c’est-à-dire lorsque son actif disponible ne peut pas suffire à faire face à son passif exigible. La procédure ainsi ouverte va figer le patrimoine du débiteur qu’il convient de bien appréhender à travers ses deux éléments que sont l’actif et le passif [1]. La détermination de l’actif permet, très rapidement, de se faire une idée sur le potentiel économique de l’entreprise pour mesurer ses chances de redressement et de règlement des créanciers [2], l’actif répondant du passif. Elle suppose que soient prises, au préalable, des mesures de protection des biens [3] de l’entreprise. Il faut éviter la dispersion ou le dépérissement du patrimoine pour maintenir à l’entreprise toutes ses capacités d’exploitation. Dès lors, on peut retenir succinctement qu’une procédure collective est une procédure qui place une entreprise en difficulté sous contrôle judiciaire pour organiser le règlement de ses créances [4]. Elle rassemble tous les créanciers et les prive du droit d’agir individuellement, d’où l’emploi du terme « collectif ». De la sorte, seules les procédures de redressement judiciaire et de liquidation des biens devraient être conçues comme de véritables procédures collectives en droit de l’OHADA. En revanche, en droit français, seuls la sauvegarde [5], le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire sont conçus comme de véritables procédures collectives.
Dans le cadre de la présente étude, seule la liquidation nous intéressera, tant est-il que le débiteur en liquidation perd une partie de ses droits au profit des organes de la procédure. On parle alors de dessaisissement du débiteur. La liquidation constitue ainsi le domaine privilégié, mieux, le domaine d’élection de cette mesure [6]. À cet effet, l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, en son article 53, ainsi que le Code de commerce français, en son article L. 641-9-1, prévoient le dessaisissement du débiteur, relevant d’une procédure de liquidation, qui a vocation à avoir une portée générale [7]. Ainsi, à compter de l’ouverture d’une procédure de liquidation, le débiteur se trouve dessaisi de l’administration et de la disposition de ses biens au profit du mandataire judiciaire. En clair, il perd ses pouvoirs de gestion sur les biens et est représenté pour tous les actes relatifs à son activité professionnelle, mais aussi « personnelle ». Tout son patrimoine est en principe touché par ce dessaisissement.
L’intitulé de cet article résume donc à lui seul la situation d’un débiteur se trouvant soumis à une procédure de liquidation. En effet, comme nous l’avons précédemment écrit, les effets de l’ouverture des procédures collectives à l’égard de la gestion du patrimoine du débiteur se traduisent par le dessaisissement en cas de liquidation. C’est dire que le débiteur est dessaisi de ses pouvoirs d’administration et de disposition sur son patrimoine. Mais, les législateurs, en prévoyant cette mesure, n’ont pas pour autant transféré au mandataire judiciaire les droits et pouvoirs qui appartiennent en propre au débiteur [8]. On parle alors de droits propres du débiteur. Toute la difficulté est de définir « sa marge de manœuvre », « son autonomie patrimoniale » pendant toute la période de liquidation, c’est-à-dire la ligne de partage qui existe entre le dessaisissement et les droits propres.
Selon Benjamin Ferrari, « le dessaisissement du débiteur est une notion célèbre du droit des entreprises en difficulté [9] ». La mesure est l’effet principal de la liquidation [10]. Bien que véhiculant une contradiction, le dessaisissement est une notion célèbre et bien connue des procédures collectives [11]. Doit-il être conçu comme un « nuage juridique » ? Plus précisément, comme un nuage qui, détruit la confiance ? Est-il un nuage qui crée un climat d’insécurité ou enfin un mystérieux nuage que nulle personne ne peut sonder ? À cet effet, une partie de la doctrine n’hésite pas à franchir le rubicond [12]. La signification du dessaisissement est fracassante du fait de la violence que dégage cette mesure pour le débiteur. En effet, le dessaisissement se définit comme le fait de priver une personne de ce qu’elle possède [13].
En droit, les mots ont leur sens [14]. Ils l’ont d’autant plus que le dessaisissement frappe une personne déjà malheureuse du fait de la procédure de liquidation à laquelle celle-ci est soumise. Cette personne est le débiteur, un professionnel indépendant [15] – une personne exerçant une activité artisanale, commerciale, agricole [16] ou libérale, voire toute personne morale de droit privé [17]. Il sera privé de l’administration et de la disposition de ses biens, ainsi que de ses droits et actions ayant une incidence patrimoniale. Ces derniers seront exercés par le mandataire judiciaire le temps de la procédure. En d’autres termes, débiteurs... gare à la liquidation car « nous ferons vos affaires chez vous, sans vous et malgré vous [18] ».
Dans le Code de commerce de 1807, l’article 442 disposait que « le failli, à compter du jour de la faillite, est dessaisi de plein droit de l’administration de tous ses biens ». L’actuel article L. 641-9-1 du Code de commerce reprend cette formule, mais précise en ces termes, « le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens même ceux qu’il a acquis à quelques titres que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur [19] ». De même, l’article 53 de l’Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif reprend cette formule en ces termes : « la décision qui prononce la liquidation des biens d’une personne morale emporte, de plein droit, dissolution de celle-ci. Elle emporte, de plein droit, à partir de sa date, et jusqu’à la clôture de la procédure, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens présents et de ceux qu’il peut acquérir à quelques titres que ce soit, sous peine d’inopposabilité de tels actes, sauf s’il s’agit d’actes conservatoires. Les actes, droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont accomplis ou exercés, pendant toute la durée de la liquidation des biens, par le syndic agissant seul en représentation du débiteur ».
C’est dire que le débiteur ne peut plus exercer aucune action sur son patrimoine à partir du jugement prononçant l’ouverture de la procédure de liquidation des biens. Toutefois, faut-il préciser que le dessaisissement a une nature juridique controversée et complexe, en ce sens que l'on se pose parfois la question de savoir s’il s’agit ou non d’une incapacité. La doctrine majoritaire considère que le dessaisissement n’est pas une incapacité puisque le débiteur conserve ce qu’il est convenu d’appeler « droits propres [20] ». Le dessaisissement atteint les biens présents et à venir du débiteur ainsi que son activité juridique, sauf s’il s’agit d’actes conservatoires.
