Le Quotidien du 6 juillet 2023

Le Quotidien

Collectivités territoriales

[Brèves] Intervention (inutile) du SDIS sollicitée par une société de téléassistance : prise en charge du coût de l’opération

Réf. : CE, 3°-8° ch. réunies, 28 juin 2023, n° 463457, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A508797K

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N6161BZ9

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par Yann Le Foll

Le 05 Juillet 2023

► Une intervention (constatée inutile a posteriori) du SDIS sollicitée par une société de téléassistance sans que celle-ci n’ait accompli les diligences qui lui incombent implique la prise en charge par celle-ci d’une partie du coût de l’opération.

Faits. Le dispositif personnel d'alarme d'un client d'une société de téléassistance a émis un signal d'alerte auprès de cette société. La société a tenté, sans succès, de contacter à plusieurs reprises son client ainsi que le réseau de proches qu'il avait désignés, puis ayant alerté la régulation médicale d'urgence, laquelle a décidé de faire intervenir le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) au domicile de cette personne.

L’intervention a conduit à constater que celle-ci avait déclenché son alarme par inadvertance et ne nécessitait aucun secours. Le SDIS a émis à l'encontre de cette société un avis de sommes à payer valant titre exécutoire au titre de cette intervention, sur le fondement d'une délibération de son conseil d'administration prévoyant la facturation d'un forfait au titre de la « tarification des activités opérationnelles relevant des missions facultatives » pour un « déclenchement téléassistance ».

Appréciation CE. Au moment de lancer cette intervention, le SDIS agissait au titre de la mission de service public de secours aux personnes, au sens de l'article L. 1424-2 du Code général des collectivités territoriales N° Lexbase : L6155L9T. La circonstance que cette intervention s'est finalement révélée inutile ne permet pas de la regarder, a posteriori, comme ne relevant pas de cette mission et par suite facturable à la personne secourue.

En revanche, dans l'hypothèse où la société de téléassistance aurait sollicité l'intervention du SDIS sans avoir accompli les diligences qui lui incombent pour éviter une intervention inutile, cette intervention doit être regardée comme ayant été sollicitée par cette société à son profit.

Cette société peut alors être regardée comme bénéficiaire de l'intervention, au sens de l'article L. 1424-42 du Code général des collectivités territoriales, contrairement a ce qu’a estimé la cour administrative d'appel (CAA Versailles, 24 février 2022, n° 21VE02056 N° Lexbase : A27687ZK).

Rappel. Les interventions ne relevant pas directement de l'exercice de leurs missions de service public effectuées par les SDIS peuvent donner lieu à une participation aux frais des personnes qui en sont bénéficiaires, dont ces services déterminent eux-mêmes les conditions (CE, 1°-4° ch. réunies, 18 mars 2020, n° 425990, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A95833IR).

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Concurrence

[Brèves] Rupture brutale d’une relation commerciale : application à un syndicat de copropriétaires et évaluation du préjudice principal

Réf. : Cass. com., 28 juin 2023, n° 21-16.940, FS-B N° Lexbase : A268497K

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N6170BZK

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par Vincent Téchené

Le 05 Juillet 2023

► D’une part, un syndicat de copropriétaires commerçants, qui a conclu un contrat ayant exclusivement pour objet d'assurer une prestation de services pour les besoins de l'activité commerciale de ses membres, a, bien qu'il soit de nature civile, entretenu une relation commerciale avec sa cocontractante, entrant dans le champ d'application de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

D’autre part, le préjudice principal résultant du caractère brutal de la rupture s'évalue en considération de la marge brute escomptée, c'est-à-dire la différence entre le chiffre d'affaires hors taxe escompté et les coûts variables hors taxe non supportés durant la période d'insuffisance de préavis, différence dont pourra encore être déduite, le cas échéant, la part des coûts fixes non supportés du fait de la baisse d'activité résultant de la rupture, durant la même période.

Faits et procédure. Le syndicat des copropriétaires d’un centre commercial (le syndicat), représenté par son syndic, a conclu avec une société un contrat par lequel celle-ci était chargé de la mise en œuvre des prestations de sécurité incendie, surveillance et gardiennage de son site.

Ce contrat prévoyait qu'il devait prendre effet le 3 octobre 2012, pour une durée d'un an tacitement reconductible pour une période indéterminée. Il pouvait ensuite être résilié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en respectant un préavis de trois mois.

