La lettre juridique n°713 du 28 septembre 2017

La lettre juridique - Édition n°713

Avocats/Accès à la profession

[Brèves] Accès partiel à la profession d'avocat par des ressortissants des Etats membres de l'UE

Réf. : Décret n° 2017-1370 du 20 septembre 2017, portant sur l'accès partiel à la profession d'avocat en France par les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne ayant acquis leur qualification dans un autre Etat membre (N° Lexbase : L7572LGK)

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par Anne-Laure Blouet Patin

Le 28 Septembre 2017



A été publié au Journal officiel du 22 septembre 2017, le décret n° 2017-1370 du 20 septembre 2017, portant sur l'accès partiel à la profession d'avocat en France par les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne ayant acquis leur qualification dans un autre Etat membre (N° Lexbase : L7572LGK).

Pour mémoire, l'ordonnance n° 2016-1809 du 22 décembre 2016, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles de professions réglementées (N° Lexbase : L9154LBN), a transposé, pour la profession d'avocat, l'article 4 septies de la Directive 2005/36/CE du 7 septembre 2005 (N° Lexbase : L6201HCN), telle que modifiée par la Directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 (N° Lexbase : L2198IZG). Le décret a pour objet de poursuivre cette transposition et d'en prévoir les conditions d'application, notamment celles relatives à la formalisation des demandes et des autorisations d'accès partiel à la profession d'avocat en France par les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne ayant acquis leur qualification dans un autre Etat membre, ainsi qu'à la suspension et au retrait de l'autorisation.

A cet égard, il est inséré un nouveau titre dans le décret n° 91-1197 (N° Lexbase : L8168AID). La demande d'accès partiel à la profession d'avocat pour les activités de consultation juridique et de rédaction d'acte sous-seing privé, prévues à l'article 94 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ), est adressée au Garde des Sceaux, ministre de la Justice, par téléprocédure sur le site internet du ministère de la Justice. Si la demande est incomplète, le demandeur dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de la demande de complément adressée par le Garde des Sceaux pour produire les éléments requis. A défaut, sa demande est caduque. Le Garde des Sceaux se prononce sur la demande par décision motivée qui précise si le demandeur doit subir l'épreuve d'aptitude prévue au II de l'article 94 de la loi du 31 décembre 1971. Le programme et les modalités de l'épreuve d'aptitude sont fixés par arrêté du Garde des Sceaux après avis du Conseil national des barreaux.

Ce texte entrera en vigueur le 1er octobre 2017. Toutefois, les dispositions du décret prévoyant des transmissions au Garde des Sceaux par voie de téléprocédure sur le site internet du ministère de la justice entrent en vigueur à une date fixée par arrêté, et au plus tard le 31 décembre 2017. Jusqu'à cette date, les transmissions concernées sont effectuées par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou tout autre moyen permettant d'en assurer la réception et d'en déterminer la date (cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E9971E98).

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Avocats/Honoraires

[Brèves] Pas de convention, pas d'honoraire ?!

Réf. : CA Papeete, 2 août 2017, n° 17/00008 (N° Lexbase : A6700WRL)

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par Anne-Laure Blouet Patin

Le 28 Septembre 2017

A défaut de convention d'honoraires écrite obligatoire, l'avocat ne peut prétendre à aucun honoraire !
Telle est la stupéfiante position adoptée par la cour d'appel de Papeete, dans une ordonnance rendue le 2 août 2017 (CA Papeete, 2 août 2017, n° 17/00008 N° Lexbase : A6700WRL). Dans cette affaire, une avocate contestait la décision de son Bâtonnier ordonnant, notamment, la restitution d'une partie des honoraires perçus. En appel, les clients demandaient le remboursement total des honoraires versés, faute d'avoir signé une quelconque convention d'honoraires avec leur avocate. La cour va recevoir le moyen et décider qu'aucun honoraire n'était dû.

Les juges rappellent la lettre de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ), après sa modification par la loi "Macron", étendant l'obligation de conclure une convention d'honoraires du divorce à l'ensemble, ou presque, des affaires confiées aux avocats, sauf urgence. Ces dispositions ont été, bien entendu, étendues à la Polynésie française (puisque l'avocate exerçait au sein du barreau de Papeete). Pour la cour, ne peut valoir convention d'honoraires un simple reçu qui n'indique ni le montant, ni le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ni les divers frais et débours envisagés et sur lequel ne figure du reste que le nom d'un seul des clients.

Cette décision a de quoi surprendre. On sait que la jurisprudence relative à l'absence de convention d'honoraires en matière divorce s'était montrée plus clémente : ce non-respect n'entraînait pas l'impossibilité pour l'avocat défaillant de percevoir tout honoraire, mais commandait que la juridiction du recours fasse une analyse particulièrement poussée, non seulement, du travail réalisé, mais aussi, de la connaissance que le justiciable a eu de la procédure et si les renseignements fournis quant aux honoraires avaient été particulièrement clairs (CA Nîmes, 5 mars 2015, n° 14/04940 N° Lexbase : A0433NDE). Encore que pour la cour d'appel de Grenoble, si cette exigence légale n'interdisait pas à l'avocate de travailler avant le résultat des demandes d'aide juridictionnelle et la conclusion de la convention, elle l'avait fait à ses risques et périls. Lui reconnaître le droit à des honoraires, en l'absence de convention, serait ignorer une exigence d'ordre public (CA Grenoble, 16 mars 2016, n° 15/03989 N° Lexbase : A9228Q7W).

Alors, l'exégèse du nouvel article 10 de la loi de 1971 nous pousse à constater que la loi ne prévoit plus de modalités d'évaluation des honoraires à défaut de convention. L'ordre public justement commanderait la non-perception d'un quelconque honoraire. Reste que l'avocat bénéficie, en principe, d'un droit à l'honoraire (décret n° 2005-790, art. 10 N° Lexbase : L6025IGA). Et même si la vérification du respect par l'avocat de son obligation déontologique et professionnelle d'information du client quant aux modalités de détermination de ses honoraires et à l'évolution prévisible de leur montant, ressortit pleinement à la compétence du juge de l'honoraire qui peut, dans son évaluation, tirer toutes conséquences de la violation de cette obligation, l'avocat défaillant dans ce devoir d'information ne peut pas être privé de son droit à honoraire (Cass. civ. 2, 23 octobre 2014, n° 13-23.808, F-D, Cassation N° Lexbase : A0418MZI). Reste à savoir si la Cour de cassation considérera ou non si la convention d'honoraires n'a qu'une valeur probatoire ou si elle revêt un caractère d'ordre public absolu (cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E9105ETE et N° Lexbase : E9117ETT).

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Procédure civile

[Brèves] Mouvement de grève du barreau Paris : un obstacle insurmontable à l'assistance d'un conseil

Réf. : Cass. civ. 1, 13 septembre 2017, n° 16-22.819, F-P+B (N° Lexbase : A0743WSC)

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par Aziber Seïd Algadi

Le 28 Septembre 2017

Après avoir relevé qu'en raison d'un mouvement de grève du barreau de Paris, aucun avocat n'était présent à l'audience et que, dès lors, la demande de désignation d'un avocat commis d'office n'avait pu être suivie d'effet, le premier président en a justement déduit que cette circonstance constituait un obstacle insurmontable à l'assistance d'un conseil. Telle est la solution retenue par un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation rendu le 13 septembre 2017 (Cass. civ. 1, 13 septembre 2017, n° 16-22.819, F-P+B N° Lexbase : A0743WSC ; sur le sujet, lire T. Vallat, Fragilisation des droits de la défense pendant une période de grève des avocats, Lexbase éd. prof., n° 202, 2015 N° Lexbase : N9379BUW).

En l'espèce, M. A., placé en soins sans consentement sous la forme d'un programme de soins, a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de mainlevée de la mesure sur le fondement de l'article L. 3211-12 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L2976IYU). Il a ensuite fait grief à l'ordonnance (CA Paris, Pôle 2, 12ème ch., 26 octobre 2015, n° 15/00451 N° Lexbase : A0618NUG) de rejeter sa demande, alors qu'un renvoi était selon lui normalement envisageable. En jugeant le contraire, le magistrat délégué par la première présidente de la cour d'appel de Paris aurait méconnu les exigences de la défense et celles de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L7558AIR) ainsi que l'article 16 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1133H4Q). Aussi, en ne précisant pas en quoi l'audience publique du 22 octobre 2015 ne pouvait être reportée à une date ultérieure pour que l'appelant puisse être effectivement assisté d'un avocat comme il le souhaitait, le délai s'imposant à la cour d'appel pour statuer expirant le 2 novembre 2015 à 24 heures, le magistrat délégué par le premier président de la cour d'appel de Paris aurait privé son arrêt de base légale au regard des articles R. 3211-22 du Code de la santé publique, 642 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6803H74) et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

A tort. Après avoir énoncé le principe susvisé, la Cour de cassation rejette son pourvoi en notant par ailleurs, qu'il ne résulte ni de l'ordonnance ni des productions que M. A. ait demandé le renvoi de l'affaire du fait de l'absence d'un avocat (cf. les Ouvrages "Procédure civile" N° Lexbase : E3884EUE et "La profession d'avocat" N° Lexbase : E9554ETZ).

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Avocats/Statut social et fiscal

[Jurisprudence] Bataille autour du nom de l'associé décédé d'une SCP d'avocats

Réf. : Cass. civ. 1, 6 septembre 2017, n° 16-15.941, F-P+B (N° Lexbase : A1207WR7)

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par Bastien Brignon, Maître de conférences - HDR à l'Université d'Aix-Marseille, Membre du Centre de droit économique (EA 4224) et de l'Institut de droit des affaires (IDA), Directeur du Master professionnel Ingénierie des sociétés

Le 28 Septembre 2017

Une SCP ne peut se prévaloir, pour conserver dans sa raison sociale le nom d'un associé décédé, de la nouvelle version de l'article 8 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 (N° Lexbase : L3146AID), tel que modifié par la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 (N° Lexbase : L8851IPI), alors que le consentement de l'intéressé avait été recueilli sous l'empire de la version précédente dudit l'article et que son décès était intervenu antérieurement à ladite réforme. Telle est la solution retenue par un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 6 septembre 2017. Particulièrement bien rédigée, la présente décision, en date du 6 septembre 2017 (1) et relative au nom d'un cabinet d'avocats, apporte une précision d'importance inédite. La première chambre civile de la Cour de cassation considère, en substance, que les modifications législatives dont l'article 8 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 afférent au nom des SCP a fait l'objet ne sont pas rétroactives, de sorte que l'autorisation d'un avocat quant à l'utilisation de son nom patronymique au sein de la dénomination sociale d'une SCP donnée sous l'empire dudit article dans sa rédaction issue de la loi n° 72-1151, ne vaut que pour le temps où cette mouture reste en vigueur. Dès lors que la loi change, l'autorisation donnée sous l'empire de la loi ancienne n'est plus valable.

En l'espèce, il s'agissait d'un Bâtonnier qui avait accepté, plusieurs fois, que son nom patronymique soit utilisé comme dénomination sociale, même après son départ de la SCP au sein de laquelle il avait exercé. Ainsi, lors de l'assemblée générale du 22 juillet 1997, l'intéressé avait "à titre personnel réitéré son accord à l'utilisation de son nom et ce même après son départ de la société en cas de cessation d'activité ou après son décès". Puis, lors de l'assemblée générale du 28 décembre 2001, il avait été décidé que la SCP se poursuivait entre les associés qui n'avaient pas notifié leur retrait et que sa dénomination sociale serait celle du patronyme du Bâtonnier ; ainsi, les statuts signés par l'intéressé mentionnaient que "Monsieur le Bâtonnier [...] a fait connaître aux membres de la SCP son accord personnel et celui des membres de sa famille pour que la SCP conserve une dénomination incluant le nom [patronymique] et ce même après" sa cessation d'activité en qualité d'avocat.

