Le Quotidien du 10 décembre 2019

Le Quotidien

Peines

[Brèves] Droits des détenus : la France doublement condamnée pour violences commises sur un détenu au moment de son transfert et défaut d’enquête effective

Réf. : CEDH, 5 décembre 2019, Req. 71670/14, J.M. c/ France (N° Lexbase : A9855Z4R)

Lecture: 5 min

N1498BY7

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par June Perot

Le 18 Décembre 2019

► La Cour européenne des droits de l’Homme a doublement condamné la France pour traitements inhumains et dégradants de la part des surveillants pénitentiaires et défaut d’enquête effective ;

elle estime en l’espèce que le requérant a bien subi des violences au cours de son transfert qui a duré 4 heures et durant lequel il était uniquement vêtu d’un tee-shirt et d’un drap pour cacher sa nudité ; elle relève par ailleurs que la crédibilité des témoignages des surveillants aurait dû être minutieusement vérifiée au cours de l’instruction, estimant de la sorte que le requérant n’a pas bénéficié d’une enquête effective.

C’est ainsi que statue la Cour européenne des droits de l’Homme dans un arrêt de chambre rendu le 5 décembre 2019 (CEDH, 5 décembre 2019, Req. 71670/14, J.M. c/ France N° Lexbase : A9855Z4R).

Résumé de l'affaire. Les faits de l’espèce concernaient un ressortissant français détenu qui, souhaitant être transféré vers un établissement pénitentiaire plus proche de sa famille, s’était scarifié le bras. Le médecin avait alors conseillé un transfert vers un autre centre. A la suite de divers incidents, c’est au cours d’un dernier transfert que celui-ci avait été victime de violences de la part du personnel pénitentiaire. Une enquête de flagrance avait alors été diligentée par le procureur et confiée à la gendarmerie nationale. L’enquête préliminaire se conclut par un classement sans suite au motif que les investigations n’avaient pas permis de caractériser l’infraction. A l’issue d’une enquête administrative interne diligentée le même jour, l’enquêteur conclut à la faute disciplinaire d’un surveillant responsable du transfert, du fait de la tenue du requérant, vêtu seulement d’un tee-shirt et d’un drap. Le surveillant fut condamné à une exclusion temporaire de ses fonctions. L’enquête de l’inspection générale des services pénitentiaires estima que, concernant les conditions du transfert, le surveillant aurait dû attendre l’ouverture du vestiaire et la remise de vêtements avant le départ pour l’autre centre.

L’intéressé a déposé une plainte avec constitution de partie civile pour actes de torture et de barbarie commis avec usage d’une arme par personnes dépositaires de l’autorité publique. Une information judiciaire fut alors ouverte. Le juge d’instruction a rendu une ordonnance de non-lieu, considérant que l’information n’avait pas permis de caractériser l’infraction dénoncée. L’intéressé a interjeté appel et la chambre de l’instruction a confirmé l’ordonnance de non-lieu. La Cour de cassation a par ailleurs rejeté le pourvoi (Cass. crim., 6 mai 2014, n° 13-81.522, F-D N° Lexbase : A9311MK3).

C’est dans ces conditions que l’intéressé a saisi la CEDH.

Violences infligées au détenu. Sur ce point, la Cour conclut à une violation de l’article 3 dans son volet matériel (N° Lexbase : L7558AIR). Outre les souffrances physiques supportées, la Cour considère que le traitement auquel le requérant a été soumis a engendré peur, angoisse et souffrance mentale. Elle observe d’ailleurs que le requérant se trouvait également dans un état de détresse psychique et était donc particulièrement vulnérable, ce qui pose la question de la nécessité de l’usage de la force à l’encontre de ce détenu. Elle énonce par ailleurs qu’il ne fait aucun doute «qu’un tel traitement a provoqué chez le requérant des sentiments d’arbitraire, d’infériorité, d’humiliation et d’angoisse. Ce traitement constitue un grave manque de respect pour sa dignité humaine. La circonstance qu’il n’avait pas pour but d’humilier ou de rabaisser le requérant n’exclut pas qu’il soit qualifié de dégradant et tombe ainsi également sous le coup de l’interdiction énoncée à l’article 3» (§ 99).