Soutenant que le syndic avait, au nom du syndicat, par lettre du 9 mars 2015, résilié le contrat à compter du 13 avril suivant, la société de gardiennage les a assignés en réparation pour non-respect du préavis contractuel et rupture brutale d'une relation commerciale établie.

La cour d’appel (CA Paris, 5-11, 26 février 2021, n° 18/20619 N° Lexbase : A35434I3) a jugé que le syndicat avait rompu brutalement la relation commerciale établie avec la société de sécurité et a, en conséquence, condamné le premier à payer à la seconde la somme de 6 000 euros de dommages et intérêts. Le syndicat a alors formé un pourvoi en cassation.

Décision. En premier lieu, la Cour de cassation commence par rappeler qu’il résulte de l'article L. 410-1 du Code de commerce N° Lexbase : L6581AIL, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-649, du 26 mai 2021 N° Lexbase : L6122L4I, que les règles définies au livre IV de ce code s'appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services.

Ainsi en espèce le syndicat de copropriétaires commerçants, qui a conclu un contrat ayant exclusivement pour objet d'assurer une prestation de services pour les besoins de l'activité commerciale de ses membres, a, bien qu'il soit de nature civile, entretenu une relation commerciale avec sa cocontractante, entrant dans le champ d'application de l'ancien article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce N° Lexbase : L7575LB8 (v. désormais, C. com., art. L. 442-1, III N° Lexbase : L0680LZ9).

En second lieu, la Haute juridiction rappelle qu’il résulte de l'article L. 442-6, I, 5° précité que le préjudice principal résultant du caractère brutal de la rupture s'évalue en considération de la marge brute escomptée, c'est-à-dire la différence entre le chiffre d'affaires hors taxe escompté et les coûts variables hors taxe non supportés durant la période d'insuffisance de préavis, différence dont pourra encore être déduite, le cas échéant, la part des coûts fixes non supportés du fait de la baisse d'activité résultant de la rupture, durant la même période.

Ainsi, la Cour approuve-t-elle l'arrêt d’appel d’avoir retenu que l'assiette de l'indemnisation de la rupture brutale de la relation commerciale ne pouvait comprendre l'équivalent du chiffre d'affaires qui aurait été réalisé pendant les quatre mois de préavis, mais celui de la marge brute, qu'il a évaluée au regard des éléments du dossier.

Toutefois, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa de l’article 1149, devenu 1231-2 N° Lexbase : L1064H9B, du Code civil, en application duquel les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé. Dès lors, le préjudice subi par la société de gardiennage en raison du non-respect du préavis contractuel consiste en la perte de la marge brute escomptée, dans les conditions précédemment précisées. Par conséquent, l’arrêt d’appel est censuré en ce qu’il a retenu qu’il doit être alloué, en réparation du préjudice subi, la somme correspondant au chiffre d'affaires que la société aurait perçu si elle n'avait pas été privée de deux mois de préavis.

Observations. La Cour de cassation est souvent interrogée sur le champ d’application des dispositions du Code de commerce relatives à la rupture brutale des relations commerciales.

Ainsi, des chirurgiens réunis en SEL se sont vu refuser l'application du texte en cas de rupture de la relation nouée avec une clinique (Cass. com., 23 octobre 2007, n° 06-16.774, FS-P+B N° Lexbase : A8484DYU). Également, la Haute juridiction a précisé qu’i n'existe pas de relation commerciale entre un chirurgien-dentiste et son fournisseur de matériel dentaire (Cass. com., 31 mars 2021, n° 19-16.139, F-P N° Lexbase : A47444NZ).