La conséquence du dessaisissement étant la sanction de son inobservation, c’est-à-dire l’inopposabilité de l’acte irrégulier et non sa nullité, cette conséquence a été validée par la Cour de cassation française dans un arrêt resté célèbre [21]. Pourtant, il est possible de faire le lien entre la situation du débiteur dessaisi et de l’incapable représenté par un tiers [22]. Ce qui permet d’affirmer que « l’interdiction de principe de faire tout acte d’administration ou de disposition en est bien une manifestation de l’incapacité ».
Corrélativement, « l’avènement des droits propres est l’illustration flagrante du rôle que joue la jurisprudence [23] dans l’interprétation des textes du droit des procédures collectives et dans la révélation de dispositions légales oubliées [24] ». C’est dire que la jurisprudence a joué et continue à jouer un rôle majeur dans la définition des droits propres du débiteur qu’il continue à exercer seul malgré son dessaisissement. C’est notamment la Cour de cassation française qui, au fil de sa jurisprudence, a fait œuvre prétorienne. Elle a élargi le domaine des droits propres du débiteur en liquidation. Cependant, il n’en demeure pas moins vrai que la notion de droits propres est marquée au coin de l’obscurité.
Aussi, le débiteur est dessaisi de ses pouvoirs au profit du mandataire judiciaire, et en même temps, il peut agir pour défendre ses propres droits. Le droit positif nous met dès lors en face d’une situation paradoxale, qui suscite une interrogation parmi tant d’autres, notamment celle de savoir où se situe la limite à ne pas franchir entre contraire et liberté. En d’autres termes, où se situe la ligne de partage entre dessaisissement et droits propres ? Existe-t-elle vraiment ?
En réponse à ces questions, nous ferons observer que la jurisprudence favorise l’accroissement de la sphère d’action du débiteur en liquidation, ce qui concours à la restriction du dessaisissement (I) et à l’extension des droits propres (II).
I. Un dessaisissement considérablement affaibli
L’importance accordée au dessaisissement du débiteur est limitée par le patrimoine professionnel (A). Aussi, cette limite pourra être étendue à la portée du dessaisissement (B). Mais, il ne faut pas omettre que le domaine du dessaisissement est limité au périmètre du gage commun des créanciers.
A. Un affaiblissement causé par le patrimoine professionnel du débiteur
La décision prononçant l’ouverture de la procédure de liquidation emporte de plein droit la désignation des organes de substitution. Ils ont pour principale mission la gestion du patrimoine du débiteur rendu indisponible par le dessaisissement [25]. À ce titre, le principe du dessaisissement doit être apprécié comme une mesure de défiance vis-à-vis du débiteur ayant failli dans l’exécution de ses obligations. Aussi, est-il [26] une mesure de protection du patrimoine du débiteur destinée à éviter que certains biens soient soustraits aux effets réels de la procédure collective [27]. En ce sens, le principe du dessaisissement du débiteur se rapprocherait de l’action paulienne [28] en permettant une éventuelle remise en cause des actes passés en fraude des droits des créanciers. Son champ d’application en liquidation est ainsi lié à la règle de l’unicité du patrimoine, car le dessaisissement s’étend à toute opération ou à tout acte ayant un caractère patrimonial et atteint l’ensemble des biens du débiteur, qu’ils soient affectés ou non à l’exploitation [29]. C’est dire que, lorsque survient la liquidation, tout le patrimoine du débiteur est en principe exposé aux exigences de cette procédure collective, contrairement aux voies d’exécution, qui relèvent du droit commun et portent sur un bien en particulier.
En conséquence, sauf quelques exceptions, les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés à sa place par le liquidateur [30].
Il résulte de l’article 53 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, et de l’article L. 641-9 du Code de commerce, que le dessaisissement s’opère à l’encontre du débiteur essentiellement et non à l’encontre des créanciers qui peuvent toujours agir aux côtés du syndic. Par ailleurs, conformément aux dispositions de l’article 205 de l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique N° Lexbase : A0024YT3, « le président du conseil d’administration, en sa double qualité d’administrateur représentant la société et d’associé, a pleinement qualité et intérêt pour agir dans le sens de la sauvegarde des intérêts de ladite société [31] ». Une réserve peut être émise sur ce point. En effet, il est évident que le président-directeur général est à même d’engager la société dans ses rapports avec les tiers, mais, le président du conseil d’administration n’est en principe pas à même de le faire. S’il s’agit d’une société anonyme avec président du conseil d’administration et directeur général, c’est le directeur général qui peut engager la société à l’égard des tiers.
Aussi est-il que le principe du dessaisissement du débiteur est acquis en matière de liquidation des biens, et son domaine est très étendu dans les entreprises individuelles [32]. Cependant, avec le patrimoine professionnel, le principe du dessaisissement du débiteur va connaître de plus en plus un affaiblissement.
À la lecture de l’article 53 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, on s’aperçoit que le législateur ne précise pas la nature des biens intéressés par le dessaisissement. Aux termes de son deuxième alinéa, « (…) Elle emporte, de plein droit, à partir de sa date, et jusqu’à la clôture de la procédure, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens présents et de ceux qu’il peut acquérir à quelque titre que ce soit, sous peine d’inopposabilité de tels actes, sauf s’il s’agit d’actes conservatoires ». Contrairement à l’article L. 641-9 du Code de commerce français qui prévoit que le dessaisissement ne concerne que l’administration et la disposition des biens composant le patrimoine engagé par l’activité professionnelle, le législateur de l’OHADA n’apporte aucune précision sur la nature du patrimoine soumis à la mesure. À juste titre, cet article [33]dispose que « le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens composant le patrimoine engagé par l’activité professionnelle, même de ceux qu’il a acquis à quelques titres que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ». Ce texte a le mérite de la clarté et de la précision contrairement au texte de l’article 53 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif [34].