Le problème a été qu'à la suite du décès de cet avocat, en août 2009, ses héritiers ont assigné la SCP afin qu'elle ne fasse plus usage du nom du défunt, soutenant que l'accord qu'il avait pu donner n'était aujourd'hui plus valable. Leur fondement reposait pour l'essentiel sur le changement de législation. Ainsi, soutenaient-ils, si le principe de l'inaliénabilité et de l'imprescriptibilité du nom patronymique, qui empêche son titulaire d'en disposer librement pour identifier au même titre une autre personne physique, ne s'oppose pas à la conclusion d'un accord portant sur l'utilisation de ce nom comme dénomination sociale, en particulier dans les conditions prévues à l'article 8 de la loi du 29 novembre 1966 en sa rédaction modifiée par la loi du 28 mars 2011, une société d'avocat ne saurait toutefois, à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi du 28 mars 2011, continuer à faire un usage licite du nom d'un de ses anciens associés, dans les conditions nouvelles prévues par cette loi, que si l'accord de celui-ci ou de ses ayants droit a été recueilli sous l'empire de celle-ci, en connaissance des effets qui y sont désormais attachés. Dans ces conditions, les héritiers estimaient qu'en retenant qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 28 mars 2011, la SCP avait pu continuer à faire un usage licite du nom patronymique à titre de dénomination sociale alors que l'accord de l'intéressé à l'utilisation de son nom après sa cessation d'activité, qui n'avait pu être donné que sous l'empire des dispositions antérieures, ne saurait s'appliquer à l'utilisation de son nom au sein d'une dénomination sociale régie par ce nouveau texte, la cour d'appel avait méconnu la portée de ses propres constatations et méconnu les dispositions de l'article 8 de la loi du 29 novembre 1966 en ses rédactions successives.

En effet, au visa de l'article 8 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux SCP, la Cour de cassation censure l'arrêt de la cour d'appel de Paris pour violation de la loi. Une SCP ne peut se prévaloir, pour conserver dans sa raison sociale le nom d'un associé décédé, de la nouvelle version de l'article 8 de la du 29 novembre 1966, tel que modifié par la loi du 28 mars 2011, quand le consentement de l'intéressée avait été recueilli sous l'empire de la version précédente de l'article et que son décès était intervenu antérieurement à ladite réforme.

Parce que les lois sur la dénomination sociale ne sont pas rétroactives (III), il paraît nécessaire d'obtenir, à chaque changement de législation, l'accord de l'intéressé -ou des héritiers- pour que la SCP puisse continuer à utiliser le patronyme dans sa dénomination (II), ce qui commande de rappeler le régime applicable aux dénominations sociales de SCP (I).

I - Les règles relatives à l'insertion du patronyme dans la dénomination des SCP

Comme la Cour de cassation l'explique très bien dans son arrêt, et comme un auteur a également bien pu l'écrire (2), avant la loi du 28 mars 2011, l'article 8 de la loi du 29 novembre 1966 sur les SCP précisait les conditions dans lesquelles le nom des associés ou anciens associés pouvait être inclus dans la dénomination sociale (voire la raison sociale puisque c'était le terme utilisé dans les SCP). Ce texte autorisait ainsi le maintien dans la raison sociale du nom d'un ou plusieurs anciens associés, mais à la condition qu'il(s) soit(ent) précédé(s) du mot "anciennement". Cette faculté légale était de plus limitée dans le temps, puisqu'elle cessait lorsqu'il n'existait plus, au sein de la société, aucune personne ayant exercé la profession avec l'intéressé (3). Pour tout dire, cette possibilité, limitée dans le temps et conditionnée, d'utiliser le nom d'un ancien associé, était issue non pas de la loi de 1966 mais d'une loi n° 72-1151 de 23 décembre 1972 qui avait modifié l'article 8 originaire. Toujours est-il que la loi du 28 mars 2011 est venue remplacer la raison sociale par la dénomination et est venue, surtout, admettre l'utilisation des noms des anciens associés, sans condition ni limitation de durée.

Une telle modification n'est pas sans incidence quand on sait que nombre de cabinets d'avocats portent encore le nom de leur fondateur et sont connus comme tels. En outre, dans un souci de cohérence, il a été opéré quasiment les mêmes modifications au sein des sociétés d'exercice libéral, des sociétés en participation et des sociétés de participations financières de professions libérales. La réforme opérée par la loi du 28 mars 2011 n'est donc pas anodine eu égard à l'impact marketing que la dénomination sociale peut constituer (4), a fortiori dans un contexte de crise. Le nom est un élément essentiel pour une société (5). En témoigne d'ailleurs toute la jurisprudence afférente au nom patronymique inséré dans une dénomination sociale rendue en matière de sociétés commerciales (6).

Le nom peut être tellement un élément de l'actif social et d'identification que quelques difficultés peuvent se poser en cas de décès de l'intéressé ayant donné son nom à la société. Telle était la situation en l'occurrence.

II - L'accord de l'intéressé

L'intéressé avait donné son accord et celui de sa famille (peut-être par procuration) pour une utilisation postérieure à sa sortie de la SCP et à sa cessation d'activité. Si les conditions de l'époque -celles posées par la loi de 1972- paraissaient respectées (7), toute la question était de connaître la pérennité d'une telle autorisation en cas de changement de législation et donc de régime juridique. La Cour de cassation avait déjà pu juger que la possibilité offerte par l'article 8, alinéa 2, de la loi du 29 novembre 1966, dans sa rédaction de la loi du 23 décembre 1972, de conserver le nom d'un ou de plusieurs anciens associés dans la raison sociale d'une société civile professionnelle, nom dont la présence est par nature liée à l'exercice de l'activité professionnelle, ne dispensait pas la société d'obtenir l'accord de celui qui cesse son activité ou de ses héritiers (8). Mais la Cour de cassation ne s'était jamais encore prononcée sur le fait de savoir si une autorisation donnée sous l'empire d'une loi pouvait rester valable sous l'empire d'une autre loi. Dans l'arrêt de 1997, elle avait simplement considéré que le droit de conserver un nom patronymique dans une raison sociale ne dispensait pas le bénéficiaire/utilisateur dudit nom, c'est-à-dire la société, de demander et obtenir l'autorisation de l'intéressé ou de ses héritiers s'il était décédé.

La Cour de cassation répond très clairement aujourd'hui qu'une SCP ne peut se prévaloir, pour conserver dans sa raison sociale le nom d'un associé décédé, de la nouvelle version de l'article 8 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966, tel que modifié par la loi du 28 mars 2011, alors que le consentement de l'intéressé avait été recueilli sous l'empire de la version précédente de l'article et que son décès était intervenu antérieurement à ladite réforme. Autrement dit, une autorisation donnée sous l'empire d'une ancienne loi ne saurait perdurer en cas de changement de loi. Et il en va ainsi tant des SCP que de toutes les sociétés des professions libérales voire de toutes les professions libérales. La portée dépasse par conséquent l'hypothèse des SCP. Simplement, les SCP ayant été majoritaires et l'étant encore beaucoup au sein de certaines professions juridiques ou judiciaires (9), c'est dans les SCP que ce contentieux peut principalement prospérer.

A contrario, la solution signifie que si l'autorisation a été donnée postérieurement après une loi nouvelle, celle-ci est valable, étant précisé cependant que pareille hypothèse n'est pas admise puisqu'apparemment la Cour de cassation refuse que, par anticipation, une autorisation d'usage du nom soit donnée sous l'empire de lois postérieures. Au nom de la sécurité juridique, les juges exigent, à juste titre nous semble-t-il, que le consentement soit systématiquement réaffirmé en cas de modifications légales.

La solution signifie, a fortiori, qu'un associé ne peut pas abandonner totalement son nom à la société. Un associé ne pourrait pas par exemple se prononcer, par anticipation, à la place de ses héritiers (10), et faire en sorte qu'aucun changement législatif ne vienne contrarier sa volonté. La loi du 28 mars 2011 ayant considérablement allégé les conditions d'utilisation du nom dans la dénomination sociale, on peut penser néanmoins que seules peuvent être concernées les situations telles que celles ressortant de l'arrêt commenté, à savoir une autorisation d'utilisation du nom à une époque où les conditions étaient plus drastiques, soit entre 1966 et 1972 soit entre 1972 et 2011. Cela étant, quid de l'associé décédé qui ferait obligation à ses héritiers dans son testament de continuer à autoriser l'utilisation de son patronyme dans la dénomination sociale ? Sans peut-être en arriver jusque là, les ayants droit et ayants cause n'auraient certainement d'autres choix que de suivre la volonté du défunt. Mais ils devraient en toute hypothèse manifester cette volonté, la Cour de cassation ne dispensant pas les héritiers par exemple de demander l'autorisation d'usage du patronyme (11).

III - La non-rétroactivité de la loi du 28 mars 2011 (sur le nom des sociétés)

En refusant de maintenir l'autorisation donnée sous l'empire de la loi ancienne, la Cour de cassation fait une stricte application de la loi dans le temps. Elle refuse de faire rétroagir la loi de 2011 sur une situation née sous et gouvernée par la loi de 1972.

Le raisonnement des juges du fond n'était pourtant pas saugrenu car ils appliquaient le droit positif et ses évolutions à une situation née antérieurement. Moins qu'une rétroactivité de la loi, la Cour de cassation aurait pu y voir une application à la situation en cours de la loi nouvelle, ce qu'elle a déjà admis. C'est l'effet immédiat de la loi nouvelle applicable aux contrats en cours. L'autorisation figurant dans l'assemblée générale donnée par l'ancien Bâtonnier ne constituait-elle pas un contrat en cours ?... Il est permis d'en douter toutefois, d'autant que l'intéressé ne pouvait pas anticiper la loi nouvelle, sauf à donner un consentement non éclairé. Le patronyme est un élément si inaliénable et si imprescriptible que l'ordre public qui l'entoure empêche les intéressés de se prononcer au-delà des lois en vigueur. Certes, le patronyme peut devenir un élément d'identification de la société en s'insérant pleinement dans son actif social. Mais, il faut pour cela que l'intéressé ou ses héritiers y consentent expressément et qu'ils renouvellent leur consentement, si nécessaire, de manière expresse. Tel sera le cas lorsque l'autorisation aura été donnée sous l'empire d'une loi ancienne ou antérieure au régime actuel.

Notons, pour conclure, que l'article 10.6.3 du RIN (N° Lexbase : L2100IR9) dispose, en son alinéa 2, que : "La dénomination, quelle qu'en soit la forme, est un mode de communication". Et l'alinéa 1er du texte indique que : "les dénominations s'entendent du nom commercial, de l'enseigne, de la marque, de la dénomination ou raison sociale ou de tout autre terme par lequel un avocat ou une structure d'exercice sont identifiés ou reconnus". Parce qu'il est à la fois un élément de communication (13) et un mode d'identification, le nom d'un cabinet d'avocat doit obéir à un régime juridique strict. Il est heureux dans ces conditions que la Cour de cassation veille à une application stricte de ce principe.


