La lettre juridique n°691 du 16 mars 2017

La lettre juridique - Édition n°691

Audiovisuel

[Brèves] Appréciation de la nécessité d'assortir le visa d'exploitation d'un avertissement

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 8 mars 2017, n° 406387, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A4623T3M)

Lecture: 1 min

N7169BWG

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par Yann Le Foll

Le 17 Mars 2017

Le juge ne peut se fonder sur les conditions de diffusion du film, en particulier en raison de la nature du titre et de l'affiche, ainsi que du contenu de la bande annonce diffusée avant sa sortie, pour juger que l'information du spectateur sur les particularités de l'oeuvre n'exigeait pas que le visa délivré à la version originale sous-titrée du film soit assorti d'un avertissement. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 8 mars 2017 (CE 3° et 8° ch.-r., 8 mars 2017, n° 406387, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4623T3M). L'article R. 211-13 du Code du cinéma et de l'image animée (N° Lexbase : L7434I3Q) dispose, dans sa rédaction applicable aux visas litigieux que, "sans préjudice de la mesure de classification qui accompagne sa délivrance, le visa d'exploitation cinématographique peut être assorti d'un avertissement, destiné à l'information du spectateur, portant sur le contenu ou les particularités de l'oeuvre ou du document concerné". Pour écarter le moyen tiré de ce que le visa litigieux devait être assorti d'un tel avertissement, le juge des référés a estimé que le public était suffisamment informé du contenu du film et des éléments qu'il comporte susceptibles de choquer les plus jeunes du fait, d'une part, de l'interdiction aux moins de douze ans, exceptionnelle s'agissant d'un film d'animation, et, d'autre part, des conditions de diffusion du film, en particulier en raison de la nature du titre et de l'affiche du film ainsi que du contenu de la bande annonce diffusée avant sa sortie. Il a ainsi, au regard du principe précité, commis une erreur de droit.

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Concurrence

[Brèves] Actions en dommages-intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles

Réf. : Ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017 (N° Lexbase : L2117LDR) ; décret n° 2017-305 du 9 mars 2017 (N° Lexbase : L2124LDZ)

Lecture: 2 min

N7147BWM

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par Vincent Téchené

Le 17 Mars 2017

Une ordonnance relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles, qui transpose la Directive 2014/104 du 26 novembre 2014 (N° Lexbase : L9861I4Y), a été publiée au Journal officiel du 10 mars 2017 (ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017, relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles N° Lexbase : L2117LDR). Constatant que les actions des victimes de pratiques anticoncurrentielles demeuraient peu fréquentes en Europe, alors qu'elles permettent non seulement aux victimes d'obtenir réparation de leurs préjudices mais aussi de sanctionner efficacement les entreprises coupables des pratiques, cette Directive harmonise entre tous les Etats membres de l'Union européenne le cadre juridique de ces actions. Le principal apport de l'ordonnance concerne l'aménagement des règles de preuve. Elle crée, au bénéfice des victimes, des présomptions qui facilitent la preuve non seulement du fait générateur de la responsabilité du défendeur à l'action en dommages et intérêts, mais aussi du préjudice. Elle adapte également les règles applicables aux échanges de pièces comportant des informations sensibles. Compte tenu de la nécessité d'assurer l'efficacité de l'action des autorités de concurrence lorsqu'elles ouvrent des procédures ayant pour objet de sanctionner la commission par une entreprise d'une pratique anticoncurrentielle, les dispositions nouvelles définissent les conditions dans lesquelles des pièces figurant au dossier d'une autorité de concurrence pourront être produites à l'occasion d'une action en réparation. L'ordonnance comporte, par ailleurs, des mesures aménageant la solidarité légale ou y dérogeant lorsque les personnes ayant concouru à la commission d'une pratique anticoncurrentielle sont des petites ou moyennes entreprises ou ont bénéficié d'une exonération totale de sanction pécuniaire dans le cadre de la mise en oeuvre d'une procédure de clémence devant une autorité de concurrence. L'ordonnance comporte enfin des mesures destinées à favoriser les règlements consensuels des litiges entre une victime et l'auteur d'une pratique anticoncurrentielle. Egalement publié au Journal officiel du 10 mars 2017, un décret comporte, avec les adaptations nécessaires aux spécificités de chaque ordre juridictionnel, des dispositions procédurales relatives aux actions indemnitaires du fait de pratiques anticoncurrentielles (décret n° 2017-305 du 9 mars 2017, relatif aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles N° Lexbase : L2124LDZ).

newsid:457147

Discrimination et harcèlement

[Brèves] Port du foulard islamique dans une entreprise privée : principes et limites posés par la CJUE

Réf. : CJUE, 14 mars 2017, deux arrêts, aff. C-157/15 (N° Lexbase : A4829T3A) et aff. C-188/15 (N° Lexbase : A4830T3B)

Lecture: 2 min

N7125BWS

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par Blanche Chaumet

Le 16 Mars 2017

Dans deux arrêts rendus le 14 mars 2017, la CJUE apporte de nouvelles précisions quant aux règles relatives au port du foulard islamique dans une entreprise privée. D'une part, l'interdiction de porter un foulard islamique, qui découle d'une règle interne d'une entreprise privée interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, ne constitue pas une discrimination directe fondée sur la religion ou sur les convictions. En revanche, une telle règle interne d'une entreprise privée est susceptible de constituer une discrimination indirecte s'il est établi que l'obligation en apparence neutre qu'elle prévoit entraîne, en fait, un désavantage particulier pour les personnes adhérant à une religion ou à des convictions données, à moins qu'elle ne soit objectivement justifiée par un objectif légitime, tel que la poursuite par l'employeur, dans ses relations avec ses clients, d'une politique de neutralité politique, philosophique ainsi que religieuse, et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires, ce qu'il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier (CJUE, 14 mars 2017, aff. C-157/15 N° Lexbase : A4829T3A).
D'autre part, la volonté d'un employeur de tenir compte des souhaits d'un client de ne plus voir les services dudit employeur assurés par une travailleuse portant un foulard islamique ne saurait être considérée comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante de nature à justifier le licenciement d'une salariée au motif que celle-ci refusait de retirer son foulard islamique lorsqu'elle était en mission auprès des clients de cette entreprise (CJUE, 14 mars 2017, aff. C-188/15 N° Lexbase : A4830T3B).
Dans la première affaire, une juridiction belge avait saisi la CJUE afin de savoir si l'interdiction de porter un foulard islamique, qui découle d'une règle interne générale d'une entreprise privée, constitue une discrimination directe.
Dans la seconde affaire, la Cour de cassation (Cass. soc., 9 avril 2015, n° 13-19.855, FS-P+B+I N° Lexbase : A3737NGI) souhaitait savoir si la volonté d'un employeur de tenir compte du souhait d'un client de ne plus voir ses services fournis par une travailleuse qui porte un foulard islamique pouvait être considérée comme une "exigence professionnelle essentielle et déterminante" au sens de la Directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 (N° Lexbase : L3822AU4) (pour plus de précisions, voir également le communiqué de presse de la CJUE relatif à ces deux décisions ; cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9166ESB et N° Lexbase : E2590ET4).

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Droit des étrangers

[Brèves] Mainlevée d'un placement en rétention administrative pour irrégularité : l'atteinte aux droits de l'étranger doit être démontrée

Réf. : Cass. civ. 1, 8 mars 2017, n° 16-13.533, F-P+B+I (N° Lexbase : A5868TTI)

Lecture: 2 min

N7078BW3

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par Marie Le Guerroué

Le 16 Mars 2017

L'étranger qui ne s'est pas vu remettre un document écrit l'informant de ses droits dans une langue qu'il comprenait (C. pr. pén., art. 803-6 N° Lexbase : L2753I3D) lors de sa garde à vue mais qui a bénéficié de cette information, par le truchement d'un interprète, doit démontrer l'existence d'un grief résultant du défaut de remise. Telle est la précision apportée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 8 mars 2017 (Cass. civ. 1, 8 mars 2017, n° 16-13.533, F-P+B+I N° Lexbase : A5868TTI). En l'espèce, Mme X, de nationalité algérienne, en situation irrégulière en France, a été placée en garde à vue, le 6 janvier 2016, du chef d'organisation de mariage à visée migratoire, puis en rétention administrative, le 7 janvier. Le préfet a saisi le juge des libertés et de la détention d'une requête en prolongation de la mesure de maintien en rétention administrative, qui a constaté la régularité de la procédure et assigné l'intéressée à résidence. Pour mettre fin à cette mesure, l'ordonnance rendue le 14 janvier 2016 par le premier président de la cour d'appel de Douai, et contestée par le préfet, retient que, lors d'une garde à vue, l'absence de remise d'un document écrit dans une langue comprise par l'intéressé, telle que prévue par l'article 803-6 du Code de procédure pénale, porte nécessairement atteinte à ses droits, même si la personne était assistée d'un interprète lors de la notification de ceux-ci, et qu'il ressortait de la procédure qu'un document avait bien été remis, mais qu'aucun élément ne permettait d'établir qu'il s'agissait bien d'un document en langue arabe, alors qu'il avait été constaté que Mme X avait besoin de l'assistance d'un interprète. La Cour retient la solution susvisée au visa des articles L. 552-1 (N° Lexbase : L9290K4T) et L. 552-13 (N° Lexbase : L5019IQX) du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble les articles 63-1 (N° Lexbase : L4971K8M) et 803-6 du Code de procédure pénale. Elle rappelle qu'il résulte du second de ces textes qu'en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, la juridiction qui est saisie d'une demande d'annulation ou relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger. La Haute juridiction considère, par conséquent, qu'en statuant ainsi, le premier président a violé les textes susvisés et casse et annule l'ordonnance querellée (cf. l’Ouvrage "Droit des étrangers" N° Lexbase : E3927EY4).

newsid:457078

Durée du travail

[Jurisprudence] L'application immédiate de la subsidiarité des accords de branche

Réf. : Cass. soc., 1er mars 2017, n° 16-10.047, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A3545TPY)

Lecture: 9 min

N7114BWE

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par Sébastien Tournaux, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

Le 16 Mars 2017

Lorsque la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004, relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (N° Lexbase : L1877DY8), a instauré, par principe, la primauté de l'accord d'entreprise sur l'accord de branche, de nombreux obstacles se sont dressés contre cette nouvelle articulation restée en grande partie lettre morte. On se réfère volontiers à la faculté offerte aux négociateurs de branche d'insérer des clauses de verrouillage dans l'accord qui interdisaient aux accords d'entreprise de prévoir d'autres stipulations que celles établies au niveau supérieur. On évoque plus rarement les règles d'application de la loi dans le temps qui, pourtant, ont joué un rôle déterminant de préservation des accords de branche antérieurs. Cette logique disparaît toutefois avec les réformes ultérieures et, en particulier, avec la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (N° Lexbase : L7392IAZ), et la détermination conventionnelle du contingent annuel d'heures supplémentaires, comme l'illustre un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 1er mars 2017. En jugeant que les dispositions issues de la loi du 20 août 2008 permettent de fixer par accord d'établissement un contingent différent de celui antérieurement prévu par la convention de branche (I), la Chambre sociale fait logiquement une application immédiate aux accords anciens de la loi, raisonnement dont on ne voit pas comment il ne pourrait pas à l'avenir être reproduit pour les nouvelles articulations résultant de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (N° Lexbase : L8436K9C) (II).
Résumé

Les dispositions de l'article L. 3121-11, alinéa 1er, du Code du travail (N° Lexbase : L3752IBL), dans sa rédaction issue de la loi du 20 août 2008, permettent de fixer par voie d'accord d'entreprise ou d'établissement le contingent d'heures supplémentaires à un niveau différent de celui prévu par l'accord de branche, quelle que soit la date de conclusion de ce dernier.

