Le Quotidien du 13 décembre 2019

Le Quotidien

Avocats/Institutions représentatives

[Brèves] Personnalité morale des barreaux : le pouvoir réglementaire n’a pas à prévoir les formalités à accomplir

Réf. : CE, 6 ch., 20 novembre 2019, n° 420772 (N° Lexbase : A0243Z3E)

Lecture: 2 min

N1473BY9

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par Marie Le Guerroué

Le 05 Décembre 2019

► Le pouvoir réglementaire n’a pas à intervenir afin de prévoir les formalités que chaque barreau doit accomplir pour "acquérir effectivement la personnalité civile que la loi lui reconnaît".

Telle est la précision apportée par le Conseil d’Etat dans une décision rendue le 20 novembre 2019 (CE, 6 ch., 20 novembre 2019, n° 420772 N° Lexbase : A0243Z3E).

Espèce. En l’espèce, l’Association Grand Barreau de France demandait au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande tendant à l'édiction d'un décret en Conseil d'Etat précisant les modalités d'application du premier alinéa de l'article 21 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (N° Lexbase : L6343AGZ).

Décision. Le Conseil d’Etat énonce les dispositions applicables, il en déduit que pour chaque tribunal de grande instance, le législateur a prévu l'existence de "barreaux", personnes privées chargées de missions de service public, formés de tous les avocats inscrits au tableau établis près de ce tribunal de grande instance. Il en a précisément défini les missions, à l'article 17 de la loi du 31 décembre 1971, et les a dotés de la personnalité morale, à l'article 21 de cette même loi. En vertu de la loi également, chaque barreau est administré par un conseil de l'ordre, dont la composition et le mode d'élection sont précisés par le décret du 27 novembre 1991. Contrairement à ce que soutient l'association requérante, les dispositions législatives et réglementaires en vigueur ont ainsi suffisamment déterminé la forme sociale spécifique ainsi que les missions des barreaux.

Rejet. Par suite, pour la Haute Cour, le moyen tiré de ce que le pouvoir réglementaire avait été tenu, en complément des textes existants, d'intervenir afin de prévoir les formalités que chaque barreau doit accomplir pour "acquérir effectivement la personnalité civile que la loi lui reconnaît" ne peut qu'être écarté. La requête de l'association requérante est donc rejetée (cf. l’Ouvrage «La profession d’avocat» N° Lexbase : E9302ETP).
 

 

 

 

newsid:471473

Données personnelles

[Brèves] Droit au déréférencement : le Conseil d’Etat donne le mode d’emploi

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 6 décembre 2019, huit arrêts, n° 395335 (N° Lexbase : A3025Z78) et n° 401258 (N° Lexbase : A3028Z7B), publiés au recueil Lebon ; n° 393769 (N° Lexbase : A3024Z77) ; n° 403868 (N° Lexbase : A3029Z7C) ; n° 405464 (N° Lexbase : A3030Z7D) ; n° 405910 (N° Lexbase : A3031Z7E) ; n° 409212 (N° Lexbase : A3033Z7H) et n° 429154 (N° Lexbase : A3036Z7L), mentionnés dans les tables du recueil Lebon

Lecture: 5 min

N1566BYN

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par Vincent Téchené

Le 11 Décembre 2019

► Lorsque des liens mènent vers des pages web contenant des données à caractère personnel relevant des catégories particulières visées à l’article 8 § 1 de la Directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 (N° Lexbase : L8240AUQ), abrogé et remplacé par l’article 9 du "RGPD" (Règlement n° 2016/679 du 27 avril 2016 N° Lexbase : L0189K8I), l’ingérence dans les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel de la personne concernée est susceptible d’être particulièrement grave en raison de la sensibilité de ces données ;