(1) Obs. A-L. Blouet Patin, Lexbase, éd. prof., n° 247, 2017 (N° Lexbase : N0072BXX).
(2) Dalloz actualité, 20 septembre 2017, obs. M. Borde.
(3) J.-J. Daigre, Du maintien du nom d'un ancien associé dans l'appellation d'une société de profession libérale, Bull. Joly Sociétés 1997, p. 949 ; B. Saintourens, Les sociétés d'exercice libéral, Rev. sociétés 1991, n° 13 ; M. Roussille, Modifications de certains éléments du régime des SEL, Dr. Sociétés, 2011, comm., 111.
(4) M. Roussille, art. précité.
(5) Sur le changement de nom pour un cabinet d'avocats V., D. Jouenne et C. Chassaing, Changer de nom sans perdre son âme, Lexbase éd. prof., n° 205, 2015 (N° Lexbase : N0173BWC).
(6) Cass. com., 12 mars 1985, n° 84-17.163 (N° Lexbase : A3228AAS ; cf. l’Ouvrage "Droit des sociétés" N° Lexbase : E1461AUN), Rev. Sociétés, 1985, p. 607, note G. Parléani ; D., 2005, jurispr. p. 471, note J. Ghestin ; Cass. com., 12 juin 2007, n° 06-12.244, FS-P+B (N° Lexbase : A7896DWD ; cf. l’Ouvrage "Droit des sociétés" N° Lexbase : E6274ATK), Dr. sociétés 2007, comm., 160, note J. Monnet ; Bull. Joly Sociétés, 2007, p. 1277, note J.-C. Hallouin ; Cass. com., 13 juin 1995, n° 93-14.785 (N° Lexbase : A9940ATC ; cf. l’Ouvrage "Droit des sociétés" N° Lexbase : E6870ASA), Rev. Sociétés, 1996, p. 65, note G. Parléani ; Dr. sociétés 1996, comm. 51, note Th. Bonneau ; Cass. com., 6 mai 2003, n° 00-18.192, FS-P+B+I (N° Lexbase : A7885BST ; cf. l’Ouvrage "Droit des sociétés" N° Lexbase : E6829ASQ), D., 2003, jurispr. p. 2228, note G. Loiseau ; RTDCom., 2004, p. 90, note J. Azema ; Lamy Sociétés commerciales 2003, Bull. n° 159, note D. Velardocchio ; Bull. Joly Sociétés, 2003, p. 921, note P. Le Cannu ; CA Aix-en-Provence, 25 novembre 2004, Bull. Aix 2005, p. 126, note D. Poracchia et C.-A. Maetz ; CJCE, 30 mars 2006, aff. C-259/04 (N° Lexbase : A8303DNT), D., 2006, jurispr., p. 2109, note D. Poracchia et C.-A. Maetz ; CA Aix-en-Provence, 27 avril 2000, Bull. Aix 2001, comm. 1, p. 63, note J.-M. Marmayou ; Cass. com., 4 juillet 2006, n° 03-13.728, F-P+B (N° Lexbase : A3597DQB ; cf. l’Ouvrage "Droit des sociétés" N° Lexbase : E6272ATH), LPA, 2007, n° 120, p. 4, obs. D. Poracchia ; Cass. com., 24 juin 2008, n° 07-10.756, FP-P+B (N° Lexbase : A3626D98) ; et CA Aix-en-Provence, 11 août 2008, n° 07/12115 (N° Lexbase : A7578HKU), D., 2008, act. jurispr. p. 1993, relatif à la notion de célébrité, distincte de celle de notoriété ; CA Versailles, 15 février 2007, BRDA 7/2007, inf. 5 ; CA Bordeaux, 16 mai 2011, n° 10/00889 (N° Lexbase : A4569HRN), Dr. Sociétés, 2011, comm. 176, note M. Roussille ; Cass. com., 21 juin 2011, n° 10-23.262, FS-P+B (N° Lexbase : A5158HUL ; cf. l’Ouvrage "Droit des sociétés" N° Lexbase : E6271ATG), Bull. civ., 2011, IV, n° 105.
(7) C'est ce que devra vérifier néanmoins la cour d'appel de renvoi.
(8) Cass. civ. 1, 1er juill.1997, n° 95-18.928 (N° Lexbase : A0674ACX ; cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E0811E9W), Bull. civ. I., n° 227 ; D., 1997, 178 ; Rev. sociétés 1997, 810, note G. Parleani ; RTDCiv., 1998, 40, obs. J. Hauser ; RTDCom., 1998, 628, obs. M.-H. Monsérié.
(9) notaire par exemple.
(10) Pourtant, lors de l'assemblée générale de 1997, l'avocat intéressé avait bien affirmé que son patronyme devait rester dans la raison sociale même après son décès... Cela n'est visiblement pas possible.
(11) Cass. civ. 1, 1er juillet 1997, préc..
(12) Cass. civ. 3, 18 février 2009, n° 08-13.143 (N° Lexbase : A2721ED7 ; cf. l’Ouvrage "baux commerciaux" N° Lexbase : E0468AGG), Bull. civ. III, n° 40 : "a loi dite "Murcef" du 11 décembre 2001, qui a modifié l'article L. 145-38, alinéa 3, du Code de commerce (N° Lexbase : L5034I3T), doit s'appliquer à l'instance en révision de loyer d'un bail conclu avant son entrée en vigueur mais introduite après celle-ci, les effets légaux d'un contrat étant régis par la loi en vigueur au moment où ils se produisent ". Adde Sur la différence entre rétroactivité et application aux situations en cours des lois nouvelles, v. : le blog de B. Dondero, L'effet immédiat de la loi nouvelle (Cass. civ. 3, 9 février 2017, n° 16-10.350, FS-P+B+I N° Lexbase : A7677TBX).
(13) Non commerciale cependant au sens de la Directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 (N° Lexbase : L8989HT4) ; CE 1° et 6° ch.-r., 28 avril 2017, n° 400832 (N° Lexbase : A3248WBW ; cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" [LXB=E0811E9])

newsid:460288

Droit financier

[Brèves] Inconstitutionnalité du droit de communication aux enquêteurs de l'AMF des données de connexion

Réf. : Cons. const., décision n° 2017-646/647 QPC, du 21 juillet 2017 (N° Lexbase : A3325WNH)

Lecture: 2 min

N9605BWN

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par Vincent Téchené

Le 27 Juillet 2017

Est déclarée contraire à la Constitution la seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 621-10 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L5205IX3), prévoyant que les agents de l'Autorité des marchés financiers habilités à conduire les enquêtes qu'elle ordonne peuvent se faire communiquer les données de connexion détenues par les opérateurs de communications électroniques, les fournisseurs d'accès à un service de communication au public en ligne ou les hébergeurs de contenu sur un tel service et en obtenir la copie. Tel est le sens d'une décision du Conseil constitutionnel du 21 juillet 2017 (Cons. const., décision n° 2017-646/647 QPC, du 21 juillet 2017 N° Lexbase : A3325WNH) qui avait été saisi d'une QPC par la Cour de cassation (Cass. QPC, deux arrêts, 16 mai 2017, n° 16-25.415, FS-D N° Lexbase : A5053WDI ; n° 17-40.030, FS-D N° Lexbase : A4950WDP).

Les requérants et les parties intervenantes reprochaient aux dispositions contestées de porter atteinte au droit au respect de la vie privée protégé par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 (N° Lexbase : L1366A9H). Selon eux, le législateur n'aurait pas assorti la procédure de communication des données de connexion aux enquêteurs de l'Autorité des marchés financiers de garanties suffisantes de nature à assurer une conciliation équilibrée entre le droit au respect de la vie privée et les objectifs de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions.

Pour les Sages de la rue de Montpensier, la communication des données de connexion est de nature à porter atteinte au droit au respect de la vie privée de la personne intéressée. Si le législateur a réservé à des agents habilités et soumis au respect du secret professionnel le pouvoir d'obtenir ces données dans le cadre d'une enquête et ne leur a pas conféré un pouvoir d'exécution forcée, il n'a assorti la procédure prévue par les dispositions en cause d'aucune autre garantie. Dans ces conditions, le législateur n'a pas entouré la procédure prévue par les dispositions contestées de garanties propres à assurer une conciliation équilibrée entre, d'une part, le droit au respect de la vie privée et, d'autre part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions.

Dès lors, il déclare les dispositions contestées contraires à la Constitution et précise que, en l'espèce, l'abrogation immédiate des dispositions contestées aurait des conséquences manifestement excessives, de sorte qu'il y a lieu de la reporter au 31 décembre 2018.

newsid:459605

Congés

[Brèves] Absence d'obligation pour le juge du fond de déterminer la limitation du report des congés payés

Réf. : Cass. soc., 21 septembre 2017, n° 16-24.022, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A3785WSY]

Lecture: 2 min

N0272BXD

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par Laïla Bedja

Le 28 Septembre 2017

Si des dispositions ou pratiques nationales peuvent limiter le cumul des droits au congé annuel payé d'un travailleur en incapacité de travail pendant plusieurs périodes de référence consécutives au moyen d'une période de report à l'expiration de laquelle le droit au congé annuel payé s'éteint, dès lors que cette période de report dépasse substantiellement la durée de la période de référence, la Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail (N° Lexbase : L5806DLM) ne fait pas obligation aux Etats membres de prévoir une telle limitation. Telle est l'un des apports de la décision rendue par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 21 septembre 2017 (Cass. soc., 21 septembre 2017, n° 16-24.022, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A3785WSY).

Le syndicat T. a fait assigner la RATP devant un tribunal de grande instance pour faire juger que certains textes internes à l'entreprise datant de 2000 et 2005 étaient inopposables aux salariés, car discriminatoires et contraires à la Directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail et que, cette directive étant applicable à l'ensemble des agents de la RATP, cette dernière devait régulariser, depuis le 4 novembre 2003, la situation de l'ensemble des agents concernés en leur attribuant, sur les comptes "temps de congés", les jours de congés écrêtés à tort à l'occasion de leurs positions, maladies, accidents du travail et maladies professionnelles. La cour d'appel (CA Paris, Pôle 6, 2ème ch., 30 juin 2016, n° 15/14434 N° Lexbase : A7998RUR) allant dans le sens du syndicat en condamnant la RATP à régulariser la situation de l'ensemble des agents concerné et à payer des dommages-intérêts au syndicat en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession, la RATP a formé un pourvoi. Elle soutient notamment qu'il appartient au juge de fixer une limite au report dans le temps des droits à congés payés.

En vain, énonçant la solution précitée la Haute juridiction rejette le pourvoi. Ne méconnaît pas son office la cour d'appel qui, après avoir retenu que les articles 58 et 71 alinéa 3 du statut du personnel de la RATP relatifs à l'écrêtement des congés payés et aux reports en cas de maladie de l'agent étaient contraires aux dispositions claires et inconditionnelles de l'article 7 de la Directive 2003/88/CE, a ordonné à l'employeur de régulariser la situation de l'ensemble des salariés concernés sans fixer de délai au terme duquel les droits à congés payés acquis et reportés seraient éteints (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0069ETQ et N° Lexbase : E3213ET8).

newsid:460272

Contrat de travail

[Brèves] Le droit à l'emploi n'est pas une liberté fondamentale !

Réf. : Cass. soc., 21 septembre 2017, n° 16-20.270, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4137WSZ)

Lecture: 2 min

N0281BXP

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par Laïla Bedja

Le 28 Septembre 2017

Le droit à l'emploi ne constitue pas une liberté fondamentale qui justifierait la poursuite du contrat de travail au terme de la mission de travail temporaire en cas d'action en requalification en contrat à durée indéterminée. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 21 septembre 2017 (Cass. soc., 21 septembre 2017, n° 16-20.270, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4137WSZ).

Dans cette affaire, M. X a été mis à disposition de la société S. par la société A., entreprise de travail temporaire, du 10 juillet 2012 au 31 décembre 2013. Avant expiration de sa dernière mission, il a saisi la juridiction prud'homale en référé, pour, notamment, faire valoir les droits correspondant à un CDI et obtenir la poursuite de la relation contractuelle. Par ordonnance du 27 décembre 2013, la formation de référé a dit ne pouvoir statuer sur la demande de requalification en contrat à durée indéterminée mais a ordonné la poursuite de la relation contractuelle jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond. Par deux jugements, le conseil de prud'hommes a ordonné la requalification de la relation de travail en CDI et la poursuite du contrat de travail à durée indéterminée. Par arrêt du 5 septembre 2014 (CA Rennes, 5 septembre 2014, n° 13/09369 N° Lexbase : A0318MWP), la cour d'appel a infirmé l'ordonnance de référé en ce qu'elle avait ordonné la poursuite du contrat de travail ; par arrêt du 11 mai 2016 (CA Rennes, 11 mai 2016, n° 14/04821 N° Lexbase : A9957RN4), la cour a notamment ordonné la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée et ordonné la poursuite de la relation de travail. Pour ordonner la poursuite de la relation de travail, après avoir ordonné la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée, les juges du fond retiennent que le contrat de travail requalifié du salarié qui a agi en justice avant le terme de son dernier contrat de mission à l'effet de faire respecter sa liberté fondamentale au maintien du salarié dans l'emploi, à la suite de la violation des dispositions relatives aux conditions restrictives de recours au travail temporaire, n'a pas été rompu, peu important en la matière, la circonstance que l'ordonnance de référé du 27 décembre 2013 ait été infirmée par l'arrêt du 5 septembre 2014, survenu cependant postérieurement au jugement déféré et qu'aucune disposition du Code du travail ne sanctionne expressément la requalification par la poursuite des relations contractuelles entre l'intérimaire et la société utilisatrice.