Commentaire

I - L'application immédiate de la subsidiarité de l'accord de branche en matière de contingent d'heures supplémentaires

Développement de la subsidiarité de l'accord de branche à l'accord d'entreprise. Depuis l'adoption de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite loi "Travail", de nombreux auteurs ont décrit le changement de philosophie globale que subit le droit du travail par l'utilisation très fréquente des techniques de la supplétivité et de la subsidiarité d'une norme à l'autre (1).

Chaque chapitre du Code du travail relatif au temps de travail, aux temps de repos et de congés comporte, désormais, une section, une sous-section ou un paragraphe consacré aux dispositions légales supplétives de la volonté des partenaires sociaux. Ils comptent, également, une section, une sous-section ou un paragraphe consacré au champ ouvert à la négociation collective, où l'on trouve très fréquemment la formule selon laquelle "un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche" peut fixer telle ou telle règle (2). Déjà la loi du 20 août 2008 employait cette formule lorsqu'il s'agissait d'articuler l'accord de branche et l'accord d'entreprise à propos de la détermination du contingent annuel d'heures supplémentaires applicables à l'entreprise. L'article L. 3121-11 du Code du travail disposait alors que "des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche".

L'organisation de la subsidiarité de l'accord de branche vis-à-vis de l'accord d'entreprise est, toutefois, plus ancienne (3). Elle avait, en effet, été instituée par principe par la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 qui a créé l'actuel article L. 2253-3, alinéa 2, du Code du travail (N° Lexbase : L7221K9C) qui dispose que, "dans les autres matières, la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement peut comporter des stipulations dérogeant en tout ou en partie à celles qui lui sont applicables en vertu d'une convention ou d'un accord couvrant un champ territorial ou professionnel plus large, sauf si cette convention ou cet accord en dispose autrement". Plus anciennement encore, le législateur avait, parfois, admis, s'agissant de la modulation du temps de travail ou du travail par cycle, que l'accord d'entreprise puisse prévoir des stipulations différentes et moins favorables que celles de l'accord de branche, à condition de respecter les conditions posées par la loi (4).

Subsidiarité et application de la loi dans le temps. La construction progressive de la subsidiarité de l'accord de branche avait, toutefois, rencontré une difficulté majeure liée à l'application de la loi dans le temps. La question était la suivante : un accord d'entreprise conclu après la loi du 4 mai 2004 pouvait-il s'appliquer par préférence à l'accord de branche conclu avant la loi ? Accepter cela revenait à faire application immédiate de la loi nouvelle aux anciens accords et à nier une partie de leur force obligatoire puisqu'ils avaient été conclus en un temps où l'accord d'entreprise ne pouvait y déroger que dans un sens plus favorable au salarié.

Quoique jugé d'interprétation délicate, l'article 45 de la loi du 4 mai 2004 semblait exclure toute rétroactivité lorsqu'il disposait que "la valeur hiérarchique accordée par leurs signataires aux conventions et accords conclus avant l'entrée en vigueur de la présente loi demeure opposable aux accords de niveaux inférieurs" (5). C'est tout du moins l'interprétation qu'en avait retenue la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu en 2011, par lequel elle jugeait "qu'un accord collectif d'entreprise, même conclu postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 4 mai 2004, ne peut déroger par des clauses moins favorables à une Convention collective de niveau supérieur conclue antérieurement à cette date, à moins que les signataires de cette convention n'en aient disposé autrement" (6). La même interprétation devait-elle être retenue de l'application de formule employée par la loi du 20 août 2008 à propos du contingent annuel d'heures supplémentaires ?

L'affaire. Un employeur, dont l'entreprise entrait dans le champ d'application de la Convention collective nationale des industries chimiques du 8 février 1999 (N° Lexbase : X0653AEW), avait conclu avec la délégation unique du personnel un accord d'entreprise le 19 avril 2011 portant sur le contingent annuel d'heures supplémentaires et fixant celui-ci à 220 heures par an, soit un volume supérieur à celui établi à 130 heures par la convention de branche. La Fédération nationale CGT des industries chimiques fit assigner l'employeur et la délégation unique du personnel devant le tribunal de grande instance en annulation de l'accord d'entreprise.

La cour d'appel de Versailles, saisie de l'affaire, fit droit à la demande du syndicat sur la base de trois arguments. D'abord, les juges d'appel s'appuient sur la décision du Conseil constitutionnel rendue sur contrôle a priori de la loi du 20 août 2008, et considèrent que, si celui-ci acceptait la conclusion d'accords d'entreprise prévoyant un contingent différent de celui prévu par la branche, c'était à la condition que les conventions de branche antérieures aient été dénoncées, ce qui n'était pas le cas de la Convention collective nationale des industries chimiques. Ensuite, la convention de branche avait été conclue avant la loi du 4 mai 2004 ayant rendu les accords de branche subsidiaires des accords d'entreprise par principe et ne comportait aucune disposition permettant expressément aux entreprises d'y déroger. Enfin, les juges d'appel énoncent qu'il n'est pas possible de conclure un accord d'entreprise déterminant un contingent d'heures supplémentaires supérieur à celui prévu par l'accord de branche.

Par un arrêt rendu le 1er mars 2017 et paré du plus haut degré de publicité, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse cette décision au visa de l'article L. 3121-11, alinéa 1er, dans sa rédaction issue de l'article 18 de la loi du 20 août 2008. Aux termes de ce texte, des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite du contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Aux yeux de la Chambre sociale, "ces dispositions sont d'application immédiate et permettent de fixer par voie d'accord d'entreprise ou d'établissement le contingent d'heures supplémentaires à un niveau différent de celui prévu par l'accord de branche, quelle que soit la date de conclusion de ce dernier".

La Chambre sociale prend donc une position opposée à celle adoptée en 2011 à propos de l'articulation résultant de la loi du 4 mai 2004. La justification de ce changement est clairement apportée par la note explicative jointe à l'arrêt sur le site de la Cour de cassation (7).

II - Vers une application immédiate généralisée de la subsidiarité de l'accord de branche

La reprise de l'argumentation du Conseil constitutionnel. Comme la loi de 2004, la loi de 2008 comportait, à l'origine, des dispositions intéressant le sort des accords de branche antérieurs. La Cour de cassation rappelle, toutefois, que l'article 18, IV du texte initial de la loi du 4 mai 2004, qui disposait que "les clauses des conventions et accords conclus sur le fondement des articles L. 3121-11 à L. 3121-13 et L. 3121-17 du Code du travail (N° Lexbase : L6896K9B) [...] dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi restent en vigueur au plus tard jusqu'au 31 décembre 2009" (8), a été censuré par le Conseil constitutionnel au motif que "le législateur ne saurait porter aux contrats légalement conclus une atteinte qui ne soit justifiée par un motif d'intérêt général suffisant sans méconnaître les exigences résultant des articles 4 (N° Lexbase : L1368A9K) et 16 (N° Lexbase : L1363A9D) de la DDHC" (9).

A première vue, les accords de branche antérieurs auraient donc dû perdurer et le principe d'articulation, établi en 2011 par la Chambre sociale, être reconduit. La note explicative fait d'ailleurs curieusement référence à "l'esprit" du texte censuré que le Conseil constitutionnel aurait préservé... Faut-il se référer à l'esprit, si tant est déjà que l'on puisse clairement l'identifier d'un texte censuré ?

Le Conseil constitutionnel avait, en effet, très fortement atténué les effets de sa censure en jugeant "qu'en l'absence de la première phrase de ce IV, les dispositions de son I s'appliquent immédiatement et permettent la négociation d'accords d'entreprise nonobstant l'existence éventuelle de clauses contraires dans des accords de branche". Dit autrement, si la loi ne pouvait mettre fin aux accords antérieurs, elle pouvait, en revanche, permettre la mise en oeuvre de la nouvelle articulation entre accords de branche antérieurs et accords d'entreprise nouveaux. C'est donc en parfaite conformité avec cette interprétation du juge constitutionnel qu'est rendue la décision sous examen (10).

Un argument valable pour les nouvelles articulations issues de la loi "Travail" ? Assez spontanément, on imagine que cette interprétation du juge constitutionnel et de la Chambre sociale sera également adoptée s'agissant des nombreux nouveaux domaines dans lesquels l'accord de branche devient supplétif de l'accord d'entreprise depuis la loi du 8 août 2016. La note explicative de la Chambre sociale s'achève par un paragraphe où les magistrats notent que "les règles de fixation du contingent d'heures supplémentaires relèvent du champ de la négociation collective et que le nouvel article L. 3121-33 du Code du travail (N° Lexbase : L6880K9P) maintient le principe de la subsidiarité de l'accord de branche par rapport à l'accord d'entreprise ou d'établissement".

La formule employée nous semble ménager à la Chambre sociale des marges de manoeuvres. D'abord, parce qu'elle n'évoque pas formellement l'application immédiate de la loi du 8 août 2016 mais se contente de rappeler que le mécanisme de subsidiarité est à nouveau employé par la loi. Ensuite, parce que la note ne se focalise que sur le nouvel article L. 3121-33 du Code du travail, relatif au contingent d'heures supplémentaires, thématique sur laquelle portait la censure du Conseil constitutionnel en 2008.

Parmi les vingt-trois autres domaines dans lesquels l'accord de branche est désormais supplétif de l'accord d'entreprise, faudra-t-il toujours appliquer la loi nouvelle de manière immédiate ? Cela nous semble, à vrai dire, assez probable. En effet, la formule utilisée par le juge constitutionnel pour justifier l'application immédiate de la loi du 20 août 2008, quoique toujours focalisée sur le contingent d'heures supplémentaires, posait une règle d'application de la loi dans le temps assise sur la rédaction du texte de l'ancien article L. 3121-11, qui disposait que le contingent est "défini par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche". Or, c'est très exactement la formule reprise par de nombreux textes issus de la loi "Travail".