Défaut d’enquête effective. La Cour examine ensuite l’article 3 sous son angle procédural et conclut également à une violation. Elle prend bonne note de la célérité avec laquelle plusieurs enquêtes indépendantes ont été menées le jour-même. Toutefois, l’enquête n’a pas permis d’identifier et punir les responsables des violences constatées.

De l’avis de la Cour, le juge d’instruction, comme la chambre d’instruction, semblent avoir appliqué des critères différents lors de l’évaluation des témoignages, celui du requérant étant considéré comme subjectif, à l’inverse de ceux des surveillants. La crédibilité de ces derniers aurait dû être minutieusement vérifiée. D’autre part, certaines mesures nécessaires pour tenter d’éclaircir les faits n’ont pas été ordonnées. Ainsi, il n’a pas été ordonné d’expertise médicale et technique, afin de chercher à établir l’origine de la marque de strangulation constatée.

La Cour estime que le requérant n’a pas bénéficié d’une enquête effective et conclut à la violation du volet procédural de l’article 3.

newsid:471498

Avocats/Déontologie

[Brèves] Procédure d'arbitrage : possibilité d’invoquée à l'appui d'une demande indemnitaire la méconnaissance des dispositions du RIN

Réf. : Cass. civ. 1, 24 octobre 2019, n° 18-23.858, F-D (N° Lexbase : A6551ZSG)

Lecture: 4 min

N1457BYM

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par Marie Le Guerroué

Le 05 Décembre 2019

► La méconnaissance des dispositions du RIN peut être invoquée à l'appui d'une demande indemnitaire, à l'occasion de la procédure d'arbitrage du Bâtonnier prévue à l'article 21, alinéa 3, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ).

Tel est l’apport de la décision rendue par la Cour de cassation le 24 octobre 2019 (Cass. civ. 1, 24 octobre 2019, n° 18-23.858, F-D N° Lexbase : A6551ZSG).
Espèce. En l’espèce, un différend s'était élevé entre un avocat au barreau de Paris, et un avocat au barreau de Libourne, qui s'étaient succédé dans la défense des intérêts de leur client à l'occasion d'un litige successoral. Le premier avocat avait introduit une réclamation déontologique contre le second, laquelle avait abouti à un avis concluant à un manquement du second aux obligations de probité, d'honneur, de loyauté, de désintéressement, de confraternité, de délicatesse et de courtoisie prévues à l'article 1er du règlement intérieur national de la profession d'avocat (RIN). Aucune poursuite disciplinaire n'avait été engagée à la suite de cet avis. En application de l'article 21, alinéa 3, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, le premier avocat avait ensuite, sollicité l'arbitrage du Bâtonnier sur le différend l'opposant au second et demandé le paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1382, devenu 1240 du Code civil (N° Lexbase : L1353ABQ). Le président du Conseil national des barreaux avait confié cette mission d'arbitrage au Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Rouen.
Grief. Le second avocat fait grief à l'arrêt de le déclarer responsable des préjudices subis par le premier et de le condamner à payer une somme en réparation de son manque à gagner résultant d'une perte de chance, alors que le conseil de discipline institué dans le ressort de chaque cour d'appel dispose d'une compétence exclusive pour connaître des infractions et fautes commises par les avocats relevant des barreaux qui s'y trouvent établis. Le premier avocat prétendant qu’il aurait violé des règles déontologiques, notamment les articles 1er et 9 du RIN, avait saisi les instances disciplinaires. La procédure disciplinaire n'avait pas abouti dès lors que le procureur général de Bordeaux avait refusé d'engager des poursuites disciplinaires à l'encontre du second. Le premier avocat avait ensuite saisi les juges du fond de demandes indemnitaires en se prévalant encore des mêmes manquements disciplinaires. En déclarant recevables les demandes indemnitaires en "l'absence de poursuites disciplinaires et en conséquence de décision sur la ou les fautes déontologiques reprochées", la cour d'appel avait violé, par refus d'application, l'article 22 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ), ensemble l'article 179-1 du décret du 27 novembre 1991 (N° Lexbase : L8168AID) par fausse interprétation.
Décision. Selon la Cour de cassation, l'action disciplinaire prévue à l'article 22 de la loi du 31 décembre 1971 se distingue de l'action en responsabilité civile, la méconnaissance des dispositions du RIN peut être invoquée à l'appui d'une demande indemnitaire, à l'occasion de la procédure d'arbitrage du Bâtonnier prévue à l'article 21, alinéa 3, de la loi précitée. Dès lors, pour les juges du droit, saisie d'un recours contre la décision d'arbitrage rendue par le Bâtonnier, en application de l'article 179-6 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat (N° Lexbase : L8168AID), la cour d'appel a pu retenir l'existence d'un dénigrement et d'un manque de loyauté imputables au second avocat, pour allouer au premier une indemnisation sur le fondement de l'article 1382, devenu 1240 du Code civil (cf. l’Ouvrage «La profession d’avocat» N° Lexbase : E9257ETZ).