Pourvoi est formé par l'employeur auquel la Haute juridiction accède. En énonçant la solution précitée et au visa des articles L. 1251-40 (N° Lexbase : L1596H9Y), L. 1251-41 (N° Lexbase : L1598H93) et L. 1121-1 (N° Lexbase : L0670H9P) du Code du travail, elle casse et annule l'arrêt rendu par la cour d'appel le 11 mai 2016, mais seulement en ce qu'elle ordonne la poursuite du contrat de travail (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E7969ESX).

newsid:460281

Droit des étrangers

[Jurisprudence] Transmission de la QPC relative à l'assignation à résidence des étrangers faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion : conclusions du Rapporteur public

Réf. : CE, 2° et 7° ch.-r., 20 septembre 2017, n° 411774 (N° Lexbase : A2844WS7)

Lecture: 8 min

N0286BXU

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par Xavier Domino, Rapporteur public au Conseil d'Etat

Le 28 Septembre 2017

Dans une décision rendue du 21 septembre 2017, le Conseil d'Etat a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative aux modalités d'assignation à résidence des étrangers faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion. Lexbase Hebdo - édition publique vous propose de retrouver les conclusions anonymisées du Rapporteur public sur cet arrêt, Xavier Domino.

1. Le présent litige pose la question de la transmission au Conseil constitutionnel d'une QPC (question prioritaire de constitutionnalité) mettant en cause la constitutionnalité des dispositions de l'article L. 561-1 (N° Lexbase : L9292K4W) relatives à l'assignation à résidence des étrangers faisant l'objet d'une interdiction de territoire qui sont dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peuvent ni regagner leur pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays. Pour ces personnes, la loi ne prévoit pas de limitation de durée de l'assignation à résidence.

Ressortissant algérien, M. D. a été condamné par arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2005 à six ans d'emprisonnement et à l'interdiction définitive du territoire français pour participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme. Déchu de la nationalité française qu'il venait d'acquérir, il devait être expulsé vers l'Algérie par un arrêté du préfet de police du 16 avril 2008. Mais par un arrêt du 3 décembre 2009 (CEDH, 3 décembre 2009, Req. 19576/08 N° Lexbase : A2876EP9), la Cour européenne des droits de l'Homme a jugé qu'il existait des motifs sérieux et avérés de croire que M. D. courrait un risque réel d'être soumis à un traitement contraire à l'article 3 de la CESDH (N° Lexbase : L4764AQI) s'il était expulsé vers l'Algérie.

Depuis le 25 avril 2008, M. D., qui ne peut être expulsé vers l'Algérie et dont les demandes d'asile auprès d'autres Etats ont échoué, fait l'objet d'assignations à résidence successives prises sur le fondement de l'article L. 561-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers. Il est, donc, assigné à résidence depuis plus de 9 ans.

A l'occasion d'une perquisition menée dans le cadre de l'état d'urgence à son domicile de Carmaux (Tarn) où il était assigné à résidence depuis décembre 2011, les services de police ont trouvé des indices tendant à montrer que M. D. avait recherché des informations personnelles sur les agents de police du commissariat de Carmaux et des informations relatives à des personnes condamnées pour terrorisme. M. D. a alors fait l'objet d'une nouvelle assignation à résidence à Saint-Jean d'Angély (Charente-Maritime) par arrêté du ministre de l'Intérieur du 24 novembre 2016, afin de l'éloigner de Carmaux. Un arrêté du 30 janvier 2017 a étendu l'assignation au territoire de la commune voisine de La Verne.

M. D. a depuis demandé la suspension et l'annulation de ces deux arrêtés à quatre reprises au juge des référés du TA de Paris. Toutes ces demandes ont été rejetées (1). A l'appui de sa dernière demande, il a présenté une QPC mettant en cause l'article L. 561-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement duquel il est assigné à résidence. Dans les deux cas, la QPC a été présentée à l'appui de sa requête en référé et au fond.

En référé et cassation de référé de sa dernière demande de suspension, cette QPC n'a pas été transmise, (CE, 2ème ch., 12 juillet 2017, n° 410425 N° Lexbase : A6450WN9 ; aux conclusions de Béatrice Bourgeois-Machureau) pour des motifs de procédure (2), et n'a donc pas été examinée. Elle est, aujourd'hui, transmise par le tribunal administratif de Paris saisi au fond de la première demande d'annulation de l'arrêté d'assignation formée par M. D. et vous pourrez cette fois l'examiner.

2. La QPC met en cause l'article L. 561-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers au motif que cet article, qui ne fixe pas de limite de durée à l'assignation à résidence qui peut être prononcée sur son fondement et laisse à l'administration le libre choix du lieu d'assignation à résidence, porte atteinte à la liberté d'aller et venir, au droit au respect de la vie privée, est entaché d'une incompétence négative et méconnaît l'article 66 de la Constitution (N° Lexbase : L0895AHM).

Ces dispositions, que vous pouvez circonscrire sans trahir la portée de la critique de M. D., à la dernière phrase du 8ème alinéa et la troisième phrase du 9ème alinéa de l'article L. 561-1 sont applicables au litige et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution.

Elles posent assurément à nos yeux une difficulté sérieuse de constitutionnalité.

A l'origine, l'article 28 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 (ordonnance relative aux conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers et portant création de l'Office national d'immigration N° Lexbase : L4788AGG), dont sont issues les dispositions de l'article L. 561-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers, ne prévoyaient aucune limitation de durée à l'assignation à résidence, quelle que soit la catégorie d'étrangers visés. Mais en 2011, le législateur a fait de la limitation dans le temps des assignations à résidence le principe (six mois renouvelable une fois) et de l'absence de limitation l'exception, limitée à des hypothèses précises, notamment celle qui nous intéresse aujourd'hui d'interdiction du territoire prononcée par le juge pénal.

2.1 Il nous semble résulter de façon assez certaine de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui identifie les assignations à résidence comme des mesures seulement restrictives de liberté, ne mettant ainsi pas en jeu la garantie de la liberté individuelle, que la seule prolongation dans le temps d'une mesure d'assignation à résidence n'a pas pour effet de modifier sa nature et de la rendre assimilable à une mesure privative de liberté (Cons. const., décision n° 2017-624 QPC, du 16 mars 2017 N° Lexbase : A3171T8X, cons. 7). Ce qui rend dans notre litige l'invocation de l'article 66 de la Constitution assez peu convaincante à nos yeux.

2.2 Nous semble, en revanche, sérieux le grief tiré de l'atteinte excessive à la liberté d'aller et venir.

Le Conseil constitutionnel juge de manière constante qu'il "appartient au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties, au nombre desquelles figurent la liberté d'aller et venir et le respect de la vie privée, protégés par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 (N° Lexbase : L1370A9M), ainsi que la liberté individuelle, que l'article 66 de la Constitution place sous la surveillance de l'autorité judiciaire" (Cons. const., décision n° 2003-467, du 13 mars 2003, loi pour la sécurité intérieure N° Lexbase : A4715A7R précitée, cons. 8) et que "les mesures de police administrative susceptibles d'affecter l'exercice des libertés constitutionnellement garanties doivent être justifiées par la nécessité de sauvegarder l'ordre public et proportionnées à cet objectif" (id., cons. 9 id. et Cons. const., décision n° 2010-13 QPC, du 9 juillet 2010 N° Lexbase : A1250E43, cons. 8).

Et s'il résulte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel "qu'aucune règle de valeur constitutionnelle n'assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d'accès et de séjour sur le territoire national ; que les conditions de leur entrée et de leur séjour peuvent être restreintes par des mesures de police administrative conférant à l'autorité publique des pouvoirs étendus et reposant sur des règles spécifiques" (Cons. const., décision n° 93-325 DC, du 13 août 1993, loi relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d'accueil et de séjour des étrangers en France N° Lexbase : A8285ACT, cons. 2 ; Cons. const., décision n° 2011-631 DC, du 9 juin 2011, loi relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité N° Lexbase : A4307HTP cons. 64), cette possibilité ne peut s'exercer que dans un cadre législatif qui assure la conciliation de l'objectif de sauvegarde de l'ordre public et du respect des libertés : "si le législateur peut, s'agissant de l'entrée et du séjour des étrangers, prendre des dispositions spécifiques destinées notamment à assurer la sauvegarde de l'ordre public, qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle, il lui appartient de concilier cet objectif avec le respect des libertés et droits fondamentaux reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République ; que figurent parmi ces droits et libertés, la liberté d'aller et venir, laquelle n'est pas limitée au territoire national mais comporte également le droit de le quitter, et la liberté du mariage" (Cons. const., décision n° 97-389 DC, du 22 avril 1997, cons. 10).

S'agissant de l'atteinte portée par les assignations à résidence à la liberté d'aller et venir, le Conseil constitutionnel a jugé qu'elle n'était pas disproportionnée :

- s'agissant de l'assignation prévue à l'article L. 561-2 (N° Lexbase : L9293K4X), cette mesure étant alternative à la rétention et placée sous le contrôle du juge (Cons. const., décision n° 2011-631 DC, du 9 juin 2011, loi relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, cons. 79) ;

- s'agissant des assignations à résidence relevant de l'état d'urgence, sous réserve que "d'une part, que le comportement de la personne en cause constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics, d'autre part, que l'autorité administrative produise des éléments nouveaux ou complémentaires, et enfin que soient prises en compte dans l'examen de la situation de l'intéressé la durée totale de son placement sous assignation à résidence, les conditions de celle-ci et les obligations complémentaires dont cette mesure a été assortie" (Cons. const., décision n° 2017-624 QPC, du 16 mars 2017, cons. 17).

Mais les dispositions, aujourd'hui contestées, ont ceci de particulier qu'elles ne prévoient pas de bornage dans le temps des assignations à résidence qu'elles autorisent de prononcer à l'égard des étrangers ayant fait l'objet d'une interdiction du territoire prononcée par le juge judiciaire. Nous convenons bien volontiers avec le ministre que les assignations à résidence prononcées en raison de l'impossibilité dans laquelle l'administration se trouve d'exécuter une telle interdiction de territoire ne sont pas totalement comparables à celles prononcées dans le cadre de l'état d'urgence. Et nous convenons, en outre, que la possibilité pour l'étranger faisant l'objet de cette mesure d'en demander le relèvement au juge judiciaire après un an atténue aussi l'absence de limitation de durée qui ressort à la seule lecture des dispositions contestées. Enfin, et bien entendu, il va de soi que l'hypothèse d'assignations à résidence de personnes faisant l'objet d'une interdiction de territoire prononcée par le juge pénal pour des actes en lien avec une entreprise terroriste obéit à des motifs d'ordre public d'une particulière importance. En réalité, les choses sont donc plus nuancées, et moins univoques qu'il n'y paraît à la seule lecture des dispositions contestées.

Mais il nous semble, toutefois, que la question de constitutionnalité, qui appelle une appréciation de proportionnalité particulière est sérieuse, et qu'il est dans l'ordre des choses que le Conseil constitutionnel ait l'occasion de se prononcer sur ces dispositions.

Par ces motifs, nous concluons donc à la transmission au Conseil constitutionnel de la QPC posée par M. D..