On pourrait bien avancer l'argument selon lequel l'accord collectif est, en partie, un contrat, et que c'est habituellement le principe de la survie de la loi ancienne qui prévaut, que l'application immédiate est exceptionnelle et, à ce titre, doit être interprétée strictement et réservée au cas du contingent d'heures supplémentaires. On voit mal, toutefois, pourquoi cet argument aurait plus de poids en matière de durée maximale de travail, de jours fériés ou de conventions de forfait qu'il n'en eu en matière de contingent d'heures supplémentaires.

Il est vrai, enfin, que, quoique l'on pense de la nouvelle articulation entre accords de branche et d'entreprise, l'application immédiate de la subsidiarité est nécessaire à l'effectivité de la loi "Travail". Il aurait, en effet, été très simple de paralyser la nouvelle articulation en refusant de réviser les accords de branche antérieurs.


(1) V. en particulier F. Canut, L'ordonnancement des normes étatiques et des normes conventionnelles - à propos du projet de loi "Travail", Dr. soc., 2016, p. 519.
(2) La formule est employée à vingt-quatre reprises par les nouvelles dispositions issues de la loi "Travail".
(3) G. Auzero, Lexbase, éd. soc., n° 120, 2004 (N° Lexbase : N1536ABI) ; M.-A. Souriac, L'articulation des niveaux de négociation, Dr. soc., 2004, p. 579.
(4) V., par ex., l'ancien article L. 212-10 du Code du travail (N° Lexbase : L3774DCR), dans sa rédaction résultant de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000, relative à la réduction négociée du temps de travail (N° Lexbase : L0988AH3).
(5) V. M.-A Souriac, préc..
(6) Cass. soc., 9 mars 2011, n° 09-69.647, FS-P+B+R (N° Lexbase : A2495G9B). Sur ce type d'articulation dans le temps, v. également Cass. soc., 15 avril 2015, n° 13-18.032, FS-P+B (N° Lexbase : A9234NG4) et les obs. de Ch. Radé, Lexbase, éd. soc., n° 612, 2015 (N° Lexbase : N7281BU9).
(7) Cass. soc., 1er mars 2017, n° 16-10.047, FS-P+B+R+I et la note explicative.
(8) Le procédé avait déjà été employé à propos des stipulations conventionnelles de branche relatives aux durées des périodes d'essai, à ce propos, Cass. soc., 31 mars 2016, n° 14-29.184, FS-P+B (N° Lexbase : A1579RB4), et nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 652, 2016 (N° Lexbase : N2348BWU).
(9) Cons. const., décision n° 2008-568 DC du 7 août 2008 (N° Lexbase : A8775D9U).
(10) V. également en ce sens Circ. DGT, n° 2008/20, du 13 novembre 2008, relative à la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (N° Lexbase : L8532IBM) : "La volonté du Gouvernement et du législateur est de revenir à des dispositions plus lisibles basées sur une hiérarchie plus claire : principes et encadrement de l'organisation du temps de travail par la loi et le règlement, fixation des modalités de mise en oeuvre par accord d'entreprise, ou à défaut d'accord d'entreprise par accord de branche, lesquels ne peuvent plus être bloquants' si l'entreprise négocie à son niveau".

Décision

Cass. soc., 1er mars 2017, n° 16-10.047, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A3545TPY)

Cassation partielle (CA Versailles, 3 novembre 2015, n° 14/03276 N° Lexbase : A6275NUX)

Texte visé : C. trav., art. L. 3121-11, al. 1er (N° Lexbase : L3752IBL), dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 (N° Lexbase : L7392IAZ).

Mots-clés : heures supplémentaires ; contingent annuel ; convention de branche ; accord d'entreprise ; subsidiarité.

Lien base : (N° Lexbase : E0344ETW).

newsid:457114

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Remise en cause par la CJUE de l'agrément prévu par l'article 210 C du CGI en cas d'apports effectués au profit d'une société étrangère

Réf. : CJUE, 8 mars 2017, aff. C-14/16 (N° Lexbase : A5858TT7)

Lecture: 2 min

N7130BWY

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par Jules Bellaiche

Le 17 Mars 2017

Le droit de l'Union s'oppose à la législation française qui, dans le cas d'une opération de fusion transfrontalière, soumet l'octroi des avantages fiscaux applicables à une telle opération, en l'occurrence le report de l'imposition des plus-values afférentes aux biens apportés à une société établie dans un autre Etat membre par une société française, à une procédure d'agrément préalable dans le cadre de laquelle, pour obtenir cet agrément, le contribuable doit démontrer que l'opération concernée est justifiée par un motif économique, qu'elle n'a pas comme objectif principal ou comme l'un de ses objectifs principaux la fraude ou l'évasion fiscales et que ses modalités permettent d'assurer l'imposition future des plus-values mises en sursis d'imposition, alors que, dans le cas d'une opération de fusion interne, un tel report est accordé sans que le contribuable soit soumis à une telle procédure. Telle est la solution retenue par la CJUE dans un arrêt rendu le 8 mars 2017 (CJUE, 8 mars 2017, aff. C-14/16 N° Lexbase : A5858TT7). Pour rappel, à la suite d'un contrôle, l'administration fiscale a remis en question le bénéfice du régime spécial des fusions aux motifs, d'une part, qu'une société française n'avait pas sollicité l'agrément ministériel prévu à l'article 210 C du CGI (N° Lexbase : L3945HLP) et, d'autre part, que cet agrément n'aurait, de toute manière, pas été accordé à la société requérante luxembourgeoise car l'opération n'aurait pas été justifiée par une raison économique mais aurait poursuivi un objectif de fraude ou d'évasion fiscales. Pour la CJUE, qui a donné raison à la société requérante, la législation en cause ne précise pas les modalités d'application de la procédure préalable concernée. Lors de l'audience, tout en confirmant que tel était le cas, le Gouvernement français, en se référant à la pratique appliquée par l'administration fiscale, a apporté quelques précisions concernant ces modalités. A cet égard, le Gouvernement a indiqué que, même si cette législation prévoit trois conditions aux fins de l'obtention de l'agrément préalable, selon la pratique appliquée par l'administration fiscale, il suffit, pour accorder l'agrément, que la seule condition de l'existence d'un motif économique soit remplie. En outre, ledit Gouvernement précise que, selon cette même pratique, la procédure d'agrément préalable ne rend pas non plus suspensive l'opération de fusion transfrontalière. Ainsi, cette opération, pour autant qu'une demande d'agrément a été présentée avant sa réalisation, peut être effectuée avant l'obtention de l'accord de l'administration fiscale. En outre, le Gouvernement français reconnaît que cette législation traite différemment les opérations de fusion transfrontalière et les opérations de fusion interne. Dès lors, une telle différence est susceptible de les dissuader d'exercer leur liberté d'établissement et constitue une entrave à cette liberté .

newsid:457130

Fiscalité internationale

[Jurisprudence] Sur le champ d'application de la liberté d'établissement - Conclusions du Rapporteur public

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 22 février 2017, n° 392226, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A8447TN8)

Lecture: 11 min

N7145BWK

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par Emilie Bokdam-Tognetti, Rapporteur public au Conseil d'Etat

Le 16 Mars 2017

Le Conseil d'Etat, dans un arrêt rendu le 22 février 2017, a été invitée à préciser les critères au regard duquel s'apprécie le champ d'application de la liberté d'établissement, point sur lequel sa jurisprudence est étonnamment peu abondante (CE 9° et 10° ch.-r., 22 février 2017, n° 392226, mentionné aux tables du recueil Lebon). Lexbase Hebdo - édition fiscale vous propose de retrouver les conclusions anonymisées du Rapporteur public sur cet arrêt, Emilie Bokdam-Tognetti. Les faits de l'espèce sont simples. La société luxembourgeoise requérante a perçu, au cours des années 2003 à 2005, des dividendes de sa filiale française, lesquels ont fait l'objet d'une retenue à la source en application du 2 de l'article 119 bis du CGI (N° Lexbase : L1481IZU), dès lors qu'elle n'entrait pas, faute d'atteindre le seuil de détention de 25 % du capital fixé par celui-ci, dans le périmètre de l'exonération prévue par l'article 119 ter du même code (N° Lexbase : L3837KWZ). En décembre 2008, la société a demandé la restitution de la retenue à la source ainsi acquittée, en faisant valoir que celle-ci avait été prélevée en méconnaissance du droit de l'Union européenne et en se prévalant, pour échapper à la tardiveté de sa réclamation, de ce que les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes "Denkavit" du 14 décembre 2006 (CJUE, 14 décembre 2006, aff. C-170/05 N° Lexbase : A8816DSC) et "Amurta SGPS" du 8 novembre 2007 (CJUE, 8 novembre 2007, aff. C-379/05 N° Lexbase : A3642DZW) auraient constitué un événement motivant celle-ci au sens du c de l'article R. 196-1 du LPF (N° Lexbase : L6486AEX).

Pour juger que l'arrêt "Denkavit", qui a révélé la non-conformité au principe de liberté d'établissement des dispositions du 2 de l'article 119 bis du CGI, avait constitué, pour la société requérante, un événement au sens du c de l'article R. 196-1 du LPF, lui ouvrant un nouveau délai de réclamation dans les conditions prévues par l'article L. 190 du même livre (N° Lexbase : L9530IYM) dans sa rédaction alors en vigueur, la cour administrative d'appel de Versailles a retenu que la requérante exerçait une influence certaine sur les décisions de la filiale lui permettant d'en déterminer les activités, qu'elle entrait, dès lors, dans le champ de la liberté d'établissement et pouvait, par suite, se prévaloir d'une atteinte portée à cette liberté telle que révélée par cet arrêt du 14 décembre 2006. Puis, la cour a accordé à la société requérante la restitution des retenues à la source versées pour les dividendes de sa filiale (CAA Versailles, 27 mai 2015, n° 13VE03373 N° Lexbase : A1507NMR).

A l'appui de son pourvoi contre l'arrêt rendu par cette cour, le ministre soutient que celle-ci a commis une erreur de droit en jugeant que la société requérante, dès lors qu'elle détenait près de 19 % du capital social de sa filiale française et siégeait à son conseil d'administration, exerçait sur celle-ci une influence certaine et qu'elle était, dès lors, en droit d'invoquer une violation de la liberté d'établissement. Ce moyen, qui conteste un motif central du raisonnement de la cour dans son arrêt, est opérant contrairement à ce que soutient en défense la société.