 

newsid:471457

Cotisations sociales

[Brèves] Réintégration des sommes versées en exécution de transactions conclues avec des salariés

Réf. : Cass. civ. 2, 28 novembre 2019, n° 18-22.807, F-P+B+I (N° Lexbase : A3577Z4A)

Lecture: 3 min

N1454BYI

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par Laïla Bedja

Le 06 Décembre 2019

► Selon l’article L. 242-1, alinéa 1er, du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4986LR4), dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2018-474 du 12 juin 2018 (N° Lexbase : L6986LKX), applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail ; les sommes versées en exécution des transactions conclues avec les salariés constituant un élément de rémunération versé en contrepartie ou à l'occasion du travail, elles entrent dans l'assiette des cotisations et contributions dues par la société.

Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 28 novembre 2019 (Cass. civ. 2, 28 novembre 2019, n° 18-22.807, F-P+B+I N° Lexbase : A3577Z4A).

En l’espèce, à la suite d'un contrôle de la société d'économie mixte des transports publics de l'agglomération grenobloise, établissement d'Echirolles, portant sur les années 2013 à 2015, l’URSSAF de Rhône-Alpes (l'URSSAF) a réintégré dans l'assiette des cotisations sociales des sommes versées aux salariés au titre de protocoles transactionnels.

Le tribunal des affaires de Sécurité sociale validant le redressement relatif à la réintégration des sommes versées dans le cadre de transaction, la société forme un pourvoi en cassation, selon le moyen que ces sommes sont exclues de l’assiette des cotisations de Sécurité sociale si elles indemnisent un préjudice. En l’espèce, il est constant que dans l'unique volonté d'un apaisement du climat social à la suite des élections professionnelles, la société a accepté de verser aux salariés une indemnité transactionnelle en réparation du préjudice qu'ils estimaient avoir subi du fait du refus de la société d'accorder des jours de repos complémentaires ou de compenser les heures de dotation vestimentaire.

Rappelant la règle précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi. Rappelant les dispositions de l’article 32 de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs, les premiers juges relèvent qu'à la suite de contestations portées par plusieurs salariés de la société devant les juridictions prud'homales afin d'obtenir des rappels de salaires sur des jours fériés, ainsi que le paiement du 1er mai 2008 ayant coïncidé avec le jour de l'Ascension et le paiement d'heures de récupération de leur dotation vestimentaire, des protocoles transactionnels ont été conclus. Ils retiennent, dès lors, que, quelle que soit la qualification retenue dans ces derniers, la somme versée aux salariés en exécution des protocoles constituait une rémunération, puisqu'elle était destinée à indemniser le jeudi de l'Ascension qui n'avait été ni payé, ni récupéré, ainsi que le temps passé à retirer la dotation habillement (sur Les indemnités de rupture soumises à cotisations sociales, cf. l’Ouvrage «Droit de la protection sociale» N° Lexbase : E0785EUM).