(1) Référé-suspension contre l'arrêté du 24 novembre 2016 : rejet par ordonnance devenue définitive du 16 décembre 2016 ; deux référés-liberté contre les arrêtés du 24 novembre et du 30 janvier 2016 : rejet par deux ordonnances du 24 février et du 1er mars 2017 ; référé-suspension contre l'arrêté du 24 novembre 2016, avec de nouveaux moyens et QPC mettant en cause l'article L. 561-1 : rejet et non-renvoi de la QPC, par conséquent, par ordonnance du 6 avril 2017.
(2) En première instance, rejet de la demande de suspension pour défaut d'urgence et non-renvoi, par conséquent, de la QPC (ordonnance du 6 avril 2017) ; en cassation, le requérant a, à nouveau, présenté la même QPC en cassation de référé (CE 2ème ch., 12 juillet 2017, n° 410425 N° Lexbase : A6450WN9) : vous avez jugé, conformément à votre jurisprudence "Prototech", que cette QPC ne pouvait être transmise, le requérant ayant seulement la faculté de contester le refus de transmission par les premiers juges.

newsid:460286

Droit des étrangers

[Brèves] Assignation à résidence des étrangers faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion et absence de borne temporelle : une QPC transmise au Conseil constitutionnel

Réf. : CE, 2° et 7° ch.-r., 20 septembre 2017, n° 411774 (N° Lexbase : A2844WS7)

Lecture: 2 min

N0267BX8

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par Marie Le Guerroué

Le 28 Septembre 2017

Le Conseil d'Etat transmet au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative aux modalités d'assignation à résidence des étrangers faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion dans une décision du 21 septembre 2017 (CE 2° et 7° ch.-r., 20 septembre 2017, n° 411774 N° Lexbase : A2844WS7 ; à retrouver, aussi, les conclusions du Rapporteur public sur cette affaire N° Lexbase : N0286BXU).

Par un arrêté du 24 novembre 2016, le ministre de l'Intérieur avait assigné à résidence M. X, lui avait astreint de se présenter quatre fois par jour au commissariat de police, à demeurer tous les jours dans les locaux où il réside, et lui avait interdit de se déplacer en dehors de son lieu d'assignation à résidence sans autorisation écrite préalable du préfet. M. X faisait, par ailleurs, l'objet d'un arrêté d'expulsion mais se trouvait dans l'impossibilité de regagner son pays d'origine. Il avait saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation dudit arrêté et assorti cette demande d'une question prioritaire de constitutionnalité transmise, par la suite, à la Haute cour administrative.

Le Conseil d'Etat note que l'article L. 561-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L9292K4W) prévoit, à la dernière phrase du huitième alinéa, une dérogation à la durée maximale de six mois prévue pour l'assignation à résidence d'un étranger autorisé à se maintenir provisoirement sur le territoire français et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine, ni se rendre dans aucun autre pays, notamment pour les étrangers faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion. Dans ce cas, aucune borne temporelle à l'assignation à résidence n'est définie. L'article, à la troisième phrase du neuvième alinéa, prévoit également, que l'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion peut, quel que soit l'endroit où il se trouve, être astreint à résider dans des lieux choisis par l'autorité administrative dans l'ensemble du territoire de la République.

Le Conseil d'Etat estime que la critique tirée de ce que les dispositions de la dernière phrase du huitième alinéa et de la troisième phrase du neuvième alinéa de l'article L. 561-1 portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment à la liberté d'aller et venir, revêt un caractère sérieux. Il transmet donc la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

Le Conseil constitutionnel se prononcera d'ici trois mois sur la conformité à la Constitution des dispositions législatives critiquées (cf. l’Ouvrage "Droit des étrangers" N° Lexbase : E3879EYC).

newsid:460267

Entreprises en difficulté

[Brèves] Personnes éligibles à la procédure collective : notion de professionnel indépendant

Réf. : Cass. com., 20 septembre 2017, n° 15-24.644, F-P+B+I (N° Lexbase : A3784WSX)

Lecture: 1 min

N0270BXB

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par Vincent Téchené

Le 28 Septembre 2017

L'exercice d'une activité professionnelle indépendante, distincte de celle exercée pour le compte et au nom de la société dont une personne physique est gérant et associé majoritaire, ne peut se déduire de sa seule inscription au répertoire des entreprises et de leurs établissements tenu par l'INSEE. Telle est la solution énoncée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 20 septembre 2017 (Cass. com., 20 septembre 2017, n° 15-24.644, F-P+B+I N° Lexbase : A3784WSX).

En l'espèce, l'URSSAF a assigné en ouverture d'une procédure de redressement judiciaire une personne physique en qualité de travailleur indépendant. Ce dernier s'y est opposé en faisant valoir qu'il n'exerce pas son activité à titre individuel mais dans le cadre d'une société à responsabilité limitée dont il est le gérant et associé majoritaire. La cour d'appel ouvre une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de l'intéressé. Elle retient que ce dernier est mentionné au répertoire SIRENE de l'INSEE dans la catégorie des entrepreneurs individuels depuis le 1er octobre 2001, avec pour activité principale des "activités de sécurité privée". Elle retient encore qu'il ne justifie pas s'être fait radier de ce répertoire, de sorte que l'URSSAF est fondée à soutenir que, outre ses activités de gérant majoritaire, il est toujours enregistré comme travailleur indépendant à l'INSEE et redevable, à ce titre, de cotisations sociales.

Enonçant la solution précitée, la Cour de cassation censure l'arrêt d'appel au visa de l'article L. 631-2 du Code de commerce (N° Lexbase : L8853IN9), retenant qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'exercice effectif par l'intéressé d'une activité professionnelle indépendante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale (cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté" N° Lexbase : E7852ETY).

newsid:460270

Entreprises en difficulté

[Brèves] Réalisation des actifs de la procédure collective et licitation d'un immeuble indivis

Réf. : Cass. com., 20 septembre 2017, n° 16-14.295, F-P+B+I (N° Lexbase : A2797WSE)

Lecture: 1 min

N0265BX4

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par Vincent Téchené

Le 28 Septembre 2017

Lorsqu'un immeuble dépend d'une indivision préexistante au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire d'un des co-indivisaires, la licitation de cet immeuble, qui est l'une des opérations de liquidation et partage de l'indivision, échappe aux règles applicables en matière de réalisation des actifs de la procédure collective et ne peut être ordonnée qu'après examen des demandes formées par l'un des co-indivisaires in bonis tendant au maintien dans l'indivision et à l'attribution préférentielle de l'immeuble. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 20 septembre 2017 (Cass. com., 20 septembre 2017, n° 16-14.295, F-P+B+I N° Lexbase : A2797WSE).

En l'espèce, un débiteur faisant l'objet d'une liquidation judiciaire est propriétaire indivis d'un immeuble avec sa mère et sa soeur. Le liquidateur a assigné ces dernières en partage et licitation de l'immeuble. Elles ont formé une opposition à l'arrêt qui, statuant par défaut, a ordonné l'ouverture des opérations de liquidation et de partage de l'indivision et préalablement, la licitation de l'immeuble.

Les juges du fond (CA Aix-en-Provence, 18 novembre 2014, n° 14/12068 N° Lexbase : A5900M3W) ont écarté les demandes de la mère du débiteur fondées sur les articles 822 (N° Lexbase : L9954HNY) et 831-2 (N° Lexbase : L9497I7U) du Code civil, retenant que ces dispositions ne sont pas applicables lorsque le bien concerné est soumis à une vente forcée qui intervient en exécution des dispositions spéciales, d'ordre public, relatives à la procédure collective.

Sur pourvoi formé par la mère du débiteur, la Cour de cassation énonçant la solution précitée, censure l'arrêt d'appel au visa des articles 815-17 (N° Lexbase : L9945HNN), 822 et 831-2 du Code civil (cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté" N° Lexbase : E4635EU9).

newsid:460265

Fonction publique

[Brèves] Radiation de l'armée d'un général pour manquement aux obligations de réserve et de loyauté

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 22 septembre 2017, n° 404921, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A7384WSB)

Lecture: 1 min

N0329BXH

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par Yann Le Foll

Le 28 Septembre 2017

Un général ayant manqué à ses obligations de réserve et de loyauté encourt la radiation de l'armée. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 22 septembre 2017 (CE 2° et 7° ch.-r., 22 septembre 2017, n° 404921, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7384WSB, sur le contrôle de proportionnalité sur les sanctions infligées aux militaires, voir CE 2° et 7° s-s-r., 12 janvier 2011, n° 338461, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7698GPS).

Les officiers généraux placés dans la deuxième section sont soumis à l'obligation de réserve qui s'impose à tout militaire (C. def., art. L. 4121-2 N° Lexbase : L2544HZA). M. X a participé à une manifestation interdite par l'autorité préfectorale et a appelé au maintien de la participation à cette dernière alors qu'il n'ignorait pas cette interdiction, ainsi qu'il l'a reconnu dans le cadre de l'enquête disciplinaire. Il a pris publiquement la parole, devant la presse, au cours de cette manifestation pour critiquer de manière virulente l'action des pouvoirs publics, notamment la décision d'interdire la manifestation, et l'action des forces de l'ordre, en se prévalant de sa qualité d'officier général et des responsabilités qu'il a exercées dans l'armée, alors même qu'il ne pouvait ignorer, contrairement à ce qu'il soutient, le fort retentissement médiatique de ses propos.

S'il soutient qu'il n'était pas en service et qu'il portait une tenue civile, que la manifestation a été brève et qu'il a déféré à la sommation de dispersion des forces de l'ordre, qu'il n'a tenu que des propos oraux, qui ne présentaient aucun caractère injurieux, irrespectueux ou violent à l'égard des institutions, enfin qu'il n'était animé d'aucune volonté de déloyauté à l'égard de sa hiérarchie, les faits précités caractérisent des manquements de l'intéressé à ses obligations, à l'occasion de la manifestation en cause, de nature à justifier une sanction disciplinaire (cf. l’Ouvrage "Fonction publique" N° Lexbase : E9831EPS).

newsid:460329

Procédure

[Manifestations à venir] Conférence-débat - Quel office du juge en 2018 ?

Lecture: 1 min

N0337BXR

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par Marie Le Guerroué

Le 28 Septembre 2017

L'association "Droit & Procédure" organise une conférence-débat sur le thème : "Quel office du juge en 2018 ? Plaidoyer pour un juge moins souvent mais un juge plus présent".
  • Date et lieu

Lundi 2 octobre 2017 de 17 h 30 à 19 h 30.

La conférence se déroulera au Grand Auditorium de la Maison du Barreau de Paris située 2 rue de Harlay, 75001 Paris.

  • Programme

Accueil des participants par Emmanuel Jullien, avocat au barreau de Paris, Président de "Droit & Procédure"

Première table ronde : le procès sans le juge (ou comment éviter les lenteurs de la procédure mais aussi les délais couperets et leurs sanctions)

- Corinne Bléry, Maître de conférences HDR à la faculté de droit de Caen

- Muriel Cadiou, avocate à la cour d'appel de Paris, membre du conseil d'administration de "Droit & Procédure"

- Claude Duvernoy, ancien bâtonnier du barreau des Hauts de Seine, Président de l'HEDAC, Président de la Fédération Française des Centres de Médiation (FFCM), Président de "Médiation en Seine"

- Renaud Le Breton de Vannoise, Président du tribunal de grande instance de Bobigny

- Fabien Waechter, Président de Lexbase

Deuxième table ronde : le juge dans le procès (ou comment faire du temps du procès un temps utile)

- Irène Luc, Présidente de chambre à la cour d'appel de Paris

- François Teytaud, avocat à la cour d'appel de Paris

  • Renseignements et inscription

Véronique Jeandé

Secrétariat "Droit & Procédure"

17 bis Route du Moulin à Vent

78740 Vaux sur Seine

01 34 74 38 95 / 06 88 90 78 12 - Fax : 01 34 74 16 21

jeande.veronique@orange.fr

www.droitetprocedure.com

  • Formation continue

Cette conférence-débat est validée au titre de la formation continue obligatoire des avocats.

newsid:460337

Procédure civile

[Brèves] Mouvement de grève du barreau Paris : un obstacle insurmontable à l'assistance d'un conseil

Réf. : Cass. civ. 1, 13 septembre 2017, n° 16-22.819, F-P+B (N° Lexbase : A0743WSC)

Lecture: 2 min

N0200BXP

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par Aziber Seïd Algadi

Le 28 Septembre 2017

Après avoir relevé qu'en raison d'un mouvement de grève du barreau de Paris, aucun avocat n'était présent à l'audience et que, dès lors, la demande de désignation d'un avocat commis d'office n'avait pu être suivie d'effet, le premier président en a justement déduit que cette circonstance constituait un obstacle insurmontable à l'assistance d'un conseil. Telle est la solution retenue par un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation rendu le 13 septembre 2017 (Cass. civ. 1, 13 septembre 2017, n° 16-22.819, F-P+B N° Lexbase : A0743WSC ; sur le sujet, lire T. Vallat, Fragilisation des droits de la défense pendant une période de grève des avocats, Lexbase éd. prof., n° 202, 2015 N° Lexbase : N9379BUW).

