Le Quotidien du 7 juillet 2020

Le Quotidien

Peines

[Brèves] Appel d’un jugement d’aménagement de peine : précisions sur le caractère contradictoire de la procédure

Réf. : Cass. crim., 17 juin 2020, n° 20-80.240, F-P+B+I (N° Lexbase : A71333NI)

Lecture: 3 min

N3972BYR

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par Adélaïde Léon

Le 16 Juillet 2020

► La chambre de l’application des peines, appelée à examiner en appel un jugement concernant une mesure d’application des peines, ne peut fonder sa décision sur des éléments non contradictoirement débattus devant le juge du premier degré sans avoir entendu le condamné non représenté, au besoin après la réouverture des débats.

Résumé des faits. Un condamné a été admis au bénéfice de la libération conditionnelle par jugement du juge d’application des peines sous diverses conditions.

Le procureur de la République a formé un recours suspensif contre cette décision.

En cause d’appel. Après avoir constaté l’absence de l’avocat de l’intéressé et le dépôt d’un mémoire demandant la confirmation de la mesure, la chambre de l’application des peines, sur les réquisitions orales du ministère public, a infirmé le jugement de première instance estimant que la mesure de libération conditionnelle-expulsion n’apparaissait pas opportune et qu’il n’était pas établi que l’état de santé du prévenu était incompatible avec la détention.

L’intéressé a formé un pourvoi contre la décision de la chambre de l’instruction soumettant également une question prioritaire de constitutionnalité s’agissant de l’article 712-13, alinéa 1er, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9384IEB) lequel soumet l’audition du demandeur à l’aménagement de peine devant la chambre de l’instruction à la volonté de cette dernière, quand bien même l’intéressé ne serait pas représenté par un avocat.         

Moyens du pourvoi. Le condamné critiquait l’arrêt attaqué en ce qu’il a infirmé le jugement rendu par le juge d’application des peines sans l’entendre ni le faire comparaître. Il soutenait qu’en cas de déclaration d’inconstitutionnalité de la disposition attaquée et en fonction de sa date d’abrogation, la décision de la chambre de l’instruction serait cassée pour violation de la loi et défaut de base légale.

Décision. Après avoir relevé qu’elle avait, dans son arrêt du 25 mars 2020 (Cass. crim., 25 mars 2020, n° 20-80.240, F-D N° Lexbase : A60583KL), dit n’y avoir lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité, la Cour de cassation casse l’arrêt de la chambre de l’instruction au visa des articles préliminaire (N° Lexbase : L3311LTS) et 712-3 (N° Lexbase : L0643LTY) du Code de procédure pénale sur un moyen qu’elle relève d’office.

La Haute juridiction souligne, dans un premier temps, que la procédure pénale doit être équitable, contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties. Elle rappelle, par ailleurs, qu’en vertu des dispositions de l’article 712-3, lorsque la chambre de l’instruction est appelée à examiner en appel un jugement concernant des mesures d’aménagement de peine, elle statue après débat contradictoire, le condamné, représenté par son avocat, n’étant pas entendu sauf si celle-ci en décide autrement.

Toutefois, elle juge qu’il appartenait en l’espèce à la chambre de l’instruction de recueillir les observations du condamné non représenté en procédant à son audition, au besoin après la réouverture des débats. Les éléments de faits et les pièces sur lesquels elle entendait fonder sa décision n’ayant pas été contradictoirement débattus devant le juge de l’application des peines, il lui appartenait de rétablir le contradictoire en recueillant les observations de l’intéressé.

newsid:473972

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] La prestation de compensation du handicap est une prestation indemnitaire devant être imputée par le FIVA sur le poste de préjudice résultant du besoin d'assistance par une tierce personne

Réf. : Cass. civ. 2, 25 juin 2020, n° 19-14.085, F-D (N° Lexbase : A70833PZ)

Lecture: 3 min

N3916BYP

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par Laïla Bedja

Le 01 Juillet 2020

► Selon les articles 53, I, et 53, IV, de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 (N° Lexbase : L5178AR9), la victime d'une maladie liée à une exposition à l'amiante et ses ayants droit peuvent obtenir la réparation intégrale de leurs préjudices et l'indemnisation due par le FIVA doit tenir compte des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice ;

Il résulte des articles L. 245-1 (N° Lexbase : L3793LWE) et suivants du Code de l’action sociale et des familles que la prestation de compensation du handicap constitue une prestation indemnitaire dès lors qu'elle n'est pas attribuée sous condition de ressources, et que, fixée en fonction des besoins individualisés de la victime d'un handicap, elle répare certains postes de préjudices indemnisables.