La doctrine est cependant amenée à proposer des appréhensions de l’article 53. Si, pour le professeur Jacqueline Kom [35], l’article 53 met en évidence aussi bien le patrimoine professionnel que le patrimoine personnel du débiteur, nous prenons en revanche le contre-pied en ce sens que nous estimons que l’article 53 porte essentiellement sur le patrimoine professionnel [36]. Néanmoins notre appréciation n’écarte pas le patrimoine personnel du débiteur en liquidation des biens. D’ailleurs, même dessaisi, le débiteur en droit français ne peut exercer des droits et actions sur son patrimoine personnel, entrant dans la sphère des prérogatives du liquidateur. Cependant, dans le cadre de cette partie, nous mettons en évidence le patrimoine professionnel qui serait considéré comme une limite au dessaisissement.
En outre, en dehors du patrimoine professionnel, on note une seconde restriction, tenant à tous les biens ne rentrant pas dans ce patrimoine.
À propos du patrimoine professionnel, il convient d’entrée de jeu de noter qu’il s’agit du patrimoine affecté à l’exercice de l’activité professionnelle. Il se distingue du patrimoine personnel du débiteur.
À partir du jugement prononçant la liquidation des biens, le débiteur est dessaisi de son patrimoine professionnel. Si le dessaisissement concerne le patrimoine professionnel, il va sans dire que le débiteur conserve sa liberté d’agir sur le patrimoine personnel [37]. La difficulté majeure est celle de l’appréhension du patrimoine professionnel qui est l’ensemble des biens, droits, obligations et sûretés « utiles » à l’activité ou aux activités. Au regard du périmètre du dessaisissement, les biens inutiles à l’exercice de la profession doivent être en dehors du champ de la procédure de liquidation. Ce qui est important pour « les professionnels qui ont besoin de peu de locaux, matériels ou meubles, et ceux dont l’activité relève du secteur des services ». Cette limitation du dessaisissement au patrimoine professionnel n’est pas clairement exprimée par l’article 53 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, mais transparaît à tort ou à raison dans l’article 60, al. 1 du même Acte uniforme.
En droit français, si la séparation des patrimoines est strictement respectée, le tribunal compétent devrait renvoyer à une commission de « surendettement » le traitement du patrimoine personnel. Par conséquent, le dessaisissement ne concernerait que le patrimoine professionnel du débiteur. En revanche, en cas de confusion de patrimoines, il est alors logique de considérer que le dessaisissement porte sur ces deux patrimoines [38], ce qui rend absolu le principe du dessaisissement. Or, il s’agirait plutôt de limiter le dessaisissement mais il paraît difficile de laisser au débiteur les pouvoirs d’administrer et de disposer de ses biens personnels, et éventuellement de les dilapider. Aussi, faut-il préciser que l’inclusion des biens communs, notamment pour les époux mariés sous la communauté de biens, dans le périmètre du dessaisissement [39], est réduit à ceux qui sont utiles à l’activité, ce qui protège dès lors le conjoint.
Par ailleurs, au sens du droit français et du droit de l’OHADA, il existe des biens, même utiles à l’activité professionnelle, qui ne rentrent pas dans le patrimoine professionnel du débiteur en difficulté, au point qu’ils ne peuvent être intéressés par le dessaisissement du débiteur. C’est le cas des biens successoraux, des biens insaisissables qui, par définition, échappent à l’effet de saisie collective. Il en est ainsi de la résidence principale du débiteur en difficulté, ou pour le cas du droit français, de la résidence principale de l’entrepreneur individuel que la loi n° 2015-990, du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite loi « Macron » N° Lexbase : L4876KEC a rendu insaisissable par les créanciers professionnels [40] ; il en est ainsi aussi des biens déclarés insaisissables par la loi pour des raisons d’humanité. Dans cette catégorie, on peut noter les meubles meublants à usage familial, les créances alimentaires, les rentes d’accidents du travail, les traitements et salaires. Dans tous ces cas, il faut au préalable que le débiteur ait renoncé à la séparation des patrimoines à la demande de l’un de ses créanciers pour une opération particulière, ou encore à l’insaisissabilité de sa résidence principale ou d’un bien visé par une déclaration notariée d’insaisissabilité [41].
D’après l’article 60, alinéa premier de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, « si la juridiction compétente a ordonné l’apposition des scellés, le juge-commissaire peut, sur proposition du syndic, le dispenser de faire placer sous scellé ou l’autoriser à en faire extraire les objets mobiliers et effets indispensables au débiteur et à sa famille sur l’état qui lui est soumis ». Il s’agit notamment des objets nécessaires à l’activité professionnelle ou qui servent à l’habitation du débiteur et de sa famille.
Le dessaisissement peut aussi être affaibli dans sa portée.
B. Un dessaisissement manifestement affaibli dans sa portée
À compter du jugement de liquidation, la personne du débiteur s’efface. Ce n’est pas toujours le cas lorsqu’il s’agit d’une société, notamment en droit français, depuis l’ordonnance du 12 mars 2014. En d’autres termes, en droit français, la société en liquidation judiciaire n’est plus dissoute par le seul jugement d’ouverture. Avec l’absence de dissolution de la société au jour de l’ouverture de la liquidation judiciaire, « la survie de la société amène avec elle de nouvelles interrogations. Les dirigeants sont maintenus en poste. Ils sont chargés de faire fonctionner institutionnellement la société. Ce n’est donc pas comme si un liquidateur avait reçu pour mission de vendre l’actif de la société afin de désintéresser les créanciers [42] ». Néanmoins, le jugement d’ouverture de la liquidation emporte dessaisissement du débiteur, sauf s’il est question d’exercer des droits personnels [43] ou des droits propres.