► Il s’ensuit qu’il appartient en principe à la CNIL, saisie par une personne d’une demande tendant à ce qu’elle mette l’exploitant d’un moteur de recherche en demeure de procéder au déréférencement de liens renvoyant vers des pages web, publiées par des tiers et contenant des données personnelles relevant de catégories particulières la concernant, de faire droit à cette demande et il n’en va autrement que s’il apparaît, compte tenu du droit à la liberté d’information, que l’accès à une telle information à partir d’une recherche portant sur le nom de cette personne est strictement nécessaire à l’information du public ;

► Pour apprécier s’il peut être légalement fait échec au droit au déréférencement au motif que l’accès à des données à caractère personnel relevant de catégories particulières à partir d’une recherche portant sur le nom de la personne concernée est strictement nécessaire à l’information du public, il incombe à la CNIL de tenir notamment compte, d’une part, de la nature des données en cause, de leur contenu, de leur caractère plus ou moins objectif, de leur exactitude, de leur source, des conditions et de la date de leur mise en ligne et des répercussions que leur référencement est susceptible d’avoir pour la personne concernée et, d’autre part, de la notoriété de cette personne, de son rôle dans la vie publique et de sa fonction dans la société ; il lui incombe également de prendre en compte la possibilité d’accéder aux mêmes informations à partir d’une recherche portant sur des mots-clés ne mentionnant pas le nom de la personne concernée.

Tel est le principal enseignement issu de huit arrêts rendus par le Conseil d’Etat le 6 décembre 2019 (CE 9° et 10° ch.-r., 6 décembre 2019, huit arrêts, n° 395335 N° Lexbase : A3025Z78 et n° 401258 N° Lexbase : A3028Z7B, publiés au recueil Lebon ; n° 393769 N° Lexbase : A3024Z77 ; 403868 N° Lexbase : A3029Z7C ; n° 405464 N° Lexbase : A3030Z7D ; n° 405910 N° Lexbase : A3031Z7E ; n° 409212 N° Lexbase : A3033Z7H et n° 429154 N° Lexbase : A3036Z7L, mentionnés dans les tables du recueil Lebon)

Précisions. Ces décisions du 6 décembre 2019 ont été adoptées à la lumière de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne rendu le 24 septembre 2019 (CJUE, 24 septembre 2019, aff. C-136/17 N° Lexbase : A3916ZPQ ; lire les obs. de C. Le Goffic N° Lexbase : N0703BYP) en réponse à une question du Conseil d’Etat (CE 9° et 10° ch.-r., 19 juillet 2017, n° 399922, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2056WNH). Elles définissent, sur le fondement du «RGPD», le cadre dans lequel un exploitant de moteur de recherche doit, sous le contrôle de la CNIL, respecter le droit au déréférencement.

Dans trois des affaires jugées par le Conseil, il convient de souligner qu’il précise également que dans l’hypothèse particulière où le lien mène vers une page web faisant état d’une étape d’une procédure judiciaire ne correspondant plus à la situation judiciaire actuelle de la personne concernée mais qu’il apparaît, au terme de la mise en balance effectuée dans les conditions énoncées au point précédent, que le maintien de son référencement est strictement nécessaire à l’information du public, l’exploitant d’un moteur de recherche est tenu, au plus tard à l’occasion de la demande de déréférencement, d’aménager la liste de résultats de telle sorte que les liens litigieux soient précédés sur cette liste de résultats d’au moins un lien menant vers une ou des pages web comportant des informations à jour, afin que l’image qui en résulte reflète exactement la situation judiciaire actuelle de la personne concernée (cf. not., CE 9° et 10° ch.-r., 6 décembre 2019, n° 401258).

Par ailleurs, dans cinq d’affaires pour des faits similaires, Google avait pris les devants, en procédant aux déréférencements demandés. Le Conseil d’Etat a alors constaté le non-lieu à statuer, les requérants ayant déjà obtenu satisfaction (CE 9° et 10° ch.-r., 6 décembre 2019, cinq arrêts, n° 391000, mentionné dans les tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3023Z74 ; n° 397755 N° Lexbase : A3026Z79 n° 399999 N° Lexbase : A3027Z7A ; n° 407776 N° Lexbase : A3032Z7G et n° n° 423326 N° Lexbase : A3035Z7K, inédits au recueil Lebon).