En l'espèce, M. A., placé en soins sans consentement sous la forme d'un programme de soins, a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de mainlevée de la mesure sur le fondement de l'article L. 3211-12 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L2976IYU). Il a ensuite fait grief à l'ordonnance (CA Paris, Pôle 2, 12ème ch., 26 octobre 2015, n° 15/00451 N° Lexbase : A0618NUG) de rejeter sa demande, alors qu'un renvoi était selon lui normalement envisageable. En jugeant le contraire, le magistrat délégué par la première présidente de la cour d'appel de Paris aurait méconnu les exigences de la défense et celles de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L7558AIR) ainsi que l'article 16 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1133H4Q). Aussi, en ne précisant pas en quoi l'audience publique du 22 octobre 2015 ne pouvait être reportée à une date ultérieure pour que l'appelant puisse être effectivement assisté d'un avocat comme il le souhaitait, le délai s'imposant à la cour d'appel pour statuer expirant le 2 novembre 2015 à 24 heures, le magistrat délégué par le premier président de la cour d'appel de Paris aurait privé son arrêt de base légale au regard des articles R. 3211-22 du Code de la santé publique, 642 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6803H74) et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

A tort. Après avoir énoncé le principe susvisé, la Cour de cassation rejette son pourvoi en notant par ailleurs, qu'il ne résulte ni de l'ordonnance ni des productions que M. A. ait demandé le renvoi de l'affaire du fait de l'absence d'un avocat (cf. les Ouvrages "Procédure civile" N° Lexbase : E3884EUE et "La profession d'avocat" N° Lexbase : E9554ETZ).

newsid:460200

Procédure pénale

[Brèves] Conséquence nécessaire de l'effet dévolutif de l'appel contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention

Réf. : Cass. crim., 19 septembre 2017, n° 17-84.165, FS-P+B (N° Lexbase : A7663WSM)

Lecture: 1 min

N0292BX4

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par Aziber Seïd Algadi 

Le 28 Septembre 2017

Ne constitue pas une évocation, mais la conséquence nécessaire de l'effet dévolutif de l'appel, la décision d'une chambre de l'instruction qui, saisie de l'appel du ministère public contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention disant n'y avoir lieu à révocation du contrôle judiciaire de la personne mise en examen, statue sur cette mesure. Telle est la substance d'un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, rendu le 19 septembre 2017 (Cass. crim., 19 septembre 2017, n° 17-84.165, FS-P+B N° Lexbase : A7663WSM).

En l'espèce, M. G., mis en examen notamment des chefs de blanchiment, importation de marchandises prohibées, importation de marchandises contrefaites et travail dissimulé, a été placé sous contrôle judiciaire le 15 juin 2016, avec notamment l'obligation de verser un cautionnement de 15 000 euros. A défaut de paiement de cette somme, le juge d'instruction a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de révocation du contrôle judiciaire. Par ordonnance du 31 mai 2017, le juge des libertés et de la détention a refusé de placer l'intéressé en détention provisoire et a modifié les obligations du contrôle judiciaire, supprimant l'obligation de versement dudit cautionnement. La cour d'appel, après avoir relevé que le juge des libertés et de la détention avait excédé ses pouvoirs en modifiant les modalités du contrôle judiciaire fixées par le juge d'instruction, a renvoyé le dossier au magistrat instructeur, estimant ne pouvoir se prononcer sur la révocation du contrôle judiciaire en application de l'article 207 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2994IZW).

A tort selon les juges suprêmes qui jugent qu'en procédant ainsi, alors qu'il lui appartenait de statuer sur l'appel du ministère public en appréciant elle-même s'il y avait lieu ou non de placer la personne mise en examen en détention provisoire, la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs au regard du texte susvisé et du principe ci-dessus rappelé (cf. l’Ouvrage "Procédure pénale" N° Lexbase : E4522EUZ).

newsid:460292

Propriété intellectuelle

[Manifestations à venir] L'avenir de la propriété intellectuelle

Lecture: 1 min

N0386BXL

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Le 28 Septembre 2017

L'Association des jeunes universitaires spécialisés en propriété intellectuelle (JUSPI) organise, le 3 octobre 2017, son premier colloque, consacré à "L'avenir de la propriété intellectuelle". Ses membres y présenteront le fruit de leurs réflexions, entourés de professeurs de renom et d'universitaires étrangers.
  • Programme

Ouverture
Célia Zolynski
, Professeur à l'Université Versailles-Saint-Quentin, membre du Conseil National du Numérique

Première partie : La propriété intellectuelle, un droit en mouvement
Présidence : Laurence Dreyfuss-Bechmann, Avocat, Fidal

- Les marques, un droit de propriété intellectuelle comme les autres ?
Yann Basire, Maître de conférences à l'Université de Haute-Alsace, chargé d'enseignement au CEIPI

- La défense des droits de propriété intellectuelle : cumuls et options
Sylvain Chatry, Maître de conférences à l'Université de Perpignan Via Domitia

- Propriété intellectuelle et santé publique
Caroline Le Goffic, Maître de conférences à l'Université Paris Descartes

- L'évolution des signes européens de protection de la qualité
Pilar Montero, Professeur à l'Université d'Alicante

Seconde partie : La propriété intellectuelle, un droit d'avenir

- L'avenir du statut social des auteurs et artistes interprètes
Stéphanie Le Cam, Maître de conférences à l'Université Rennes 2

- L'avenir du brevet dans les technologies bas carbone
Amélie Favreau, Maître de conférences à l'Université Grenoble-Alpes

- Les chartes de propriété intellectuelle
Nicolas Bronzo, Maître de conférences à l'Université d'Aix-Marseille

Synthèse
Edouard Treppoz, Professeur à l'Université Jean Moulin Lyon 3

  • Date et heure

Mardi 3 octobre 2017
13h30-18h

  • Lieu

Faculté de droit de l'Université Paris Descartes,
10 avenue Pierre Larousse, 92240 Malakoff

  • Renseignements et inscriptions

Email : lesjuspi@gmail.com

Manifestation gratuite validée au titre de la formation continue des avocats.

newsid:460386

Responsabilité

[Brèves] Affaire du "Mediator" : exclusion de l'exonération de responsabilité du laboratoire fabricant

Réf. : Cass. civ. 1, 20 septembre 2017, n° 16-19.643, F-P+B+I (N° Lexbase : A3786WSZ)

Lecture: 2 min

N0274BXG

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par June Perot

Le 28 Septembre 2017

L'action introduite devant la juridiction civile par la victime du Mediator et qui n'est pas fondée sur les infractions pour lesquelles une information judiciaire était ouverte contre la société des chefs de tromperie, homicides et blessures involontaires, mais sur la responsabilité sans faute de celle-ci au titre de la défectuosité du produit, est indépendante de l'action publique et n'a donc pas à être suspendue de ce fait.

La cour d'appel a pu déduire qu'il existait des présomptions graves, précises et concordantes permettant de retenir que la pathologie est imputable au Mediator dès lors que, si l'expert judiciaire a conclu à une causalité seulement plausible, le collège d'experts, placé auprès de l'ONIAM, et chargé d'émettre un avis sur les dommages et les responsabilités en vue d'une indemnisation amiable des victimes du benfluorex, s'est ensuite, à la demande de la victime, prononcé en faveur d'une imputabilité de l'insuffisance aortique à la prise de Mediator, que la connaissance sur les effets nocifs du médicament avait alors progressé, qu'aucune hypothèse faisant appel à une cause étrangère n'a été formulée et qu'aucun élément ne permet de considérer que la pathologie de l'intéressée est antérieure au traitement par le Mediator.

La cour d'appel a exactement déduit que le laboratoire n'était pas fondé à invoquer une exonération de responsabilité au titre du dommage subi dès lors qu'après avoir retenu le caractère défectueux du Mediator, l'arrêt décrit, par motifs propres et adoptés, les conditions dans lesquelles ont été révélés les effets nocifs de ce produit en raison, notamment, de sa similitude avec d'autres médicaments qui, ayant une parenté chimique et un métabolite commun, ont été, dès 1997, jugés dangereux, ce qui aurait dû conduire la société à procéder à des investigations sur la réalité du risque signalé, et, à tout le moins, à en informer les médecins et les patients, qu'il ajoute que la possible implication du Mediator dans le développement de valvulopathies cardiaques, confirmée par le signalement de cas d'hypertensions artérielles pulmonaires et de valvulopathies associées à l'usage du benfluorex, a été mise en évidence par des études internationales et a conduit au retrait du médicament en Suisse en 1998, puis à sa mise sous surveillance dans d'autres pays européens et à son retrait en 2003 en Espagne, puis en Italie, ce dont il résulte que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment de la mise en circulation des produits administrés à la victime entre 2006 et 2009, permettait de déceler l'existence du défaut du Mediator.

Telle est la solution énoncée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 20 septembre 2017 (Cass. civ. 1, 20 septembre 2017, n° 16-19.643, F-P+B+I N° Lexbase : A3786WSZ ; cf. l’Ouvrage "Responsabilité civile" N° Lexbase : E3532EUD).

newsid:460274

Responsabilité médicale

[Panorama] Panorama de droit des accidents médicaux (mars - septembre 2017) - Partie 1

Lecture: 13 min

N0279BXM

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par Christophe Radé, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit médical"

Le 05 Octobre 2017

Lexbase Hebdo - édition privée vous propose de retrouver, cette semaine, le panorama de droit des accidents médicaux de Christophe Radé, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux et Directeur scientifique de l’Ouvrage "Droit médical", traitant de l'actualité de mars à septembre 2017, rendue par les juridictions administratives et judiciaires.

Compte tenu du nombre important de décisions, le panorama fera l'objet d'une publication en deux parties.

