La lettre juridique n°365 du 1 octobre 2009

La lettre juridique - Édition n°365

Éditorial

Partenariats publics-privés à l'ombre des chapelles

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N9386BL9

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

Le 27 Mars 2014


"La religion fait partie de la culture, non comme dogme, ni même comme croyance, comme cri". Et, si nous citons Merleau-Ponty -Sens et non sens-, c'est que, pour fondée ou non que soit la crainte d'une privatisation rampante des Universités, par le biais de partenariats publics-privés (PPP) signés pour la construction, l'entretien et la maintenance de plusieurs bâtiments universitaires parisiens, il nous semble que ce cri, pourtant laïque, se fait, paradoxalement, l'écho d'une foi : celle en l'indépendance -à ne pas confondre avec l'autonomie- des Universités françaises, bras séculiers absolus, et en principe exclusifs, de la politique de diffusion des savoirs de l'Etat. Autrement dit, ces partenariats publics-privés attenteraient à l'idée d'une Université sanctuaire, protégée non pas de la société civile et du monde professionnel -il est loin le temps de la retraite des étudiants sur le mont Athos-, mais protégée des intérêts commerciaux ; l'Etat devant maîtriser l'alpha et l'omega de sa politique de développement, d'entretien et de compétitivité de ses Universités, afin que soient assurées l'égalité sociale, l'indépendance de la pensée, la diversité des matières enseignées et l'excellence universitaire, par opposition au pragmatisme du développement des seules filières aux records d'employabilité.

Finalement, l'affaire n'est pas vraiment neuve : "comment penser librement à l'ombre d'une chapelle ?" Et, pourtant, c'est à l'ombre d'une chapelle que les premiers érudits français ont forgé la pensée et la contestation, d'abord théologiques, puis universitaires, dans toutes les matières, sciences exactes comme sciences humaines. Qui se souvient que La Sorbonne tire son origine dans le collège fondé en 1253 au sein de l'Université de Paris par Robert de Sorbon, chapelain et confesseur du roi Saint Louis. Qui se souvient, également, que cette noble institution mère de tant d'autres fleurons universitaires -bien que les Universités de Toulouse et d'Orléans puissent revendiquer une antériorité- est parée d'une Chapelle où gît le tombeau du plus illustre de ses proviseurs : le Cardinal Duc de Richelieu. Tombeau qui rappelle, ainsi, qu'à l'ombre de la confession, l'Etat moderne, centralisateur et dispensateur des savoirs sût marquer l'équilibre entre la société ecclésiastique, la société laïque, la diversité syndicale, comme demain la société marchande.

Enfin quoi ! Allez dire à Platon et à ses adeptes de l'Académie que l'indépendance de la pensée, fondement même de l'Université, a trait à une question de gestion et d'entretien immobiliers ! Eux qui fondaient la pensée philosophique sur les ruines d'une eukia !

Alors, lorsque le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche signe, le 24 juillet 2009, deux contrats de partenariat d'un montant global de 226 millions d'euros, en vue de rénover les Universités de Paris IV-Sorbonne et de Paris VII-Diderot, deal sur lequel Lexbase Hebdo - édition publique revient, cette semaine, à l'occasion d'un entretien avec Maître Marc Fornacciari, avocat associé du cabinet Salans et co-auteur du Guide opérationnel des PPP et Maître Dorothée Griveaux, conseils de l'Etat dans le cadre de la signature du contrat de partenariat relatif à l'Université Paris IV, qu'il ne s'agisse pas de réveiller de vieilles querelles de chapelle, mais d'entrevoir toute l'efficacité d'une telle démarche novatrice pour l'Etat comme pour le monde enseignant, sans occulter les inconvénients inhérents à ce type de contrat administratif.

Car, si l'efficacité des solutions globales construction-maintenance immobilière et la fiabilité des délais d'exécution sont à l'honneur, le surcoût d'un recours aux acteurs privés et la dissémination de la dette publique ainsi amortie sur des dizaines d'années, mais bien présente dans le budget de l'Etat à la charge des générations futures, en constituent les pendants qu'il est nécessaire d'évaluer pour porter un regard objectif sur une technique contractuelle encore balbutiante ; l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 ayant marqué le coup d'envoi des PPP, mais la loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008 en ayant considérablement simplifié et étendu les conditions de recours.

"Ce projet est une arlésienne, qui enfin ne l'est plus grâce à une opération de magie [du ministre] qui ressuscite un mort", se réjouissait le président de Paris-IV, lors de la signature. Et, Valérie Pécresse de préciser que deux autres partenariats public-privé de ce type sont en cours pour accélérer deux projets : la rénovation de l'UFR de médecine de l'Université de Versailles-Saint-Quentin... et celle du Zoo de Vincennes.

"Quoi que tu rêves d'entreprendre, commence-le. L'audace a du génie, du pouvoir, de la magie", nous rappelait Goethe... Les PPP relèvent d'une volonté gouvernementale forte, ont les attraits de la magie résolvant d'un coup de baguette le problème de la gestion immobilière universitaire... Quant à savoir s'il s'agit d'une idée de génie, attendons de juger sur pièce dans quelques années, à l'heure du bilan coût/avantage... Nul doute qu'il s'agit d'avoir toujours de l'audace, même à l'ombre d'une chapelle.

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Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Chronique] Chronique de TVA - octobre 2009

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N9396BLL

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par Thierry Lambert, Professeur à l'université Paul Cézanne - Aix Marseille 3

Le 07 Octobre 2010

Lexbase Hebdo - édition fiscale vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualité en matière de TVA réalisée par Thierry Lambert, Professeur à l'université Paul Cézanne Aix Marseille III. Au sommaire de cette chronique, on retrouve, tout d'abord, le problème des cessions de créances intragroupe au regard du droit à déduction, avec un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 24 juillet 2009 (CE 3° et 8° s-s-r., 24 juillet 2009, n° 305222, SAS Groupe Cayon, Mentionné aux Tables du Recueil Lebon). Est, ensuite, abordée la question de la correction de taxe indûment facturée, à travers un arrêt de la CJCE en date du 18 juin 2009 (CJCE, 18 juin 2009, aff. C-566/07, Staatssecretaris van Financien c/ Stadeco BV). Enfin, la chronique revient sur un arrêt rendu par la CJCE le 4 juin 2009, à propos des distorsions de concurrence liées au non-assujettissement des organismes de droit public (CJCE, 4 juin 2009, aff. C-102/08, Finanzamt Düsseldorf-Süd c/ Salix Grundstücks - Vermietugsgesellschaft mbH & Co.Objekt Offenbach KG).
  • Cession de créances intragroupe et droit à déduction (CE 3° et 8° s-s-r., 24 juillet 2009, n° 305222, SAS Groupe Cayon N° Lexbase : A1065EKN)

La cession de créances intragroupe est à la fois une opération banale et complexe. La présente affaire en est une illustration. La société SAS Groupe Crayon est née, en 1995, d'une fusion-absorption d'une société anonyme SA Geant Cayon avec la branche d'activité d'une autre société anonyme Transports G. Cayon. Cette dernière devenue la société Compagnie financière Montrachet a pour filiale la SAS Groupe Cayon. La Compagnie financière de Montrachet a acquis, en 1996, pour un prix inférieur à la valeur nominale des factures détenues par les sociétés SA Geant Cayon et SA Transports G. Cayon, auxquelles la SAS Groupe Cayon a succédé, et émises par les prestataires.

A l'occasion d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997, l'administration a remis en cause la déduction effectuée en 1996 de la TVA ayant grevé des prestations de services facturées aux deux sociétés au motif que la fraction de ces dettes, correspondant à la différence entre la valeur nominales des factures et leur valeur vénale, ne serait pas acquittée par la filiale.

L'article 256 du CGI (N° Lexbase : L5652H99) pose pour principe que "sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel". La jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes et celle du Conseil d'Etat considèrent qu'il doit exister un lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue (CJCE, 5 février 1981, aff. C-154/80, Staatssecretaris van Financiën c/ Association coopérative "Coöperatieve Aardappelenbewaarplaats GA" N° Lexbase : A6101AUI, Rec. CJCE, p. 445 ; CE, 6 juillet 1990, n° 88224, Codiac N° Lexbase : A4653AQE, RJF, 8-9, 1990, comm. 989). Autrement dit, il doit y avoir un rapport juridique au cours duquel des prestations réciproques sont échangées, le règlement perçu par le prestataire constituant la contre-valeur effective du service fourni au bénéficiaire (CJCE, 3 mars 1994, aff. C-16/93, R. J. Tolsma c/ Inspecteur der Omzetbelasting Leeuwarden N° Lexbase : A7246AHT, PA, 5 octobre 1994, note Cozian).

L'article 266 du même code (N° Lexbase : L7827HWS) énonce que la base d'imposition est constituée "par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou les prestataires en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers".

En outre, l'article 269 du CGI (N° Lexbase : L7828HWT), relatif au fait générateur de la taxe, retient que, pour les prestations de service, la taxe est exigible lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur autorisation du directeur des services fiscaux, d'après les débits. La loi fiscale ne définit pas les actes ou les opérations comme étant constitutifs d'une livraison. Il faut s'en remettre à l'article 1604 du Code civil (N° Lexbase : L1704ABQ) pour qui "la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur".

Enfin, l'article 271 du CGI (N° Lexbase : L3203HZN) dispose que "la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération". La jurisprudence a fixé les conditions générales ouvrant droit à déduction (CE, 3° et 8° s-s-r., 2 avril 2003, n° 233375, Société d'exploitation de l'Hôtel des bains N° Lexbase : A1985DEA, RJF, 6, comm. 704). Il est nécessaire que les factures mentionnent la TVA et qu'elles aient été établies au nom du redevable par son fournisseur. Il faut, en outre, qu'elles correspondent effectivement à l'exécution des prestations de services dont elle fait état. Et il est indispensable, enfin, que le prix indiqué soit réellement celui qui doit être acquitté par l'entreprise. Le droit à déduction de la TVA qui a grevé le prix d'une opération imposable prend naissance lorsque la taxe devient exigible chez le redevable.

La combinaison des articles 269 et 271 du CGI permet de considérer que, lorsqu'un prestataire de services cède la créance qu'il détient sur un client, il doit être regardé comme ayant obtenu, quand le prix de la cession lui est réglé et à la hauteur des sommes payées, l'encaissement du prix des prestations qu'il a facturées.

Il résulte de ces dispositions que le droit à déduction que pouvait exercer la SAS Groupe Cayon au moment de la cession par ses fournisseurs, en 1996, des factures qu'elle n'avait pas acquittées ne pouvait l'être que dans la limite du prix de cession de la créance convenu entre prestataires de services, à l'égard desquels elle était débitrice.

Dans cette affaire, la cour administrative d'appel de Lyon a considéré qu'il ne peut y avoir encaissement qu'à hauteur des sommes versées au cédant par le concessionnaire. En cas de cession pour un prix inférieur à la valeur nominale de la créance, la fraction du prix non couverte par la cession ne peut pas être analysée comme ayant été encaissée et ne peut, en conséquence, ouvrir droit à déduction (CAA Lyon, 2ème ch., 1er mars 2007, n° 03LY00664 N° Lexbase : A7147DUA, RJF, 2007, 8-9, comm. 907).