Observations. Dernièrement, la Cour de cassation est venue appliquer les principes dégagés par la CJUE dans son arrêt du 24 septembre 2019 (Cass. civ. 1, 27 novembre 2019, n° 18-14.675, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A3520Z47 ; lire N° Lexbase : N1400BYI). Cinq ans et demi après la consécration du droit à l’oubli par l’arrêt «Goolgle c/ Spain» (CJUE, 13 mai 2014, aff. C-131/12 N° Lexbase : A9704MKM ; lire l’interview de Ch. Féral-Schul N° Lexbase : N2455BUH) et un an et demi après l’entrée en vigueur du «RGPD», la jurisprudence européenne (v. également, not. CJUE, 24 septembre 2019, aff. C-507/17 N° Lexbase : A3917ZPR précisant la portée territoriale du déréférencement) et nationale construisent donc un vrai régime juridique du droit au déréférencement.

newsid:471566

Droit du sport

[Brèves] Possibilité donnée aux fédérations sportives de fixer un «salary cap» : non-renvoi de la QPC

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 11 décembre 2019, n° 434826, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A7854Z7Z)

Lecture: 3 min

N1585BYD

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par Yann Le Foll

Le 18 Décembre 2019

Les dispositions du Code du sport qui permettent aux fédérations sportives de fixer un plafond des rémunérations versées aux sportifs ne sont pas contraires à la Constitution.

Telle est la solution d’un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 11 décembre 2019 (CE 2° et 7° ch.-r., 11 décembre 2019, n° 434826, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A7854Z7Z).

Faits. L’article L. 131-16 du Code du sport (N° Lexbase : L1545LDL) permet aux fédérations de fixer des conditions à la participation aux compétitions qu’elles organisent. Il prévoit, à ce titre, la possibilité pour les fédérations de déterminer le montant maximal des rémunérations versées aux sportifs par chaque société ou association sportive (dispositif dit «salary cap»).

La société Montpellier Hérault Rugby Club soutenait que le principe d’un tel plafonnement des rémunérations méconnaissait la liberté d’entreprendre, la liberté d’association et la liberté contractuelle.

Contexte. Le Conseil d’Etat rappelle la possibilité pour le législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle des limitations justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi. Rappelons que le Conseil d'Etat a toujours accepté des limites à l'exercice de la liberté de l'industrie et du commerce. Tel est classiquement le cas lorsqu'elles sont justifiées par la loi elle-même (CE, Sect., 23 octobre 1981, n° 23994, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A5417AKT), par l'ordre public (CE 2° et 7° s-s-r., 15 mai 2009, n° 311082, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9622EGH), par "un intérêt public" associé à des raisons de circonstances particulières de temps et de lieu (CE, 30 mai 1930, n° 06781 N° Lexbase : A0744B9G) (lire, Quelles interactions entre libertés économiques et droits de l'Homme au sein des systèmes juridiques ? - Questions à Véronique Champeil-Desplats, Professeure à l'Université de Paris Ouest-Nanterre, Lexbase, éd. pub., n° 337, 2014 N° Lexbase : N2697BUG).

Solution. La Haute juridiction relève que ces dispositions visent à garantir l’équité sportive des championnats, la stabilité et la bonne situation financières des sociétés ou associations sportives, et poursuivent donc un objectif d’intérêt général. Elle estime, ensuite, que la possibilité de fixer un salary cap ne porte pas d’atteinte disproportionnée à la liberté contractuelle ni à la liberté d’entreprendre, et qu’il appartiendra au juge administratif de contrôler la mise en œuvre effective par les fédérations d’un tel plafonnement, et notamment le niveau du plafond retenu.