En application de l’article 53 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, le débiteur est en effet dessaisi de l’administration et de la disposition de l’ensemble de ses biens. Il appartient au mandataire judiciaire d’exercer les droits et actions du débiteur sur son patrimoine. En droit de l’OHADA, il était admis que seuls les commerçants étaient concernés par le dessaisissement. Le domaine personnel du dessaisissement a été considérablement étendu par le législateur de l’OHADA dans l’article 1-1 de l’Acte uniforme révisé. Il étend le champ d’application des procédures collectives à toute personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, civile, commerciale, artisanale ou agricole, à toute personne morale de droit privé ainsi qu’à toute entreprise publique ayant la forme de personne morale de droit privé [44]. La réalité est la même en droit français.
Le domaine matériel du dessaisissement prévoit donc que la décision qui prononce la liquidation d’une personne morale emporte dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens présents et de ceux qu’il peut acquérir à quelques titres que ce soit, sous peine d’inopposabilité de tels actes, sauf s’il s’agit d’actes conservatoires. À juste titre, le fait d’interjeter appel d’une décision défavorable à la masse des créanciers ayant été considéré comme un acte conservatoire [45], le débiteur déclaré en liquidation peut exercer cette action. Il en résulte que les correspondances adressées par le syndic-liquidateur à la juridiction d’appel après la mise en délibéré et tendant à denier à l’avocat du débiteur le défaut de mandat, doivent être écartées des débats.
À première vue, on a l’impression que le législateur OHADA de 2015, au même titre que le législateur français, a renforcé le dessaisissement du débiteur en liquidation des biens ; ce n’est pas tant le cas, en ce sens que de plus en plus, le dessaisissement connaît certaines limites dans sa portée. Il a une durée limitée par rapport à celle de la procédure de liquidation des biens. La limitation du dessaisissement dans sa portée s’explique par la possibilité offerte au débiteur en difficulté de démarrer une nouvelle activité professionnelle [46]. Celle-ci existe aussi en droit français, notamment avec la loi n° 2022-172, du 14 février 2022, précitée N° Lexbase : L3215MBP, sur le nouveau statut de l’entrepreneur individuel.
Le fait d’encadrer la durée de la procédure de liquidation, de sorte qu’elle ne s’étale pas sur une longue durée, permet de limiter le dessaisissement dans sa portée, puisqu’il n’existe que le temps de la procédure. Limiter la durée de la procédure permet en outre de favoriser le rebond [47] du débiteur. Ainsi, la durée de la procédure devrait être fixée dès le jugement d’ouverture. Elle ne devrait être prolongée par la suite que sur décision motivée.
En outre, en permettant au débiteur dessaisi de récréer une entreprise et de constituer un nouveau patrimoine professionnel, voire deux, ce patrimoine professionnel ne va pas être concerné par la procédure de liquidation ouverte. Cette assertion limite les effets du dessaisissement. Elle permet le rebond du débiteur, sa réinstallation, sous réserve que le débiteur n’ait pas déjà fait l’objet d’une liquidation des biens clôturée pour insuffisance d’actif.
En clair, en procédant de la sorte, le dessaisissement ne fait pas obstacle à la recréation d’une entreprise sans qu’il soit précisé si elle doit être d’une nature différente de l’ancienne. À défaut d’interdiction expresse, il semble possible qu’il s’agisse d’une entreprise de même nature, « sinon certains professionnels tels les médecins ou avocats ne pourraient se réinstaller ». Au bilan, on s’aperçoit que le dessaisissement recule dans sa portée.
Corrélativement, la construction de la jurisprudence sur les droits propres restreint les prérogatives reconnues au mandataire judiciaire et invite le débiteur au bal de la procédure de liquidation.
II. Un accroissement certain des droits propres
En 2005, le professeur Marie-Hélène Monsériè-Bon écrivait que « l’avènement des droits propres est l’illustration flagrante du rôle que joue la jurisprudence dans l’interprétation des textes du droit des procédures collectives et dans la révélation de dispositions légales oubliées [48] ». Les droits propres qui souffrent encore au coin de l’obscurité du fait de leur difficile identification [49] marqueraient semble-t-il la limite la plus aboutie du dessaisissement, puisque celui-ci ne concerne pas les droits propres du débiteur qui sont, selon une doctrine établie, de nature patrimoniale. Ils partagent le même domaine que le dessaisissement [50]. Il est donc reconnu au débiteur en liquidation des droits propres procéduraux qui diffèrent, selon la doctrine, des droits personnels [51]. Parce que les droits propres réduisent les prérogatives du mandataire, il convient de les identifier (A) avant de rechercher s’il existe un critère d’identification commun à ces droits (B), ce qu’une doctrine qualifie de « fil conducteur ».
A. Une identification des droits propres
Comme le soulignait déjà en 2005 le professeur Marie-Hélène Monsériè-Bon, « la Cour de cassation, ces dernières années, a fait apparaître la catégorie des droits propres, qui comprend les droits exercés au sein de la procédure par le débiteur exclusivement [52] ». Les droits propres sont, en effet, d’origine prétorienne, mais ils n’en ont pas moins reçu une forme de consécration législative puisque le troisième alinéa de l’article L. 641-9-1 du Code de commerce prévoit que le débiteur en liquidation judiciaire conserve l’exercice des droits non compris dans la mission du liquidateur. En ce sens, Benjamin Ferrari écrit que, « si le dessaisissement est d’abord soumis aux fluctuations de l’effet réel de la procédure, la mesure doit également composer avec les droits que conserve le débiteur [53] ». Ces derniers, de plus en plus nombreux, limitent l’emprise du dessaisissement. Quel que soit le pouvoir du tribunal, il ne peut transférer au mandataire les droits et pouvoirs qui appartiennent en propre au débiteur.