newsid:471454

Droit des étrangers

[Brèves] Absence d'assistance de l'avocat dans les procédures de refus d'entrée en France et de maintien en zone d'attente : conformité à la Constitution

Réf. : Cons. const., décision n° 2019-818 QPC, du 6 décembre 2019 (N° Lexbase : A9881Z4Q)

Lecture: 2 min

N1500BY9

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par Marie Le Guerroué

Le 23 Décembre 2019

► L'absence d'assistance de l'étranger par un avocat lors des auditions conduites à l'occasion de son entrée en France ou lors de son maintien en zone d'attente ne méconnaît pas la Constitution.

Telle est la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 6 décembre 2019 (Cons. const., décision n° 2019-818 QPC, du 6 décembre 2019 N° Lexbase : A9881Z4Q).

QPC. Selon la requérante, faute de prévoir que l'étranger peut exiger d'être assisté d'un avocat lorsqu'il est entendu par l'administration avant qu'un refus d'entrée en France lui soit opposé ou pendant son maintien en zone d'attente, les dispositions de l'article L. 213-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L1937LMP) dans sa rédaction résultant de la loi du 10 septembre 2018 (N° Lexbase : L9696LLP) et de l'article L. 221-4 (N° Lexbase : L2586KD7) du même code dans sa rédaction résultant de la loi du 29 juillet 2015 (N° Lexbase : L9673KCA) méconnaîtraient les droits de la défense ainsi que les exigences résultant des articles 7 (N° Lexbase : L1371A9N), 9 (N° Lexbase : L1373A9Q) et 16 (N° Lexbase : L1363A9D) de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 (N° Lexbase : L1370A9M). La question prioritaire de constitutionnalité portait donc sur les mots «ou le conseil de son choix» figurant à la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 213-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et «un conseil ou» figurant à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 221-4 du même code.

Décision. La Conseil énonce que, d'une part, les auditions effectuées dans le cadre de l'instruction administrative des décisions de refus d'entrée en France ou organisées pendant le maintien de l'étranger en zone d'attente n'ont pour objet que de permettre de vérifier que l'étranger satisfait aux conditions d'entrée en France et d'organiser à défaut son départ. Elles ne relèvent donc pas d'une procédure de recherche d'auteurs d'infractions. D'autre part, il énonce que la décision de refus d'entrée, celle de maintien en zone d'attente et celles relatives à l'organisation de son départ ne constituent pas des sanctions ayant le caractère de punition mais des mesures de police administrative. Dès lors, la circonstance que les auditions mentionnées ci-dessus puissent se dérouler sans l'assistance d'un avocat ne peut être contestée sur le fondement des articles 7, 9 et 16 de la Déclaration de 1789. Il ajoute, enfin, que l'étranger peut être assisté d'un avocat dans le cadre des instances juridictionnelles relatives à de telles mesures.

newsid:471500

Experts-comptables

[Brèves] Experts-comptables : inconstitutionnalité de la révocation automatique du sursis à l'exécution de la sanction disciplinaire en cas de prononcé d'une nouvelle sanction disciplinaire

Réf. : Cons. const., décision n° 2019-815 QPC, du 29 novembre 2019 (N° Lexbase : A8686Z34)

Lecture: 3 min

N1427BYI

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par Vincent Téchené

Le 04 Décembre 2019

► L’alinéa 10 de l’article 53 de l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 (N° Lexbase : L8059AIC), dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2016-1809 du 22 décembre 2016 (N° Lexbase : L9154LBN), qui prévoit, s’agissant des peines disciplinaires qui peuvent être prononcées à l’égard des experts-comptables, que le sursis assortissant une peine disciplinaire est automatiquement et obligatoirement révoqué en cas de nouvelle peine disciplinaire prononcée dans un délai de cinq ans, est contraire à la Constitution.