Pour la Haute juridiction, la cession de la créance implique l'encaissement du prix des prestations facturées au client, la taxe correspondante devenant exigible pour le montant facturé, le droit à déduction s'exerçant chez le client dans les mêmes conditions. Il en résulte que la société peut exercer son droit à déduction sur la totalité du prix facturé alors que le prix de cession au tiers serait différent du montant stipulé sur la facture cédée. En réalité, c'est le montant nominal de la créance cédée qui détermine le droit à déduction de la TVA.

Réglant l'affaire au fond le Conseil d'Etat constate, qu'en l'espèce, il est troublant que la société requérante n'ait jamais produit la convention de cession de créances et ne justifie pas que celle-ci ait été signifiée ou acceptée par elle. En conséquence, la requête d'appel de la société est rejetée.

  • Correction de la taxe indûment facturée (CJCE, 18 juin 2009, aff. C-566/07, Staatssecretaris van Financien c/ Stadeco BV N° Lexbase : A2797EIG)

Une entreprise établie aux Pays-Bas, exerçant des activités de location, de construction et de démontage de stands dans les foires et expositions, a exercé son activité de 1993 à 1995 en Allemagne et pour le compte d'un organisme de droit public établi aux Pays Bas. L'entreprise a réalisé des prestations non soumises à la TVA aux Pays-Bas et n'avait, en tant que partie d'un organisme de droit public, droit à aucune déduction au titre de cette taxe. Les factures pour les services effectués en dehors des Pays-Bas, par l'intermédiaire de l'organisme public, indiquaient les montants dus de la TVA qui aurait été applicable à des services identiques fournis aux Pays-Bas. L'organisme public a honoré ces factures et la société a acquitté aux Pays-Bas les taxes concernées.

En 1996, l'administration fiscale a informé l'entreprise que, s'agissant des services en cause fournis en dehors des Pays-Bas, elle n'était redevable d'aucune taxe sur le chiffre d'affaires aux Pays-Bas. Dans ces conditions, la société a demandé le remboursement de la totalité des taxes indûment acquittées. L'administration a subordonné le remboursement à la rectification des factures remises à l'organisme public. L'entreprise a fait parvenir "la copie d'une note de crédit". L'entreprise a obtenu le remboursement.

A l'occasion d'un contrôle, en 2000, l'administration a constaté que l'entreprise n'avait ni établi de note de crédit à l'ordre de l'organisme public, ni corrigé les factures, ni remboursé aucun montant à ce dernier. A la suite, l'administration a adressé à la société un avis de redressement portant sur la totalité des taxes remboursées.

L'entreprise a contesté ce redressement devant la cour d'appel de la Haye qui lui a donné raison aux motifs que la correction des erreurs de facturation n'était pas essentielle et que, en outre, aucun risque de perte de recettes fiscales n'existait en raison de la qualité de l'organisme public, qui excluait tout droit à déduction au titre de la taxe sur le chiffre d'affaires.

L'administration a introduit un pourvoi en faisant valoir que l'entreprise n'avait pas respecté les règles relatives à la correction des erreurs de facturation et, qu'en outre, elle n'avait aucun droit à conserver le remboursement de la TVA. La juridiction de renvoi a considéré, eu égard aux règles matérielles de la TVA, que le lieu des prestations en cause n'étant pas aux Pays-Bas, l'avis de redressement pouvait uniquement se fonder sur une disposition de droit interne qui transpose en droit néerlandais l'article 21, § 1, sous c) de la 6ème Directive-TVA (N° Lexbase : L9279AU9).

La juridiction néerlandaise a décidé de surseoir à statuer et de poser deux questions préjudicielles.

La première est de savoir comment il convient d'interpréter la 6ème Directive-TVA quand aucune TVA n'est due dans l'Etat membre où l'émetteur d'une facture réside ou est établi, lorsque celui-ci a indiqué le montant de la TVA sur la facture pour une prestation qui, en vertu du système commun de TVA, est réputée avoir eu lieu dans un autre Etat membre, voire un pays tiers.

La seconde est, dans l'hypothèse d'une réponse négative, de savoir si les Etats membres peuvent, lorsqu'une facture, au sens de la 6ème Directive-TVA, est envoyée à un destinataire qui n'a pas le droit de déduire la TVA (de telle sorte qu'il n'existe aucun risque de perte de recettes fiscales), soumettre la correction de la TVA, facturée par erreur et payable en vertu de ladite disposition, à la condition que l'assujetti ait envoyé à son client une facture de remplacement ne mentionnant pas la TVA.

Par son arrêt du 18 juin 2009, la Cour de justice énonce un principe selon lequel les dispositions communautaires doivent être interprétées en ce sens que la TVA est due à l'Etat membre auquel la TVA mentionnée sur la facture ou tout document en tenant lieu correspond, même si l'opération n'était pas imposable dans cet Etat. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier la TVA de quel Etat correspond à celle qui est mentionnée sur la facture en cause. Pour ce faire, il est possible de se référer au taux mentionné, à la monnaie dans laquelle est exprimé le montant à régler, au lieu d'établissement de l'émetteur de cette facture ou encore au contenu et au contexte dans lequel celle-ci a été émise.

La Cour considère que le principe de neutralité ne s'oppose pas à ce qu'un Etat subordonne la correction de la TVA due dans cet Etat membre du seul fait qu'elle est mentionnée par erreur sur la facture envoyée à la condition que l'assujetti ait adressé au bénéficiaire des services effectués une facture rectificative ne mentionnant pas cette taxe, si cet assujetti n'a pas complètement éliminé le risque de perte de recettes fiscales.

Il n'est pas inutile de rappeler que la Cour de justice des Communautés européennes a jugé, dans un arrêt du 13 décembre 1989 (CJCE, 13 décembre 1989, aff. C-342/87, Genius Holding BV c/ Staatssecretaris van Financiën N° Lexbase : A7858AUL) que "l'exercice du droit à déduction prévu par la sixième directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ne s'étend pas à la taxe qui est due exclusivement parce qu'elle est mentionnée sur la facture". Qu'elle le soit est une condition nécessaire, mais non suffisante.

Concernant la France, cette règle s'applique lorsque la taxe a été facturée au titre d'une opération fictive (CGI, art 272-2 N° Lexbase : L5504HWR). Elle concerne aussi la taxe facturée au titre d'une opération réelle mais exonérée de la TVA ou, la taxe facturée à un taux plus élevé que le taux légal. Lorsque qu'il n'y a pas de manquement délibéré des parties, l'émetteur de la facture peut délivrer à son client une facture rectificative (CGI, article 272-1).

Pour rappel, afin de réduire les charges pesant sur les entreprises et d'aider les administrations à lutter contre la fraude à la TVA, la Commission européenne a présenté, le 28 janvier 2009, une proposition de Directive relative aux règles de facturation en matière de TVA prévoyant, notamment, que les factures devraient être émises au plus tard le 15 du mois suivant le fait générateur.

  • Non-assujettissement des organismes de droit public et distorsion de concurrence (CJCE, 4 juin 2009, aff. C-102/08, Finanzamt Düsseldorf-Süd c/ Salix Grundstücks - Vermietugsgesellschaft mbH & Co.Objekt Offenbach KG N° Lexbase : A9455EHN)

Le non-assujettissement à la TVA peut-il être de nature à engendrer des distorsions de concurrence ? C'est à cette question complexe que la Cour de justice des Communautés européennes a eu à répondre à l'occasion d'une question préjudicielle. En effet, la présente décision fait suite à une question préjudicielle, concernant l'interprétation de l'article 4 § 5, deuxième et quatrième alinéas, de la 6ème Directive-TVA. La question avait trait au droit à déduction de la TVA acquittée en amont dans le cadre de la construction d'un bâtiment loué à un organisme de droit public qui, à son tour, l'avait en partie sous-loué à long terme à des tiers assujettis à la TVA.

Si, historiquement, les collectivités locales, au Royaume-Uni se sont considérées comme assujetties à la TVA pour les recettes qu'elles perçoivent de l'exploitation de parcs de stationnement, à la suite d'un arrêt de la CJCE du 14 décembre 2000 (CJCE, 14 décembre 2000, aff. C-446/98, fazenda Publica c/ Camara municipal do Porto N° Lexbase : A1796AWG), 127 d'entre elles ont introduit des recours pour obtenir des remboursements estimant qu'elles n'auraient pas du être assujetties. Devant le refus qui leur fut opposé, elles n'eurent pas d'autre solution que le recours contentieux.

Du point de vue des principes, il est un fait que la transposition en droit interne d'une Directive n'implique pas une reprise textuelle de ses dispositions. La Cour de justice accepte que la transposition soit précise, claire, offrant une stabilité satisfaisante (CJCE, 28 février 1991, aff. C-131/88, Commission des Communautés européennes c/ République fédérale d'Allemagne N° Lexbase : A4511AWY, RJF, 1991 ; 5, comm. 705).

Au cas particulier, le quatrième alinéa de l'article 4, § 5 de la 6ème-Directive se limite à ouvrir aux Etats l'opportunité de déroger à la règle générale d'assujettissement des activités de nature économique à la TVA.

Les Etats doivent avoir recours à cette possibilité en prenant une disposition spécifique expresse, tout en conservant le choix de la technique normative qui leur apparaît être la plus appropriée. Autrement dit, les Etats doivent permettre que des activités précises d'organismes de droit public, exonérées en vertu des articles 13 et 14 de la Directive, puissent être considérées comme étant des activités de l'autorité publique.

Le non-assujettissement des organismes de droit public est une exception au principe d'imposition des activités de nature économique à la TVA. La 6ème Directive-TVA, en son article 4, deuxième alinéa, du § 5, prévoit la possibilité d'assujettissement lorsque, s'il n'en va pas ainsi, la situation "conduirait à des distorsions de concurrence d'une certaine importance" vis-à-vis de concurrents privés, mais aussi lorsque la distorsion se fait à son propre détriment. La Cour de justice vient, par la présente, confirmer que les organismes de droit public doivent être considérés, dans les conditions précitées, comme des assujettis pour les activités ou les opérations qu'ils accomplissent. La Cour a jugé que les distorsions de concurrence d'une certaine importance auxquelles conduirait le non-assujettissement des organismes de droit public, agissant en tant qu'autorités publiques, doivent être évaluées par rapport à l'activité en cause, sans qu'il soit nécessaire que cette évaluation porte sur un marché local en particulier (CJCE, 16 septembre 2008, aff. C-288/07, gr. ch, Isle of Wight Council et autres N° Lexbase : A3602EAN, RJF, 2009, 1, comm. 100). Par le même arrêt, la Cour a une interprétation extensive considérant que l'expression "conduirait à" implique de prendre en compte à la fois la concurrence actuelle, mais aussi la concurrence potentielle pour autant que celles-ci existent vraiment et que l'expression "d'une certaine importance" signifie que le non-assujettissement des organismes publics ne peut être admis que dans le cas où il impliquerait des distorsions de concurrence négligeables.