La notion de droits propres du débiteur tel que nous la connaissons aujourd’hui est née de la jurisprudence relative au droit des procédures collectives. Elle est même considérée par un auteur comme un grand concept du droit des entreprises en difficulté [54]. Fort de cette considération, Corinne Saint-Alary-Houin écrit que les droits propres permettent d’octroyer un droit au débiteur « chaque fois qu’à défaut de l’affirmer, ses intérêts ne pourraient être pris en compte dans la procédure [55] ». En reconnaissant au débiteur des droits propres dans la procédure, en dépit du dessaisissement qui le frappe du fait de l’ouverture de la liquidation judiciaire, le législateur et avec lui la jurisprudence convient le débiteur au bal de la procédure de liquidation, tant est-il qu’il n’est plus considéré comme un simple spectateur mais une partie nécessaire, c’est-à-dire une partie qui a son mot à dire dans le déroulement de la procédure de liquidation. En ce sens, le dessaisissement qui frappe de plein droit le débiteur n’est plus à craindre : il a été considérablement atténué, non pas seulement dans sa portée, mais aussi par la reconnaissance au débiteur de droits propres procéduraux.
En d’autres termes, même si le dessaisissement réalise une certaine immobilisation du patrimoine du débiteur, ce qui fait qu’on l’assimile à une saisie collective des biens, c’est l’inopposabilité qui traduit mieux la situation créée par le jugement d’ouverture des procédures collectives. Cette saisie globale de son patrimoine paraît excessive et injustifiée. Le législateur s’est borné à imposer des restrictions aux pouvoirs de gestion du débiteur, justifiées par l’intérêt général qui s’attache à la protection des entreprises en difficulté et des créanciers [56]. Cette inopposabilité permet à la masse des créanciers d’invalider les actes faits par le débiteur en violation des restrictions légales qui sont prescrites. Cependant, le débiteur dessaisi ne perd pas le droit de propriété sur ses biens. Il n’est pas frappé d’incapacité, car il conserve ses droits propres.
Constituent des droits propres du débiteur ceux que visent les textes chaque fois qu’est reconnue au débiteur la faculté d’exercer une action en justice ou de former un recours sans le concours direct du mandataire judiciaire. Ainsi, pouvons-nous citer le droit d’interjeter appel ou de former un pourvoi contre des décisions ouvrant la liquidation des biens. Il serait, en effet, de peu de portée de reconnaître des droits procéduraux au débiteur si c’est pour en confier l’exercice au liquidateur qui le représente. Mais, au-delà, il s’agit de droits qui sont attribués au débiteur afin qu’il puisse exercer une action ou se défendre alors que le liquidateur s’abstient d’agir [57]. L’exemple type de droit propre est celui du rôle qui est reconnu au débiteur dans les opérations de vérification des créances. Aussi, le débiteur peut tout seul interjeter appel de l’ordonnance du juge-commissaire autorisant le liquidateur à signer une transaction emportant cession d’un actif dépendant de la liquidation, à vendre un fonds de commerce ou un bien immobilier, à faire appel d'un jugement ordonnant son expulsion ou statuant sur sa condamnation au paiement d'une somme d'argent pour une cause antérieure au jugement d'ouverture. Tout cela fait douter de ce que le liquidateur représente le débiteur [58].
Aussi, il faudrait se demander si la notion de droits propres ne renvoie pas aux droits qui ne peuvent être exercés que par leur titulaire et non par leurs créanciers, ce qui conduit à s’interroger sur les droits transmissibles et saisissables. Par exemple, la victime d’un dommage moral a une créance : quelle est la nature de cette créance ? Est-elle saisissable ? Transmissible ?
Reste cependant à trouver le critère d’identification pour définir le périmètre des droits propres.
B. Une recherche des critères d’identification des droits propres
Les droits propres sont constitués par les cas dans lesquels, malgré le dessaisissement, il est reconnu au débiteur la faculté d’agir dans le cadre de la procédure de liquidation. Il y a une unité entre eux. Ils sont consacrés dans toutes les hypothèses dans lesquelles il y a un risque de conflit d’intérêts entre les créanciers et le débiteur. Il est indispensable de laisser le débiteur s’exprimer puisqu’il n’est pas représenté. Parce que le liquidateur, en représentant le débiteur, poursuit l’intérêt des créanciers, qu’il doit être reconnu au débiteur un droit propre toutes les fois que l’intérêt des créanciers n’est plus de mise dans la procédure. On se retrouve alors dans une situation de divergence d’intérêt, situation qui favorise la naissance d’un droit propre du débiteur dans la procédure. Mais, bien plus encore, parce que l’intérêt des créanciers se retrouve dans la préservation du gage commun, il doit être reconnu au débiteur un droit propre lorsque le droit en question n’entre pas directement dans le gage commun. Les droits propres en ce sens sont des droits fondamentaux de la personne [59], qui lui permettent d’exister en tant que sujet de droit.
En outre, il convient de relever un important en droit de l’OHADA. La Cour commune de justice et d'arbitrage n’ajamais été saisie dans des affaires lui permettant de mettre en orbite la notion de droits propres du débiteur. En revanche, la jurisprudence française est plus florissante en la matière [60]. D’ailleurs, c’est elle qui a consacré cette notion, sans lui donner une définition unitaire, permettant de l’apprécier généralement. Elle se prononce au cas par cas et « semble réfractaire à toute systématisation ». C’est pourquoi la doctrine [61] a cherché des critères permettant d’identifier, à l’avance, ces droits propres afin d’introduire une certaine prévisibilité des solutions.