Le Conseil d’Etat, estimant dans ces conditions que la question de la constitutionnalité de l’article L. 131-16 du Code du sport ne revêtait pas un caractère sérieux, a décidé qu’il n’y avait pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

newsid:471585

Droit pénal international et européen

[Brèves] Mandat d’arrêt européen : les parquets français, suédois et belge sont des autorités indépendantes pouvant émettre les MAE

Réf. : CJUE, aff. jointes, C-566/19, PPU Parquet général du Grand-Duché de Luxembourg (N° Lexbase : A7837Z7E) et C-626/19, PPU Openbaar Ministerie, C-625/19 PPU (N° Lexbase : A7838Z7G) et C-627/19 PPU Openbaar Ministerie (N° Lexbase : A7839Z7H)

Lecture: 3 min

N1583BYB

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par June Perot

Le 12 Décembre 2019

► La Cour estime que les parquets français, suédois et belge répondent aux exigences requises pour émettre un mandat d’arrêt européen et clarifie également la portée de la protection juridictionnelle dont bénéficient les personnes visées par un tel mandat.

C’est ainsi que statue la CJUE dans plusieurs arrêts rendus le 12 décembre 2019 (CJUE, aff. jointes, C-566/19 PPU N° Lexbase : A7837Z7E et C-626/19 PPU, C-625/19 PPU N° Lexbase : A7838Z7G et C-627/19, PPU N° Lexbase : A7839Z7H).

A cette occasion, la CJUE complète sa jurisprudence récente (CJUE, 27 mai 2019, aff. C-508/18 N° Lexbase : A1496ZDR et aff. C-509/18 N° Lexbase : A1497ZDS ; v. à ce sujet, B. Thellier de Poncheville, Les autorités de poursuites : autorités judiciaires d’émission d’un mandat d’arrêt européen ?, Lexbase Pénal, juillet 2019 N° Lexbase : N9861BXI et ainsi que du 9 octobre 2019 (CJUE, 9 octobre 2019, aff. C-489/19 PPU, NJ N° Lexbase : A6387ZQM) sur la décision-cadre 2002/584, relative  au mandat d’arrêt européen, en apportant des indications sur l’exigence d’indépendance de l’«autorité  judiciaire d’émission» d’un mandat d’arrêt européen et sur l’exigence de protection juridictionnelle effective, qui doit être assurée aux personnes faisant l’objet d’un tel mandat d’arrêt

Dans les affaires au principal, des mandats d’arrêt européens avaient été émis par les parquets français (aff. C-566/19 PPU et C-626/19 PPU), suédois (aff. C-625/19 PPU) et belge (aff. C-627/19 PPU), aux fins, dans les trois premières affaires, de poursuites pénales et, dans le dernier cas, de l’exécution d’une peine. Se posait la question de leur exécution, laquelle dépendait, notamment, de la qualité d’«autorité judiciaire d’émission» de ces parquets respectifs.

Dans ses conclusions, l’avocat général appelait, en ce qui concerne la notion d’autorité judiciaire d’émission, à répondre comme suit : «Le ministère public ne peut pas être qualifié d’“autorité judiciaire d’émission" si, lorsqu’ils décident d’émettre un mandat d’arrêt européen, ses membres doivent se conformer aux instructions générales de politique pénale émises par le ministre de la Justice et contraignantes pour ce type de mandat ainsi qu’aux instructions de leurs supérieurs hiérarchiques».

Pour répondre à la question qui lui était posée, dans un premier temps, la Cour a examiné si le statut du parquet français lui confère une garantie d’indépendance suffisante pour émettre des mandats d’arrêt européens et a jugé que tel était le cas.