Tel est le sens d’une décision du Conseil constitutionnel du 29 novembre 2019 (Cons. const., décision n° 2019-815 QPC, du 29 novembre 2019 N° Lexbase : A8686Z34).

La QPC. La requérante soutenait en effet que cette disposition était contraire au principe, dès lors que le juge prononçant la nouvelle peine ne pouvait y faire échec ou moduler les effets de la révocation. Le Conseil d’Etat (CE 5° et 6° ch.-r., 2 octobre 2019, n° 432723, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A5131ZQ4) a donc renvoyé au Conseil constitutionnel la question de la conformité à la Constitution de l'article 53 de l'ordonnance du 19 septembre 1945, en tant qu'il prévoit que le prononcé d'une nouvelle sanction disciplinaire pour une infraction ou une faute commise au cours du délai d'épreuve emporte révocation automatique du sursis à l'exécution de la première sanction disciplinaire.

La décision. Le Conseil énonce qu’il résulte de la combinaison des dispositions contestées et de celles du décret n° 2012-432 du 30 mars 2012 (N° Lexbase : L6889ISX) que la révocation du sursis intervient pour toute nouvelle sanction disciplinaire. Une telle sanction peut être prononcée en raison d’une contravention aux lois et règlements qui régissent l’activité de l’expertise-comptable, d’une infraction aux règles professionnelles ou d’un manquement à la probité, à l’honneur ou à la délicatesse, même se rapportant à des faits non liés à l’activité professionnelle. Cette révocation peut donc intervenir quelles que soient la nature et la gravité du manquement sanctionné et de la peine prononcée. D’autre part, le délai d’épreuve durant lequel un tel manquement est susceptible d’entraîner cette révocation est de cinq ans. En outre, en vertu des dispositions contestées, le prononcé d’une nouvelle peine disciplinaire entraîne la révocation automatique du sursis sans que la juridiction disciplinaire puisse alors s’y opposer ou en moduler les effets. Dans ces conditions, eu égard à la gravité de la peine de suspension temporaire d’exercice professionnel, la disposition contestée, à savoir la seconde phrase du dixième alinéa de l’article 53 de l’ordonnance du 19 septembre 1945, méconnaît le principe d’individualisation des peines et doit donc être déclarée contraire à la Constitution.

Le Conseil précise que l’abrogation immédiate des dispositions contestées aurait pour effet de supprimer toute possibilité de révocation du sursis assortissant une peine disciplinaire de suspension. Afin de permettre au législateur de remédier à l’inconstitutionnalité constatée, la date de l’abrogation des dispositions contestées est reportée au 1er septembre 2020. Enfin, jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi, le juge disciplinaire peut décider que la peine qu’il prononce n’entraîne pas la révocation du sursis antérieurement accordé ou n’entraîne que sa révocation partielle.

newsid:471427

Responsabilité médicale

[Brèves] Absence de faute du médecin dès lors que la prise de précautions ne pouvait permettre d’écarter l’éventualité de la survenue d’une lésion inhérente à la technique utilisée

Réf. : Cass. civ. 1, 27 novembre 2019, n° 18-24.906, F-D (N° Lexbase : A3600Z44)

Lecture: 3 min

N1434BYR

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par Laïla Bedja

Le 04 Décembre 2019

► Il ne peut être reproché à un médecin d’avoir lésé un organe proche de celui qui était opéré dès lors qu’il apparaît que la prise de précautions ne pouvait permettre d’écarter l’éventualité de la survenue d’une lésion inhérente à la technique utilisée.

Telle est la solution retenue par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 27 novembre 2019 (Cass. civ. 1, 27 novembre 2019, n° 18-24.906, F-D N° Lexbase : A3600Z44).

Les faits. En l’espèce, Mme Y a subi, le 22 février 2010, une ligature des trompes sous coelioscopie, réalisée par M. Z, gynécologue obstétricien. Elle a ensuite présenté une hémorragie interne due à une section de l'artère iliaque primitive droite qui a nécessité une nouvelle intervention, compliquée par la survenue d'une sténose urétérale ayant conduit à la mise en place de sondes. Après une expertise sollicitée en référé, Mme Y a assigné le praticien en responsabilité et indemnisation.