Aux termes de l'article 43 du traité CE, repris à l'article 49 du TFUE (N° Lexbase : L2697IPL), "les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un Etat membre dans le territoire d'un autre Etat membre sont interdites. Cette interdiction s'étend également aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d'un Etat membre établis sur le territoire d'un Etat membre". Le second alinéa du même article précise que la "liberté d'établissement comporte l'accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d'entreprises, et notamment de sociétés".

De cette inclusion dans le champ de la liberté d'établissement de la constitution et de la gestion de sociétés, la CJUE a déduit, dans un arrêt du 13 avril 2000 "Baars" (CJUE, 13 avril 2000, aff. C-251/98, pt 22 N° Lexbase : A2003AIZ) dont la formulation a connu depuis une abondante postérité, qu' : "exerce ainsi son droit d'établissement le ressortissant d'un Etat membre qui détient dans le capital d'une société d'un autre Etat membre une participation lui conférant une influence certaine sur les décisions de la société et lui permettant d'en déterminer les activités". Quelques rares fois, la Cour a substitué à l'expression "influence certaine" celle d'"influence décisive sur la société" distribuant les dividendes (par ex. CJUE, 24 novembre 2016, aff. C-464/14 N° Lexbase : A5119SIG).

Pour déterminer si une participation relève de la liberté d'établissement, la CJUE tient compte, d'une part, de l'intention dans laquelle la participation a été acquise (dans une perspective qui n'est pas sans rappeler celle retenue pour définir la notion de titre de participation) et, d'autre part, du pouvoir d'influence et de contrôle qu'elle confère à son détenteur.

Sur le premier point, elle juge que relèvent exclusivement de la libre circulation des capitaux les prises de participations "effectuées dans la seule intention de réaliser un placement financier sans intention d'influer sur la gestion et le contrôle de l'entreprise", que la Cour qualifie aussi d'investissements de portefeuille (v. par ex. CJUE, 21 octobre 2010, aff. C-81/09 N° Lexbase : A2207GCQ ; CJCE, 17 septembre 2009, aff. C-182/08 N° Lexbase : A0081ELL ; CJUE, 24 novembre 2016, aff. C-464/14, préc.).

Sur le second point, la jurisprudence de la Cour distingue, au sein même des participations au capital qui n'ont pas été effectuées dans une intention purement financière, entre celles qui confèrent simplement à leur détenteur la possibilité de participer effectivement à la gestion de la société, qui relèvent de la liberté de circulation des capitaux, et les participations conférant une influence certaine sur la gestion de la société et la faculté d'en déterminer les activités, qui entrent dans le champ de la liberté d'établissement (CJCE, 26 mars 2009, aff. C- 326/07 N° Lexbase : A1560EEI).

Pour apprécier la faculté d'exercer une influence certaine et de déterminer les activités de la société conférée par une participation, il y a lieu de se référer avant tout à la part de capital détenue et aux droits de vote qui lui sont attachés (lesquels ne correspondent pas nécessairement au même pourcentage que la quote-part de capital), dans la mesure où l'enjeu n'est pas, en cette matière, la participation aux bénéfices mais la capacité décisionnelle de l'actionnaire.

Lorsque cette participation directe ou indirecte dépasse le seuil de 50 % (et a fortiori lorsqu'elle atteint 100 %), le classement dans la catégorie des participations relevant de la liberté d'établissement ne soulève alors aucune difficulté, sans qu'il y ait lieu de tenir compte d'autres facteurs, dès lors qu'elle implique alors la prise de contrôle de la société (CJUE, 19 juillet 2012, aff. C-48/11 N° Lexbase : A0048IR9).

En dessous du seuil de 50 % des droits de vote, l'appréciation au regard du seul pourcentage de ces droits est plus délicate et incertaine. Il faut en effet tenir compte de la plus ou moins grande dispersion du capital, en fonction du nombre des autres actionnaires et de la répartition entre eux du capital restant, mais aussi, comme l'illustre l'arrêt du 6 décembre 2007, "Columbus Container Services" (CJUE, 6 décembre 2007, aff. C-298/05 N° Lexbase : A9908DZY), des liens existant entre les actionnaires, à l'instar de liens familiaux ou de pactes d'actionnaires.

Plus la participation détenue sera faible, moins elle sera susceptible, sauf très importante dispersion du capital, de conférer une influence certaine à son détenteur. Mais une participation très proche de 50 % ne lui garantira pas non plus automatiquement une telle influence car il ne peut être entièrement exclu qu'il n'existe face à lui qu'un seul actionnaire, par construction majoritaire. D'où la prudence dont la Cour de justice, appelée tantôt à se prononcer in abstracto sur la compatibilité de régimes nationaux concernant toutes les participations dépassant un seuil donné, tantôt à statuer à l'occasion de cas d'espèces dont elle ne dispose pas toujours de tous les éléments de fait, assortit couramment son appréciation en présence de participations inférieures à 50 %, à travers l'usage de la formule "en principe".

Un examen attentif de sa jurisprudence permet d'y retrouver toute la gamme des degrés de participation entre 0 % et 50 %.

Ainsi, dans son arrêt du 26 mars 2009 précité, la Cour a jugé qu'une participation d'au moins 5 % au capital d'une société, "qui doit permettre aux intéressés de participer de manière effective à la gestion de ladite société", entre dans le champ des dispositions du Traité relatives à la liberté de circulation des capitaux. Elle a néanmoins relevé que, s'agissant en l'espèce de sociétés dont l'actionnariat est en général fortement dispersé, il n'était pas exclu que les détenteurs de participations correspondant à un tel pourcentage "aient le pouvoir d'influencer de manière certaine la gestion d'une telle société et d'en déterminer les activités, ce qui relève des dispositions de l'article 43 CE" relatives à la liberté d'établissement.

S'agissant d'une participation d'au moins 10 % du capital, de nombreux arrêts de la Cour ont souligné qu'un tel seuil "n'implique pas nécessairement que le titulaire de la participation exerce une influence certaine sur les décisions de la société dont il est actionnaire" (v. par ex. CJCE, 12 décembre 2006, aff. C-446/04 N° Lexbase : A8519DSC ; CJUE, 3 octobre 2013, aff. C-282/12 N° Lexbase : A1788KM8 ; CJUE, 11 septembre 2014, aff. C-47/12 N° Lexbase : A2325MWZ ; CJUE, 24 novembre 2016, aff. C-464/14, préc.), mais au contraire, qu'il exclut en règle générale l'exercice d'une telle influence (CJUE, 10 février 2011, aff. C-436/08 N° Lexbase : A1171GUW).

Dans une affaire du 8 novembre 2012, "Commission c/ Grèce" (CJUE, 8 novembre 2012, aff. C-244/11 N° Lexbase : A5091IWH), la cour a pu paraître considérer qu'une réglementation visant les participations représentant plus de 20 % du capital de sociétés anonymes stratégiques n'affecterait que les actionnaires en mesure d'exercer une influence certaine sur la gestion et le contrôle d'une telle société. Toutefois, cet arrêt ne nous paraît pas devoir être interprété comme jugeant qu'en principe, une participation de 20 % serait suffisante pour exercer une influence certaine. Il s'agissait en effet seulement dans cette affaire de constater que le régime d'autorisation institué par la réglementation grecque pour les prises de participation dépassant 20 % empêchait les investisseurs d'atteindre le niveau requis pour contrôler et gérer une société stratégique et influer sur ses décisions.

Cette lecture paraît confortée par une autre décision de la Cour de justice, qui apprécie avec prudence et nuance l'influence conférée par une participation de 25 %. Ainsi, dans un arrêt du 21 octobre 2010, "Idryma Typou AE" (CJUE, 21 octobre 2010, aff. C-81/09 N° Lexbase : A2207GCQ), la Cour relève que "selon la manière dont le capital social est réparti, notamment s'il est dispersé parmi un grand nombre d'actionnaires, une participation de 25 % peut être suffisante pour détenir le contrôle d'une société ou à tout le moins exercer une influence certaine" sur les décisions de cette société et en déterminer les activités.

Enfin, la Cour a jugé, toujours avec la même formulation prudente, que des participations de 34 % (CJUE, 21 janvier 2010, aff. C-311/08 N° Lexbase : A4534EQY), 45 % du capital et des droits de vote (CJUE, 10 juin 2015, aff. C-686/13 N° Lexbase : A5290NK7) ou encore 48 % (CJCE, 22 décembre 2008, aff. C-282/07 N° Lexbase : A9974EBZ), étaient "en principe de nature à" conférer à leur titulaire une influence certaine sur les décisions et les activités de la société concernée.

Ainsi, en dessous de 50 % des droits de vote, aucun seuil de participation ne peut être regardé comme conférant avec certitude à l'actionnaire la faculté non seulement d'exercer une influence certaine sur la société mais aussi d'en déterminer les activités, lorsque l'on ne connaît pas la répartition du capital restant et que l'on ne tient pas compte d'éventuelles alliances entre les actionnaires.

Par ailleurs, le droit de disposer d'un représentant au conseil d'administration nous semble constituer un élément nécessaire à l'exercice d'une influence certaine sur les décisions de la société, mais non suffisant lorsque les droits de vote attachés à la participation, voire l'existence de droits politiques d'associé spéciaux, ne permettent pas d'avoir une chance de l'emporter dans les débats. En effet, la Cour juge constamment qu'une participation qui permet de participer de manière effective à la gestion d'une société relève uniquement du champ de la liberté de circulation des capitaux.

Enfin, l'existence d'un associé disposant d'une minorité de blocage ne nous paraît pas conduire à remettre en cause la faculté de l'actionnaire majoritaire d'exercer une influence certaine sur la société, au sens de la jurisprudence "Baars". Quant à l'actionnaire d'une société anonyme détenant, grâce à une participation dépassant le tiers des droits de vote, une minorité de blocage en vertu du droit français des sociétés, il nous semblerait délicat de considérer qu'il dispose, grâce à ce pouvoir de blocage, d'une influence certaine au sens de cette jurisprudence. En effet, ce pouvoir lui permet seulement de bloquer toute décision prise en assemblée générale extraordinaire, ce qui impose de composer avec cet actionnaire pour l'adoption de telles résolutions, mais ne lui permet pas d'influer sur les décisions de l'assemblée générale ordinaire. En tout état de cause, vous n'aurez pas à trancher ce point aujourd'hui.

Le mode d'emploi ainsi précisé, qu'en est-il dans la présente affaire ?

Si vous jugez que l'appréciation portée par une cour sur le point de savoir si une participation confère à son détenteur la faculté d'exercer une influence certaine sur la gestion et les décisions d'une société est souveraine et susceptible uniquement d'un contrôle de dénaturation (CE 3° et 8° s-s-r., 21 janvier 2016, n° 373559, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A5763N49, RJF, 4/16, n° 380, concl. N. Escaut), cela n'exclut pas un contrôle de l'erreur de droit sur les critères maniés par les juges du fond pour caractériser l'existence ou l'absence d'une telle influence.