En outre, l’incompatibilité de certaines professions avec une activité à caractère commercial a déjà conduit à exclure l'application des dispositions de l’article L. 442-6, I, 5°, aux notaires (Cass. com., 20 janvier 2009 n° 07-17.556, F-P+B N° Lexbase : A6375EC4, D. Bakouche, in Chron., Lexbase Droit privé, février 2009, n° 337 N° Lexbase : N4911BIQ), aux avocats (Cass. com., 24 novembre 2015 n° 14-22.578, F-D N° Lexbase : A0932NY8), et ce quel qu’en soit le mode d’exercice (ex. pour l’exercice en SELARL : CA Paris, 4-5, 29 juin 2016, n° 14/07291 N° Lexbase : A6592RUP, B. Brignon, Lexbase Avocats, septembre 2016 N° Lexbase : N4020BWS) ou encore aux conseils en propriété industrielle (Cass. com., 3 avril 2013, n° 12-17.905, F-P+B N° Lexbase : A6378KBT, B. Brignon, Le conseil en propriété industrielle n'est pas commerçant, Lexbase Affaires, avril 2013, n° 337 N° Lexbase : N6873BTQ). Enfin, la Cour de cassation a retenu que l’activité principale de comptabilité exercée par l’expert-comptable n’est pas une relation commerciale ouvrant droit à indemnité pour rupture brutale de la relation commerciale établie (Cass. com., 10 février 2021, n° 19-10.306, F-P N° Lexbase : A79884GX).

Pour terminer, on relèvera que la responsabilité pour rupture brutale a été retenue à l’encontre d’une société d'assurances mutuelles, dès lors qu'elle procède à une activité de services, leur régime juridique comme le caractère non lucratif de leur activité n'étant pas de nature à les exclure du champ d'application de l'article L 442-1, II (Cass. com. 14 septembre 2010 n° 09-14.322, F-P+B N° Lexbase : A5772E9N). Il en est de même d'une association à but non lucratif, dès lors qu'elle exerce une activité de production, de distribution ou de services (Cass. com. 25 janvier 2017 n° 15-13.013 FS-P+B+I N° Lexbase : A8401S9Z).

newsid:486170

Copropriété

[Brèves] Notification du PV d’assemblée par LR/AR : conformité à la CESDH de la fixation du point de départ du délai de contestation à la date de la première présentation de la lettre ?

Réf. : Cass. civ. 3, 29 juin 2023, n° 21-21.708, FS-B N° Lexbase : A497797H

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N6197BZK

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 05 Juillet 2023

► En application de l'article 64 du décret n° 67-223, du 17 mars 1967, la notification d'un procès-verbal d'assemblée générale par lettre recommandée avec demande d'avis de réception fait, quand bien même ne parviendrait-elle pas effectivement à son destinataire, courir le délai pour agir ; cette disposition ne porte pas une atteinte injustifiée au droit d'accès à un tribunal, garanti par l’article 6 CESDH.

Les textes. Pour rappel, selon l’article 42, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 N° Lexbase : L4849AH3, « Les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée, sans ses annexes. Cette notification est réalisée par le syndic dans le délai d'un mois à compter de la tenue de l'assemblée générale. ».

Et l’article 64 du décret n° 67-223, du 17 mars 1967, dispose : « Toutes les notifications et mises en demeure prévues par la loi du 10 juillet 1965 susvisée et le présent décret sont valablement faites par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Le délai qu'elles font, le cas échéant, courir a pour point de départ le lendemain du jour de la première présentation de la lettre recommandée au domicile du destinataire » (nous soulignons).

Contrôle de conventionnalité. Dans cette affaire, un copropriétaire, qui s’était vu opposer l’irrecevabilité de sa demande d’annulation d’une assemblée générale (ou à tout le moins de certaines résolutions), jugée tardive, contestait la règle posée par l’article 64 précité, soutenant notamment sur le fondement de l’article 6 CESDH N° Lexbase : L7558AIR, qu’un délai d'action ou de recours ne peut courir si l'intéressé n'est pas en mesure d'agir, ce qui était le cas, comme en l’espèce, lorsque le pli n'a jamais été retiré.

Réponse de la Cour de cassation. L’argument ne trouve pas écho auprès de la Cour suprême, qui approuve le raisonnement de la cour d’appel de Colmar (CA Colmar, 1er juillet 2021, n° 20/00055 N° Lexbase : A90354XW), aux termes d’une motivation enrichie.

Ainsi, selon la Haute juridiction, en premier lieu, la cour d'appel a énoncé, à bon droit, qu'en application de l'article 64 du décret n° 67-223, du 17 mars 1967, la notification d'un procès-verbal d'assemblée générale par lettre recommandée avec demande d'avis de réception fait, quand bien même ne parviendrait-elle pas effectivement à son destinataire, courir le délai pour agir, dès lors que l'article 670-1 du Code de procédure civile, qui invite les parties à procéder par voie de signification, concerne la seule notification des décisions de justice (la Cour suprême écarte ainsi la première branche du moyen qui faisait valoir que le délai en cause ne court pas lorsque le pli n'a jamais été retiré, le syndic de copropriété devant, dans cette hypothèse, notifier le procès-verbal d'assemblée générale par voie de signification).