La cour d’appel. Pour déclarer le praticien responsable des préjudices subis par la patiente et le condamner à lui payer différentes sommes en réparation de ses préjudices , après avoir repris les constatations de l'expert écartant toute faute du praticien et retenant que la lésion survenue, très rare, soit une pour 2 500 coelioscopies, était provoquée le plus souvent lors de l'introduction du trocart ombilical qui se faisait à l'aveugle et que, malgré les précautions, une telle blessure pouvait s'expliquer par la proximité plus ou moins grande des vaisseaux iliaques par rapport à l'ombilic, lieu d'introduction du trocart, la cour d’appel (CA Agen, 12 septembre 2018, n° 15/01162 N° Lexbase : A9353X3S) relève que M. Z, ayant porté atteinte à un organe non visé par l'intervention, doit prouver que cette artère présentait une anomalie ou une particularité physique rendant son atteinte inévitable, ce qu'il ne fait pas, que l'expert n'a pas analysé précisément le déroulement de l'opération, les techniques utilisées et leur pertinence, que le compte rendu opératoire versé au dossier ne démontre pas que le praticien a pris toutes les précautions pour prémunir sa patiente contre le risque survenu, alors que l'intervention ne constituait pas une intervention de routine, et que ce compte rendu n'a pas été complété par d'autres éléments en cours de procédure. Le praticien ne démontre donc pas que l’atteinte survenue constituait un risque inhérent à l’intervention pratiquée qui ne pouvait être maîtrisé.

Solution de la Cour de cassation. A tort. Enonçant la solution précitée, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt rendu par les juges du fond en violation avec l’article L. 1142-1, I, alinéa 1er du Code de la santé publique (cf. l’Ouvrage «Droit médical», Le régime de la faute imputable au médecin N° Lexbase : E5218E7E).

newsid:471434

Soins psychiatriques sans consentement

[Brèves] Soins psychiatriques sans consentement : les irrégularités de procédures peuvent être soulevées pour la première fois en cause d’appel

Réf. : Cass. civ. 1, 5 décembre 2019, n° 19-21.127, F-P+B+I (N° Lexbase : A9843Z4C)

Lecture: 2 min

N1499BY8

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par Laïla Bedja

Le 09 Décembre 2019

► Il résulte de la combinaison des article 563 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6716H7U) et L. 3211-12 (N° Lexbase : L6085LRS) du Code de la santé publique qu’il incombe au juge qui statue sur une mesure de soins psychiatriques sans consentement de répondre à l'ensemble des moyens, même soulevés pour la première fois en cause d'appel, à la seule exception des irrégularités antérieures à une instance où il a été statué sur une précédente demande.

Telle est la solution retenue par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 5 décembre 2019 (Cass. civ. 1, 5 décembre 2019, n° 19-21.127, F-P+B+I N° Lexbase : A9843Z4C).

En l’espèce, M. A. a été admis en soins psychiatriques sans consentement sur décision du représentant de l’Etat, en application de l’article L. 3213-1 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L3005IYX). Le préfet a saisi le juge des libertés et de la détention d’une demande aux fins de prolongation de la mesure sur le fondement de l’article L. 3211-12 du Code précité.

Le premier président de la cour d’appel, pour confirmer la validité de la procédure retient que, si les moyens tirés de la tardiveté de la notification de l'arrêté d'admission du préfet et du défaut de motivation de l'arrêté de maintien en soins psychiatriques ne constituent pas des exceptions de procédure soumises comme telles à l'article 74 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1293H4N), le législateur, en instaurant un contrôle systématique par le juge des libertés et de la détention de la régularité des décisions administratives, telles que les admissions en soins sans consentement, et toutes les décisions prises en application des articles L. 3211-1 et suivants du Code de la santé publique (N° Lexbase : L6971IQA), a entendu instaurer une purge de toutes les irrégularités de la procédure de soins psychiatriques sans consentement si bien qu'à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune irrégularité de la procédure de soins psychiatriques ne peut être soulevée lors d'une instance ultérieure. Elle en déduit qu'il convient de rejeter les moyens avancés par M. A. dès lors qu'ils n'ont pas été soutenus devant le juge des libertés et de la détention.