Ainsi statue la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 25 juin 2020 (Cass. civ. 2, 25 juin 2020, n° 19-14.085, F-D N° Lexbase : A70833PZ).

Les faits. Une victime est décédée le 28 juillet 2013 d’un cancer broncho-pulmonaire, qui avait été diagnostiqué le 16 septembre 2008 et dont le caractère professionnel a été reconnu par son organisme de Sécurité sociale.

Après avoir accepté les offres présentées par le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (le FIVA), les 11 juillet et 3 novembre 2014, au titre des frais funéraires et de l'indemnisation de leur préjudice moral, les ayants droit de la victime ont de nouveau saisi le Fonds aux fins d’obtenir l’indemnisation, d’une part, du préjudice tenant à la nécessité dans laquelle leur auteur s’était trouvé de recourir à l’assistance d’une tierce personne, d’autre part, du préjudice économique subi par sa veuve.

Le FIVA leur ayant présenté, par lettre du 13 juin 2017, une offre d’indemnisation complémentaire au titre du seul préjudice lié à l'assistance d'une tierce personne, qu’ils ont jugée insuffisante, les ayants droit ont saisi la cour d’appel pour contester cette décision, la veuve ayant, par ailleurs, contesté la décision implicite de rejet de la demande d’indemnisation de son préjudice économique, puis l’offre présentée à ce titre par le Fonds, en cours d’instance, par lettre du 20 mars 2018.

La cour d’appel. Pour allouer aux ayants droit une certaine somme au titre du préjudice lié à l’assistance d’une tierce personne, la cour d’appel (CA Douai, 31 janvier 2019, n° 17/05474 N° Lexbase : A7555YUD) a refusé de prendre en compte la prestation de compensation du handicap alloué à la victime à compter du 1er avril 2011 et a énoncé qu’il ressort des pièces du dossier que la victime a bénéficié d’une hospitalisation à domicile au cours des années 2010 et 2011, mais nullement pour la période ultérieure au 28 août 2012, de sorte qu’aucune période ne doit être déduite à ce titre au motif de l'éventuel versement d'une prestation de compensation à un handicap. Un pourvoi est alors formé par le FIVA pour contester cette absence de prise en compte de la prestation de compensation du handicap.

Cassation. Rappelant la règle précitée, la Haute juridiction casse l’arrêt rendu par la cour d’appel. En se déterminant ainsi, par des motifs inopérants et alors que la prestation de compensation du handicap perçue par la victime d'une maladie due à une exposition à l'amiante doit être imputée sur le poste de préjudice résultant du besoin d'assistance par une tierce personne, cette dernière n'a pas donné de base légale à sa décision.

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Avocats/Déontologie

[Brèves] Saisies informatiques : l'absence de production des pièces rend impossible leur identification comme bénéficiant du secret professionnel de l'avocat

Réf. : CA Lyon, 10 juin 2020, n° 19/05460 (N° Lexbase : A40793NE)

Lecture: 3 min

N3915BYN

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par Marie Le Guerroué

Le 08 Juillet 2020

► Il appartient à l'appelant de verser aux débats les pièces qu'il prétend ne pouvoir être saisies en en expliquant les raisons pour chacune, l'absence de production rendant impossible de les identifier comme bénéficiant du secret professionnel de l'avocat ;

► Le fait qu'un document couvert par le secret professionnel ou sans rapport avec la fraude présumée figure au sein des saisies effectuées n'a pas pour effet d'entraîner l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et saisie (CA Lyon, 10 juin 2020, n° 19/05460 N° Lexbase : A40793NE).

Moyens. La société appelante soutenait que l'administration fiscale avait saisi des documents qui n'étaient pas en rapport avec la fraude présumée en copiant l'intégralité du disque dur et de la messagerie des ordinateurs de la société et qu'il a été porté atteinte au secret des correspondances entre le client et son avocat, certaines correspondances avec les avocats de la société ayant été saisies sans être placées sous scellé. La Direction nationale d'enquêtes fiscales soutient qu’il appartient au juge de contrôler la validité de la saisie des pièces couvertes par le secret entre l'avocat et son client ou de celles qui seraient sans lien avec la fraude.