En France, les activités des personnes morales de droit public, qui sont en principe situées hors du champ d'application de la TVA, deviennent imposables lorsque leur non-assujettissement entraîne des distorsions dans les conditions de la concurrence (CGI, art. 256 B N° Lexbase : L5161HLQ). La doctrine administrative définit les activités concurrentielles comme étant celles qui, par leur nature, leur étendue, leur clientèle et les moyens mis en oeuvre, entrent en concurrence directe avec les entreprises commerciales ou industrielles qui offrent des services similaires (instruction 8 septembre 1994, BOI 3 CA-94 N° Lexbase : X0377AA9). Le domaine concurrentiel peut varier en fonction du champ d'action géographique de l'organisme public concerné, de l'étendue du marché ou de la clientèle vers laquelle son activité est orientée (BOI 3 A-121 du 20 octobre 1999).

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Marchés de partenariat

[Questions à...] Conclusion de deux contrats de partenariat pour la rénovation des Universités Paris-Sorbonne (Paris IV) et Paris Diderot (Paris VII) : Questions à Maître Marc Fornacciari et Maître Dorothée Griveaux, cabinet Salans

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N9388BLB

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par Anne Lebescond, Journaliste juridique

Le 07 Octobre 2010

La Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, a signé, vendredi 24 juillet 2009, deux contrats de partenariat d'un montant global de 226 millions d'euros, en vue de rénover l'Université Paris IV - Sorbonne et l'Université Paris VII - Diderot. Le contrat de partenariat concernant la rénovation et la reconstruction du centre de Clignancourt de l'Université Paris IV, signé pour une durée de 28 ans avec la société Sophi (société de projet constituée par Bouygues Bâtiment Ile-de-France, Sodéarif, Exprimm, SEIEF et Dexia Crédit Local) s'élève à 68 millions d'euros. Celui concernant l'Université Paris VII (installation de la faculté sur le site Paris Rive Gauche dans le treizième arrondissement de Paris), signé pour une durée de 30 ans avec le groupement Unicité (composé de filiales de Vinci Construction France, de Cofely -GDF-Suez, de Barclays Private Equity et de Fideppp -Caisses d'Epargne), atteint, quant à lui, 158 millions d'euros. Dans les deux cas, le contrat est global : il porte sur le financement, la conception, la construction, la maintenance, le gros entretien et le renouvellement des nouveaux bâtiments. D'introduction récente (1), et malgré des débuts timides, cette forme de partenariat public-privé sera, désormais, celle sur laquelle il faudra compter. Le contrat de partenariat présente, en effet, de nombreux avantages : il est, à la fois, plus complet et plus simple que les deux autres montages en partenariat public-privé (PPP), les baux emphytéotiques administratifs et les autorisations d'occupation temporaires. Il a, donc, légitimement, toutes les faveurs du Gouvernement et des administrations. En témoignent les nombreux projets en cours, ou à venir, concernant la rénovation de certains hôpitaux, prisons, casernes et commissariats, liaisons TGV, ou encore certains stades. Un contrat de partenariat a, ainsi, été conclu fin 2008 entre la Communauté urbaine de Lille et Eiffage, portant sur la rénovation du Grand Stade de Lille Métropole, sur lequel est, notamment, intervenu, comme conseil du club résident, Maître Marc Fornacciari, avocat associé du cabinet Salans, co-auteur du Guide opérationnel des PPP (2) et spécialiste des partenariats publics-privés (3). Celui-ci, assisté de sa collaboratrice, Maître Dorothée Griveaux, a conseillé l'Etat dans le cadre de la signature du contrat de partenariat relatif à l'Université Paris IV. Ils ont accepté de nous présenter plus en détail cette opération, et en ont profité pour dresser un état des lieux du contrat de partenariat en France.

Lexbase : Dans quel cadre s'inscrit la signature des deux contrats de partenariat en vue de la rénovation des Universités Paris IV et Paris VII ?

Dorothée Griveaux et Marc Fornacciari : Les contrats de partenariat portant sur la rénovation des Universités Paris IV et Paris VII sont, en réalité, des contrats pilotes préalables à la mise en oeuvre de l'opération "Campus", annoncée début 2008 par Valérie Pécresse et qui s'accélère aujourd'hui.

Il s'agit, face au lourd bilan de l'état de l'immobilier universitaire, de financer massivement -soit, à hauteur de cinq milliards d'euros- et de façon ciblée le développement et la rénovation de celui-ci. Cet effort financier est rendu possible par la cession d'une partie de la participation de l'Etat dans le capital d'EDF et par les moyens consacrés par le budget 2008, qui dédie, notamment, un milliard d'euros aux investissements, mises en sécurité et maintenance des facultés françaises.

Dix projets, qui répondaient aux quatre critères requis -une ambition pédagogique et scientifique du projet, l'urgence de la situation immobilière, le développement d'une vie de campus et le caractère structurant et innovant du projet pour le territoire- ont été sélectionnés courant 2008 par un comité dédié (4), et sont sur le point d'être mis en oeuvre. Ils concernent les Universités de Bordeaux, Toulouse, Grenoble, Lyon, Montpellier, Strasbourg, Aix-Marseille, Condorcet-Paris-Aubervilliers, Plateau de Saclay et plus d'une dizaine de campus prometteurs et innovants (5). Pour l'ensemble de ces opérations, le Gouvernement a affiché sa volonté de recourir aux partenariats publics-privés et, en particulier, aux contrats de partenariat. Ceux-ci porteront sur l'investissement, mais, également, sur la conception et la maintenance des bâtiments, et seront conclus pour une longue durée avec paiement d'un loyer dont le montant sera lié aux objectifs de performance.

Lexbase : Le recours au contrat de partenariat implique que l'on se trouve en présence d'un des cas prévus par la loi. Qu'en est-il en l'espèce ?

Dorothée Griveaux et Marc Fornacciari : Les contrats de partenariat conclus le 24 juillet 2009 dans le cadre de la rénovation des Universités Paris IV et Paris VII sont régis par les dispositions de l'ordonnance du 17 juin 2004, sur les contrats de partenariat (ordonnance n° 2004-559 sur les contrats de partenariat N° Lexbase : L2584DZQ), dans leur version antérieure à la loi du 28 juillet 2008 (loi n° 2008-735, relative aux contrats de partenariat N° Lexbase : L7307IAU).

Aux termes de l'article 2 du texte, ces contrats ne peuvent être conclus qu'en cas de complexité du projet telle que la personne publique n'est pas en mesure de définir les moyens techniques ou le montage juridico-financier permettant de répondre à ses besoins, ou encore en cas d'urgence.

La personne publique doit, en outre, justifier avec précision des raisons économiques, financières, juridiques et administratives "qui l'ont conduite, après une analyse comparative de différentes options (notamment en termes de coût global, de performance et de partage des risques), à retenir le projet envisagé et à décider de lancer cette procédure" : c'est l'objet de ce que l'on appelle l'évaluation préalable.

Par la suite, la loi du 28 juillet 2008 a prévu un nouveau cas de recours aux contrats de partenariat, celui dit du "bilan" favorable. Un contrat de partenariat pourra, ainsi, être conclu lorsque, "compte tenu, soit des caractéristiques du projet, soit des exigences du service public dont la personne publique est chargée, soit des insuffisances et difficultés observées dans la réalisation de projets comparables, [son] recours présente un bilan entre les avantages et les inconvénients plus favorable que ceux d'autres contrats de la commande publique", étant précisé que le critère du paiement différé ne saurait, à lui seul, constituer un avantage. Si, au terme de la décision du Conseil constitutionnel du 24 juillet 2008 (6), ont été déclarées inconstitutionnelles les dispositions relatives à la présomption d'urgence introduite par la loi, ce troisième cas de recours au contrat de partenariat a, pour sa part, été entériné à cette occasion. Pour autant, il ne nous était pas possible d'y recourir dans le cadre du contrat de Paris IV, puisque ces dispositions n'étaient pas encore en vigueur. L'article 52 de la loi prévoit, en effet, qu'elles sont applicables aux projets de contrat de partenariat pour lesquels un avis d'appel public à la concurrence est envoyé à la publication postérieurement au 29 juillet 2008 (date de publication du texte). Or, l'avis, dans notre cas, avait été envoyé avant cette date.

Néanmoins, ces dispositions auraient-elles été applicables, nous n'y aurions, tout de même, certainement pas recouru. Il est, en effet, plus pertinent, dès lors que l'on répond aux exigences de l'ordonnance, de se fonder sur la condition de complexité pour recourir au contrat de partenariat, puisque seule cette notion permet, également, de justifier le recours à la procédure du dialogue compétitif avec les candidats. Du point de vue du développement et de la rénovation de l'immobilier universitaire, la complexité pourra être, notamment, démontrée au regard des exigences de haute qualité environnementale et de performance énergétique, mais, également, des problématiques de chantier en site occupé par les étudiants.

Lexbase : Quels sont les avantages et les inconvénients du contrat de partenariat ?

Dorothée Griveaux et Marc Fornacciari : Le contrat de partenariat est un contrat global, portant autant sur la conception que sur la construction et la maintenance. En cela, il favorise la concertation entre les différents acteurs du projet (investisseurs, architectes, constructeurs et mainteneurs) en vue de réaliser toutes les économies possibles et de renforcer la cohérence de l'opération. Cet avantage est considérable, puisque l'interface aboutit, en général, à une diminution du prix significative. Le contrat de partenariat règle, également, efficacement les problèmes liés à la maintenance des bâtiments publics, puisque celle-ci est incluse dans le périmètre contractuel. A l'issue de l'opération, soit, en l'espèce, 28 ans pour Paris IV et 30 ans pour Paris VII, l'immeuble revient en très bon état à l'administration qui aura, de plus, évité toutes les charges liées aux grosses réparations. Un avantage majeur réside dans le respect des délais par les partenaires privés, qui ne percevront aucun loyer tant que le bâtiment ne sera pas livré. Le retard de livraison les placerait d'autant plus dans une situation délicate, eu égard aux pénalités et aux intérêts bancaires supplémentaires dont ils seraient alors redevables. Pour cette raison, il n'est, en général, pas constaté de retard sur les opérations de PPP. Enfin, le contrat de partenariat, via le recours aux loyers, permet à l'Etat ou aux administrations d'échelonner le financement du projet immobilier sur une longue période, la durée du contrat étant calculée en fonction de l'amortissement de l'investissement (qui, en général, excède 20 ans).

En conclusion, outre l'opportunité de l'interface entre les différents acteurs, le contrat de partenariat permet le transfert de trois risques majeurs sur la tête des partenaires privés : le risque des dérives de coûts, celui de la maintenance et celui du retard de livraison.