Dans un second temps, la Cour a précisé l’exigence posée dans sa jurisprudence récente, selon laquelle la décision d’émettre un mandat d’arrêt européen doit, lorsqu’elle est prise par une autorité qui participe à l’administration de la justice sans être une juridiction, pouvoir être soumise, dans l’Etat membre d’émission, à un recours juridictionnel respectant les exigences d’une protection juridictionnelle effective.

Pour comprendre le raisonnement opéré par la CJUE, le lecteur est invité à consulter le communiqué de presse particulièrement précis.

Rappelons également que la cour d’appel d’Aix-en-Provence a accepté de transmettre à la CJUE une question préjudicielle sur le statut du parquet français, ses garanties d’indépendance et donc sa capacité ou non à émettre un mandat d’arrêt européen (CA Aix-en-Provence, 15 octobre 2019, n° 2019/1986 N° Lexbase : A9069ZX8).

newsid:471583

Filiation

[Brèves] GPA : irrecevabilité, pour défaut manifeste de fondement, des requêtes tendant à contester le refus des autorités françaises de transcrire l’intégralité d’un acte de naissance étranger, pour autant qu’ils désignent la mère d’intention comme étant la mère

Réf. : CEDH, 12 décembre 2019, Req. 1462/18 et 17348/18, C. et E. c/ France (N° Lexbase : A7855Z73)

Lecture: 7 min

N1587BYG

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 09 Janvier 2020

Sont déclarées irrecevables, pour défaut manifeste de fondement, les requêtes tendant à contester le refus des autorités françaises de transcrire sur les registres de l’état civil français l’intégralité des actes de naissance d’enfants nés à l’étranger par gestation pour autrui (GPA) des gamètes du père d’intention et d’une tierce donneuse, pour autant qu’ils désignent la mère d’intention comme étant leur mère ;

en effet, le refus des autorités françaises n’est pas disproportionné dès lors que le droit interne offre une possibilité de reconnaissance du lien de filiation entre les enfants requérants et leur mère d’intention par la voie de l’adoption de l’enfant du conjoint, étant observé notamment que la durée moyenne d’obtention d’une décision n’est que de 4,1 mois en cas d’adoption plénière et de 4,7 mois en cas d’adoption simple.

C’est en ce sens que s’est prononcée la Cour européenne des droits de l’Homme, aux termes d’une décision rendue le 12 décembre 2019, qui s’inscrit dans la parfaite continuité de son avis rendu le 19 avril 2019, auquel se réfère expressément la Cour dans la présente décision du 12 décembre 2019 (CEDH, 12 décembre 2019, Req. 1462/18 et 17348/18, C. et E. c/ France N° Lexbase : A7855Z73 ; CEDH, 10 avril 2019, avis n° P16-2018-001 N° Lexbase : A7859Y8L).

♦ Pour rappel, la ligne directrice fixée par la CEDH dans l’avis du 19 avril 2019 est la suivante.

Pour le cas d’un enfant né à l’étranger par gestation pour autrui (GPA) et issu des gamètes du père d’intention et d’une tierce donneuse et alors que le lien de filiation entre l’enfant et le père d’intention a été reconnu en droit interne :

1° le droit au respect de la vie privée de l’enfant, au sens de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, requiert que le droit interne offre une possibilité de reconnaissance d’un lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention, désignée dans l’acte de naissance légalement établi à l’étranger comme étant la «mère légale» ;

le droit au respect de la vie privée de l’enfant ne requiert pas que cette reconnaissance se fasse par la transcription sur les registres de l’état civil de l’acte de naissance légalement établi à l’étranger ; elle peut se faire par une autre voie, telle l’adoption de l’enfant par la mère d’intention, à la condition que les modalités prévues par le droit interne garantissent l’effectivité et la célérité de sa mise en œuvre, conformément à l’intérêt supérieur de l’enfant..

En résumé : la CEDH est d’avis qu’un lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention doit pouvoir être établi, mais laisse les Etats décider du mode le plus adapté.