Texte. Pour la cour, il résulte des dispositions combinées des articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) et L. 16 B du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L0419LTPqu'en toute matière, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, et les correspondances échangées entre le client et son avocat sont couvertes par le secret professionnel et que ces documents ne peuvent donc pas être régulièrement saisis par l'administration, sauf lorsque l'avocat a participé à la fraude présumée.

Réponse de la cour. En l'espèce, dans le procès-verbal contesté, l'administration constate que les messageries présentes sur les ordinateurs comprennent des correspondances avec des avocats qui feront l'objet d'un retraitement ultérieur. Toutefois, la société ne donne pas, dans le cadre de son recours, la liste des messages couverts par le secret professionnel qu'elle entend voir écartés et ne sollicite aucune communication de pièces de l'administration fiscale. Or, la cour rappelle que la Cour de cassation a jugé qu'il appartenait à l'appelant, auquel les pièces ont été restituées, ce qui lui permet d'exercer un recours effectif, de verser aux débats celles qu'il prétend ne pouvoir être saisies en en expliquant les raisons pour chacune, l'absence de production rendant impossible de les identifier comme bénéficiant du secret professionnel de l'avocat. En tout état de cause, la cour précise également, d'après une jurisprudence constante, que le fait qu'un document couvert par le secret professionnel ou sans rapport avec la fraude présumée figure au sein des saisies effectuées n'a pas pour effet d'entraîner l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et saisie (v. ETUDE : Le secret professionnel, in La Profession d’avocat N° Lexbase : E6257ETW).

 

newsid:473915

Consommation

[Brèves] Conditions générales accessibles sur le site internet du professionnel : obligation de faire figurer les informations relatives à l’entité de règlement extrajudiciaire des litiges

Réf. : CJUE, 25 juin 2020, aff. C-380/19 (N° Lexbase : A33693PH)

Lecture: 3 min

N3943BYP

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par Vincent Téchené

Le 02 Juillet 2020

► Un professionnel, qui rend accessible sur son site internet les conditions générales des contrats de vente ou de service, mais qui ne conclut pas de contrats avec les consommateurs par l’intermédiaire de ce site, est tenu de faire figurer dans ces conditions générales les informations relatives à l’entité ou aux entités de règlement extrajudiciaire des litiges dont ce professionnel relève, lorsque ce dernier s’engage à recourir à cette ou à ces entités ou est tenu d’y recourir pour résoudre les litiges avec les consommateurs ; il n’est pas suffisant à cet égard que ledit professionnel soit présente ces informations dans d’autres documents accessibles sur ledit site ou dans d’autres onglets de celui-ci, soit fournisse au consommateur lesdites informations lors de la conclusion du contrat soumis auxdites conditions générales au moyen d’un document distinct de celles-ci.

Les faits. Une banque coopérative exploite un site internet par l’intermédiaire duquel aucun contrat ne peut être conclu. Dans les mentions légales de ce site figure l’information selon laquelle la banque se soumet ou est soumise à une procédure de règlement des litiges devant une entité de médiation des litiges de consommation. En outre, il est possible de télécharger à partir de ce site les conditions générales des contrats que la banque conclut avec les consommateurs. Ces conditions générales ne contiennent aucune information relative à la soumission de la banque à une telle procédure de règlement des litiges. Par ailleurs, lorsque la banque conclut avec un consommateur un contrat soumis aux conditions générales en cause, ce consommateur reçoit, outre le document contenant lesdites conditions générales, les conditions tarifaires, également établies par la banque, au verso desquelles celle-ci informe le consommateur qu’elle se soumet à une procédure de règlement des litiges.

Un litige est né sur l’obligation pour la banque de faire figurer ces mentions directement sur son site. Le juge allemand a alors posé des questions préjudicielles à la CJUE.