Mais, s'il présente de nombreux avantages, le contrat de partenariat présente, également, quelques inconvénients. Eu égard à son coût (notamment, en raison de l'intervention de nombre d'experts et de conseillers), il est souvent déconseillé d'y recourir pour des opérations de faible importance (soit celles inférieures à cinq millions d'euros environ). Ce contrat nécessite, ensuite, de pouvoir être géré par la personne publique sur le long terme, tant du point de vue financier (la charge étant échelonnée sur des périodes importantes), que des points de vue techniques et des ressources humaines. Le recours à ces contrats ne doit donc pas se faire sans une véritable réflexion quant à sa mise en oeuvre. Il ne doit pas se traduire par une baisse des effectifs, mais, au contraire, par un renforcement de l'emploi de hauts fonctionnaires aux compétences pointues. Une réflexion globale sur l'organisation des universités est donc nécessaire.

Lexbase : Eu égard aux nombreux avantages du contrat de partenariat, quel avenir se profile-t-il pour les marchés publics ?

Dorothée Griveaux et Marc Fornacciari : Comme nous l'avons indiqué, le contrat de partenariat ne sera pas opportun pour toutes les opérations, mais seulement pour les opérations les plus importantes. Le recours aux marchés publics conserve, alors, tout son sens pour une grande partie des projets. Ceci, d'autant que les administrations sont rompues à ce type de procédure.

En outre, dans bien des cas, la personne publique aura intérêt à se financer directement, sans passer par des partenaires privés. Dans le cadre du contrat de partenariat, les banques et les différents investisseurs prêtent à la société de projet constituée entre les différents acteurs privés, une société de capitaux qui dispose, très souvent, de fonds propres minimum, mais qui a l'avantage de faire écran vis-à-vis du patrimoine de ses actionnaires et de permettre la déconsolidation des dettes à leur bilan. Les prêteurs, qui prêtent sans recours sur les actionnaires des sociétés de projet, sont évidemment très exigeants sur les clauses contractuelles. Certaines personnes publiques pourraient ne pas l'admettre.

Lexbase : Certains ont vu dans la signature des deux contrats de partenariat une privatisation des Universités Paris IV et Paris VII. Quelle est votre opinion sur le sujet ?

Dorothée Griveaux et Marc Fornacciari : Cet argument a, en effet, souvent été invoqué. Il est pourtant injustifié. Ce qui est transféré au partenaire privé ne concerne que l'immobilier lui-même (conception, construction et maintenance) et ne porte, en aucun cas, sur le contenu du service public, en l'occurrence, sur le contenu de l'enseignement en tant que tel. Par ailleurs, la personne publique reste entièrement maîtresse du périmètre des missions confiées aux acteurs privés dans le cadre de ce contrat. Il faut, en outre, souligner, que l'Etat dispose de nombreux moyens lui permettant d'interrompre le contrat (dont la célèbre résiliation pour motif d'intérêt général) ou de le renégocier.


(1) Le contrat de partenariat a été introduit en droit français par l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004, sur les contrats de partenariat (N° Lexbase : L2584DZQ), ratifiée par la loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008, relative aux contrats de partenariat (N° Lexbase : L7307IAU).
(2) F. Bergère, X. Besançon, L. Deruy et M. Fornacciari, Le guide opérationnel des PPP, Ed. Le Moniteur, 2ème éd., 2007.
(3) Marc Fornacciari (associé du cabinet Salans) intervient sur nombre des opérations les plus importantes en matière de partenariat public-privé, quelle que soit la forme adoptée (contrat de partenariat, convention d'occupation temporaire et bail emphytéotique). Il a, récemment, conseillé Vinci Concessions dans le cadre de la construction et de l'exploitation d'un stade de football, représentant un investissement de cent millions d'euros. Il est, également, intervenu fin 2008 sur le partenariat public-privé (convention d'occupation temporaire et contrat de mise à disposition) portant sur le terminal céréalier du port de La Réunion, en tant que conseil de la Chambre de commerce et d'industrie de La Réunion.
(4) Ce comité est composé de Guy Aubert (physicien, ancien directeur général du CNRS), Hubert Blanc (conseiller d'Etat honoraire, ancien préfet de région), Catherine Cesarsky (astrophysicienne, membre de l'Académie des Sciences), Jean-Lou Chameau (américain d'origine française, président de Caltech -Los Angeles- et ancien président de Georgiatech -Atlanta-), Jacques Glowinski (chercheur de l'INSERM, spécialiste reconnu en neuropharmacologie, professeur honoraire au Collège de France), Françoise Benhamou (économiste), Robert Lacroix (ancien président de l'université de Montréal), Gilles Pélisson (directeur-général du groupe Accor).
(5) Il s'agit, notamment, pour les campus prometteurs, de ceux de Rennes, Clermont-Ferrand, Nantes, Nice-Sophia Antipolis et Créteil-Marne-la-Vallée et, pour les campus innovants, de ceux de Cergy, Dijon, du Havre et de Valenciennes.
(6) Cf. Cons. const., décision n° 2008-567 DC du 24 juillet 2008, loi relative aux contrats de partenariat (N° Lexbase : A7893D99).

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Bancaire

[Textes] Aperçu du nouveau dispositif normatif relatif aux activités de paiement en France

Réf. : Ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009, relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement (N° Lexbase : L4658IEA)

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par Alexandre Bordenave, Avocat, Chargé d'enseignement à l'Ecole Normale Supérieure de Cachan

Le 07 Octobre 2010

Preuve supplémentaire des efforts conséquents déployés par la France en matière d'application des normes communautaires (1), l'ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009, relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement (ci-après l'ordonnance) (2) transpose à la date prévue, soit le 1er novembre 2009 (3), les dispositions de la Directive 2007/64/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 concernant les services de paiement dans le marché intérieur (N° Lexbase : L5478H3B) (ci-après la "Directive") en droit français.
La Directive est souvent reliée (voire confondue) à l'initiative "SEPA" (4). Lancé en 2002, par un comité ad hoc rassemblant les principales banques et fédérations bancaires européennes, l'European Payments Council (5) (l'EPC), le projet "SEPA" se veut le prolongement de l'introduction de l'euro sous forme fiduciaire (pièces et billets). Le souhait exprimé, soutenu par l'Eurosystème (6), est qu'il soit possible pour les "utilisateurs" de monnaie unique européenne d'effectuer des paiements de détail en euros dans les mêmes conditions de fiabilité, de rapidité et de prix partout dans la zone euro, aussi facilement que dans leur pays. La Directive participe à la construction du "SEPA", sans y être, ni complètement, ni nécessairement, assimilée : d'ailleurs, elle affiche fermement une volonté de contredire, le cas échéant, les positions de "l'EPC" (7). De manière remarquable, la Directive introduit dans l'ordre juridique communautaire deux notions qui se fondaient jusqu'alors dans des catégories plus larges : la notion de "service de paiement" (8) et la notion d'"établissement de paiement". Au-delà, elle aspire à renforcer les droits et la protection des utilisateurs (9). Et, bien qu'elle retienne globalement une approche d'harmonisation totale, la Directive laisse sur ces sujets des marges de manoeuvre de transposition substantielles aux Etats membres.

Après avoir consulté les principaux acteurs intéressés, la France a donc pu retenir des choix de transposition "équilibrés" (10), qui visent, tout en assurant le développement de la concurrence et la baisse des coûts, à :
- garantir la stabilité et la solidité du système de paiement français, et en ce sens, n'a pas été utilisée l'option permettant d'exempter un établissement de paiement lorsque le volume d'opérations de paiement exécutées représente moins de 3 millions d'euros par mois sur un an (Directive, art. 26.1 (a)) -à vrai dire, l'époque se révèle peu propice à de telles souplesses- ;
- favoriser l'attractivité de la France pour l'installation des établissements de paiement ;
- maintenir un niveau élevé de protection des consommateurs, notamment en choisissant de prohiber le "surcharging" (11) (Directive, art. 52.3 ; ordonnance, art. 2 modifiant l'article L. 112-12 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L4697IEP) ;
- faciliter des transferts de fonds des migrants (12).

Au-delà des objectifs affichés par le Gouvernement français, restent l'effort d'harmonisation des règles applicables à différents instruments de paiement et les innovations issues de l'ordonnance qui englobent les opérations de paiement en euro ou dans une devise de l'Espace économique européen (l'"EEE") entre deux prestataires situés dans cet espace : elles affectent tant les acteurs (I) que les services (II) liés au paiement.

I - Les nouveaux acteurs du paiement

L'ordonnance introduit une typologie nouvelle au sein de l'ordre bancaire et financier français : les prestataires de services de paiement (A), parmi lesquels les établissements de paiement (B).

A - Les prestataires de services de paiement

L'article 11 de l'ordonnance crée la notion de prestataires de services de paiement. Il s'agit d'un vaste ensemble regroupant les établissements de crédit et les établissements de paiement (13) (C. mon. fin., art. L. 521-1 I N° Lexbase : L4702IEU). En ce sens, la construction de cette catégorie nouvelle s'inspire (en filigrane) de la méthode retenue pour les prestataires de services d'investissement : ces derniers rassemblent également la catégorie générale des établissements de crédit et une catégorie plus spécifique, celle des entreprises d'investissement (C. mon. fin., art. L. 531-1 N° Lexbase : L9338DYI (14)).

Les prestataires de services de paiement jouissent d'un monopole, organisé par l'article L. 521-2 (N° Lexbase : L4851IEE) : ils sont seuls à pouvoir fournir des services de paiement (15). A la réflexion, comme nous le constaterons par la suite, ce monopole n'est inédit qu'en apparence : de manière générale, les activités qu'il recouvre participaient au monopole des établissements de crédit.

Parallèlement aux prestataires de services de paiement, l'ordonnance fait apparaître une figure accessoire : les agents des prestataires de services de paiement (C. mon. fin., art. L. 523-1 N° Lexbase : L4756IEU et s.). Chaque agent doit être enregistré auprès du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (le CECEI) par le prestataire de services de paiement qui le mandate : il s'agit de s'assurer qu'il répond à des exigences minimales en termes de déontologie financière (16). La consultation française préalable à la transposition de la Directive avait fait apparaître que ce statut d'agent pouvait s'avérer trop lourd vis-à-vis de personnes assurant déjà un service de délivrance de monnaie au nom d' un établissement de crédit pour les seuls clients dudit établissement. Le sujet semblait particulièrement crucial en zone rurale (17). Aussi, à l'initiative du Gouvernement, l'article L. 523-6 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L4750IEN) ménage cette hypothèse en accordant à de tels mandataires (18) un statut dérogatoire allégé, sans contrôle a priori (19).

Mais, à l'évidence, c'est bel et bien l'introduction des établissements de paiement qui suscite la curiosité.

B - L'apparition des établissements de paiement

L'article L. 522-1 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L4871IE7) définit les établissements de paiement comme les "personnes morales, autres que les établissements de crédit et autres que les personnes mentionnées au II de l'article L. 521-1, qui fournissent à titre de profession habituelle les services de paiement". Pour autant, leur champ d'intervention n'est pas limité à la pure fourniture de services de paiement.