♦ Application à la situation d’espèce : la voie de l’adoption empêche de considérer le refus de transcription comme disproportionné par rapport aux buts poursuivis

En l’espèce, la Cour note que la situation des enfants requérants correspond précisément au cas de figure résultant de l’avis rendu par la CEDH.

Elle relève aussi que le droit interne offre une possibilité de reconnaissance du lien de filiation entre les enfants requérants et leur mère d’intention par la voie de l’adoption de l’enfant du conjoint. Cela ressort d’arrêts de la Cour de cassation du 5 juillet 2017, et la Cour ne voit aucune raison de douter des assurances fournies à cet égard par le Gouvernement. Certes, cette possibilité n’est établie de manière certaine que depuis le 5 juillet 2017, alors que l’enfant C. avait sept ans et que les enfants E. avaient trois ans, soit, selon toute vraisemblance, bien après la concrétisation du lien entre eux et leur mère d’intention.

Or, la Cour a précisé dans son avis consultatif du 10 avril 2019 qu’un mécanisme effectif permettant la reconnaissance d’un lien de filiation entre les enfants concernés et la mère d’intention doit exister au plus tard lorsque, selon l’appréciation des circonstances de chaque cas, le lien entre l’enfant et la mère d’intention s’est concrétisé.

Toutefois, la Cour estime qu’en l’espèce, ce n’est pas imposer aux enfants concernés un fardeau excessif que d’attendre des requérants qu’ils engagent maintenant une procédure d’adoption à cette fin. Elle observe notamment qu’il résulte des éléments produits par le Gouvernement que la durée moyenne d’obtention d’une décision n’est que de 4,1 mois en cas d’adoption plénière et de 4,7 mois en cas d’adoption simple.

Par conséquent, s’agissant du grief fondé sur l’article 8 de la CESDH (N° Lexbase : L4798AQR), la Cour conclut que le refus des autorités françaises de transcrire les actes de naissance étrangers des enfants requérants sur les registres de l’état civil français pour autant qu’ils désignent la mère d’intention comme étant leur mère n’est pas disproportionné par rapport aux buts poursuivis. Cette partie des requêtes est donc manifestement mal fondée.

Absence de discrimination

S’agissant du grief fondé sur l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8, la Cour précise que la différence entre «les autres enfants nés à l’étranger» et «les enfants nés d’une GPA à l’étranger» consiste uniquement en ce que les enfants nés d’une GPA ne peuvent obtenir la transcription intégrale de l’acte de naissance étranger et doivent passer par la voie de l’adoption. Elle note qu’il ressort des explications du Gouvernement que cette différence de traitement quant aux modalités d’établissement du lien maternel de filiation permet, en ce qu’il induit un contrôle juridictionnel, de s’assurer au regard des circonstances particulières de chaque cas qu’il est dans l’intérêt supérieur de l’enfant né d’une GPA qu’un tel lien soit établi à l’égard de la mère d’intention.

Elle rappelle aussi qu’elle a indiqué dans son avis consultatif du 10 avril 2019 que le choix des moyens à mettre en œuvre pour permettre la reconnaissance du lien enfant-parents d’intention tombait dans la marge d’appréciation des Etats et que l’article 8 ne mettait pas à leur charge une obligation générale de reconnaître dès le début un lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention. Par conséquent, la différence de traitement dénoncée repose sur une justification objective et raisonnable. Cette partie des requêtes est donc manifestement mal fondée.