En l'espèce, la cour a déduit du seul taux de la participation considérée, qui était de 19 % environ au cours des années en litige (et non 10 % comme l'a relevé de manière inexacte la cour), ainsi que de l'occupation d'un siège au conseil d'administration, que la société requérante disposait de la faculté d'exercer une influence certaine sur la gestion de la filiale et d'en déterminer les activités. La cour n'a, en statuant ainsi, pas recherché quelle était la répartition du reste du capital social alors qu'il ressortait du dossier qui lui était soumis qu'il était détenu, au cours des années en litige, à plus de 76 % par une autre entité. Quant au pacte d'actionnaires conclu postérieurement aux retenues à la source litigieuses que la cour a mentionné, cette circonstance postérieure est insusceptible d'avoir permis à la société intéressée d'exercer une influence certaine au cours des années en litige.

En s'abstenant ainsi, en présence d'une participation inférieure à 50 % du capital et des droits de vote, de rechercher si la répartition du capital restant permettait de regarder la participation litigieuse comme de nature à conférer une influence certaine à son détenteur ou, à l'inverse, faisait nécessairement obstacle à ce qu'une telle influence soit caractérisée, la cour nous paraît avoir commis une erreur de droit. Vous annulerez, par suite, son arrêt, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du ministre.

Par ces motifs, nous concluons :

- à l'annulation de l'arrêt du 27 mai 2015 de la cour administrative d'appel de Versailles ;

- au renvoi de l'affaire à cette cour ;

- et au rejet des conclusions présentées par la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du CJA (N° Lexbase : L3227AL4).

newsid:457145

Fiscalité internationale

[Brèves] Rattachement à un autre régime de Sécurité sociale et assujettissement du patrimoine à la CSG : les Etats tiers à l'UE sont redevables !

Réf. : Cons. const., 9 mars 2017, n° 2016-615 QPC (N° Lexbase : A6456TUN)

Lecture: 1 min

N7084BWB

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par Jules Bellaiche

Le 16 Mars 2017

La différence de traitement, au regard de l'assujettissement à la contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine, entre les personnes relevant du régime de Sécurité sociale d'un Etat membre de l'Union européenne et celles relevant du régime de Sécurité sociale d'un Etat tiers est conforme à la Constitution. Telle est la solution retenue par le Conseil constitutionnel dans une décision rendue le 9 mars 2017 (Cons. const., 9 mars 2017, n° 2016-615 QPC N° Lexbase : A6456TUN). En l'espèce, les requérants soutiennent que les dispositions de l'article L. 136-6 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L3812KW4), telles qu'interprétées par le juge administratif, sont contraires aux principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques. Elles créent, selon eux, une différence de traitement injustifiée entre les personnes affiliées au régime de Sécurité sociale d'un Etat membre de l'Union européenne et celles affiliées au régime de Sécurité sociale d'un autre Etat. Seules les secondes seraient en effet soumises à la contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine et aux autres contributions sociales. Cependant, les Sages n'ont pas décidé en ce sens. En effet, les dispositions litigieuses ont pour objet d'assurer le financement de la protection sociale dans le respect du droit de l'Union européenne qui exclut leur application aux personnes relevant d'un régime de Sécurité sociale d'un autre Etat membre de l'Union. Au regard de cet objet, il existe une différence de situation, qui découle notamment du lieu d'exercice de leur activité professionnelle, entre ces personnes et celles qui sont affiliées à un régime de Sécurité sociale d'un Etat tiers. La différence de traitement établie par les dispositions contestées est ainsi en rapport direct avec l'objet de la loi. Par conséquent, les griefs tirés de la méconnaissance des principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques doivent être écartés. Le premier alinéa du e du paragraphe I de l'article L. 136-6 du Code de la Sécurité sociale, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit donc être déclaré conforme à la Constitution .

newsid:457084

Internet

[Brèves] Droit à l'oubli : le cas des données à caractère personnel figurant dans le registre des sociétés

Réf. : CJUE, 9 mars 2017, aff. C-398/15 (N° Lexbase : A6421TUD)

Lecture: 2 min

N7155BWW

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par Vincent Téchené

Le 22 Mars 2017

Il n'existe pas de droit à l'oubli pour les données à caractère personnel figurant dans le registre des sociétés. Toutefois, à l'expiration d'un délai suffisamment long après la dissolution de la société concernée, les Etats membres peuvent prévoir un accès restreint des tiers à ces données dans des cas exceptionnels. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la CJUE le 9 mars 2017 (CJUE, 9 mars 2017, aff. C-398/15 N° Lexbase : A6421TUD). Elle relève, tout d'abord, que la publicité des registres des sociétés vise à assurer la sécurité juridique dans les rapports entre les sociétés et les tiers ainsi qu'à protéger notamment les intérêts des tiers par rapport aux sociétés par actions et aux sociétés à responsabilité limitée, dès lors qu'elles n'offrent comme garantie à l'égard des tiers que leur patrimoine social. Elle constate, en outre, que des questions nécessitant de disposer des données à caractère personnel figurant dans le registre des sociétés peuvent surgir encore de nombreuses années après qu'une société a cessé d'exister. En effet, compte tenu de la multitude de droits et de relations juridiques pouvant impliquer une société avec des acteurs dans plusieurs Etats membres et de l'hétérogénéité des délais de prescription prévus par les différents droits nationaux, il paraît impossible d'identifier un délai unique à l'expiration duquel l'inscription des données dans le registre et leur publicité ne serait plus nécessaire. Dans ces conditions, les Etats membres ne peuvent pas garantir aux personnes physiques dont les données sont inscrites dans le registre des sociétés le droit d'obtenir, après un certain délai à compter de la dissolution de la société, l'effacement des données à caractère personnel les concernant. La Cour considère que cette ingérence dans les droits fondamentaux des personnes concernées n'est pas disproportionnée dans la mesure où seul un nombre limité de données à caractère personnel est inscrit dans le registre des sociétés et il est justifié que les personnes physiques qui choisissent de participer aux échanges économiques par l'intermédiaire d'une société par actions ou d'une société à responsabilité limitée et qui n'offrent comme garantie à l'égard des tiers que le patrimoine de cette société soient obligées de rendre publiques les données tenant à leur identité et à leurs fonctions au sein de celle-ci. Néanmoins, la Cour n'exclut pas que, dans des situations particulières, des raisons prépondérantes et légitimes tenant au cas concret de la personne puissent justifier, à titre exceptionnel, que l'accès aux données à caractère personnel la concernant soit limité, à l'expiration d'un délai suffisamment long après la dissolution de la société, aux tiers justifiant d'un intérêt spécifique à leur consultation. Il appartient à chaque Etat membre de décider s'il souhaite une telle limitation d'accès dans son ordre juridique.

newsid:457155

Pénal

[Manifestations à venir] Le surpeuplement carcéral en Europe : un phénomène maîtrisable mais indifféremment maîtrisé. Quelles sont les pistes retenues par le livre blanc ?

Lecture: 2 min

N7162BW8

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Le 17 Mars 2017

Le vendredi 24 mars 2017 à l'Université d'Aix-Marseille, se tiendra un colloque organisé par le Laboratoire de droit privé et de sciences criminelles et l'Institut de sciences pénales et de criminologie sur le thème suivant : "Le surpeuplement carcéral en Europe : un phénomène maîtrisable mais indifféremment maîtrisé. Quelles sont les pistes retenues par le livre blanc ?"
  • Date et lieu

Vendredi 24 mars 2017

Le Colloque se déroulera dans l'Amphithéâtre 1 (ALLSH) situé 29, Avenue Robert Schuman, à Aix-en-Provence - Tel. 04 42 17 25 40

  • Programme

Matinée

9h00 - Propos introductifsPhilippe Bonfils, Doyen de la Faculté de droit et de science politique d'Aix-en-Provence

Présentation du livre blanc

Sous la présidence de Muriel Giacopelli, Professeur Aix-Marseille, Directrice ISPEC

9h15 - La genèse du Livre blanc du conseil de l'Europe

Annie Devos, administratrice générale des maisons de Justice, Fédération Wallonie-Bruxulles, membre expert du conseil de coopération pénologique, Comité Européen pour les problèmes criminels, conseil de l'Europe, Strasbourg

9h35 - Les axes majeurs du Livre blanc

Annie Devos, administratrice générale des maisons de Justice, Fédération Wallonie-Bruxulles, membre expert du conseil de coopération pénologique, Comité Européen pour les problèmes criminels, conseil de l'Europe, Strasbourg

10h00 - Des recommandations inspirées par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme

Anne Gaëlle Robert, Maître de conférences, Grenoble-Alpes

10h20 : Pause

Le surpeuplement carcéral : une problématique actuelle en France

Sous la présidence d'Éric Senna, Magistrat, MCF associé Montpellier

10h45 - Les normes d'espace vital en détention : l'approche du Comité européen pour la prévention de la torture

Vincent Theis, ancien membre du CPT au titre du Luxembourg

11h10 - La mesure du phénomène et les instruments de suivi

Annie Kensey, Chef du bureau des statistiques et des études, Sous-Direction des Métiers, Direction de l'administration pénitentiaire

et Christian Mouhanna, Directeur du Centre de recherches Sociologiques sur le Droit et les Institutions Pénales, Paris

11h40 - L'appréhension du phénomène en France

Martine Lebrun, Présidente honoraire de l'Association nationale des juges de l'application des peines

12h00 - Déjeuner libre

Après-midi

Une approche plurielle d'une problématique largement partagée en Europe

Sous la présidence d'Eric Senna, Magistrat, MCF associé Montpellier

14h00 - La situation de la Roumanie

Madalina Manolache, Conseillère juridique à la Direction Affaires Européennes et Droits de l'Homme, Ministère de la Justice Roumanie, Bucarest

14h20 - La situation de la Bulgarie

Lubov Stoytcheva, Legal Officer, Service exécution des arrêts de la CEDH, Strasbourg

14h40 - La situation de la Belgique

Vincent Spronck, Directeur du site de Forest Bruxelles, Direction générale EPI, Bruxelles

15h00 - La situation de l'Italie

Maria Teresa Leacche, Direttore Uffico II (Contenzioso dinanzi alla CEDH) Direction générale des affaires juridiques et légales Ministère de la Justice, Rome

15h20 - Pause

Les pistes d'amélioration : stabilisation et réduction de la population pénale

Sous la présidence d'Anne Gaëlle Robert, MCF Grenoble-Alpes

15h40 - Les différentes pistes d'amélioration de la situation

Adeline Hazan, contrôleur générale des lieux de privation de liberté, Paris

16h00 - Des questionnements récurrents autour de l'instauration d'un mécanisme de régulation et de la mise en oeuvre de l'encellulement individuel