A tort. Enonçant la solution précitée, la Haute juridiction casse et annule l’ordonnance rendue par le premier président de la cour d’appel (cf. l’Ouvrage «Droit médical», Le contrôle des mesures d'admission en soins psychiatriques par le juge des libertés et de la détention N° Lexbase : E7544E9B).

newsid:471499

Urbanisme

[Brèves] Rejet d’une requête dirigée contre un permis de construire due à la régularisation par un permis modificatif : mise à la charge d’une commune des frais d’instance supportés par les requérants

Réf. : TA Versailles, 28 octobre 2019, n° 1605813 (N° Lexbase : A7445Z4I)

Lecture: 3 min

N1453BYH

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par Yann Le Foll

Le 09 Décembre 2019

► Doivent être mis à la charge d’une commune, sur le fondement de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L3227AL4), les frais d’instance supportés par les requérants dont la requête dirigée contre un permis de construire n’est rejetée qu’après la régularisation par un permis modificatif des illégalités relevées par un premier jugement.

Telle est la solution d’un jugement rendu par le tribunal administratif de Versailles le 28 octobre 2019 (TA Versailles, 28 octobre 2019, n° 1605813 N° Lexbase : A7445Z4I).

Faits. Par un arrêté du 13 juin 2016, le maire de la commune de B. a délivré à M. et Mme G. et M. et Mme A. un permis de construire pour l’édification d’un bâtiment comprenant trois logements d’une surface de plancher créée de 417,72 m² sur un terrain cadastré. Les requérants demandent l’annulation de cet arrêté.

Par le jugement avant dire-droit visé ci-dessus, le tribunal administratif de Versailles, estimant que le moyen tiré de l’article N2 du plan local d’urbanisme de la commune de B. invoqué par M. et Mme X. était fondé, a décidé, après avoir écarté les autres moyens de la requête, de surseoir à statuer sur la légalité de l’arrêté attaqué et imparti à la commune un délai de six mois à compter de la notification du jugement pour procéder à la régularisation du permis de construire.

Délivrance du permis modificatif. En exécution de ce jugement, le maire de la commune de B. a délivré un permis de construire modificatif. Le tribunal a considéré que ce permis mettait fin aux illégalités initialement constatées. Par ailleurs, le tribunal rappelé qu’à compter de la décision par laquelle le juge fait usage de la faculté de surseoir à statuer ouverte par l'article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme (N° Lexbase : L0034LNL), seuls des moyens dirigés contre le permis de construire modificatif notifié, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. Les parties ne peuvent ainsi soulever aucun moyen nouveau qui ne serait pas fondé sur des éléments résultant de la régularisation opérée (cf. l'Ouvrage "Droit de l'urbanisme" N° Lexbase : E4931E7R).

En conséquence, si les requérants font valoir que le projet ne comporte pas de local vélos conformément aux nouvelles dispositions de l’article UC 12.2 du règlement du plan local d’urbanisme, ce moyen, qui est sans lien avec les modifications autorisées par le permis en cause qui portent uniquement sur les aires de stationnement et la végétation, doit être écarté comme inopérant.

Frais d’instance. Le rejet de la requête n’est intervenu qu’à la suite de la régularisation du permis de construire ordonnée par le tribunal du fait d’une illégalité entachant le permis de construire attaqué soulevée à bon droit par les requérants. Or dans le cadre de cette procédure particulière et dans les circonstances de l’espèce, la commune doit être regardée comme partie perdante au sens des dispositions de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative. Par suite, il y a lieu de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros sur le fondement de ces dispositions et de rejeter les conclusions présentées par la commune sur le fondement de ces mêmes dispositions (cf. l'Ouvrage "Procédure administrative" N° Lexbase : E3752EXA).

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