Pour la doctrine, les droits propres sont avant tout de nature procédurale, car ils « permettent de reconnaître au débiteur une autonomie procédurale importante pour défendre ses intérêts tout au long de la liquidation judiciaire [62] ». C’est pourquoi on parle de « droits propres procéduraux ». Ce caractère semble aujourd’hui acquis. Aussi, a été observée une « unité entre les droits procéduraux : ils ont été consacrés dans toutes les hypothèses dans lesquelles il y avait un risque de conflit d’intérêts entre les créanciers et le débiteur. Il est ici indispensable de laisser le débiteur s’exprimer puisqu’il n’est pas représenté par le liquidateur [63] ». Cette analyse qui a le mérite de la clarté et de la précision, a été battue en brèche par la jurisprudence [64] française, en ce que pour le juge, elle limite la portée de la fonction du liquidateur, car il n’a pas pour principale fonction de représenter l’intérêt collectif des créanciers et ne représente pas le débiteur. Mais, l’appréciation de la Haute Cour ne convainc pas. Un droit propre à agir est reconnu au débiteur chaque fois qu’à défaut de l’affirmer, ses intérêts ne pourraient être pris en compte dans la procédure. Cette position est partagée par le professeur Pierre-Michel Le Corre pour qui « les droits propres sont donc ceux qui permettent au débiteur de faire valoir son point de vue sur le déroulement de la procédure collective, dont il est le sujet, et non simplement l’objet [65] ». Dès lors, il existe bien un critère d’identisation : le souci d’assurer la protection du débiteur. Elle est l’expression de son droit à un procès équitable. En revanche, si le débiteur a pu faire valoir ses droits dans la procédure, il ne peut faire obstacle à sa représentation par le syndic. Un débiteur en liquidation des biens n’est dessaisi que de l’administration et de la disposition de son patrimoine. Malgré la liquidation, il jouit d’une autonomie juridique et procédurale et peut reprendre une activité. Sa situation juridique est profondément modifiée dans le souci de dédramatiser la liquidation des biens et de favoriser son « rebond ». Ainsi, les droits propres du débiteur, selon la doctrine des procédures collectives, sont donc bien un concentré de promotion de droits fondamentaux de la personne, d’intérêt à agir et d’autonomie juridique et procédurale. Pourtant, les droits propres du débiteur, qualifiés par la doctrine de droits propres procéduraux, ne lui sont cependant pas réservés puisque pour certains de ces droits, les représentants disposent de prérogatives similaires. Pour autant, ces droits sont réellement des droits propres du débiteur, puisqu’ils ne seront exercés que par lui, parce qu’ils n’auront d’intérêt que pour lui. Mais ces prérogatives, qui sont reconnues au débiteur, ne présentent pas toutes les qualités des droits propres du débiteur selon notre approche, droit dont le débiteur est seul titulaire et qu’il peut seul exercer. Nous n’allons pas aborder cette approche dans cette contribution, tant est-il qu’elle fait l’objet de notre dissertation doctorale.
Conclusion
Tout le monde s’accorde à reconnaître l’importance du dessaisissement, sans pourtant en avoir en tête une définitionprécise. Cette notion a suscité les plus vives passions du droit des procédures collectives. En ce sens, une doctrine autorisée a prêté attention à la notion, sans cependant la définir, tant le concept apparaît insaisissable. Pourtant, cerner le contenu de la notion de dessaisissement est d’une importance indéniable, tant chacun entend faire produire à cette mesure des effets importants. Cependant, il est possible de relever, sans exclure toute autre approche doctrinale, que le dessaisissement va avoir un impact sur le débiteur en liquidation au point de le transformer en un quasi incapable. Cette approche de la notion paraît doublement réductrice, puisqu’il ne faut pas limiter la mesure aux seules personnes physiques et que l’on ne peut se satisfaire d’une assimilation de la notion de dessaisissement à celle d’incapacité. En réalité, le concept est beaucoup plus riche et plus complexe, en ce qu’il participe notamment de l’évolution du patrimoine saisissable du débiteur. C’est en ce sens que nous avons mis en orbite dans la présente étude l’objet du dessaisissement. Mais, dans le prolongement de notre analyse, nous avons abordé l’affaiblissement du dessaisissement, particulièrement par le biais du patrimoine professionnel. Aussi, avons-nous abordé l’affaiblissement de sa portée.
Aujourd’hui, il est établi que le patrimoine personnel du débiteur dessaisi, qui n’échappe pas au dessaisissement, s’est considérablement restreint, en ce que le législateur s’est résolu de le protéger de diverses façons, que l’on songe au statut de l’entrepreneur individuel en droit français, ou à l’insaisissabilité de certains biens ayant un caractère hautement familial et participant à la vie privée et familiale du débiteur. Cette protection du patrimoine privé du débiteur favorise l’affaiblissement du dessaisissement, mais permet en même temps le rebond du débiteur.
Aussi, avons-nous abordé la lancinante question des droits propres du débiteur, qui participent à l’affaiblissement du dessaisissement. En ce sens, nous avons d’entrée de jeu défini la notion, avant de l’identifier. Si la notion de droits propres dans le cadre de la présente étude a été envisagée sous l’angle uniquement des procédures collectives, il convient toutefois d’affirmer que les droits propres du débiteur transcendent plusieurs pans du droit privé. Nous nous réservons tout commentaire sur ce point.
[1] V. S. Toe et M.-E. Mfini, op. cit., RADA, 2023.
[2] V. M. Bourassin, Droit des sûretés, 8e éd., Sirey, 2024 ; Ph. Simler et Ph. Delebecque, Droit des sûretés et de la publicité foncière, 8e éd., Dalloz, 2023.
[3] À propos de la notion de bien, v. l’important voyage de Pierre Berlioz : P. Berlioz, La notion de bien, thèse, Paris 1, L. Aynès (dir.), 2006.
[4] V. en ce sens, C. Houin-Bressand, M.-H. Monsérié-Bon et C. Saint-Alary-Houin, Droit des entreprises en difficulté, 13e éd., LGDJ, 2022.
[5] La thèse selon laquelle la « sauvegarde est une procédure collective » est néanmoins mitigée. En effet, cette procédure instituée en 2005 est en principe ouverte en l’absence de l’état de cessation des paiements, c’est-à-dire que le législateur, en consacrant la sauvegarde, l’a déconnectée de ce critère. Il a fait de l’absence de cessation des paiements, l’un des critères de son ouverture, à côté de la nécessité, « pour le débiteur, de démontrer des difficultés pour se prévaloir de cette procédure » (v. H. Poujade et S. Sabatier, Le droit des entreprises en difficulté en schémas, ellipse, 2022, p. 32).
[6] V. not. C. Houin-Bressand, M.-H. Monsérié-Bon et C. Saint-Alary-Houin, Droit des entreprises en difficulté, op. cit.
[7] V. not. Y.R. Kalieu Elongo, Le droit des procédures collectives de l’OHADA, PUA, 2016.