Alexis Saurin, Président FARAPEJ, Paris

16h20 - Courtes peines et prévention de la récidive : un nouveau lieu de préparation à la sortie

Un représentant de la direction de l'administration pénitentiaire

16h40 - Dépénalisation, contraventionnalisation, révision de l'échelle des peines

Anne Ponseille, MCF, CERCOP, Montpellier

17h00 - Propos conclusif

Sylvie Cimamonti, Professeur à Aix-Marseille

  • Inscription

Obligatoire avant le 23 mars 2017 auprès de :

Mme Monette LASCO, Laboratoire de Droit Privé et de Sciences Criminelles

monette.lasco@univ-amu.fr - 04.86.91.43.16

(Règlement à adresser à l'ordre de l'agent comptable AMU)

Tarif plein : 100 euros

Tarif réduit : avocats inscrits au barreau depuis moins de 2 ans : 50 euros

Gratuit pour les étudiants

newsid:457162

Procédure pénale

[Brèves] Contrôle du juge judiciaire sur les contrôles d'identité effectués dans une zone accessible au public de gares ouvertes au trafic international

Réf. : Cass. crim., 8 mars 2017, n° 15-86.160, F-P+B (N° Lexbase : A4437T3Q)

Lecture: 2 min

N7110BWA

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par Aziber Seïd Algadi

Le 17 Mars 2017

Au même titre que les autres contrôles d'identité, le contrôle prévu à l'article 78-2, alinéa 9, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L1023LDA), qui s'applique à toute personne se trouvant dans une zone accessible au public de gares ouvertes au trafic international et désignées par arrêté, est soumis à des conditions, autres que celles relatives au lieu du contrôle, au respect desquelles le juge judiciaire doit veiller. Telle est la précision apportée par un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, rendu le 8 mars 2017 (Cass. crim., 8 mars 2017, n° 15-86.160, F-P+B N° Lexbase : A4437T3Q). En l'espèce, le 25 novembre 2013, M. A. et son frère ont fait l'objet d'un contrôle à la gare Saint-Jean de Bordeaux, à la suite duquel l'identité du premier a été vérifiée dans les locaux des services de la police aux frontières de Bordeaux-Mérignac. M. A. a été entendu, le 26 novembre, sur sa carte d'identité belge qui a été appréhendée. Il a été placé en garde à vue le 18 février 2014, puis directement cité devant le tribunal correctionnel du chef d'usage de faux document administratif. Les premiers juges ont rejeté l'exception de nullité du contrôle d'identité et des actes subséquents et condamné le prévenu à quatre mois d'emprisonnement avec sursis. Celui-ci et le ministère public ont interjeté appel. Pour faire droit au moyen de nullité soulevé en défense et annuler la procédure établie par les services de police, la cour d'appel a retenu que l'article 78-2 du Code de procédure pénale envisage plusieurs modalités de contrôle d'identité, le contrôle judiciaire, le contrôle administratif et le contrôle dit "Schengen" et que le procès-verbal de police relatif aux conditions de mise en oeuvre du contrôle d'identité doit être explicite afin que le juge puisse exercer son contrôle sur le respect des règles applicables. Les juges d'appel ont relevé qu'en l'espèce, ne figure à la procédure aucun procès-verbal du contrôle d'identité du prévenu, et que le procès-verbal d'audition du 26 novembre 2013 fait simplement état d'un contrôle dont le prévenu et son frère ont été l'objet le 25 novembre en gare Saint-Jean à Bordeaux. La cour a alors conclu ne pas être en mesure d'apprécier le respect par les policiers des dispositions susvisées. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a, selon les juges suprêmes, justifié sa décision au regard de l'article 78-2 du code précité (cf. l’Ouvrage "Procédure pénale" N° Lexbase : E4327EUS).

newsid:457110

Propriété intellectuelle

[Jurisprudence] Affaire "MECCANO" : quand la vulgarisation de la marque reste sans incidence sur la dégénérescence

Réf. : Cass. com., 1er mars 2017, n° 15-13.071, FS-P+B+I (N° Lexbase : A5750TPN)

Lecture: 11 min

N7098BWS

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par Fabienne Fajgenbaum et Thibault Lachacinski, Avocats à la cour

Le 16 Mars 2017

La réussite commerciale d'une société s'apprécie notamment par la notoriété de ses marques. Quoi de plus flatteur que de les voir largement adoptées par le public ? Pour autant, il appartient au titulaire de s'assurer que sa marque ne va pas à ce point intégrer l'inconscient collectif qu'elle ne sera plus perçue comme un signe distinctif mais comme la désignation usuelle de certains produits et services. Tel un Icare que sa funeste témérité a incité à voler trop près du soleil, la marque hier notoire retomberait alors irrémédiablement dans le domaine public, librement utilisable par tout un chacun. La société Meccano avait agi à l'encontre du magazine Le Point, lui reprochant l'utilisation réitérée de son signe "MECCANO" dans des articles rédactionnels sans préciser qu'il s'agissait d'une marque déposée. Par un arrêt rendu le 1er mars 2017 et publié au Bulletin , la Chambre commerciale de la Cour de cassation a dit pour droit que l'usage d'un signe enregistré en tant que marque n'est pas fautif "s'il n'est pas susceptible d'être à l'origine d'une dégénérescence de cette marque". Le signe "MECCANO" n'ayant pas été utilisé pour désigner le produit "jeu de construction" mais à titre de métaphore, c'est à tort que la cour d'appel de Paris (1) aurait condamné l'hebdomadaire Le Point sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun. I - La dégénérescence ou la sanction de la marque "trop" notoire

Quel paradoxe, tout de même, que la dégénérescence de la marque ! En effet, victime de son succès, la marque est devenue à ce point notoire qu'elle a fini par être littéralement adoptée par le public... qui ne la perçoit plus comme un signe distinctif mais comme la désignation usuelle dans le commerce d'un produit ou d'un service (1). Les marques associées à des produits novateurs ("FRIGIDAIRE", "KLEENEX", "SOPALIN", "PAMPERS", "FERMETURE ECLAIR", "KÄRCHER", etc.), à l'origine d'un nouveau marché, sont plus particulièrement exposées. Alors que, hier, la marque notoire bénéficiait d'un régime de protection renforcée (C. prop. intell., art. L. 713-5 N° Lexbase : L2200ICH), la marque devenue "trop" notoire (3) se verrait désormais privée de toute protection au titre du droit des marques ; son titulaire se trouvant en effet déchu de ses droits, n'importe lequel de ses concurrents pourrait désormais librement exploiter son signe dans la vie des affaires.

D'une manière générale, les dispositions du droit des marques s'attachent à concilier, d'un côté, les intérêts du titulaire de la marque à sauvegarder la fonction essentielle de celle-ci et, de l'autre côté, les intérêts d'opérateurs économiques à disposer de signes susceptibles de désigner leurs produits et services (4). Faisant application de ce principe de mise en balance des intérêts, l'article L. 714-6 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3739ADT) (5) menace donc de déchéance le propriétaire d'une marque devenue "la désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service". En effet, la marque ayant alors perdu son caractère distinctif et n'étant plus apte à remplir sa fonction d'indication d'origine, c'est-à-dire à identifier le produit ou le service désigné comme provenant d'une entreprise déterminée, l'intérêt supérieur constitué par la liberté du commerce et de l'industrie retrouve sa primauté (6).

Le régime de la dégénérescence n'est toutefois pas dénué d'une certaine dose d'équité. Compte tenu de l'exceptionnelle sévérité de la sanction prononcée, la déchéance est en effet conditionnée au constat supplémentaire que la dégénérescence du signe est "le fait de l'activité ou de l'inactivité de son titulaire" (Directive 2015/2436, art. 20 N° Lexbase : L6109KW8). Véritable gardien du caractère distinctif de sa marque, le titulaire se trouve donc investi d'une obligation de vigilance, consistant notamment à s'assurer que le public est bien informé qu'il s'agit d'un signe protégé, notamment dans les pays de régime anglo-saxon par l'apposition de sigles tels que "®" ou "TM" (7). Une absence de réaction de sa part voire sa passivité, contribuant à favoriser le processus de dégénérescence du signe, l'exposerait à la sanction de la déchéance.

Le titulaire de la marque menacée de dégénérescence se doit donc de réagir à l'égard des tiers mal inspirés qui en réalisent un usage dévoyé. C'est entendu. Pour autant, la nature de cette réaction et l'intensité requise sont laissées à l'appréciation souveraine des juges du fond. La jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne se contente de préciser que le titulaire ne doit pas se montrer "insuffisamment vigilant" (8). Si les directives de l'EUIPO proposent notamment d'organiser une campagne télévisée ou de publier des publicités dans les journaux et les magazines pertinents (9), le type de mesures à mettre concrètement en oeuvre dans chaque affaire reste donc incertain.

En pratique, compte tenu de l'extrême gravité de la sanction associée à une éventuelle carence du titulaire, cet aléa n'est pas sans susciter un certain désarroi. Ainsi, le titulaire de la marque "VINTAGE" avait semblé considérer que l'envoi de courriers à quelques concurrents indélicats utilisant son signe sans les précautions nécessaires serait suffisant. Certainement pas, à en croire l'arrêt rendu le 20 avril 2015 par la cour d'appel de Paris ayant au contraire jugé cette réaction "peu proportionnée à l'emploi massif et généralisé du terme vintage" ; l'existence d'une unique action en justice, le défaut de suivi des mises en demeure et l'absence d'action "contre les journaux et magazines pour mettre fin à l'utilisation générique qu'ils font de sa marque" lui auront donc été fatals (10). De même, la société Candia a été déchue de ses droits de marque sur la couleur "rose fuchsia" au motif qu'elle n'aurait intenté qu'une seule action contre des tiers et n'aurait donc pas pris "des mesures suffisantes pour éviter cette généralisation de l'emploi" de ce cette couleur (11). Mentionnons encore la marque "PINA COLADA", dont la cour d'appel de Paris (12) a prononcé la déchéance au motif que, si son titulaire était notamment intervenu pour obtenir le retrait des marques déposées par des tiers, il était en revanche resté "totalement passif face à l'emploi généralisé de l'expression pina colada' [...]" et s'était "abstenu de réagir contre cet usage (par voie d'interventions directes, ou au moyen de campagnes de publicité organisée pour mettre en garde les consommateurs contre les conclusions possibles)".

Dans le doute, le titulaire de la marque aura donc tout intérêt à faire prévaloir le principe de précaution. Tel semblait être le parti-pris de la société Meccano dans le litige l'opposant au magazine Le Point et ayant donné lieu à l'arrêt du 1er mars 2017 rendu par la Chambre commerciale.