En deuxième lieu, procédant au contrôle de conventionnalité qui lui était demandé, elle a relevé que cette disposition avait pour objectif légitime de sécuriser le fonctionnement des copropriétés en évitant qu'un copropriétaire puisse, en s'abstenant de retirer un courrier recommandé, empêcher le délai de recours de courir et ainsi fragiliser l'exécution des décisions d'assemblée générale.

En troisième lieu, elle en a exactement déduit que cette disposition, en l'absence de disproportion avec le droit d'un copropriétaire de pouvoir contester les décisions prises par l'assemblée générale, ne portait pas une atteinte injustifiée au droit d'accès à un tribunal garanti par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

En quatrième lieu, ayant constaté que le procès-verbal de l'assemblée générale du 30 mars 2015 avait été adressé à la société par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 avril 2015, cachet de la poste faisant foi, et que cette lettre avait été retournée à l'expéditeur avec la mention « pli avisé et non réclamé », la cour d'appel, motivant sa décision, a souverainement retenu que, bien que la date n'en soit pas renseignée, la première présentation était nécessairement antérieure de plus de deux mois à l'assignation délivrée le 5 janvier 2017.

Pour aller plus loin : à noter que le présent arrêt fera l’objet d’un commentaire approfondi, à paraître en septembre prochain dans Lexbase Droit privé.

newsid:486197

Données personnelles

[Brèves] Une autorité de la concurrence peut constater, dans le cadre de l’examen d’un abus de position dominante, une violation du RGPD

Réf. : CJUE,  4 juillet 023, aff. C-252/21 N° Lexbase : A078498K

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N6189BZA

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par Vincent Téchené

Le 05 Juillet 2023

► Une autorité de la concurrence nationale peut constater, dans le cadre de l’examen d’un abus de position dominante, une violation du RGPD. Tenue par le principe de coopération loyale, elle doit toutefois prendre en considération toute décision ou enquête de l’autorité de contrôle compétente en vertu de ce Règlement.

Faits et procédure. L’autorité fédérale allemande de la concurrence a interdit, en particulier, de subordonner, dans les conditions générales, l’utilisation du réseau social Facebook par des utilisateurs privés résidant en Allemagne au traitement de leurs données off Facebook et de procéder au traitement de ces données sans leur consentement. Elle a motivé sa décision par le fait que ce traitement n’étant pas conforme au RGPD (Règlement n° 2016/679, du 27 avril 2016 N° Lexbase : L0189K8I), il constituait une exploitation abusive de la position dominante de Meta Platforms Ireland sur le marché allemand des réseaux sociaux en ligne. Saisi d’un recours contre cette décision, le tribunal régional supérieur de Düsseldorf demande à la Cour de justice si les autorités de la concurrence nationales peuvent contrôler la conformité d’un traitement de données avec les exigences formulées dans le RGPD. En outre, le juge allemand interroge la Cour sur l’interprétation et l’application de certaines dispositions du RGPD au traitement des données par un opérateur d’un réseau social en ligne.

Décision. La CJUE observe que, dans le cadre de l’examen d’un abus de position dominante de la part d’une entreprise, il peut s’avérer nécessaire pour l’autorité de la concurrence de l’État membre concerné d’examiner également la conformité du comportement de cette entreprise à des normes autres que celles relevant du droit de la concurrence, telles que les règles prévues par le RGPD. Néanmoins, lorsque l’autorité de la concurrence nationale relève une violation du RGPD, elle ne se substitue pas aux autorités de contrôle mises en place par ce Règlement. En effet, l’appréciation du respect du RGPD se limite aux seules fins de constater un abus de position dominante et d’imposer des mesures visant à cesser cet abus selon les règles du droit de la concurrence.

Afin d’assurer une application cohérente du RGPD, les autorités de la concurrence nationales doivent se concerter et coopérer loyalement avec les autorités veillant au respect de ce Règlement. Notamment, lorsque l’autorité de la concurrence nationale considère qu’il est nécessaire d’examiner la conformité d’un comportement d’une entreprise à la lumière du RGPD, elle doit vérifier si ce comportement ou un comportement similaire a déjà fait l’objet d’une décision par l’autorité de contrôle compétente ou bien encore par la Cour. Si tel est le cas, elle ne peut s’en écarter, tout en restant libre d’en tirer ses propres conclusions sous l’angle de l’application du droit de la concurrence.