La décision. Aux termes de l’article 13 § 2 de la Directive n° 2013/11 (N° Lexbase : L5054IXH), « les informations relatives à l’entité ou aux entités de règlement extrajudiciaire des litiges dont le professionnel relève, visées au paragraphe 1 de l’article 13 de cette Directive, doivent être « claires, compréhensibles et aisément accessibles sur le site internet du professionnel, quand il en a un, et, le cas échéant, dans les conditions générales des contrats de vente ou de service conclus entre le professionnel et le consommateur ». Or, pour la CJUE, le libellé de cette disposition est sans équivoque et prévoit que ces informations doivent figurer « dans » les conditions générales, lorsqu’elles sont affichées sur le site internet du professionnel, et non pas dans d’autres documents accessibles sur ce site ou dans d’autres onglets de celui-ci. Il s’ensuit que, conformément à l’article 13 § 2 de la Directive, l’obligation d’information que cette disposition prévoit n’est pas satisfaite si le professionnel qui affiche les conditions générales sur son site internet omet d’y faire figurer lesdites informations mais les présente ailleurs sur ledit site.

En outre, il ressort de l’article 6 § 1, sous t), de la Directive n° 2011/83 (N° Lexbase : L2807IRE) que le consommateur doit être informé de la possibilité de recourir à une procédure extrajudiciaire de réclamation et de réparation à laquelle le professionnel est soumis ainsi que des modalités d’accès à celle-ci « avant » qu’il ne soit lié par un contrat à distance ou un contrat hors établissement ou par une offre du même type.

Ainsi, au regard tant des dispositions de la Directive n° 2013/11 que de celles de la Directive n° 2011/83, il n’est pas suffisant que le consommateur reçoive les informations sur le règlement extrajudiciaire des litiges visées à ces dispositions seulement au moment de la conclusion du contrat avec le professionnel, que ce soit dans le cadre des conditions générales du contrat ou dans un document distinct de celles-ci.

newsid:473943

Construction

[Brèves] Prise de possession + paiement du prix = présomption de réception tacite

Réf. : Cass. civ. 3, 25 juin 2020, n° 19-15.780, F-D (N° Lexbase : A70913PC)

Lecture: 4 min

N3965BYI

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la Commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 01 Juillet 2020

► La Cour de cassation poursuit la clarification de sa jurisprudence sur la caractérisation de la réception tacite ; la prise de possession de l’ouvrage et le paiement des travaux font présumer la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage de recevoir l’ouvrage.

Le législateur de 1978 a pris le soin de définir, à l’article 1792-6 du Code civil (N° Lexbase : L1926ABX), la réception comme un acte juridique, justement pour éviter, autant que possible, l’insécurité consécutive à la réception tacite. La réception tacite semble donc exclue. Mais il est des cas où il n’est pas possible d’établir cet acte contradictoirement, ce qui suscite un contentieux pour la réparation des désordres de la construction.

La Cour de cassation opère, comme l’illustre l’arrêt commenté confirmatif, à cet égard, d’une jurisprudence éculée (Cass. civ. 3, 6 novembre 1996, n° 94-21.598 N° Lexbase : A7681CNS, RDI 1997, p. 83), un contrôle de motivation des conditions d’existence d’une telle réception qu’elle a, très tôt, résumé à « la caractérisation de la volonté non équivoque du maître de recevoir l’ouvrage » (Cass. civ. 3, 4 octobre 1989, n° 88-12.061 N° Lexbase : A0797CGM). La formule est, depuis, reprise inlassablement.

Sont ainsi insuffisants, pris isolément, à caractériser une réception tacite, la prise de possession des lieux (Cass. civ. 1, 4 octobre 2000, n° 97-20.990 N° Lexbase : A7732AHT Constr. Urb. 2000, n° 298), le paiement du prix (Cass. civ. 3, 30 septembre 1998, n° 96-17.014 N° Lexbase : A5487AC9, Constr. Urb. 1998, com 409), la signature d’une déclaration d’achèvement des travaux et d’un certificat de conformité (Cass. civ. 3, 11 mai 2000, n° 98-21.431 N° Lexbase : A4667CRB, AJDI, 2000, 741), des difficultés financières (CA Metz, 12 mars 2003) l’achèvement de l’ouvrage (Cass. civ. 3, 25 janvier 2011, n° 10-30.617, F-D N° Lexbase : A8600GQL), la succession d’une entreprise à une autre (Cass. civ. 3, 19 mai 2016, n° 15-17.129, FS-P+B N° Lexbase : A0851RQL) le paiement du solde dû à l’entreprise (Cass. civ. 3, 22 juin 1994, n° 90-11.774 N° Lexbase : A6284ABD), surtout lorsque des réserves importantes sont émises par le maître d’ouvrage (Cass. civ. 3, 10 juillet 1991, n° 89-21.825 N° Lexbase : A2841ABT, Bull. civ. III, n°204).