Sont donc abordés dans la première partie de ce panorama, les derniers arrêts rendus en matière de responsabilité des professionnels et établissements de santé (faute médicale en relation avec le choix du traitement, la prescription, le défaut de surveillance, défaut d'information etc.), les arrêts relatifs aux infections nosocomiales, ainsi que les arrêts concernant l'indemnisation par l'ONIAM et les recours des tiers payeurs. 1. Responsabilité des professionnels et établissements

1.1. Faute médicale

  • Traitement. Ne commet pas de faute, à la lumière de l'ensemble des éléments du dossier, le médecin, chargé de valider le principe et les modalités de rapatriement, qui a décidé le rapatriement du patient victime d'une crise de paludisme par avion de ligne, sans que le médecin transporteur ne soit muni de Quinine IV : (Cass. crim., 21 mars 2017, n° 15-87.377, F-D N° Lexbase : A7754ULR ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5291E74).
  • Prescription. Ne commet pas de faute le médecin qui prescrit à une patiente un médicament qui peut avoir causé l'addiction au jeu dont celle-ci se plaignait, selon une posologie qui dépassait très légèrement la dose maximale recommandée par l'autorisation de mise sur le marché pour le syndrome dont souffrait la patiente ; l'addiction était par ailleurs survenue alors que la patiente avait absorbé un plus grand nombre de comprimés pour obtenir une meilleure efficacité du traitement sur ses jambes, le premier médecin prescripteur n'ayant reçu aucun compte-rendu mentionnant les doses prescrites (Cass. civ. 1, 29 mars 2017, n° 16-13.577, F-D N° Lexbase : A0914UTZ ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5291E74).
  • Surveillance. Commet une faute l'hôpital public qui place un patient en cours de sevrage alcoolique sur un brancard dont les barrières de sécurité se trouvaient au minimum à 110 centimètres du sol, alors notamment que des recommandations de la Société française de médecine d'urgence indiquent que la crise d'épilepsie survenue en contexte de sevrage alcoolique comporte un risque de récidive accru et justifie une surveillance particulière du patient, et que l'hôpital où le patient était ordinairement suivi et où son état antérieur était connu, ne justifiait d'aucun traitement ni d'aucune forme de surveillance organisée de ce patient après son admission, ni même de son installation dans des lieux permettant une surveillance occasionnelle ou incidente, alors que son placement sur un brancard dont les barrières de sécurité se trouvaient au minimum à 110 centimètres du sol était susceptible, en cas de chute, d'aggraver notablement les conséquences d'une nouvelle crise (CE 5ème ch., 19 juillet 2017, n° 395243 N° Lexbase : A2046WN4 ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5430E7A).
  • Organisation. Commet une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service de nature à engager sa responsabilité le centre hospitalier qui été dans l'incapacité d'assurer l'opération du patient dans le délai qu'exigeait son état, en effectuant la remise en état opérationnelle de la salle d'opération immédiatement après la fin de la césarienne, alors que la situation à laquelle était confronté l'hôpital n'avait aucun caractère exceptionnel (CE 5ème ch., 19 juillet 2017, n° 395083 N° Lexbase : A2044WNZ ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5430E7A).
  • Imputabilité directe du dommage à la faute. Est à l'origine du dommage corporel subi et pas seulement d'une perte de chance d'en éviter la survenue, la technique mise en oeuvre lors de la réalisation de l'injection anesthésique qui n'était pas conforme aux règles de l'art en raison d'un réglage élevé du neurostimulateur, de l'absence de modification de ce réglage lors de la recherche et de l'apparition de la réponse, et de la poursuite de l'injection au-delà d'un certain volume malgré la persistance de la réponse motrice, ce qui explique la survenue de cet accident et l'absence de reconnaissance précoce de l'injection intra vasculaire (Cass. civ. 1, 29 mars 2017, n° 16-13.866, F-D N° Lexbase : A0935UTS ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5438E7K).
  • Défaut d'information. Lorsqu'il est envisagé de recourir à une technique d'investigation, de traitement ou de prévention dont les risques ne peuvent être suffisamment évalués à la date de la consultation, notamment parce que cette technique est récente et n'a été mise en oeuvre qu'à l'égard d'un nombre limité de personnes, l'information du patient doit porter à la fois sur les risques fréquents ou graves normalement prévisibles déjà identifiés de cette technique mais aussi sur le fait que l'absence d'un recul suffisant ne permet pas d'exclure l'existence d'autres risques (CE 4° et 5° ch.-r., 10 mai 2017, n° 397840, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1107WCY (1) ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E9757EQG).

Les faits. Le CHU de Nice a proposé à un malade de bénéficier d'une technique opératoire nouvelle censée permettre une récupération plus rapide mais qui n'avait jusqu'à lors été appliquée qu'à un nombre très limité de patients. A la suite de l'opération il a conservé des séquelles et a saisi les juridictions administratives d'une demande indemnitaire, qui a été satisfaite. Pour la cour administrative d'appel de Marseille en effet, les médecins avaient commis une faute en ne l'informant pas des risques liés à la méthode utilisée et qui n'étaient pas suffisamment connus, et en ne lui présentant que les avantages de cette technique ; la cour avait mis à la charge de l'établissement la réparation d'une perte de chance d'éviter le dommage, imputable à ce défaut d'information, qu'elle a évalué à 50 %.

C'est ce que confirme le rejet du pourvoi. Pour le Conseil d'Etat, en effet, "lorsqu'il est envisagé de recourir à une technique d'investigation, de traitement ou de prévention dont les risques ne peuvent être suffisamment évalués à la date de la consultation, notamment parce que cette technique est récente et n'a été mise en oeuvre qu'à l'égard d'un nombre limité de patients, l'information du patient doit porter à la fois sur les risques fréquents ou graves normalement prévisibles déjà identifiés de cette technique et sur le fait que l'absence d'un recul suffisant ne permet pas d'exclure l'existence d'autres risques".

Une solution pleinement justifiée. La solution est parfaitement justifiée, tant au regard des textes que de la finalité de l'obligation d'information du patient (2).

L'article L. 1111-2 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L9646KXK) dispose que l'information due au patient "porte sur [...] les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus". Ces risques sont ceux qui sont conformes aux données acquises de la science ; un professionnel ne saurait être condamné pour n'avoir pas communiqué des risques qui n'ont été avérés qu'ultérieurement (3). Mais lorsqu'on se situe dans un contexte d'incertitudes scientifiques, la prise en considération du principe de précaution a conduit à enrichir le contenu de l'obligation d'information en imposant au professionnel d'informer le patient sur l'incertitude existant et sur le fait qu'il n'est pas en mesure de lui garantir la sécurité, ou l'innocuité, de l'acte ou du produit (4). C'est cette idée qui se trouve ici mise en oeuvre.

La solution est également logique dans la mesure où l'objet même de l'obligation d'information est de permettre au patient de prendre une décision éclairée, au regard des informations détenues par le médecin. Seul le patient est habilité à se déterminer au regard du bilan bénéfices/risques, et il ne peut le faire que s'il est informé de l'ensemble des risques inhérents à l'acte ou à la technique proposée ; or, l'absence de certitudes sur les risques constitue bien un...risque que le patient est en droit de connaître pour se décider en connaissance de cause.

  • Réparation des suites du défaut d'information. La perte de chance d'éviter le dommage, consécutive à la réalisation d'un risque dont le patient aurait dû être informé, constitue un préjudice distinct du préjudice moral résultant d'un défaut de préparation aux conséquences de ce risque et consiste, dès lors que son existence est retenue par les juges du fond, en une fraction des différents chefs de préjudice déterminée en mesurant la chance perdue (Cass. civ. 1, 22 juin 2017, n° 16-21.141, F-D N° Lexbase : A1040WKQ (5) ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5445E7S).
  • Homicide involontaire. Commet le délit d'homicide involontaire la chirurgienne dont la défaillance complète a été établie ; au lendemain de l'hémorroïdectomie pratiquée sur une patiente de 42 ans, elle n'a procédé à aucun examen ; dans la journée suivante elle ne s'est pas préoccupée de sa patiente ; appelée par l'infirmière en fin d'après-midi, elle s'est contentée de prescrire la poursuite du traitement initial, sans manifester l'intention de se déplacer ; par la suite elle a coupé son téléphone portable de sorte qu'elle n'a pu recevoir l'appel de l'infirmière alors qu'il lui incombait, de sa propre initiative, de s'enquérir d'une possible aggravation de l'état de celle qui était sous sa responsabilité ; ces manquements sont d'autant plus graves qu'ayant opéré la patiente d'une zone poly microbienne, la chirurgienne ne pouvait qu'avoir conscience du risque infectieux dont le traitement pré opératoire administré par l'anesthésiste ne pouvait suffire à se prémunir et alors que les symptômes de douleurs abdominales persistantes, un état de faiblesse généralisé et l'apparition d'une température anormale dont le chirurgien aurait dû avoir connaissance s'il avait été normalement diligent aurait dû l'alerter sur la dégradation de l'état de santé de sa patiente ; l'alerte que constituaient tous ces symptômes aurait dû conduire le médecin à envisager un phénomène infectieux et, ce faisant, celle-ci aurait dû, au moins dès le soir, prescrire une analyse de sang et, dans l'attente des résultats, dont la suite a démontré qu'ils pouvaient être obtenus 2 heures plus tard, prescrire une antibiothérapie prophylactique afin de prémunir la patiente de toute complication infectieuse, permettant ainsi, par sa négligence et par l'absence de soins attentifs qui lui incombaient, le développement de la pathologie infectieuse qui a conduit à l'issue fatale (Cass. crim., 19 avril 2017, n° 16-83.640, F-D N° Lexbase : A3188WAC ; cf. l’Ouvrage "Droit pénal spécial" N° Lexbase : E4892EXH).

1.2. Infections nosocomiales

  • Caractère nosocomial de l'infection. La circonstance que l'infection a été contractée à l'occasion d'une greffe d'organe ne fait pas obstacle à l'application des dispositions relatives à l'indemnisation des victimes d'infections nosocomiales (CE 4° et 5° ch.-r., 30 juin 2017, n° 401497, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1794WLZ ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5407E7E).

Les faits. A la suite d'une transplantation rénale, un patient avait développé une infection soignée par traitement antifongique, avant d'être réopéré en urgence à deux reprises et que le greffon ne soit retiré. Il avait obtenu en appel une condamnation de l'ONIAM à lui verser une provision en raison du caractère nosocomial de l'infection. L'ONIAM contestait cette condamnation et tentait de faire valoir le caractère subsidiaire de l'indemnisation due à la victime, opposant à la fois une faute de l'établissement dans la préparation du liquide de rinçage du greffon et la responsabilité de l'établissement en raison du défaut du greffon, ce que ne retient pas le Conseil d'Etat qui confirme la condamnation intervenue en appel.

Une solution logique. L'article L. 1142-1-1 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L1859IEL) subordonne l'indemnisation par l'ONIAM au seul constat du caractère nosocomial de l'infection, sans autre condition (outre la gravité de l'atteinte), et singulièrement sans que puisse être opposée à la victime une éventuelle faute commise par l'établissement. Certes, dans cette hypothèse la jurisprudence autorise la victime à choisir entre la responsabilité pour faute de l'établissement, fondée sur l'article L. 1142-1, I, du Code de la santé publique (N° Lexbase : L1910IEH), et l'indemnisation par l'ONIAM dans le cadre de l'article L. 1142-1-1 de ce même code (6). Mais en aucun cas la faute de l'établissement ne saurait présenter de caractère exonératoire pour l'ONIAM, cette exonération ne pouvant résulter que d'une "circonstance extérieure à l'activité hospitalière" (7).

L'ONIAM tentait également de faire valoir ici le caractère subsidiaire de son obligation au regard de la responsabilité de plein droit de l'établissement en raison d'un défaut du greffon. Cet argument ne pouvait pas non plus être admis dans la mesure où le caractère subsidiaire de l'obligation indemnitaire de l'ONIAM ne vaut que dans le cadre de sa compétence générale visée à l'article L. 1142-1, II, du Code de la santé publique, et non dans les hypothèses particulières où le législateur l'a désigné comme devant indemniser la victime.

  • Preuve du caractère nosocomial. Le juge ne peut écarter le caractère nosocomial d'une infection au motif que l'inflammation du nerf vestibulaire était liée à une infection virale "sans rapport avec les soins", alors que, si la cour regardait comme établi que l'inflammation avait été causée par une infection, il lui appartenait seulement de vérifier si celle-ci était présente ou en incubation lors de l'admission et, en cas de réponse négative, de reconnaître son caractère nosocomial et de rechercher si l'établissement apportait la preuve d'une cause étrangère (CE 4/5 ch.-r., 8 juin 2017, n° 394715, inédit N° Lexbase : A6116WKQ ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5260E7X).