La Cour précise que le seul fait qu’un utilisateur consulte des sites internet ou des applications susceptibles de révéler de telles informations ne signifie nullement qu’il rend manifestement publiques ses données, au sens du RGPD. En outre, il en va de même lorsqu’un utilisateur insère des données dans de tels sites ou dans de telles applications ou encore active des boutons de sélection y intégrés, à moins qu’il a explicitement exprimé son choix au préalable de rendre les données le concernant publiquement accessibles à un nombre illimité de personnes.

En ce qui concerne plus généralement le traitement effectué par Meta Platforms Ireland, y inclus celui des données « non sensibles », la Cour examine ensuite si celui-ci relève des justifications, prévues par le RGPD, permettant de rendre licite un traitement de données effectué sans le consentement de la personne concernée. Dans ce contexte, elle considère que la nécessité d’exécuter le contrat auquel cette personne est partie ne justifie la pratique litigieuse qu’à la condition que le traitement de données soit objectivement indispensable de telle sorte que l’objet principal de ce contrat ne pourrait être atteint en l’absence de ce traitement. Sous réserve d’une vérification par le juge national, la Cour émet des doutes quant à la possibilité que la personnalisation des contenus ou l’utilisation homogène et fluide des services propres au groupe Meta puissent satisfaire à ces critères. De plus, selon la Cour, la personnalisation de la publicité par laquelle est financé le réseau social en ligne Facebook ne saurait justifier, en tant qu’intérêt légitime poursuivi par Meta Platforms Ireland, le traitement de données en cause, en l’absence du consentement de la personne concernée.

Enfin, la Cour observe que le fait que l’opérateur d’un réseau social en ligne, en tant que responsable du traitement, occupe une position dominante sur le marché des réseaux sociaux ne fait pas obstacle, en tant que tel, à ce que ses utilisateurs puissent valablement consentir, au sens du RGPD, au traitement de leurs données, effectué par cet opérateur. Toutefois, vu qu’une telle position est susceptible d’affecter la liberté de choix de ces utilisateurs et de créer un déséquilibre manifeste entre ceux-ci et le responsable du traitement, elle constitue un élément important pour déterminer si le consentement a effectivement été donné valablement et, notamment, librement. Il incombe à cet opérateur de le prouver.

newsid:486189

Formation professionnelle

[Brèves] Entretien d’évaluation et entretien professionnel : précisions utiles sur leur tenue

Réf. : Cass. soc., 5 juillet 2023, n° 21-24.122, FS-B N° Lexbase : A330398T

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N6205BZT

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par Lisa Poinsot

Le 12 Juillet 2023

Ni les dispositions légales applicables ni la jurisprudence ne s’opposent à la tenue à la même date de l’entretien d’évaluation et de l’entretien professionnel pourvu que, deux comptes rendus distincts soient rédigés et que, lors de la tenue de l’entretien professionnel, les questions d’évaluation ne soient pas évoquées.

Faits et procédure. Invoquant la survenue de plusieurs événements tragiques, dont de nombreux syndromes d’épuisement professionnel et plusieurs suicides, un CSE, la Fédération CFDT et l’UGICT-CGT saisissent le tribunal judiciaire pour faire juger que la société n’a pas respecté son obligation de sécurité et de prévention des risques professionnels et lui ordonner de mettre en place des mesures d’urgence pour lutter contre les risques psychosociaux. En outre, il est demandé d’ordonner à la société d’organiser les entretiens professionnels à une date distincte de la tenue des entretiens annuels d’évaluation et de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts.

La cour d’appel relève qu’il est justifié que ces deux entretiens sont d’ores et déjà réalisés à une date distincte dans certains cas de figure, à savoir après une absence de longue durée et à la demande du collaborateur. Comme l’explique l’employeur, les salariés qui ne souhaitent pas que leur entretien professionnel se tienne le même jour que leur entretien annuel d’évaluation ont la possibilité de demander une dissociation à deux dates différentes, ce qui est accepté par les managers.