Comparaison avec l’Affaire «Mennesson»

On relèvera que si, dans son arrêt du 4 octobre 2019 (Ass. Plén., 4 octobre 2019, n° 10-19.053, P+B+R+I), l’Assemblée plénière de la Cour de cassation, suivant l’avis de la CEDH du 10 avril 2019, a admis la transcription de la filiation à l’égard de la mère d’intention sur les registres d’état civil, il faut rappeler que «cette solution est et restera exceptionnelle», compte tenu des circonstances très particulières de l’affaire, comme le relevait le Professeur Adeline Gouttenoire, dans son commentaire de la décision du 4 octobre 2019 (La transcription intégrale des actes de naissance sur les registres d’état civil dans l’affaire «Mennesson» : une solution d’espèce dans un arrêt de principe, Lexbase, éd. priv., n° 800, 2019 N° Lexbase : N0904BY7).

newsid:471587

Marchés publics

[Brèves] Impossiblité de rechercher la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre concernant les prestations indissociables de la réalisation de l'ouvrage après la réception de celui-ci

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 2 décembre 2019, n° 423544, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6407Z43)

Lecture: 2 min

N1547BYX

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par Yann Le Foll

Le 11 Décembre 2019

► La responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre concernant les prestations indissociables de la réalisation de l'ouvrage ne peut être recherchée après la réception de celui-ci.

 

Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 2 décembre 2019 (CE 2° et 7° ch.-r., 2 décembre 2019, n° 423544, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6407Z43).

 

 

Faits. Pour estimer que le centre hospitalier Francis Vals était fondé à demander la condamnation solidaire de la société Guervilly, de la société Pujol et de la société Bati Structure Ouest à le garantir de la condamnation prononcée à son encontre au titre du surcoût de construction, la cour administrative d'appel de Marseille (CAA Marseille, 2 juillet 2018, n° 12MA02540 N° Lexbase : A7147XXY) a, d'une part, relevé que ce surcoût était directement imputable à faute de conception de l'ouvrage des maîtres d'oeuvre et, d'autre part, estimé que ces derniers ne pouvaient se prévaloir de la réception de l'ouvrage ni du caractère définitif du décompte du marché de travaux.

 

 

Rappel. La réception met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage (CE, 6 avril 2007, n° 264490 N° Lexbase : A9305DU8) et le principe de son unicité est fermement établi par le juge administratif (CE, 27 septembre 2006, n° 269925 N° Lexbase : A3341DR8).

 

 

Solution. La réception de l'ouvrage met fin aux rapports contractuels entre le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre en ce qui concerne les prestations indissociables de la réalisation de l'ouvrage, au nombre desquelles figurent, notamment, les missions de conception de cet ouvrage. 

 

En justifiant par le fait que la réception de l'ouvrage n'a pas pour objet de constater les éventuelles fautes de conception imputables au maître d'oeuvre de l'opération, lesquelles ont vocation à être constatées et réservées, le cas échéant, à l'occasion de la réception des prestations du marché de maîtrise d'oeuvre, le constat que cette réception ne fait pas obstacle à ce que la responsabilité contractuelle des maîtres d'oeuvre soit recherchée à raison des fautes de conception qu'ils ont éventuellement commises, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit (cf. l'Ouvrage "Marchés publics" N° Lexbase : E1138EUP).

newsid:471547

Procédures fiscales

[Brèves] Application de la taxation d'office sans mise en demeure au contribuable ne s'étant acquitté d'aucune obligation déclarative rendant ainsi son activité occulte

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 4 décembre 2019, n° 420488, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A9649Z47)

Lecture: 2 min

N1516BYS

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par Marie-Claire Sgarra

Le 11 Décembre 2019

Dans le cas où un contribuable n’a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu’il était tenu de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, son activité est réputée occulte s’il n’est pas en mesure d’établir qu’il a commis une erreur justifiant qu’il ne se soit pas acquitté d’aucune de ses obligations déclaratives.

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 4 décembre 2019 (CE 9° et 10° ch.-r., 4 décembre 2019, n° 420488, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9649Z47).

En l’espèce, à l’issue d’un examen de sa situation fiscale personnelle et d’une vérification de comptabilité, le requérant a été assujetti à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes selon la procédure d’évaluation d’office prévue à l’article L. 73 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L0715ITN). Le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande de décharge de ces suppléments d’imposition. La cour administrative d’appel de Marseille a fait partiellement fait droit à l’appel formé contre ce jugement (CAA de Marseille, 8 mars 2018, n° 16MA04554 N° Lexbase : A2950XHQ).