L'affaire. Dans cette affaire la patiente avait été hospitalisée pour traiter des coliques néphrétiques, et avait présenté, lors de son hospitalisation une névrite vestibulaire à l'oreille gauche d'origine virale. Le tribunal administratif avait écarté la qualification d'infection nosocomiale en raison de l'origine endogène du virus en cause, oubliant sans doute que le Conseil d'Etat a écarté cette distinction dès lors qu'il a fait application des dispositions du Code de la santé publique (8). Sans doute consciente de l'erreur commise par le juge de première instance, la cour administrative d'appel avait également écarté la responsabilité de l'hôpital en raison de l'infection mais pour un autre motif tiré du fait que "la survenance de l'infection d'origine virale [...] n'est pas, ne fût-ce que partiellement ou indirectement, en rapport avec les soins qui ont pu être prodigués lors de la prise en charge de la patiente au sein de l'établissement hospitalier", et que "par suite, cette infection virale ne présente pas un caractère nosocomial" (9).

C'est ce qui vaut à l'arrêt d'être cassé. Le Conseil d'Etat rappelle ici que l'infection révélée lors de la période d'hospitalisation est réputée présenter un caractère nosocomial, à moins que l'établissement ne rapporte la preuve que cette infection était "n'était ni présente, ni en incubation au début de cette prise en charge". Pour avoir exigé que l'infection soit en lien avec les soins, l'arrêt est logiquement censuré pour erreur de droit.

1. 3. Produits de santé

1.3.1. Cadre général

  • Remarques liminaires. Les hypothèses mettant en cause la responsabilité des laboratoires pharmaceutiques en raison du défaut de leurs produits de santé ne concernent pas directement l'indemnisation des victimes dans le cadre du droit des accidents médicaux. Les dispositions de la Directive du 25 juillet 1985 (N° Lexbase : L9620AUT) ne s'appliquent en effet pas aux établissements qui utilisent des produits de santé dans le cadre de leurs activités médicales (10). Il est toutefois triplement important d'évoquer ici ces contentieux.

En premier lieu, et du point de vue des patients, la possibilité d'agir directement contre le laboratoire offre une action garantissant une indemnisation effective, tout comme les règles du Code de la santé publique lui garantissent une autre possibilité d'indemnisation.

En deuxième lieu, on sait que l'indemnisation par l'ONIAM, dans le cadre de sa compétence générale, au titre des affections iatrogènes, suppose que la responsabilité d'un producteur ne soit pas caractérisée ; la responsabilité des producteurs de produits de santé détermine donc en creux l'étendue des obligations indemnitaires de l'ONIAM lorsqu'il intervient de manière subsidiaire.

En troisième et dernier lieu, le régime de la responsabilité des établissements qui utilisent des produits de santé dans le cadre des dispositions du code de la santé publique est toujours des plus flous ; même si on sait désormais que la question échappe à l'emprise de la Directive du 25 juillet 1985 (11), on ne peut dire après précision quelles règles doivent s'appliquer. Il nous semble toutefois que la formule du I, alinéa 1er, de l'article L. 1142-1 du Code de la santé publique, aux termes duquel "hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute", doit s'entendre comme énonçant un cas de responsabilité sans faute des établissements et professionnel pour les dommages causés par les produits de santé, cas dont le régime peut être précisé par le juge sans qu'il soit tenu par les termes de la Directive (12).

A suivre...

1.3.2. Jurisprudence européenne

Conformité à la Directive de la preuve du défaut et de l'imputabilité du dommage - Vaccins anti hépatite B (CJUE, 21 juin 2017, aff. C-621/15 N° Lexbase : A1281WKN ; cf. les Ouvrages "Droit médical" N° Lexbase : E0410ERM et "Responsabilité civile" N° Lexbase : E3532EUD).

1.3.3. Jurisprudence nationale

  • Imputabilité du dommage au produit - Distilbène : Cass. civ. 2, 8 juin 2017, n° 16-19.185, F-P+B (N° Lexbase : A4307WHY ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E0128ER8).
  • Imputabilité du dommage - risque de développement - Médiator : Cass. civ. 1, 20 septembre 2017, n° 16-19.643, F-P+B+I (N° Lexbase : A3786WSZ).
  • Recours du fabricant du tout : Cass. civ. 1, 15 mars 2017, n° 15-27.740, F-P+B (N° Lexbase : A2576UCE).

2. Indemnisation par l'ONIAM

  • Accident médical sans responsable - caractère direct du dommage : Cass. civ. 1, 24 mai 2017, n° 16-16.890, FS-P+B (N° Lexbase : A0919WER ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5408E7G).
  • Indemnisation des victimes de contaminations transfusionnelles : CE 4° et 5° ch.-r., 10 mai 2017, n° 392312, mentionné dans les tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1099WCP ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5210E74).
  • Procédure de règlement amiable : Cass. civ. 1, 29 mars 2017, n° 16-13.247, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6073UMU ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5412E7L).

3. Recours

  • Contaminations - recours des tiers payeurs : Cass. civ. 1, 29 mars 2017, n° 16-12.815, F-P+B (N° Lexbase : A0899UTH ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E0124ERZ).
  • Contaminations - recours de l'assureur : CE 4° et 5° ch.-r., 24 mai 2017, n° 395490, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6668WEP ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5414E7N).
  • Recours des tiers payeurs contre l'ONIAM : CE 4° et 5° ch.-r., 24 mai 2017, n° 395914, mentionné aux tables du Recueil Lebon (N° Lexbase : A6669WEQ ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5414E7N).

(1) RDSS, 2017, p. 764, note D. Cristol ; AJDA, 2017, p. 1025, obs. Pastor.
(2) Dans le même sens, CAA Marseille, 3ème ch., 2 décembre 2004, n° 00MA01367 (N° Lexbase : A2191DEU), AJDA, 2005, p. 399.
(3) Cass. civ. 1, 7 juillet 1998, n° 96-19.927 (N° Lexbase : A7539AHP), Resp. civ. et assur., 1998, comm. 393, 1re esp. ; Cass. civ. 1, 12 octobre 2016, n° 15-16.894, FS-P+B (N° Lexbase : A9664R73) ; CE 4° et 5° ch.-r., 19 octobre 2016, n° 391538 (N° Lexbase : A7802R9T, cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E9757EQG).
(4) Affaire du "Bactrim Forte" : Cass. civ. 1, 6 octobre 2011, n° 10-21.709, F-D (N° Lexbase : A6138HYY, cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E0410ERM) : l'AMM ne mentionnait que de "simples "manifestations cutanées", tandis que seule l'annexe I, réservée aux professionnels, faisait état de "quelques cas de nécrolyse épidermique imprévisibles et parfois mortels (syndrome de Lyell)"" ; condamnation du laboratoire Servier en raison du défaut de sécurité du Mediator : TGI Nanterre, 2ème, 22 octobre 2015, deux jugements, n° 12/07723 (N° Lexbase : A8246NWC) et n° 13/06176 (N° Lexbase : A8245NWB) : le TGI s'est fondé sur l'absence de toute indication dans la notice des précautions à prendre face à la multiplication des cas avérés de valvulopathie.
(5) Sur le bénéfice cumulatif du préjudice d'impréparation et de la réparation au titre de l'aléa thérapeutique, voir Cass. civ. 1, 25 janvier 2017, n° 15-27.898, F-P+B+R+I (N° Lexbase : A8411S9E), et nos obs. in Panorama de droit des accidents médicaux (novembre 2016 - mars 2017), Lexbase hebdo, éd. priv., 2017, n° 693 (N° Lexbase : N7352BW9).
(6) Cass. civ. 1, 28 septembre 2016, n° 15-16.117, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A2310R4C) et nos obs. in Panorama de droit des accidents médicaux (juillet 2016 - novembre 2016), Lexbase hebdo, éd. priv., 2016, n° 678 (N° Lexbase : N5398BWT).
(7) CE 4° et 5° s-s-r., 17 février 2012, n° 342366, Mentionné aux tables du Recueil Lebon (N° Lexbase : A8545ICH ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E0439EXK). Voir également CE 5° s-s., 29 décembre 2014, n° 367312, inédit (N° Lexbase : A8317M8K). La Cour de cassation a retenu la même analyse : Cass. civ. 1, 14 avril 2016, n° 14-23.909, FS-P+B (N° Lexbase : A6889RIY).
(8) CE 4° et 5° s-s-r., 10 octobre 2011, n° 328500 (N° Lexbase : A7422HYK ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E0439EXK).
(9) CAA Douai, 2ème ch., 22 septembre 2015, n° 14DA01299 (N° Lexbase : A1121NQL).
(10) CJUE, 21 décembre 2011, aff. C-495/10 (N° Lexbase : A6909H8E ; cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E5266E78) et CE 4° et 5° s-s-r., 12 mars 2012, n° 327449 (N° Lexbase : A9481IEU) et nos obs., in Panorama de responsabilité civile médicale (15 juin - 30 octobre 2010), Lexbase Hebdo, éd. priv., 2010, n° 415 (N° Lexbase : N4537BQ4) ; D., 2011, p. 213, note J.-S. Borghetti ; JCP éd. G, n° 20, 21 mai 2012, 623, note P. Tiffine ; AJDA, 2012, p. 1665, note Hafida Belrhali-Bernard ; RDSS, 2012, p. 716, note J. Peigné ; LPA, 2011, n° 69, p. 7, note M.-C. Rouault.
(11) CJUE, 21 décembre 2011, aff. C-495/10, préc..
(12) En ce sens L. Bloch, Pour une autre présentation de la responsabilité du fait des produits de santé, Resp. civ. et assur., 2009, étude 16.

newsid:460279

Sociétés

[Brèves] Publication d'informations non financières par certaines grandes entreprises et certains groupes d'entreprises

Réf. : Ordonnance n° 2017-1180 du 19 juillet 2017, relative à la publication d'informations non financières par certaines grandes entreprises et certains groupes d'entreprises (N° Lexbase : L2684LGI)

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N9584BWU

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par Vincent Téchené

Le 27 Juillet 2017

Une ordonnance, publiée au Journal officiel du 21 juillet 2017 (ordonnance n° 2017-1180 du 19 juillet 2017, relative à la publication d'informations non financières par certaines grandes entreprises et certains groupes d'entreprises N° Lexbase : L2684LGI), prend les dispositions relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de la Directive 2014/95 du 22 octobre 2014 (N° Lexbase : L8668I4S) ainsi que les mesures d'adaptation de la législation liées à cette transposition. La déclaration de performance extra-financière, qui remplace le rapport de responsabilité sociale des entreprises (RSE), devient un outil de pilotage stratégique de l'entreprise, à la fois concis et accessible, concentré sur les informations significatives intéressant ses parties prenantes.

Le périmètre des sociétés tenues de produire une telle déclaration évolue afin d'orienter le dispositif vers les grandes entreprises. C'est ainsi que les petites et moyennes sociétés cotées ne sont plus soumises à ce dispositif, ce qui constitue une importante mesure de simplification. En outre, le nouveau dispositif exempte les filiales de produire une telle déclaration, dès lors que les informations les concernant sont présentées par la société tête de groupe de façon consolidée, ce qui donne une image complète des impacts extra-financiers des activités du groupe, tout en limitant la charge déclarative pesant sur les filiales.

Le format de la déclaration de performance extra-financière est également clarifié. Le contenu de cette déclaration comprend une mention relative à son modèle d'affaires, une présentation des risques extra-financiers auxquels elle est confrontée, une description des politiques mises en oeuvre pour limiter ces risques ainsi que les résultats de ces politiques. Résultant d'une analyse en profondeur des enjeux extra-financiers auxquels la société est confrontée, la déclaration de performance extra-financière a vocation à devenir un document d'information incontournable pour l'ensemble des parties prenantes.
De manière conséquente, le régime de vérification des informations publiées est également simplifié : il concerne désormais les seules sociétés de plus de 500 salariés et dépassant plus de 100 millions d'euros de total de bilan ou de chiffre d'affaires, alors que le régime actuellement en vigueur vise toutes les sociétés tenues de produire un rapport de RSE.

En outre, la déclaration de performance extra-financière devra désormais être publiée sur le site internet des sociétés visées et maintenue en ligne pendant une durée de cinq ans.

Les dispositions de l'ordonnance s'appliquent aux rapports relatifs aux exercices ouverts à partir du 1er août 2017.

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