Elle retient que ni les dispositions légales applicables ni la jurisprudence n'imposent la tenue de ces entretiens à des dates différentes, la seule obligation résidant dans le fait de rédiger deux comptes rendus distincts, ce qui est le cas au sein de la société.

Un pourvoi est alors formé contre cette décision, soutenant que le salarié bénéficie tous les deux ans d'un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d'emploi ; que cet entretien ne devant pas porter sur l'évaluation du travail du salarié et devant ainsi être distinct de celui relatif à l'évaluation de la prestation de travail du salarié, l'employeur ne peut y convoquer celui-ci à la suite, ou le même jour, de la tenue de son entretien d'évaluation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation considère que les moyens ne sont pas fondés, sur le fondement de l’article L. 6315-1, I du Code du travail N° Lexbase : L7678LQG, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 N° Lexbase : L9567LLW.

Pour aller plus loin :

  • lire M.-L. Boulanger et M. Wintrebert, L’entretien d’évaluation : atouts et points de vigilance, Lexbase Social, novembre 2022, n° 924 N° Lexbase : N3261BZS ;
  • v. fiche pratique, Comment évaluer un salarié ?, Droit du travail N° Lexbase : E6846Z7P ;
  • v. ÉTUDE : L’évaluation professionnelle du salarié, Les méthodes utilisées dans l’entretien d’évaluation du salarié, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2248Z8R.

 

newsid:486205

Santé et sécurité au travail

[Brèves] Publication d’un décret précisant les modalités de suivi de l'état de santé des salariés ayant plusieurs employeurs

Réf. : Décret n° 2023-547 du 30 juin 2023, relatif au suivi de l'état de santé des travailleurs ayant plusieurs employeurs N° Lexbase : L0418MIC

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N6178BZT

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par Charlotte Moronval

Le 05 Juillet 2023

► Publié au Journal officiel du 1er juillet 2023, le décret n° 2023-547, du 30 juin 2023, précise les modalités du suivi de l’état de santé des travailleurs ayant plusieurs employeurs et occupant des emplois identiques.

Pris pour l’application de l’article 25 de la loi n° 2021-1018, du 2 août 2021, pour renforcer la prévention en santé au travail N° Lexbase : L4000L7B, le décret précise notamment les travailleurs concernés par ce suivi, le service de prévention et de santé au travail interentreprises ou le service de santé au travail en agriculture chargé du suivi mutualisé de leur état de santé, les modalités de ce suivi ainsi que les modalités de répartition entre les employeurs du coût de la cotisation annuelle.

Entrée en vigueur. Le texte est entré en vigueur le 2 juillet 2023, à l’exception des dispositions relatives aux modalités de répartition du coût de la mutualisation entre les employeurs qui entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2024.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les services de prévention et de santé au travail Le suivi de l’état de santé du travailleur « hors risques », in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E8107ZBU.

 

newsid:486178

Soins psychiatriques sans consentement

[Brèves] Possible action de la personne majeure sous curatelle pour obtenir la mainlevée d’une mesure de soins sans consentement

Réf. : Cass. civ. 1, 5 juillet 2023, n° 23-10.096, FS-B N° Lexbase : A3313989

Lecture: 2 min

N6206BZU

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par Laïla Bedja

Le 05 Juillet 2023

► Tant la saisine du juge des libertés et de la détention aux fins d’obtenir la mainlevée d’une mesure de soins sans consentement que l’appel de sa décision maintenant une telle mesure constituent des actes personnels que la personne majeure protégée peut accomplir seule.

Les faits et procédure. Le 16 août 2022, Mme X a été admise en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d’une hospitalisation complète dans un centre hospitalier, par décision du directeur d’établissement, en application de l’article L. 3212-1 du Code de la santé publique N° Lexbase : L4852LWM, à la demande d’un tiers. Le directeur de l’établissement a demandé la poursuite de la mesure devant le juge des libertés et de la détention.

Pour déclarer son appel irrecevable, le premier président de la cour d’appel de Paris retient qu'en sa qualité de majeure sous curatelle celle-ci ne pouvait ester ou se défendre en justice sans l'assistance de son curateur et relève que celui-ci n'a, à aucun moment, relevé appel lui-même de cette décision, ni régularisé l'appel de l'intéressée.

Elle s’est pourvue en cassation.