Tout d'abord, au titre des services de paiement, les établissements de crédit sont habilités à ouvrir des comptes de paiement. Il s'agit de comptes bancaires utilisés pour effectuer des opérations de paiement (C. mon. fin., art. L. 314-1 I N° Lexbase : L4861IER) ; ce ne sont pas des comptes d'épargne (C. mon. fin., art. L. 522-4 I N° Lexbase : L4808IES) et les fonds transitant sur ces comptes ne sont pas à la libre disposition de l'établissement (id., II) (20) ;

Ensuite, est prévue l'hypothèse d'établissements "hybrides", à savoir des entités n'ayant pas pour unique profession habituelle la fourniture de services de paiement (C. mon. fin., art. L. 522-3 N° Lexbase : L4853IEH). Cette possibilité est encadrée, de sorte que l'exercice de l'autre activité ne nuise pas à la fourniture des services de paiement. Cela pourrait laisser libre cours à l'imagination commerciale au nom de laquelle, par exemple, des franchiseurs tiendraient lieu d'établissements de paiement au sein de leur réseau.

Enfin, les établissements de paiement peuvent proposer des services connexes, tels des services de change, de garde, voire des opérations de crédit (21) (C. mon. fin., art. L. 522-2 N° Lexbase : L4870IE4). Ces dernières sont limitativement délimitées et nécessairement liées aux opérations de paiement. Un établissement de paiement ne saurait donc être le factor ou être cessionnaire d'un bordereau Dailly.

Les établissements de paiement sont soumis à des règles ressemblant à s'y méprendre à celles applicables aux établissements de crédit.
Ainsi, l'accès à la profession est soumis à la délivrance d'un agrément par le CECEI (C. mon. fin., art. L. 522-6 I N° Lexbase : L4836IET) (22). Cet agrément est délivré en tenant compte, notamment, du montant de capital social de l'établissement, de la solidité de son système de gouvernance ou de la qualité de ces dirigeants.
Ensuite, les établissements de paiement font l'objet de règles prudentielles a minima (C. mon. fin., art. L. 522-14 N° Lexbase : L4836IET et s.). Outre le fait qu'elles prévoient un niveau de fonds propres minimal, ces dispositions organisent la protection des fonds reçus des utilisateurs des services de paiement. Cela a du sens dans la mesure où les établissements de paiement sont exclus du mécanisme de garantie des déposants (23). Pour cette raison, le texte prévoit que les fonds des utilisateurs doivent faire l'objet d'un cantonnement (24) ou d'une assurance (C. mon. fin., art. L. 522-17 I N° Lexbase : L4869IE3) (25).
Les établissements de paiement doivent, par ailleurs, respecter un secret professionnel fort proche du très débattu "secret bancaire" (C. mon. fin., art. L. 522-19 I N° Lexbase : L4683IE8) (26). 
Ils doivent, en outre, observer les règles relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement des activités terroristes (C. mon. fin., art. L. 561-21 N° Lexbase : L4979IE7).
Enfin, ils sont placés sous la tutelle du ministère chargé de l'Economie (C. mon. fin., art. L. 611-1-1 N° Lexbase : L5007IE8), du CECEI (C. mon. fin., art. L. 612-2 N° Lexbase : L4992IEM) et de la Commission bancaire (C. mon. fin., art. L. 613-1-1 N° Lexbase : L4983IEB).

Le constat est clair : les règles nouvellement introduites relativement aux établissements de paiement se démarquent moins de celles applicables aux établissements de crédit par leur nature que par leur intensité. Tel était l'objectif affiché dans la Directive : soumettre ces entités d'un genre particulier à des exigences "proportionnées aux risques opérationnels et financiers auxquels elles sont exposées" (Directive, considérant n° 11). Ce qui est recherché, c'est également un accroissement de la concurrence sur le marché des services financiers (au sens large) : en imposant des barrières normatives à l'entrée moins contraignantes, le législateur communautaire espère tendre un peu plus vers la condition généralement admise d'atomicité de l'offre de la théorie de la concurrence pure et parfaite (27). Plus généralement, il paraîtrait contre-productif d'imposer aux établissements de paiement une réglementation aussi rigoriste que celle concernant les établissements de crédit compte tenu du fait qu'ils proposent des services plus restreints et plus spécialisés, générant des risques plus circonscrits.

Précisément, la Directive ne se limite pas à régir le sort des seuls dispensateurs de services de paiement. Elle modifie, également, les règles applicables aux services eux-mêmes ; l'ordonnance fait, bien sûr, de même.

II - Les nouvelles règles du paiement

L'ordonnance consacre le périmètre du monopole réservé aux établissements de paiement : les services de paiement (A). Elle s'attèle, également, à renforcer la protection de leurs utilisateurs (B).

A - L'apparition des services de paiement

Pleine du feu sacré communautaire, l'ordonnance (et plus précisément son article 3) franchit un Rubicon en remodelant certaines des notions cardinales du droit bancaire, afin de faire une place aux services de paiement :
- elle modifie la notion d'opération de banque, en substituant les "services bancaires de paiement" à "la mise à disposition de la clientèle/gestion de moyens de paiement" (C. mon. fin., art. L. 311-1 N° Lexbase : L4711IE9) ;
- elle définit ce qu'est "la mise à disposition de la clientèle/gestion de moyens de paiement" en précisant qu'elle comprend les services bancaires de paiement et les "services de paiement" (C. mon. fin., art. L. 311-3, al. 2 N° Lexbase : L4804IEN) et on déduit de cette définition que les services bancaires de paiement sont tous les services qui consistent en de la mise à disposition de la clientèle ou de la gestion de moyens de paiement sans pour autant être des services de paiement ;
- elle ajoute à la liste des opérations connexes aux opérations de banque les "services de paiement" (C. mon. fin., art. L. 311-2, 7° N° Lexbase : L4823IED).

A ce stade, relevons également que l'ordonnance prévoit deux exceptions au champ d'application de la mise à disposition de la clientèle/gestion de moyens de paiement (C. mon. fin., art. L. 311-4 N° Lexbase : L4781IES). Ainsi, par principe, sont des activités libres :

- "la réalisation d'opérations de paiement exécutées au moyen d'un appareil de télécommunication ou d'un autre dispositif numérique ou informatique, lorsque l'opérateur du système de télécommunication numérique ou informatique n'agit pas en seule qualité d'intermédiaire", cela offrant une solide assise juridique à la création de services "kiosque" dont les opérateurs de téléphonie mobile et fournisseurs d'accès à internet sont souvent friands (28) ;

- "les opérations de paiement entre une entreprise mère et sa filiale", ou entre sociétés d'un même groupe, "sans qu'aucun autre prestataire de services de paiement qu'une entreprise du même groupe ne fasse office d'intermédiaire". Compte tenu des enjeux en présence, c'est louable. Au fond, il s'agit, peu ou prou, du pendant en matière d'opérations de paiement de la dérogation de l'article L. 511-7, 3° relative aux opérations de crédit.

Coeur de la nouveauté, les services de paiement font l'objet d'une liste exhaustice à l'article L. 314-1 II du Code monétaire et financier (complétée par une "liste négative") (29). Ces services sont ceux auxquels il est recouru pour réaliser des opérations de paiement. On comprend de ce nouvel article du Code monétaire et financier que, pour être ainsi qualifiée, une opération de paiement doit donner lieu à un ordre de paiement dont le traitement est dématérialisé et transiter par un compte de paiement ouvert dans l'EEE et concerner un prestataire de service de paiement et un de ses clients (30). Il faut en tirer comme conséquences principales que les services de paiement :

- excluent, notamment, les paiements en monnaie fiduciaire, les paiements "papier" (titres restaurants, chèques emploi-service universels...) et les instruments privatifs (31) (cartes cadeaux et alli. (32)) ;

- n'englobent, au contraire, que les prélèvements, les paiements par cartes et les virements. Rien d'étonnant à cela : il s'agit des trois moyens de paiement concernés par le "SEPA" (33).

B - Le renforcement de la protection offerte aux utilisateurs

La protection des utilisateurs de services de paiement (qu'ils soient payeurs ou bénéficiaires) figure parmi les objectifs assignés par la Directive aux législations nationales (Directive, considérant n° 20 et s.). En ce sens, l'ordonnance impose un principe général de protection qu'elle décline vertement ; nous nous attacherons à en dégager les lignes principales.

A titre liminaire, remarquons que, en pratique, il y a fort à parier que seuls les consommateurs bénéficieront des mesures protectrices. En effet, l'article L. 133-2 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L4849IEC) énonce a contrario qu'il peut être dérogé à la plupart des dispositions protectrices chaque fois que l'utilisateur n'est pas une personne physique agissant pour des besoins non professionnels.

Au premier chef, la protection porte sur les ordres et instruments de paiement. A cet égard, elle s'articule autour de trois axes principaux.

  • Les conditions d'exécution des ordres de paiements (34).

Toute opération doit recueillir le consentement de l'utilisateur (35) ; à défaut elle est non autorisée (C. mon. fin., art. L. 133-7 N° Lexbase : L4829IEL) et ouvre un droit à remboursement "immédiatement" (36) (C. mon. fin., art. L. 133-18 N° Lexbase : L4679IEZ). Est réaffirmé le principe d'irrévocabilité de l'ordre de paiement (C. mon. fin., art. L. 133-8 N° Lexbase : L4721IEL), principe déjà connu en matière de cartes de paiement (par exemple). Le principe est que le moment de la réception de l'ordre de paiement est le jour ouvré où est passé l'ordre (C. mon. fin., art. L. 133-9 N° Lexbase : L4717IEG). Egalement, le payeur est assuré de voir l'intégralité du montant de l'ordre versé au bénéficiaire (C. mon. fin., art. L. 133-11 N° Lexbase : L4749IEM). Concrètement, cela signifie que les éventuels frais à la charge du payeur doivent faire l'objet d'une facturation ou d'un prélèvement séparé : il ne peut donc y avoir de déperdition défavorable à l'opération de paiement (37).

  • Les délais d'exécution des ordres de paiement

Par principe, le délai d'exécution ne saurait être supérieur à un jour entre le moment de la réception de l'ordre de paiement (en euro) par le prestataire du payeur et le crédit sur le compte du prestataire du bénéficiaire (C. mon. fin., art. L. 133-13 N° Lexbase : L4770IEE (38)). Comme un auteur l'a fait remarquer (39), cette précision n'a d'intérêt que pour les paiements opérés par voie de virements : en matière de paiements par carte bancaire et de prélèvements, la date de règlement interbancaire correspond à la date de réception de l'ordre.

Quant à la date de valeur de l'opération, elle ne peut être postérieure à la date à laquelle le montant correspondant est crédité sur le compte du prestataire de services de paiement du bénéficiaire, ni antérieure à la date à laquelle ce même montant est débité sur le compte du prestataire de services de paiement du payeur (C. mon. fin., art. L. 133-14 N° Lexbase : L4843IE4). Détail d'extrême importance : lesdits délais sont d'ordre public et ne font pas partie des dérogations autorisés à l'article L. 133-2. La jurisprudence française s'est longuement et richement attardée sur la question des dates de valeur et de disponibilité des fonds (40). Nul doute que la nouvelle législation contribuera à éclaircir la question.