Mais, la prise de possession des lieux doublée du paiement complet du prix peut suffire à caractériser cette volonté (Cass. civ. 3, 18 mai 2017, n° 16-11.260, FS-P+B N° Lexbase : A4987WD3) même si les travaux ne sont pas achevés (Cass. civ. 3, 8 novembre 2006, JCP G 2006, IV, 3336). C’est ainsi que depuis une jurisprudence amorcée le 24 novembre 2016 (Cass. civ. 3, 24 novembre 2016, n° 15-25.415, FS-P+B N° Lexbase : A3460SLQ) clairement confirmée en 2019 (Cass. civ. 3, 30 janvier 2019, n° 18-10.197, FS-P+B+I N° Lexbase : A5083YUS ; Cass. civ. 3, 18 avril 2019, n° 18-13.734, FS-P+B+I N° Lexbase : A3818Y9B), la réception tacite est présumée lorsqu’il y a paiement intégral du prix et prise de possession. La Haute juridiction y tient. Elle a déjà eu l’occasion d’y revenir cette année (Cass. civ. 3, 5 mars 2020, n° 19-13.024, FS-D N° Lexbase : A54163IG, obs. J. Mel, Lexbase, éd. priv., n° 819 N° Lexbase : N2886BYK) et réitère en l’espèce.

Des particuliers commandent un bungalow en bois installé le 13 mai 2014 et dont le solde du prix a été réglé le 20 juin 2014. Se plaignant de désordres, ils assignent l’entreprise aux fins d’indemnisation. Les conseillers d’appel avaient considéré que l’ouvrage n’avait pu être réceptionné pour être inachevé.

La Haute juridiction censure. D’un côté, l’achèvement n’est pas une condition de la réception. De l’autre, la prise de possession et le paiement des travaux font présumer la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage de recevoir l’ouvrage, avec ou sans réserve.

Cette décision s’inscrit dans le droit fil de la jurisprudence de la troisième chambre civile.

 

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Contrats et obligations

[Brèves] Restitution du prix consécutive à la résolution d'un contrat de vente incombant exclusivement au vendeur : rejet de la caractérisation de préjudice indemnisable

Réf. : Cass. civ. 2, 25 juin 2020, n° 17-24.189, F-D (N° Lexbase : A70373PC)

Lecture: 4 min

N3935BYE

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par Manon Rouanne

Le 01 Juillet 2020

La restitution du prix de vente par le vendeur à l’acheteur à la suite de l’action rédhibitoire exercée du fait de la mise en œuvre de la garantie contre les vices cachés ne constitue pas un préjudice indemnisable, de sorte que l’assureur du constructeur ne peut être condamné, à la suite de la résolution du contrat de vente conclu entre le vendeur intermédiaire et l’acheteur, à payer à ce dernier une somme correspondant au prix du bien objet du contrat et à garantir le vendeur de cette condamnation.

Résumé des faits. En l’espèce, une société ayant pour objet social la construction de bateaux a vendu un navire à une autre société, laquelle l’a revendu à un particulier. L’acheteur, ayant constaté, lors d'une navigation, la présence d'eau à l'intérieur du voilier en a informé, six mois après la livraison de ce bateau, le vendeur. L’expertise diligentée de ce fait ayant conclu à un vice dans la conception et la réalisation de la liaison entre la coque et la quille du bateau, l’acheteur a assigné son vendeur sur le fondement de la garantie contre les vices cachés en exerçant l’action rédhibitoire ayant pour conséquence la résolution de la vente et la restitution du prix et sollicité le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice qui en résulte.

En cause d’appel. La cour d’appel ayant prononcé la résolution de la vente et, alors, condamné in solidum, le vendeur et l’assureur du constructeur à payer une somme incluant, outre les dommages et intérêts réparant le préjudice subi, le prix de la vente du navire devant être restitué, ce dernier, condamné également à garantir le vendeur des condamnations prononcées à son encontre, a contesté la position adoptée par les juges du fond devant la Cour de cassation.