[8] A. Akam-Akam, Droits des procédures collectives et d’apurement du passif, Recueil des cours de l’ERSUMA 2004-2012, 1e éd., 2013, cours 2, p. 81.
[9] B. Ferrari, Dessaisissement et droit des sociétés, in Droit des sociétés et procédures collectives, L. C. Henry (dir.), L’Harmattan, 2018, p. 27.
[10] G. Boucher, Le dessaisissement et l’exécution, in Mélanges d’exécution et procédures collectives, Collection Procédures, éd. Bruylant, 2012, p. 165, n° 1.
[11] V. not. P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz-action, 2010-2011, p. 1227.
[12] C. Saint-Alary-Houin, Le dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire, Rev. proc. coll. 2003/2, p. 173, n° 3.
[13] S. Le Normand, Le dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire à l’épreuve des évolutions récentes, JCP E, 2012, 1337, n° 2.
[14] Ch. Atias, Les maux du droit et les mots pour le dire, D., 1997. 231.
[15] J. Vallansan, L’évolution des personnes assujetties à la procédure collective : 1985-2005, RLDA, mars 2005, supp. 80, p. 12 ; F. Perochon, Entreprises en difficulté, LGDJ, 10e éd., 2014, n° 275.
[16] Sur les problématiques engendrées par le statut : Ch. Lebel, Entreprises individuelles et entreprises en difficulté dans la loi Pacte, JCP N, 2019, 1206, n° 26 s. ; M. Diesbecq, Loi relative à la croissance et la transformation des entreprises : quel impact(e) sur les agriculteurs en difficulté ?, Rev. proc. coll., 2020/1, et. 2.
[17] À l’exception des syndicats de copropriétés (C. Regnaut-Moutier, Le traitement des difficultés des syndicats de copropriété, Rev. proc. coll., 2010/3, comm. 12), ainsi que des établissements de crédit et d’assurance. Ces derniers bénéficient d’un régime de traitement des difficultés adapté au risque systémique que leur défaillance pourrait causer (Th. Bonneau, Le régime des résolutions bancaires, Rev. proc. coll.,2012/5, et. 26) ainsi que des établissements de crédit et d’assurance. Ces derniers bénéficient d’un régime de traitement des difficultés adapté au risque systémique que leur défaillance pourrait causer (Th. Bonneau, Le régime des résolutions bancaires, op. cit.).
[18] Reprenant une formule prêtée à Louis XIV chez les Hollandais, ces mots auraient été employés par le député Paul Dupont lors d’une séance de l’Assemblée nationale du 18 août 1848, afin de remettre en cause la pertinence du dessaisissement : C. Magras Vergez, La constance des stigmates de la faillite – de l’antiquité à nos jours, th. Bordeaux, 2018, p. 331.
[19] Le dessaisissement avait d’abord été codifié à l’article L. 622-9 du Code de commerce N° Lexbase : L3868HBU, dont la rédaction est issue de l’article 152 de la loi n° 85-98, relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, du 25 janvier 1985 N° Lexbase : L7852AGW. Si le principe est resté le même, sous réserve de quelques modifications, ce n’est qu’à compter de la loi de sauvegarde des entreprises n° 2005-845, du 26 juillet 2005 N° Lexbase : L5150HGT qu’apparaît l’article L. 641-9 du Code de commerce. Le principe est d’ailleurs repris par le droit de l’OHADA. L’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif prévoit en son article 53 le dessaisissement du débiteur.
[20] Fr. Perochon avec le concours de M. Laroche, F. Reille, T. Favario et A. Donette, Entreprises en difficulté, LGDJ, 11e éd., 2022, n° 1997.
[21] Par ex., Cass. com., 5 juillet 2005, n° 04-13.266. Pourtant, la nullité est la sanction habituelle du dépassement de pouvoir. En ce sens, v. not. M.-E. Mfini, Le cautionnement réel en droit OHADA, Lexbase Afrique-OHADA, novembre 2022, n° 60 N° Lexbase : N3137BZ9, à propos du dépassement du pouvoir des époux d’engager unilatéralement les biens de la communauté. V. aussi, M.-E. Mfini, Le cautionnement réel OHADA : cette sûreté atypique, Revue congolaise de droit et des affaires, n° 51, 2023.
[22] V. Y. Buffelan-Lanore et V. Larribau-Terneyre, Droit civil, 22e éd., Sirey, 2022.
[23] V. not., CCJA, 1re ch., 29 novembre 2018, n° 226/2018 N° Lexbase : A6477YSP.
[24] M.-H. Monsérié-Bon, op. cit., 2005.
[25] P. Tapchem, Le dessaisissement du débiteur en procédure collective, Mémoire de DEA, Droit des Affaires, Yaoundé II, 2001.
[26] R. Bonhomme et Fr. Perochon, Entreprises en difficulté, LGDJ, 8e éd., 2009, n° 413, p. 434.
[27] R. Bonhomme et Fr. Perochon, loc. cit. Contra : C. Saint-Alary-Houin, Le dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire, Rev. proc. coll., juin 2003, p. 173. Selon cet auteur, il s'agirait d'une « incapacité de défiance » vis-à-vis du débiteur entraînant une restriction corrélative de ses pouvoirs.
[28] Pour une étude plus avancée de l’action paulienne, v. M. Julienne, Régime général des obligations, 4e éd., LGDJ, 2022.
[29] Caen, 25 novembre 1997 : BICC, 1998, n° 608 ; RJDA, 1998, n° 1018.
[30] V. CA Bobo-Dioulasso, ch. civ. et com., 19 janvier 2004, n° 03, GMB c/ S. B. H., Ohadata J-04-196 N° Lexbase : A2760ZTE.
[31] V. CA Ouagadougou, ch. civ. et com., 16 avril 2004, n° 52, Socaco c/ K. H. (BTM) & Batec-SARL & Entreprise Dar-es-Salam, Ohadata J-04-375 et J-04-374.