L'administration fiscale a évalué d'office les revenus du requérant issus de son activité de joueur de poker exercée au cours des années 2008 à 2010 et imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, sans l'avoir préalablement mis en demeure de déposer les déclarations afférentes à cette activité.

En jugeant que l'administration n'était pas tenue de procéder à cette mise en demeure au motif que le requérant ne s'était pas fait connaître d'un centre de formalité des entreprises ou d'un greffe de tribunal de commerce et n'avait pas déposé la déclaration prévue à l'article 97 du Code général des impôts (N° Lexbase : L2027HLN) au titre des années en litige, alors que le contribuable établissait que l'absence de souscription de déclaration devait être regardée comme une erreur justifiant qu'il ne se soit pas acquitté de ses obligations dès lors que ce n'est que postérieurement aux années d'imposition en litige que la jurisprudence et l'administration fiscale ont expressément estimé que de tels gains étaient, dans certaines conditions, imposables à l'impôt sur le revenu, la cour a commis une erreur de droit.

 

newsid:471516

Salariés protégés

[Brèves] Décompte du délai de recours contentieux après l’échec d’un recours hiérarchique dans le cadre du licenciement d’un salarié protégé

Réf. : CE 1° et 4° ch.-r., 2 décembre 2019, n° 415470, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6396Z4N)

Lecture: 2 min

N1532BYE

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Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/55170937-edition-du-13122019#article-471532
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par Charlotte Moronval

Le 12 Décembre 2019

► Les délais de recours contre une décision administrative prise en matière d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, soit dans sa notification si la décision est expresse, soit dans l'accusé de réception de la demande l'ayant fait naître si elle est implicite ; il en va ainsi alors même que la décision du ministre du Travail, prise à la suite de l'exercice d'un recours hiérarchique qui n'est pas un préalable obligatoire au recours contentieux, ne se substitue pas à la décision de l'inspecteur du travail qui a fait l'objet de ce recours.

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 2 décembre 2019 (CE 1° et 4° ch.-r., 2 décembre 2019, n° 415470, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6396Z4N ; voir déjà CE, 7 décembre 2015, n° 387872 N° Lexbase : A0450NZP).

Faits et procédure. Un salarié, délégué du personnel, est licencié pour faute grave à la suite d’une violente altercation avec un collège. Il conteste la décision de l’inspectrice du travail d’autoriser la rupture de son contrat de travail en exerçant un recours hiérarchique, puis, à la suite du rejet de sa demande, un recours contentieux.

La présidente du tribunal administratif rejette la demande, jugeant celle-ci irrecevable au motif qu’elle n’était pas motivée et n’avait pas été régularisée avant l’expiration du délai de recours. Le salarié se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Paris (CAA Paris, 15 juin 2017, n° 15PA04495 N° Lexbase : A7093WIK) a rejeté son appel.

Solution. Enonçant la solution susvisée, les Hauts magistrats jugent que dès lors que l'accusé de réception du recours hiérarchique du salarié répondait aux conditions légales, le salarié disposait, pour contester la décision de l'inspectrice du travail, d'un délai de 2 mois à compter de la décision implicite de la ministre du Travail. En l’espèce, le ministre du Travail a respecté la procédure en adressant au salarié un accusé de réception du recours hiérarchique, dans lequel il avait informé l'intéressé qu'une décision implicite de rejet naîtrait le 23 juin 2015 en l'absence de décision expresse statuant sur son recours, et lui avait précisé les voies et délais de recours contre la décision expresse ou implicite à intervenir. Le salarié avait bien saisi le tribunal administratif dans les délais mais sa demande devait être rejetée, faute d’avoir été motivée (sur Le recours contentieux contre la décision de l'inspecteur du travail, cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E9587ESU).

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