  • La sécurisation des instruments de paiement

Les prestataires de services de paiement sont tenus de sécuriser les instruments en mettant en place des "dispositifs de sécurité personnalisés" -éventuellement complétés par des "identifiants uniques" (41)- (C. mon. fin., art. L. 133-15 N° Lexbase : L4859IEP) et se trouvent débiteurs d'une obligation supplémentaire d'information en cas "de perte, de vol, de détournement ou d'utilisation non autorisée d'un instrument de paiement" (id.). A notre sens, l'obligation est plutôt sévère. Et, là où le droit prévoyait que l'utilisateur d'une carte de paiement supporte les pertes avant mise en opposition (à laquelle succède "l'information aux fins de blocage") jusqu'à 400 euros en ayant soixante-dix jours pour procéder à l'opposition, l'ordonnance abaisse le plafond à 150 euros (C. mon. fin., art. L. 133-19 N° Lexbase : L4809IET) et augmente le délai de forclusion à treize mois à compter de la date de débit (C. mon. fin., art. L. 133-24 N° Lexbase : L4687IEC).

En second lieu, la protection des utilisateurs s'incarne dans des prescriptions additionnelles concernant certains contrats qui peuvent être conclus pour recourir à des services de paiement.

  • La convention de compte de dépôt

Dorénavant, sa conclusion doit faire l'objet d'une information précontractuelle détaillée qui va au-delà de la simple information sur "les caractéristiques essentielles du bien ou du service" (42) (C. mon. fin., art. L. 312-1-1 N° Lexbase : L4719IEI). Comme cela a été mis en évidence (43), se ménager la preuve de ce que cette obligation a été observée ne sera possible que si le prospect s'est mué en client.
complétant les dispositions de l'ordonnance, un arrêté du 29 juillet 2009 (44) est venu préciser les stipulations devant obligatoirement figurer dans les conventions de compte de dépôt.
Sur un autre sujet lié, l'ordonnance modifie légèrement les règles concernant la conclusion d'avenants à une convention de compte de dépôt : notamment, le délai de réflexion laissé au client est ramené à deux mois pleins (45).

  • La convention-cadre de services de paiement

Genre contractuel nouveau inauguré par l'ordonnance, cette convention est obligatoirement conclue lorsqu'est proposé un service de paiement lié à un compte de paiement qui ne fait pas l'objet d'une convention de compte de dépôt (C. mon. fin., art. L. 314-12 N° Lexbase : L4739IEA). En pratique, cela signifie que, dans la plupart des cas, les établissements de paiement seront seuls à conclure des conventions de ce type. Les règles applicables à la convention-cadre de services de paiement reprennent celles relatives à la convention de dépôt.

Signalons aussi que la protection de l'utilisateur est assurée par une obligation d'information ante (C. mon. fin., art. L. 312-1-1 V) et post (arrêté du 29 juillet 2009, préc.) exécution de l'ordre de paiement (46) ; ou encore par l'ouverture de la médiation bancaire aux clients des établissements de paiement (C. mon. fin, art. L. 315-1 N° Lexbase : L4819IE9).

Enfin, à titre de principe, l'ordonnance organise une véritable police des frais bancaires. Ainsi, on peut citer l'interdiction de facturation des frais relatifs à la production d'informations obligatoires destinées à la clientèle (C. mon. fin., art. L. 314-7 I N° Lexbase : L4733IEZ) et aux mesures préventives et correctrices à la disposition du client (C. mon. fin., art. L. 133-26 I N° Lexbase : L4776IEM). Intention louable, mais quelque peu naïve puisque cette disposition ne peut en aucun cas empêcher une augmentation des frais bancaires généraux (qui n'aurait rien d'illogique, compte tenu du surplus d'obligations mises à la charge des prestataires de services de paiement).

A l'image du projet SEPA, dont elle est l'héritière au deuxième degré, ou comme d'autres réalisations liées au SEPA - telle la plateforme TARGET247- l'ordonnance est d'essence éminemment technique. Simplement, en contribuant à libéraliser les services de paiement tout en assurant qu'ils soient fournis dans des conditions de sécurité technique et juridique d'un niveau équivalent dans toute l'Union Européenne, elle a le mérite de venir parachever l'introduction de l'euro. Dans les milieux bancaires, un temps durant au moins, l'ordonnance devrait surtout générer une multiplication ou un renforcement des processus "qualité" afin de palier les risques opérationnels qu'elle induit. Les opportunités qu'elle ouvre sont sans doute plus lointaines et plutôt favorables à des acteurs non-bancaires (48), susceptibles de devenir de nouveaux concurrents pour les établissements de crédit. Lourde de conséquences pour la sphère bancaire, presque inodore pour les utilisateurs : une lame de fer pour une révolution de velours ?


(1) Volonté affirmée dans des textes tels que la circulaire du 27 septembre 2004, relative à la procédure de transposition en droit interne des Directives et décisions-cadres négociées dans le cadre des institutions européennes et le décret n° 2005-1283 du 17 octobre 2005, relatif au comité interministériel sur l'Europe et au secrétariat général des affaires européennes (N° Lexbase : L0427HD8), et dont l'efficacité a été soulignée par le Conseil d'Etat dans son étude "Pour une meilleure insertion des normes communautaires dans le droit national" (2007) et la Commission européenne elle-même. Cette dernière, dans son dernier tableau d'observation consacré à la question, observe que "sur les dix-sept Etats membres ayant atteint l'objectif précédent de 1 %, dix sont parvenus à réduire davantage leur déficit", parmi lesquels la France (même si notre déficit de transposition demeure au quatrième rang communautaire).
(2) A l'instar de nombreux textes récents, l'ordonnance est prise sur le fondement de l'article 152 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, de modernisation de l'économie (N° Lexbase : L7358IAR). Il convient déjà de lui associer un premier décret d'application : le décret n° 2009-934 du 29 juillet 2009, pris pour l'application de l'ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement (N° Lexbase : L5897IE7).
(3) Dans la présente publication, pour plus de commodité, nous anticipons sur l'entrée en vigueur de l'ordonnance. Aussi, les références aux articles du Code monétaire et financier doivent-elles s'entendre comme des références aux articles en vigueur à compter du 1er novembre 2009.
(4) Pour Single Euro Payments Area (Espace unique de paiements en euros).
(5) Cf. le site internet de l'EPC.
(6) L'Eurosystème regroupe la Banque centrale européenne et les banques centrales nationales des Etats membres qui ont adopté l'euro.
(7) Puisque que la Directive considère qu'"il est crucial d'établir, au niveau communautaire, un cadre juridique moderne et cohérent pour les services de paiement -que ces services soient ou non compatibles avec le système résultant de l'initiative du secteur financier en faveur d'un espace unique de paiement en euros" (Directive, considérant n° 4). Ajoutons aussi que contrairement au projet SEPA, la Directive ne concerne pas les membres de l'Association européenne de libre échange.
(8) Notion qu'elle utilise d'ailleurs afin de délimiter (pour l'essentiel) son champ d'application (Directive, art. 2).
(9) On peut se référer à la volonté affichée en la matière dans le communiqué de presse du 12 décembre 2007.
(10) V. rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement, JORF du 25 juillet 2009.
(11) Le surcharging consiste à facturer au client, utilisateur d'un service de paiement, des frais correspondant au coût d'utilisation de l'instrument de paiement donné par le commerçant.
(12) Sur ces objectifs, voir rapport au Président de la République, préc..
(13) Nous reviendrons plus amplement sur cette notion un peu plus loin. A cette liste, il convient d'ajouter -comme à l'habitude- la Banque de France, l'Institut d'émission des départements d'outre-mer, la Caisse des dépôts et consignations et le Trésor Public (C. mon. fin., art. L. 521-1 II N° Lexbase : L4702IEU).
(14) A ceci près que, s'agissant des prestataires de services d'investissement, les établissements de crédit doivent avoir reçu l'agrément adéquat pour fournir ces services
(15) "Il est interdit à toute personne autre que celles mentionnées à l'article L. 521-1 de fournir des services de paiement au sens du II de l'article L. 314-1 (N° Lexbase : L4861IERà titre de profession habituelle". Une fois encore, on peut remarquer le classicisme de la formulation de l'interdiction à la lumière de ce que la loi française prévoit déjà en matière d'opérations de banque et de services d'investissement (respectivement aux articles L. 511-5 N° Lexbase : L9481DYS et L. 531-10 N° Lexbase : L3050HZY du Code monétaire et financier).
(16) Notamment que l'agent en question ne cherche pas à se "recycler" dans une activité alternative à celle pour laquelle il a pu faire l'objet d'une condamnation sur le fondement de l'article L. 621-15 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L6187IC7).
(17) Par exemple, on peut penser au rôle joué par les "points jaunes" de la Banque Postale.
(18) Qui, d'ailleurs, peuvent exercer une autre profession (qui doit, pour autant, demeurer "accessoire et non significative" selon les termes de l'alinéa 5 de l'article L. 523-6 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L3056HZ9).
(19) En contrepartie, cet agent a minima est intégré dans le périmètre du système de contrôle interne de l'établissement mandant.
(20) Ce qui constitue une différence fondamentale par rapport aux établissements de crédit.
(21) Mais, dans ce dernier cas, seulement à des conditions strictes, notamment une échéance d'un maximum de douze mois (C. mon. fin., art. L. 522-3 N° Lexbase : L4853IEH).
(22) Au surplus, une option de conversion est ouverte sur simple notification du CECEI jusqu'au 25 décembre 2009 aux établissements de crédit qui souhaiteraient adopter le statut allégé d'établissement de paiement (ordonnance, art. 18).
(23) Ce qui est, au demeurant, logique puisque les établissements de paiement ne reçoivent pas (stricto sensu) de dépôts (C. mon. fin., art. L. 522-4 I N° Lexbase : L4808IES).
(24) Faisant réapparaître le spectre du patrimoine d'affectation.
(25) La Directive permettait aux Etats transposant de ne retenir une protection qu'au-delà de 600 euros (Directive, art. 9.4). La France a choisi de ne pas recourir à cette possibilité.
(26) A comparer avec ce que prévoit l'article L. 511-33 (N° Lexbase : L2778IBI) en matière d'établissement de crédit.
(27) L'objectif d'une plus grande concurrence sur ce secteur est affiché à de très nombreuses reprises dans l'introduction de la Directive ; il est repris dans l'ordonnance. La Directive à peine transposée, la réalité de l'objectif suscite déjà des doutes (cf. P. Bouteiller, La transposition en droit français des dispositions européennes régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement, JCP éd. E, 2009, 1897, p. 23, n° 92).
(28) L'état du droit jusqu'alors en vigueur avait conduit le groupe France Télécom à créer un établissement de crédit destiné à fournir de tels services, France Télécom Encaissements.
(29) Liste qui reprend celle figurant en annexe de la Directive :
- les services permettant le versement d'espèces sur un compte de paiement et les opérations de gestion d'un compte de paiement ;
- les services permettant le retrait d'espèces sur un compte de paiement et les opérations de gestion d'un compte de paiement ;
- l'exécution des opérations de paiement suivantes associées à un compte de paiement, à savoir (peu ou prou) les prélèvements, les paiements par carte et les virements ;
- l'exécution des mêmes opérations, mais liées à une ouverture de crédit ;
- l'émission d'instruments de paiement et/ou l'acquisition d'ordres de paiement ;
- des services de transmission de fonds ;
- et l'exécution d'opérations de paiement, lorsque le consentement du payeur est donné au moyen de tout dispositif de télécommunication, numérique ou informatique et que le paiement est adressé à l'opérateur du système ou du réseau de télécommunication ou informatique, agissant uniquement en qualité d'intermédiaire entre l'utilisateur de services de paiement et le fournisseur de biens ou services.
(30) Les opérations pour compte propre sont donc exclues (C. mon. fin., art. L. 314-4 N° Lexbase : L4741IEC).
(31) C. mon. fin., art. L. 531-3 (N° Lexbase : L4747IEK) : "une entreprise peut fournir des services de paiement fondés sur des moyens de paiement qui ne sont acceptés, pour l'acquisition de biens ou de services, que dans les locaux de cette entreprise ou, dans le cadre d'un accord commercial avec elle, dans un réseau limité de personnes acceptant ces moyens de paiement ou pour un éventail limité de biens ou de services".
(32) L'exemption concernant les cartes cadeaux se fonde actuellement sur l'article L. 511-7 II 3 (N° Lexbase : L4822IEC) (rapport 2006 du Comité de établissements de crédit et des entreprises d'investissement). A notre sens, le nouvel article L. 521-3 (N° Lexbase : L4747IEK) permet de servir les mêmes intérêts dans des cas légèrement différents.
(33) On parle volontiers de la trilogie SCT (pour SEPA Credit Transfer), SDD (SEPA Direct Debit) et SCF (SEPA Card Framework). L'ordonnance permet également aux établissements de paiement d'encaisser des chèques (C. mon. fin., art. L. 131-45 N° Lexbase : L4723IEN et L. 131-71 N° Lexbase : L4832IEP).
(34) Définie à l'article L. 133-3 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L4786IEY) comme "une action consistant à verser, transférer ou retirer des fonds, indépendamment de toute obligation sous-jacente entre le payeur et le bénéficiaire, ordonnée par le payeur ou le bénéficiaire".
(35) Le payeur dans la grande majorité des cas, mais on peut penser à des situations où il revient au bénéficiaire de consentir (en matière de prélèvements, par exemple).
(36) C'est optimiste, d'autant qu'il est légitime d'estimer que l'établissement en cause souhaitera vérifier les allégations de son client avant de rembourser le montant du paiement.
(37) Les frais éventuels ne peuvent être prélevés que par le prestataire de services de paiement du bénéficiaire.
(38) Avec une tolérance à trois jours ouvrés jusqu'en 2012.
(39) P. Bouteiller, op cit., p. 15 n° 31.
(40) Nota., Cass. com., 27 juin 1995, n° 93-10.179, Epoux Schiettecatte c/ Union de banques et autres, publié (N° Lexbase : A8209ABN), Bull. civ. IV, n° 192.
(41) Ils fleurissent à l'occasion des paiements en ligne, qui requièrent de plus en plus fréquemment de renseigner une clé cryptée.
(42) Formule sacramentelle de l'article L. 111-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L1842IEX).
(43) P. Bouteiller, op. cit., p. 18, n° 55.
(44) Arrêté du 29 juillet 2009, relatif aux relations entre les prestataires de services de paiement et leurs clients en matière d'obligations d'information des utilisateurs de services de paiement et précisant les principales stipulations devant figurer dans les conventions de compte de dépôt et les contrats-cadres de services de paiement (N° Lexbase : L6065IED).
(45) Au lieu d'un étrange délai mixte de deux/trois mois.
(46) Ante : délai d'exécution maximal et frais ; post : informations relatives à l'autre partie, montant, date de valeur, taux de change (le cas échéant), etc..
(47) TARGET2 (pour Trans-european Automated Real-time Gross settlement Express Transfer System) est le nouveau système de paiement de montant élevé de l'Eurosystème. En France, il est en place depuis février 2008.
(48) Les établissements de crédit étant de plein droit (et de facto !) des prestataires de services de paiement, on peut raisonnablement parier qu'ils n'utiliseront qu'a minimal le nouveau statut d'établissement de paiement. Ce dernier devrait surtout intéresser des grands groupes industriels et commerciaux.