A hauteur de cassation. S’opposant à sa condamnation d’avoir à payer à l’acheteur une somme incluant le prix du navire, l’assureur du constructeur a allégué, comme moyen au pourvoi, que la restitution du prix consécutive à la résolution de la vente ne constitue pas un préjudice indemnisable, de sorte qu’en tant qu’assureur responsabilité civile du constructeur, il ne devait pas être tenu de restituer le prix du navire, obligation devant incomber exclusivement au vendeur. Dans le même sens, le demandeur au pourvoi a argué que, dès lors que la restitution du prix, résultant de la résolution d’un contrat de vente, est la contrepartie de la remise de la chose par l'acquéreur et qu'ainsi, seul celui auquel la chose est rendue doit restituer à ce dernier le prix qu'il en a reçu, il en résulte, qu'à la suite de l’action rédhibitoire exercée par l'acquéreur final ayant mis en jeu la garantie contre les vices cachés à l’encontre du vendeur intermédiaire, seul ce dernier pouvait être condamné à restituer le prix et était concerné par la remise de la chose, à l’exclusion du constructeur, vendeur initial.

Décision. Rejoignant l’argumentaire développé par le demandeur au pourvoi, la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la cour d’appel. Sans remettre en cause le jeu de l’action en garantie contre les vices cachés entraînant, du fait de l’exercice de l’action rédhibitoire, la résolution du contrat de vente et après avoir retenu que les juges du fond avaient relevé que l’assureur du constructeur était contractuellement tenu de garantir son assuré « contre les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant lui incomber en raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers y compris les clients… », la Haute juridiction affirme, à l’instar du demandeur, que la restitution du prix résultant de la résolution du contrat ne constitue pas un préjudice indemnisable, de sorte que ce dernier ne pouvait, à la suite de la résolution de la vente conclue entre le vendeur intermédiaire et l’acheteur, être condamné à payer à ce dernier une somme incluant le remboursement du prix du navire, et à garantir le vendeur de cette condamnation.

 

 

newsid:473935

Droit des étrangers

[Brèves] Assistance de l'interprète par l'intermédiaire de moyens de télécommunication : la Cour de cassation rappelle l’exigence de nécessité

Réf. : Cass. civ. 1, 24 juin 2020, n° 18-22.543, F-P+B (N° Lexbase : A69943PQ)

Lecture: 3 min

N3897BYY

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par Marie Le Guerroué

Le 03 Juillet 2020

Lorsqu'il est prévu qu'une décision ou une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend par l'intermédiaire d'un interprète, cette assistance ne peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication qu’en cas de nécessité ; tel n’est pas le cas lorsque le recours à l'interprétariat par téléphone résultait, d’une part, de ce que l’interprète ne se tenait pas dans les locaux de la gendarmerie à la disposition de l’agent notificateur, d’autre part, de ce que l'intéressé s'était présenté volontairement pour satisfaire à son obligation de pointage (Cass. civ. 1, 24 juin 2020, n° 18-22.543, F-P+B N° Lexbase : A69943PQ).

Faits et procédure. Le 3 juillet 2018, un sri-lankais, en situation irrégulière en France, avait fait l'objet d'un arrêté de placement en rétention administrative, en exécution d'une décision portant obligation de quitter le territoire national du 7 mai précédent. Le 5 juillet 2018, le juge des libertés et de la détention a été saisi, par l'étranger, d'une requête en contestation de la régularité de la décision et, le lendemain, par le préfet, d'une requête en prolongation de la mesure.

Moyen. Le demandeur au pourvoi faisait grief à l’ordonnance de prolonger la mesure, alors :

« que l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication qu’en cas de nécessité ; qu’en énonçant que la nécessité du recours à l’interprétariat par téléphone résultait de ce que l’intéressé s’était présenté volontairement le 3 juillet 2018 à 14 h 30 dans le cadre de son obligation de pointage et que les gendarmes devaient donc l’entendre immédiatement sur sa volonté de quitter la France, puis compte tenu du refus opposé, sur son placement en rétention, le délégué du premier président a statué par des motifs impropres à caractériser la nécessité d’un interprétariat par téléphone et ainsi violé l’article L.111-8 du CESEDA (N° Lexbase : L6642KDD)».