La décision. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction casse et annule l’ordonnance rendue par le premier président de la cour d’appel. Elle rappelle notamment que selon l’article 459 du Code civil N° Lexbase : L7284LPH, la personne protégée ne bénéficie, pour les actes relatifs à sa personne, d'une assistance que si son état ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, ou encore, après le prononcé d'une habilitation familiale ou l'ouverture d'une mesure de tutelle, d'une représentation, au cas où cette assistance ne suffirait pas.

newsid:486206

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Caractérisation d’un établissement stable et d’une activité occulte en matière de TVA : le Conseil d’État apporte des précisions

Réf. : CE, 3°-8° ch. réunies, 15 juin 2023, n° 465719, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A203693S

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par Maxime Loriot, Notaire Stagiaire - Doctorant en droit international privé à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Le 05 Juillet 2023

► Le Conseil d’État était amené à apprécier un litige relatif à la caractérisation d’un avantage occulte et d’un établissement stable au regard de la réglementation sur la TVA.

La question de la caractérisation dun établissement stable et dune activité occulte en matière de TVA a fait lobjet dune jurisprudence relativement fournie. Traditionnellement, la jurisprudence considère que la preuve du caractère occulte est présumée rapportée dès lors que le contribuable ne sest pas acquitté de ses obligations déclaratives, sans que ladministration ne soit tenue de démontrer que son comportement révélait son intention de dissimuler son activité (CE Contentieux, 7 décembre 2015, n° 368227, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0405NZZ). Toutefois, le contribuable peut renverser cette présomption en démontrant quil a commis une erreur de nature à justifier quil ne se soit acquitté daucune de ses obligations déclaratives (CE, 9°-10° ch. réunies, 21 juin 2018, n° 411195, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8763XTQ).

Rappel des faits et procédure

  • Une société luxembourgeoise a fourni entre 2012 et 2014 des prestations de services en matière administrative, financière, fiscale, juridique et informatique à deux filiales françaises. Ces prestations ont fait l’objet d’une autoliquidation par les filiales françaises au titre de la TVA.
  • À la suite d’un contrôle comptable de l’une des filiales, l’administration fiscale a jugé que la société mère devait être considérée comme la redevable légale de la TVA afférente à ces prestations. Ainsi, la société mère a été condamnée à un rappel de TVA pour la période comprise entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014, assortie d’une pénalité de 80 % pour activité occulte sur le fondement de l’article 1728, 1) du CGI N° Lexbase : L1445MDU.
  • En conséquence, la société mère a engagé une action en justice afin d’obtenir la décharge de ces impositions ainsi que de la majoration de 80 % pour activité occulte.
  • En première instance et en appel, tant les juges du tribunal administratif de Lyon, que les juges de la cour administrative d’appel de Lyon (CAA Lyon, 12 mai 2022, n° 22LY00046 N° Lexbase : A92688BU), ont débouté la société de ses prétentions. Les juges ont notamment retenu que la société mère avait réalisé les prestations litigieuses par l’intermédiaire de sa filiale et partant d’un établissement en France. La société a dès lors formé un pourvoi en cassation.

Question de droit. Les juges du Conseil dÉtat étaient amenés à statuer sur la question suivante : Le défaut de déclaration fiscale de TVA dans le délai légal par une société mère pour des activités exercées par l’intermédiaire d’un établissement stable suffit-il à caractériser une activité occulte au sens de l’article 1728, 1) du CGI ?

Solution

Le Conseil dÉtat rappelle tout dabord que dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, son activité est réputée occulte s'il n'est pas en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives.

En revanche, si le contribuable a satisfait à ses obligations fiscales dans un autre État que la France, la justification de l'erreur commise doit être appréciée en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment du niveau d'imposition dans cet autre État et des modalités d'échange d'informations entre les administrations fiscales des deux États.

En l’espèce, les juges constatent que la société mère navait ni déposé dans le délai légal les déclarations fiscales quelle était tenue de souscrire en France ni fait connaître son activité à un centre de formalité des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce.

En conséquence, cest à bon droit que les juges dappel en ont déduit que la société mère devait être regardée comme ayant entendu dissimuler lactivité quelle exerçait en France par lintermédiaire de cet établissement stable et quelle n’établissait pas avoir commis une erreur justifiant quelle ne se soit pas acquittée de son obligation de déclarer la TVA afférente aux prestations correspondantes. 

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