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Assurances

[Chronique] Chronique en droit des assurances dirigée par Véronique Nicolas, Professeur, avec Sébastien Beaugendre, Maître de conférences - Octobre 2009

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N9403BLT

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Le 07 Octobre 2010

Lexbase Hebdo - édition privée générale vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique en droit des assurances dirigée par Véronique Nicolas, Professeur, en collaboration avec Sébastien Beaugendre, Maître de conférences à la Faculté de droit de Nantes, tous deux membres de l'IRDP (Institut de recherche en droit privé). Au sommaire de cette chronique, on retiendra, en premier lieu, un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 8 juillet 2009 qui se prononce sur les pouvoirs du curateur simple sur la clause bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie, et, en second lieu, un arrêt rendu par la deuxième chambre civile le 3 septembre dernier et qui énonce que selon l'article L. 114-1, alinéa 3, du Code des assurances, lorsque l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier et qu'une assignation en référé en vue de la nomination d'un expert constitue une action en justice.
  • Pouvoirs limités du curateur simple sur la clause bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie (Cass. civ. 1, 8 juillet 2009, n° 08-16.153, FS-P+B+I N° Lexbase : A7360EIG)

La grande préoccupation en matière de contrats d'assurance vie, ces derniers mois, concerne les circonstances de la modification du ou des tiers bénéficiaires désignés dans la clause contractuelle du même nom. Du moins, cet aspect contractuel -mais aussi légal- fait-il l'objet de divers arrêts de la première chambre civile de la Cour de cassation. C'est qu'au-delà des enjeux financiers, parfois élevés, l'existence ou non de pouvoirs en ce domaine, accordés ou non, aux représentants des souscripteurs laisse dubitatif certains d'entre eux, à tort ou à raison ; souvent à tort lorsque la solution figure dans la simple lecture des restrictions légales concernant ces personnes dont les pouvoirs pourraient -dans le cas contraire- apparaître exorbitants, tant au sens juridique du terme que dans sa perception commune. C'est ainsi que la Cour de cassation a dû préciser que l'avocat doit avoir reçu un mandat spécial pour pouvoir modifier la clause bénéficiaire et donc le nom des tiers y figurant (1).

Et c'est une nouvelle illustration, dans un autre cadre, qu'offre à notre réflexion l'arrêt en date du 8 juillet  2009, et relatif à une curatelle. Quelle est l'étendue des pouvoirs du curateur sur un contrat d'assurance vie ? L'interrogation n'est pas tout à fait nouvelle et la réponse figure, en partie, dans le Code civil. En revanche, lorsque le curateur assiste le majeur en curatelle afin de substituer le tiers bénéficiaire initialement désigné dans la clause bénéficiaire pour devenir lui-même tiers bénéficiaire, l'opération apparaît osée, pour ne pas dire à la limite de l'illicéité. Est-ce néanmoins autorisé ? Telle était la question posée dans cette affaire.

En 2001, un juge des tutelles décide de prononcer la mise sous curatelle renforcée d'une femme, Madame I.. Il désigne l'une des filles de celle-ci, Madame C., en qualité de curatrice, en lui reconnaissant le droit d'user des pouvoirs conférés par l'article 512 du Code civil (N° Lexbase : L3088ABY alors en vigueur, devenu C. civ., art. 472 N° Lexbase : L8458HW8), c'est-à-dire la perception des revenus de la personne en curatelle, le règlement des dépenses, ainsi que le versement, si un solde positif en résulte, sur un compte ouvert chez un dépositaire agréé. Il est connu, même des non juristes, que le curateur doit, selon les termes de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 (N° Lexbase : L1139ATD), chaque année, rendre des comptes de sa gestion au greffier en chef du tribunal d'instance, sachant que le juge peut, à tout moment, demander la communication de ce compte de gestion et la reddition de celui-ci (devenu, C. civ., art. 511 N° Lexbase : L8509HW3).

Dans notre espèce, sans que nul ne puisse croire au hasard pur, quelques jours seulement après la désignation, en qualité de curatrice, de la fille de cette femme sous régime de protection des majeurs, est modifiée la clause bénéficiaire des contrats d'assurance vie que celle-ci avait souscrits plus de dix ans auparavant ! Et pour qui n'aurait pas encore deviné, nous posons la question : qui a été désigné à la place des anciens bénéficiaires ? La réponse est : la fille, curatrice ! Oserons-nous ajouter que celle-ci avait, de manière indubitable, quelques notions de droit, néanmoins encore insuffisantes... Un peu plus de deux ans plus tard la majeure protégée -du moins en apparence- décède. Elle laisse comme héritiers la curatrice, ainsi qu'une deuxième fille et ses deux petits-enfants venant aux droits de leur mère, elle-même décédée, qui était la troisième fille de la majeure protégée.

Ce qui devait arriver intervînt : la deuxième fille et ses neveu et nièce ayant sans doute découvert la désignation de Madame C. comme seul tiers bénéficiaire l'assignent pour demander tant le rapport à succession des sommes versées sur les contrats d'assurance vie que des dommages-intérêts. Un premier jugement est intervenu refusant de faire droit aux prétentions relatives au rapport à succession ; en revanche, il a estimé que la curatrice était redevable de dommages-intérêts. Or, la cour d'appel va statuer dans un sens contraire en usant d'un motif, qui sera censuré par la Cour de cassation, selon lequel la deuxième fille et les petits-enfants n'avaient pas invoqué le moindre vice du consentement pour erreur, dol ou violence "par le fait de manoeuvres ou agissements imputés à la curatrice à l'occasion de la modification de la clause bénéficiaire".

La Cour de cassation, se fondant tant sur les articles 510 (N° Lexbase : L8508HWZ) que 1382 (N° Lexbase : L1488ABQ) du Code civil, considère que la cour d'appel, en raisonnant ainsi, a violé ces textes. Elle estime que "la modification du bénéficiaire d'un contrat d'assurance vie par un majeur en curatelle nécessite l'assistance du curateur" et surtout que "la substitution du bénéficiaire au profit du curateur ne peut être faite qu'avec l'assistance d'un curateur ad hoc".

Avant de commenter le coeur de la présente affaire, rappelons qu'elle est née avant la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 (loi portant réforme de la protection juridique des majeurs N° Lexbase : L6046HUH) (2) et son entrée en vigueur fixée au 1er janvier 2009. D'ailleurs, la Cour de cassation précise bien qu'elle fait application de l'article 510 du Code civil (N° Lexbase : L3082ABR) "dans sa rédaction antérieure à la loi du 5 mars 2007". Ce texte prévoit que "le majeur en curatelle ne peut, sans l'assistance de son curateur, faire aucun acte qui, sous le régime de la tutelle des majeurs, requiert une autorisation du conseil de famille". Toutefois, ce constat ne doit pas réduire la portée de cet arrêt. En effet, il est fort probable que la solution ne serait pas différente sous l'empire de la loi nouvelle.