Réponse de la Cour. La Cour déduit de l’article L. 111-8 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que, lorsqu'il est prévu qu'une décision ou une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend par l'intermédiaire d'un interprète, cette assistance ne peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication qu’en cas de nécessité. Pour prolonger la mesure à l’égard de l’intéressé, l’ordonnance retient, par motifs propres et adoptés, que la procédure de notification de la décision de placement en rétention est régulière dès lors que la nécessité du recours à l'interprétariat par téléphone résultait, d’une part, de ce que l’interprète ne se tenait pas dans les locaux de la gendarmerie à la disposition de l’agent notificateur, d’autre part, de ce que l'intéressé s'était présenté volontairement pour satisfaire à son obligation de pointage et devait donc être entendu immédiatement sur sa volonté de quitter la France, puis, compte tenu du refus opposé, sur son placement en rétention.

Elle conclut qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la nécessité d’une assistance de l'interprète par l'intermédiaire de moyens de télécommunication, le premier président a privé sa décision de base légale.

Cassation. La Cour casse et annule, en toutes ses dispositions, l'ordonnance précédemment rendue.

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Procédure civile

[Brèves] Procédure à bref délai : sanction de l’obligation de notification de la déclaration d’appel à l’avocat de l’intimé

Réf. : Cass. civ. 2, 2 juillet 2020, n° 19-16.336, F-P+B+I (N° Lexbase : A57183QT)

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N3983BY8

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 08 Juillet 2020

L’obligation faite à l’appelant de notifier la déclaration d’appel à l’avocat que l’intimé a préalablement constitué, dans le délai de dix jours de la réception de l’avis de fixation adressé par le greffe, n’est pas prescrite à peine de caducité de la déclaration d’appel ; en ce sens, la Cour de cassation avait rendu trois avis (Cass. avis, 12 juillet 2018, trois avis, n° 15010 N° Lexbase : A9885XXE, n° 15011 N° Lexbase : A9193XXR, n° 15012 N° Lexbase : A9194XXS) ;

Encourt la censure l’arrêt qui retient que la sanction de la caducité prévue à l’article 905-1 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L7035LEB), s’applique de manière identique selon que l’appelant procède par voie de signification de la déclaration d’appel ou par voie de simple notification entre avocats.

Faits et procédure. Dans cette affaire, la défenderesse a interjeté appel du jugement rendu à son encontre par le tribunal d’instance, ordonnant la saisie de ses rémunérations. Le greffe a adressé un avis de fixation à bref délai à l’appelant le 6 décembre 2017. La partie intimée a soulevé le 18 janvier 2018, la caducité de la déclaration d’appel faute pour l’appelante d’avoir notifié à son conseil préalablement constitué, la déclaration d’appel, dans les délais requis.

Le pourvoi. La demanderesse au pourvoi fait grief à l’arrêt rendu le 4 juillet 2018, par la cour d'appel de Toulouse, d’avoir violé les articles 905-1 du Code de procédure civile et l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L7558AIR), en prononçant la caducité de la déclaration d’appel, compte tenu du fait qu’elle n’avait pas notifié à l’avocat que l’intimé a préalablement constitué, la déclaration d’appel dans le délai de dix jours à compter de l’avis de fixation adressé par le greffe. Elle énonce que cette obligation n’est pas prescrite à peine de caducité.

Solution de la Cour. Énonçant la solution précitée aux visas des articles 905-1 du Code de procédure civile et l’article 6 § 1 de la CESDH, la Cour suprême casse et annule l’arrêt d’appel, en toutes ses dispositions.

 

Point pratique : il convient de préciser que c’est la déclaration d’appel qui doit être signifiée ou notifiée et non l’avis du greffe ; en ce sens, la Cour suprême s’est déjà prononcée (Cass. civ. 2, 1er juin 2017, n° 16-18.212, F-P+B N° Lexbase : A2584WGS). En pratique, nous aurons tendance à signifier les deux en même temps. V. ETUDE : Les délais de procédure devant la cour d'appel, in Procédure civile, Lexbase (N° Lexbase : E5674EYS).

Cet arrêt fera l'objet dans la prochaine revue Lexbase Privé d'un commentaire groupé avec l’arrêt n° 19-14.745, rédigé par Y.-J. Ratineau, Maître de conférences à l’Université Grenoble Alpes.

 

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