II - La dégénérescence ou la responsabilité des organes de presse en question

L'affaire objet de l'arrêt rendu le 1er mars 2017 par la Cour de cassation est particulièrement intéressante en ce qu'elle a trait à une problématique relativement méconnue (13) : la responsabilité des tiers dans le processus linguistique de dégénérescence de la marque, dont l'issue juridique consiste dans l'expropriation (légale) de son titulaire. Témoin privilégié, voire caisse de résonance de l'évolution de la langue, les journaux et magazines peuvent en effet contribuer à banaliser un signe à l'origine distinctif, si ce n'est consacrer son entrée dans le langage courant. Comme bien souvent, d'un grand pouvoir s'infèrent de grande responsabilité. Tel est d'ailleurs le message implicite des nouvelles dispositions du "paquet marques" (14), qui imposent désormais aux dictionnaires, encyclopédies et autres ouvrages à consulter, sur demande du titulaire de la marque, de préciser que le signe qui y est reproduit a fait l'objet d'un enregistrement à titre de marque (15).

Manifestement consciente du risque encouru par sa célèbre marque éponyme, la société Meccano a intenté une action sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle de droit commun (C. civ. art. 1382 N° Lexbase : L1488ABQ (16) ) à l'encontre de l'hebdomadaire Le Point. Elle lui reprochait en effet d'avoir, en dépit de ses avertissements successifs et à douze reprises entre 2006 et 2012 (17), utilisé le signe "MECCANO" "comme un nom commun désignant de manière générique n'importe quel jeu de construction", qu'il soit intellectuel, architectural ou autre. La demanderesse faisait notamment valoir que sa marque était utilisée sans guillemets et en lettres minuscules (à l'exception, souvent, de la première lettre), toujours précédée d'un déterminant et souvent accompagnée d'un adjectif qualificatif, laissant donc croire qu'elle serait en fait un nom commun signifiant "assemblage ou montage de pièces".

En première instance (18), le tribunal de grande instance de Paris n'a pas été sensible à son argumentation et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes. Le jugement rendu le 25 janvier 2013 relève en effet que l'usage du nom "MECCANO" est fait "à titre métaphorique pour évoquer soit des manoeuvres politiques ou des constructions intellectuelles, soit des constructions architecturales, des manipulations, des mécanismes". Le tribunal souligne, par ailleurs, que le produit visé au dépôt n'est pas désigné. En conséquence, compte tenu du nombre limité des occurrences litigieuses, de la présence des majuscules en début de mot et d'un usage "dans des acceptions métaphoriques qui ne servent pas à désigner les produits visés au dépôt des enregistrements français et communautaire de la marque", le comportement du magazine Le Point n'a pas été jugé fautif.

L'arrêt rendu le 21 octobre 2014 (19) par la cour d'appel de Paris, saisie d'un recours par la société Meccano, poursuit une analyse diamétralement opposée. Retenant une obligation de prudence à la charge de l'hebdomadaire, la cour considère que "le prétendu usage stylistique et métaphorique d'une marque notoire ne saurait nécessairement exclure toute faute préjudiciable, alors qu'il n'est pas discuté que la liberté d'expression n'est pas absolue et que la société Meccano a pu intervenir utilement auprès d'autres organes de presse pour défendre sa marque" (20). Cette première considération est intéressante en ce qu'elle revient sur le rôle et la responsabilité des organes de presse dans le processus de vulgarisation des marques. Pour la cour, l'usage du terme "Meccano" ne répondait donc à aucun but légitime, ni besoin nécessaire d'expression en matière de presse, à plus forte raison dès lors que d'autres termes du langage ("assemblage", "construction", "jeu de construction" ou encore "dispositif") auraient pu être valablement utilisés.

En pratique, si le signe "MECCANO" a certes été orthographié comme un nom propre (avec une majuscule), son emploi a été celui d'un mot usuel du langage journalistique pour "conceptualiser un signe, qui constitue une marque de jeu, pour l'étendre à la désignation de toutes sortes de systèmes de construction ou de montages architecturaux, intellectuels, politiques ou économiques". Le terme "Meccano" se voit donc conférer un sens nouveau, plus large que le jeu de construction pour enfants. Pour cette raison, il n'est plus nécessairement perçu comme une marque déposée ("aucune mention ou sigle ne l'indiquant") mais comme un terme du langage courant, quand bien même le public aurait conscience d'une référence implicite à un jeu de construction connu.

Ayant participé au processus de vulgarisation préjudiciable de la marque "MECCANO" ("dont le caractère distinctif résulte de la perception qu'en a le public"), l'hebdomadaire Le Point a donc été condamné à régler la somme de 30 000 euros à titre d'indemnisation, outre la publication du dispositif de l'arrêt dans trois journaux ou revues à déterminer.

III - Le périmètre de la dégénérescence en question

Par son arrêt du 1er mars 2017 voué aux honneurs d'une publication au Bulletin, la Chambre commerciale a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 21 octobre 2014. Ayant rappelé que l'usage d'un signe enregistré en tant que marque n'est pas fautif s'il n'est pas susceptible d'être à l'origine d'une dégénérescence de cette marque, la Cour de cassation reproche à la cour d'appel de Paris de ne pas avoir caractérisé en quoi l'usage du signe "MECCANO" à titre de métaphore, qui ne tendait pas en l'espèce à désigner des produits ou services, aurait pu contribuer à une telle dégénérescence.

Ce faisant, la Cour de cassation adopte une analyse similaire à celle retenue en première instance et revient donc à une lecture littérale des dispositions relatives à la déchéance pour dégénérescence : pour qu'une marque puisse devenir la désignation usuelle dans le commerce d'un produit ou d'un service, il est nécessaire d'en établir l'usage générique par des tiers pour désigner ce produit ou ce service. En l'espèce, l'hebdomadaire Le Point n'a pas utilisé le terme "MECCANO" pour désigner de façon usuelle n'importe quel jeu de construction pour enfants mais lui a attribué un sens nouveau (métaphorique) appartenant au langage commun, par le biais d'une figure de style : la synecdoque (21).

Pour autant, l'appréciation de la cour d'appel, qui a semblé vouloir privilégier l'esprit du texte à sa lettre (22), ne nous semblait pas dénuée de pertinence (23). En effet, il est constant que tout comportement qui aboutit à faire entrer un signe dans le langage courant et à lui faire quitter corrélativement le champ de la marque contribue à brouiller la perception du public ; celui-ci n'associe plus alors exclusivement la marque à un signe distinctif renvoyant à une entreprise déterminée. C'est la raison pour laquelle la dégénérescence de la marque doit être retenue lorsqu'elle devient la désignation usuelle d'un produit ou d'un service.

Or, la fonction d'identité de la marque n'est-elle pas tout autant affectée lorsqu'un organe de presse l'utilise de façon "métaphorique" et la vulgarise ? Nous aurions tendance à le penser, conformément à l'adage "qui peut le plus peut le moins". En effet, l'atteinte qui a été portée à la marque devenue usuelle pour désigner un produit nous semble d'autant plus grave lorsque le signe ne désigne plus simplement un produit mais bien métaphoriquement une catégorie ou une globalité de produits. Dissocié des produits et services qui ont fait sa renommée, le signe pourrait n'être plus perçu que comme un terme du langage courant, le public oubliant peu à peu qu'il s'agissait avant toute chose d'une marque.

Dans son arrêt précité du 20 avril 2005, la cour d'appel de Paris avait ainsi prononcé la déchéance de la marque "VINTAGE", alors que celle-ci ne désignait pas un produit ou service spécifique mais un "style d'articles vestimentaires d'inspiration ancienne ou rétro". La Cour de cassation (24) a également confirmé la déchéance de la marque "rose fuchsia", alors pourtant que celle-ci ne constitue évidemment pas la "désignation usuelle dans le commerce du produit" (C. prop. intell., art. L. 714-6) mais simplement l'une de ces caractéristiques.

Compte tenu du danger encouru du fait de la "métaphorisation" de la marque, il nous aurait donc semblé légitime que soit reconnue au titulaire la possibilité d'intervenir auprès des organes de presse. En effet, n'est-ce pas précisément le rôle du titulaire, conformément à son obligation de vigilance, de s'assurer qu'il sera toujours rappelé au public que le signe en question est avant toute une marque ?

A notre sens, tel était en tout cas le raisonnement suivi par la cour d'appel de Paris. Il est d'ailleurs intéressant de relever que l'arrêt du 21 octobre 2014 ne renvoie à aucun moment aux dispositions de l'article L. 714-6 du Code de la propriété intellectuelle, pas plus qu'il ne se réfère à la notion de déchéance/dégénérescence (le terme n'étant pas même cité) (25). De là à en déduire que la réflexion sur la faute menée par la cour ne portait pas spécifiquement sur le cas de la dégénérescence mais, plus généralement, sur l'atteinte au pouvoir distinctif de la marque "MECCANO" et sa vulgarisation (26)...

* * *

L'arrêt du 1er mars 2017 énonce que "l'usage d'un signe enregistré en tant que marque n'est pas fautif s'il n'est pas susceptible d'être à l'origine d'une dégénérescence de cette marque". Le caractère a priori très général de cette affirmation surprend quelque peu dans un arrêt rendu au visa des dispositions de l'article 1382 (devenu 1240 N° Lexbase : L0950KZ9) du Code civil et ayant donc trait à la responsabilité civile de droit commun. Or, il ne nous aurait pas semblé extravagant que soit jugé fautif le refus d'un organe de presse de préciser que le signe "MECCANO", bien qu'utilisé dans un sens métaphorique, reste une marque protégée, à plus forte raison alors qu'il avait été mis en garde de façon répétée par le titulaire, qu'il avait pris implicitement des engagements (27) et que le recours à des synonymes aurait été possible. En effet, à supposer que la présence d'une majuscule en début de mot ne soit pas en tant que telle suffisante pour informer le lecteur de l'existence d'une marque enregistrée, un manquement à une obligation élémentaire de prudence nous semble alors constitué. Par ailleurs, quand bien même ce comportement ne serait pas susceptible d'induire une dégénérescence au sens du droit des marques, il n'emporte pas moins une atteinte au pouvoir attractif et distinctif de la marque par une dilution à l'origine de laquelle, justement, le titulaire du droit doit pouvoir venir s'opposer. Le triptyque Faute/Préjudice/Lien de causalité se trouve ainsi réuni.

En creux, l'arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation reste néanmoins porteur d'une bonne nouvelle pour la société Meccano : l'usage "métaphorique" de la marque, quand bien même il serait généralisé, ne pourrait pas aboutir à la dégénérescence de ce signe au sens des dispositions de l'article L. 714-6 du Code de la propriété intellectuelle. Au surplus, quelle que soit l'issue de la procédure, la demanderesse pourra s'en prévaloir comme un gage de sa réactivité pour défendre ses droits. Le spectre de la dégénérescence semble donc s'éloigner, quand bien même celui de la vulgarisation reste bien présent. Assisterait-on à une "uberisation" du droit des marques ?