[32] V. not. R. E. Okomen Tsague, La protection du patrimoine de l’entrepreneur individuel dans l’espace OHADA, RDJA, n° 1, mars 2021.
[33] C. com., L. 641-9.
[34] Mais, de façon analogique, on peut déduire que le législateur de l’OHADA vise aussi le patrimoine professionnel, puisque l’article 53 de l’Acte uniforme ne vise que la personne morale, donc une société, qui est dissoute par le jugement d’ouverture de la procédure de liquidation des biens.
[35] J. Nkom, Droit OHADA des entreprises en difficulté, 2e éd., L’Harmattan, 2021.
[36] Puisque l’article 53 ne vise qu’une personne morale.
[37] V. par exemple, O. Buisine, De l’entrepreneur en difficulté, Rev. proc. coll., 2022, étude 2.
[38] Fr. Perochon avec le concours de M. Laroche, F. Reille, T. Favario et A. Donette, Entreprises en difficulté, LGDJ, 11e éd., 2022, n° 997 et 2031.
[39] L’inclusion des biens communs dans l’actif de la procédure collective est une conséquence de l’article 1413 du Code civil N° Lexbase : L1544ABS selon lequel les biens communs répondent des dettes de chacun des époux.
[40] À partir de son entrée en vigueur.
[41] Avec la loi française de 2022 sur l’activité professionnelle indépendante, la séparation des patrimoines est de droit. Dès lors, la résidence principale de l’entrepreneur individuel serait insaisissable de droit. V. loi n° 2022-172, du 14 février 2022, en faveur de l’activité professionnelle indépendante N° Lexbase : L3215MBP (JORF n° 0038 du 15 février 2022).
[42] V. en ce sens, B. Ferrari, Droit des sociétés et procédures collectives, op. cit., p. 31.
[43] Pour une étude des droits personnels, v, T. Lakssimi, La summa divisio des droits personnels et des droits réels : étude critique, thèse, Nathalie Peterka (dir.) et Philippe Jacques (dir.), Paris Est, 2014.
[44] V. l’importante thèse de A. Cartier-Bresson, L’État actionnaire, Didier Truchet (dir.), Université Paris 2, 2005.
[45] Cass. com., 13 janvier 1968 : D 1968-1396.
[46] V. M.-E. Mfini, Le rebond du débiteur dans le droit OHADA des procédures collectives d’apurement du passif, Revue de l’ERSUMA, n° 18, 2023.
[47] V. M.-E. Mfini, Le rebond du débiteur dans le droit OHADA des procédures collectives, art. précité. V. aussi, AUPCAP, art. 174.
[48] M.-E. Monsérié-Bon, op. cité. 2005.
[49] Comme autrefois, le dessaisissement ne concerne pas le droit pour le débiteur de se constituer partie civile dans le but d’obtenir la condamnation de l’auteur d’un crime ou d’un délit dont il serait victime (C. com., art. L. 641-9, al. 2).
[50] B. Ferrari, thèse précitée, 2021.
[51] En ce sens, J. Vallansan avec le concours de L. Fin-Langer, Guide des procédures collectives, 22/23, LexisNexis, fiche 19, n° 432.
[52] M.-H. Monsérié-Bon, Le dessaisissement et l’avènement des droits propres, RLDA, 2005, n° 50, p. 53, spéc. p. 57.
[53] B. Ferrari, thèse précitée, p. 417.
[54] B. Ferrari, Droits propres du débiteur, op. cit., 2019.
[55] C. Saint-Alary-Houin, op. cit., 2003.
[56] V. en ce sens, M.-E. Mfini, La protection des intérêts des créanciers dans le droit OHADA des entreprises en difficulté, Lexbase Afrique-OHADA, septembre 2023, n° 69 N° Lexbase : N6631BZM.
[57] J. Theron, Les contours du dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire, Rev. proc. coll., 2013, dossier 3. ; B. Ferrari, La qualité pour agir en procédure collective : quelle place pour le droit commun procédural ?, D., 2020, p. 548, spéc., n° 14.
[58] J. Theron, Les contours du dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire, Rev. proc. coll., 2013, dossier 3.
[59] V. not. X. Dupre de Boulois, Droit des libertés fondamentales, 4e éd., PUF, 2023.
[60] V. not., Cass. com., 14 juin 2023, n° 21-24.143, F–B N° Lexbase : A99499ZI (rejet pourvoi c/ CA Besançon, 14 septembre 2021), M. Vigneau, prés. ; SCP Krivine et Viaud, SCP Thouin-Palat et Boucard, av. Cass. com., 14 juin 2023, n° 21-11.588, F–D (cassation CA Saint-Denis, 4 décembre 2020), M. Vigneau, prés. ; Me Soltner, SCP Piwnica et Molinié, av. ; J.-B. Barbieri, note sous Cass. com., 14 juin 2023, n° 21-24.143, F-B N° Lexbase : A99499ZI : LEDEN juillet 2023, n° DED201r6 ; Cass. com., 18 janvier 2023, n° 21-17.581, F-B N° Lexbase : A937588Q ; Cass. com., 8 février 2023, n° 21-16.954, F-B N° Lexbase : A97059B3 ; Cass. com., 8 juillet 2003, n° 01-02.050, FS-P N° Lexbase : A0961C9H : Bull. civ., IV, n° 126, p. 145 ; D., 2003, AJ, p. 2173, obs. A. Lienhard ; Dr. Sociétés, 2003, comm. 187, note F.-X. Lucas.
[61] V. not. C. Saint-Alary-Houin, Entre dessaisissement et droits propres, Rev. proc. coll., 2022, dossier n° 45, p. 72.
[62] M.-H. Monsérié-Bon, art. préc. : RLDA, 2005, n° 50, p. 57.
[63] J. Theron, Les contours du dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire, Rev. proc. coll., 2013, dossier 3.
[64] Cass. com., 1er octobre 2013, n° 12-20.567, F-D N° Lexbase : A3308KMH.
[65] P.-M. Le Corre, Traité théorique et pratique des procédures collectives, Dalloz-Action, 2021-2022.
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