(1) CA Paris, Pôle 5, 1ère ch., 21 octobre 2014, n° 13/08736 (N° Lexbase : A8311MYH).
(2) Figure de style appelée une antonomase (remplacement d'un nom commun par un nom propre), ainsi que le rappelle le site internet de l'INPI ("3M Company : empêcher la dégénérescence de marque").
(3) La cour d'appel de Nancy parle de "dégénérescence par excès de notoriété" (CA Nancy, 18 mai 2016, n° 15/01335 N° Lexbase : A5170RP8).
(4) CJUE, 27 avril 2006, affaire C-145/05, points 29 et s. (N° Lexbase : A1711DP3) ; CJUE, 6 mars 2014, aff. C-409/12, Points 32 et s. (N° Lexbase : A2326MGA).
(5) Transposant en droit interne les dispositions de la Directive 2015/2436 du 16 décembre 2015, rapprochant les législations des Etats membres sur les marques (N° Lexbase : L6109KW8).
(6) Pour reprendre une formule utilisée par la cour d'appel de Nancy dans son arrêt du 18 mai 2016 (préc. note 3).
(7) Par un jugement du 29 octobre 1997, le tribunal de grande instance de Paris a jugé que l'insertion de la mention "marque déposée" dans le corps d'un article de presse, simplement "incidente", était insuffisante, cf. PIBD, 648, III, 119.
(8) CJUE, 6 mars 2014, aff. C-409/12, préc., point 34.
(9) Directives relatives à l'examen devant l'Office, Partie D, Annulation, Point 2.3.5.
(10) CA Paris, 4ème ch., sect. A, 20 avril 2015, n° 04/03753 (N° Lexbase : A0317DIL).
(11) CA Lyon, 23 mars 2006, n° 04/08055 (N° Lexbase : A8633DQS) ; en sens inverse, ayant considéré que le titulaire de la marque s'était montré suffisamment réactif, CA Paris, Pôle 5, 2ème ch., 12 juin 2015, n° 14/11690 (N° Lexbase : A6300SAL infirmant toutefois le jugement de première instance ayant relevé que la demanderesse ne versait au débat que des courriers de mise en demeure : TGI Paris, 3ème ch., 16 mai 2014, n° 12/03980 N° Lexbase : A1644MQX) ; de même, le titulaire de la marque "PEDALO", déposée en 1936, l'a suffisamment défendue, CA Aix-en-Provence, 9 janvier 2006, n° 03/06469 et CA Aix-en-Provence, 14 janvier 2010, n° 08/09209 (N° Lexbase : A3226EY7).
(12) CA Paris, 19 octobre 2001, n° 1999/06247, confirmé par Cass. com., 28 avril 2004, n° 02-10.505, F-P+B (N° Lexbase : A0480DCR).
(13) Pour une autre affaire à l'encontre du journal Le Figaro, mais sur le fondement de la contrefaçon : TGI Paris 21 janvier 1993, PIBD, 546, III, 395 (marque "CADDIE"), confirmé par CA Paris, 21 janvier 1993 puis par Cass. com., 3 janvier 1996, n° 94-12.691, inédit (N° Lexbase : A9983ATW) ; cf. également, à l'encontre du journal Libération : TGI Paris, 29 octobre 1997, PIBD, 648, III, 119 (marque "CADDIE").
(14) Directive 2015/2436 et Règlement n° 2015/2424 du 16 décembre 2015 (N° Lexbase : L3614KWR, art. 10).
(15) L'importance des dictionnaires avait déjà été soulignée dans TGI Paris 21 janvier 1993, PIBD, 546, III, 395 (marque "CADDIE") et dans CA Aix-en-Provence, 9 janvier 2006, préc. (marque "PEDALO").
(16) Devenu l'article 1240 du Code civil (N° Lexbase : L0950KZ9) ; à cet égard, le tribunal fait justement remarquer que les conditions d'application du droit des marques ne sont pas réunies, faute d'usage de la marque "MECCANO" dans la vie des affaires (TGI Paris, 25 janvier 2013, n° 11/13338 N° Lexbase : A1817KAK).
(17) Dont six articles publiés en cours d'instance.
(18) TGI Paris, 25 janvier 2013, préc. note 16.
(19) CA Paris, Pôle 5, 1ère ch., 21 octobre 2014, préc. note 1.
(20) En première instance, le tribunal avait également rappelé (à titre surabondant) que la liberté d'expression, si elle correspond à une liberté fondamentale, n'est pas absolue et "doit respecter les droits d'autrui, parmi lesquels notamment le droit de propriété incorporelle, qui a la même valeur" (TGI Paris, 25 janvier 2013, préc.).
(21) C'est-à-dire la désignation de la partie (un jeu de construction pour enfants) pour le tout (tous jeux de constructions, intellectuels y compris).
(22) Cf. J Passa, L'incidence de la fonction de la marque sur l'obtention ou la validité et le maintien en vigueur du droit, Propriété industrielle n° 10, octobre 2010, dossier 4, suggérant que le domaine d'application de la déchéance pour dégénérescence puisse être étendu à d'autre cas de figure.
(23) Pour un raisonnement similaire, la marque "VINTAGE" étant utilisée pour désigner une catégorie de produits, CA Paris, 20 avril 2015, préc. note 10.
(24) Cass. com., 28 avril 2004, préc. note 12.
(25) Le terme dégénérer n'est utilisé qu'une unique foi, pour retranscrire l'argumentaire du magazine Le Point.
(26) Le terme "Meccano" "renvoie [...] fautivement à l'idée d'un signe conceptualisant tout type de produits d'un même genre, ce qui est par nature préjudiciable au titulaire de la marque, le caractère distinctif de cette dernière résultant de la perception qu'en a le public".
(27) S'engageant à en tenir "le plus grand compte" selon l'exposé réalisé par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 21 octobre 2014 (préc. note 1).

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Rel. collectives de travail

[Brèves] Adhésion d'une union syndicale locale à une union départementale et à des organes confédéraux : absence de constitution d'un groupe

Réf. : Cass. soc., 7 mars 2017, n° 15-23.038, FS-P+B (N° Lexbase : A4508T3D)

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par Blanche Chaumet

Le 17 Mars 2017

L'adhésion d'une union syndicale locale à une union départementale et à des organes confédéraux n'entraîne pas en soi la constitution d'un groupe au sens des dispositions de l'article L. 1233-4 du Code du travail (N° Lexbase : L2149KGP). Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 7 mars 2017 (Cass. soc., 7 mars 2017, n° 15-23.038, FS-P+B N° Lexbase : A4508T3D).
En l'espèce, Mme X a été engagée le 1er octobre 1989 par l'Union locale de la confédération générale du travail de Saint-Dizier en qualité de secrétaire administrative. Elle a été licenciée pour motif économique le 21 octobre 2011.
Pour dire que le licenciement de la salariée devait être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à payer à la salariée une somme en réparation du préjudice causé, la cour d'appel retient que celui-ci n'a pas satisfait à son obligation de reclassement, notamment dès lors que l'activité des unions locales et départementales de la CGT et leur inclusion dans une organisation véritablement communautaire rendaient permutables leurs salariés chargés des tâches de secrétariat administratif. A la suite de cette décision, ce dernier s'est pourvu en cassation.
En énonçant la règle susvisée, la Haute juridiction casse l'arrêt d'appel au visa de l'article L. 1233-4 du Code du travail. En statuant comme elle l'a fait sans préciser en quoi les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation de l'Union locale CGT de Saint-Dizier lui permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel avec d'autres unions affiliées au même syndicat, la Haute juridiction a jugé que la cour d'appel n'avait pas donné de base légale à sa décision (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E4776EX8).

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Responsabilité médicale

[Brèves] Confirmation de l'injonction de reprendre les soins d'une enfant d'un an souffrant de lésions neurologiques graves et irréversibles

Réf. : CE référé, 8 mars 2017, n° 408146 (N° Lexbase : A5871TTM)

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N7164BWA

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par June Perot

Le 18 Mars 2017

La poursuite des traitements sur une enfant de un an, placée dans un service de réanimation pédiatrique d'un hôpital, diagnostiquée comme ayant des lésions neurologiques graves, entraînant une paralysie des membres, de la face et une dépendance à une respiration et une alimentation artificielles, ne caractérise pas une obstination déraisonnable, n'ayant pour d'autre effet que le maintien artificiel de la vie. La décision d'arrêter les traitements de l'enfant ne relève donc pas de l'hypothèse d'interruption de traitement prévue par la loi à l'égard des personnes hors d'état d'exprimer leur volonté. Dès lors qu'il constate que la décision ne pouvait pas être prise par le médecin dans le cadre de cette procédure, le juge des référés ne se prononce pas sur la question de savoir si cette procédure était applicable ou bien si, s'agissant d'un mineur, le consentement des parents à l'arrêt de traitement était nécessaire. Telle est la solution énoncée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 8 mars 2017 (CE référé, 8 mars 2017, n° 408146 N° Lexbase : A5871TTM). En l'espèce, une enfant âgée de un an avait été admise à l'hôpital en raison d'une forte fièvre puis admise en réanimation pédiatrique en raison d'un choc cardiogénique. Le diagnostic avait été posé d'une rhombencéphalomyélite à entérovirus qui a entraîné des lésions neurologiques définitives, entraînant un polyhandicap majeur. Dans ces circonstances, le médecin en charge au sein du service d'anesthésie-réanimation pédiatrique a engagé la procédure collégiale prévue à l'article L. 1110-5-1 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L4208KYI). A l'issue d'une réunion collégiale du 4 novembre 2016, l'arrêt de la poursuite des thérapeutiques actives a été décidé à l'unanimité, au motif du caractère irréversible des lésions neurologiques constatées et d'un état de conscience difficile à évaluer mais probablement fortement altéré. Les parents ont exprimé leur opposition à cet arrêt et ont saisi le juge des référés. Par une première ordonnance du 16 novembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif a suspendu provisoirement l'exécution de la décision et ordonné une expertise médicale. Par une seconde ordonnance du 8 février 2017, il a suspendu la décision d'arrêter les traitements et enjoint à l'équipe médicale de maintenir à l'enfant les soins appropriés (TA Marseille, du 08-02-2017, n° 1608830 N° Lexbase : A0002TNE). L'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille a fait appel de cette ordonnance devant le juge des référés du Conseil d'État. Enonçant la solution précitée, le juge des référés du Conseil d'Etat rejette l'appel de l'AP-HM. Celle-ci demeure ainsi tenue, en vertu de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de poursuivre les soins de l'enfant .

newsid:457164

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