En effet, la loi du 5 mars 2007, eu égard à l'évolution de la société française et des techniques de gestion possibles, visait plusieurs objectifs. Parmi ceux-ci, le législateur a voulu adapter le droit à la gestion patrimoniale contemporaine (3), tout en confortant la représentation et l'assistance, notamment au travers de la curatelle. Cependant, conforter ne signifie pas accorder tout pouvoir, sans les moindres contrôle ou limite, à ces personnes chargées de la protection des majeurs. Il est même probable qu'en face de l'augmentation attendue, étant donné le vieillissement de la population, des cas de mise sous tutelle ou curatelle des personnes âgées, les magistrats redoubleront d'attention et de prise de mesures de protection.

Les présents faits démontrent combien cette vigilance est nécessaire au moins lorsque des contrats d'assurance font partie du patrimoine du principal intéressé. On ne peut qu'être soulagé, d'autant que l'échappatoire ne pouvait être trouvée dans une quelconque contestation de la validité du contrat lui-même ou des versements effectués. Outre que ceux-ci avaient eu lieu antérieurement à la mise sous curatelle, s'ils sont considérés comme une donation, l'article 513 du Code civil (N° Lexbase : L3089ABZ, devenu C. civ., art. 470 N° Lexbase : L8456HW4) prévoyait alors que le majeur protégé ne peut procéder à celles-ci qu'avec l'assistance de son curateur. Le seul angle d'attaque possible semblait donc être de tenter de convaincre la Cour de cassation que la modification de la clause bénéficiaire ne peut être effectuée par n'importe quelle personne et notamment pas par un curateur lorsqu'il cherche à se gratifier lui-même.

Le sens de la décision de la Cour de cassation pouvait être espéré, d'autant que -il faut le redire- nos Hauts magistrats avaient déjà anticipé, dans une espèce où aucune manoeuvre douteuse et malveillante de la part de l'avocat des souscripteurs n'avait été entreprise (4). Toutefois, en vertu sans doute de cette règle de bon sens selon laquelle il est préférable de prévenir que de guérir, la Cour de cassation avait tenu à encadrer ce type d'opérations dans leur ensemble. Par ailleurs, chacun sait, même de manière imprécise, que la loi s'est toujours méfiée notamment du corps médical qui entoure les personnes en fin de vie : sont nulles certaines dispositions prises en leur faveur peu de temps avant le décès résultant de la maladie ayant eu raison du de cujus. Bien qu'attendue donc, la solution n'en demeure pas moins bienvenue.

En effet, faut-il encore insister ? La réponse, pour nos Hauts magistrats, est positive : le droit d'élaborer, de modifier, d'aménager la clause bénéficiaire est un droit propre, un droit personnel du souscripteur ; il ne saurait donc disparaître à la première occasion. Ou bien alors c'est faire fi de la volonté de l'intéressé ; c'est se substituer à lui dans l'accomplissement d'actes qui sont anciens et surtout fondamentaux, alors qu'il n'avait de difficultés d'aucun ordre, sauf à ceux qui le prétendent d'en apporter la preuve, ce que les magistrats n'admettent pas volontiers non plus (5). Et souvent, désormais, la clause bénéficiaire représente une part très importante du patrimoine du souscripteur. Limiter toute intervention -pour ne pas dire altération- extérieure portant sur la clause bénéficiaire comme d'ailleurs, le droit au rachat, constitue la condition de la survie des contrats d'assurance vie.

Quant à la tentative d'obtention de dommages-intérêts, elle était quasiment vouée à l'échec. Car, jusqu'à son dernier souffle ou presque, tout sujet de droit dispose du droit de modifier les intentions qui furent les siennes pendant des années précédentes. Le contrat d'assurance vie n'est pas différent, de ce point de vue là, de l'ancienne pratique du testament. Combien d'affaires -sans compter les films et autres séries- ont mis en exergue la situation où un homme âgé décide, sous influence ou non, de changer son testament quelques jours ou semaines avant de décéder ? La clause bénéficiaire dans le contrat d'assurance vie lui fournit la même possibilité ; mais elle lui appartient à lui seul. Enfin, gageons que les intéressés ont été plus satisfaits de la décision de la Cour de cassation sur la limite des pouvoirs du curateur que sur l'absence d'abus de droit....

Véronique Nicolas, Professeur agrégé, Faculté de droit de l'Université de Nantes, Directrice du master II "Responsabilité civile et assurances", vice-doyen, Membre de l'IRDP

  • Expertise en référé sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile et effet interruptif sur la prescription biennale du contrat d'assurance (Cass. civ. 2, 3 septembre 2009, n° 08-18.092, Etablissement français du sang (EFS), F-P+B N° Lexbase : A8428EKD)

L'arrêt rapporté constitue, indirectement, un bel hommage au législateur qui, par la loi du 17 juin 2008 a réformé la prescription en matière civile (loi n° 2008-561 N° Lexbase : L9102H3I), spécialement au nouvel article 2239 du Code civil (N° Lexbase : L7224IAS).

Gardons à l'esprit, toutefois, que les dispositions transitoires de la loi n° 2008-561 prévoient, par l'article 26 III, que "lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation".

En l'espèce, la cour d'appel de Rennes ayant statué le 21 mai 2008, l'affaire est pendante devant la Cour de cassation lors de l'entrée en vigueur de la réforme de la prescription.

L'assuré (l'Etablissement français du sang) ne pourra donc bénéficier du nouveau dispositif légal, spécialement du nouvel article 2239 du Code civil.

Le législateur a, en effet, souhaité moderniser les causes de suspension de la prescription. Cette modernisation s'est traduite par deux dispositions très importantes, les articles 2238 (N° Lexbase : L7223IAR) et 2239 nouveaux.

Selon l'article 2238, "La prescription est suspendue à compter du jour où, après la survenance d'un litige, les parties conviennent de recourir à la médiation ou à la conciliation ou, à défaut d'accord écrit, à compter du jour de la première réunion de médiation ou de conciliation.
Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter de la date à laquelle soit l'une des parties ou les deux, soit le médiateur ou le conciliateur déclarent que la médiation ou la conciliation est terminée
".

Il s'agit là d'encourager les modes alternatifs de règlement des litiges. En cas d'échec de ces discussions, les parties, surtout l'assuré, auront la quiétude de savoir qu'un délai minimal de six mois court à compter de l'échec formalisé de la conciliation ou médiation.

Appliquée au domaine des assurances, cette solution contraste avec la situation actuelle de fragilité de l'assuré qui, lorsque des pourparlers tenant lieu de négociation amiable avec l'assureur "s'éternisent", risque de se voir opposer par l'assureur l'acquisition de la prescription biennale de l'article L. 114-1 du Code des assurances (N° Lexbase : L2640HWP).

Ce n'est toutefois pas de cette disposition dont aurait eu besoin l'assuré dans l'arrêt jugé le 3 septembre 2009. C'est davantage de l'article 2239 nouveau dont il aurait pu tirer profit...

En effet, aux termes de cet article,"la prescription est également suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès.
Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée".

C'est ici le recours au juge, des référés ou des requêtes, saisi sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49) dans le cadre d'une mesure d'instruction in futurum, pour obtenir désignation d'un expert, qui est encouragé.

En effet, par l'effet conjugué des articles 2241 (N° Lexbase : L7181IA9) et 2239 du Code civil, la saisine du juge est pleinement efficace.

En application de l'article 2241, alinéa 1er, "la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion". La saisine du juge, des référés ou des requêtes, produit ainsi un effet interruptif. S'il est question d'un contrat d'assurance, cette saisine doit avoir lieu conformément au délai biennal de l'article L. 114-1 du Code des assurances.

En application de l'article 2239, la nomination d'un expert va déployer un effet suspensif jusqu'à ce que cet expert remette son rapport (au jour "où la mesure a été exécutée" dixit l'article), date à laquelle le délai va reprendre son cours, pour un délai minimal de six mois.

Le droit antérieur était bien différent, qui considérait que la nomination d'un expert judiciaire ne suspendait pas la prescription jusqu'à remise du rapport de l'expert.

Des juges du fond qui avaient, jadis, tenté d'aménager le droit en ce sens s'étaient vu vertement censurés aux motifs que "la prescription interrompue par l'ordonnance de référé avait recommencé à courir dès le prononcé de celle-ci et alors que les époux X ne justifiaient pas avoir été, du fait du déroulement des opérations d'expertise après cette ordonnance, dans l'impossibilité d'interrompre la prescription à l'égard de l'assureur, en particulier par l'envoi à celui-ci de lettres recommandées avec accusé de réception, la cour d'appel a violé [les articles L. 114-1 et L. 114-2 (N° Lexbase : L0076AA3) du Code des assurances, ensemble l'article 2251 ancien du Code civil (N° Lexbase : L2539ABN)]" (Cass. civ. 1, 13 mars 1996, n° 93-21.206, Compagnie Axa Assurances, venant aux droits de la compagnie Providence IARD présence assurances c/ M. Paul Ainoux et autres, inédit N° Lexbase : A4451CSN).

Dès l'ordonnance de référé (ou l'ordonnance sur requête) rendue, le délai de prescription recommençait à courir. Il fallait donc que la partie (assuré ou assureur) soit vigilante pour ne pas laisser la prescription de deux ans s'épuiser...

Dans l'espèce jugée le 3 septembre 2009, c'est l'Etablissement français du sang qui va, à ses dépens, en faire les frais, puisque dans cette affaire une patiente atteinte du virus de l'hépatite C, après avoir reçu des transfusions de produits sanguins, a saisi le 8 octobre 2001 le juge des référés d'une demande d'expertise médicale afin de rechercher l'origine de sa contamination. L'Etablissement français du sang (l'EFS) intervenant volontaire à l'instance, a obtenu, par ordonnance de référé du 20 décembre 2001, que l'expertise soit déclarée commune à la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), son assureur. De son côté, l'expert judiciaire ayant déposé son rapport le 18 mai 2003, Mme X a assigné l'EFS, le 22 juillet 2004, devant un tribunal de grande instance en responsabilité et réparation, et a demandé, avant dire droit, une nouvelle expertise médicale afin d'évaluer son préjudice ; et le 31 mars 2005, l'EFS a fait assigner la SHAM en intervention.

L'assuré a donc été assigné in futurum par le tiers victime le 8 octobre 2001 et l'assureur de l'EFS a donc été partie à cette procédure d'expertise ordonnée sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile à compter du 20 décembre 2001. Or, son assuré l'assignera le 31 mars 2005, soit plus de 4 ans après...

Il est donc parfaitement logique que la cour d'appel ait considéré acquise la prescription et que la Cour de cassation ait abondé aux motifs que "selon l'article L. 114-1, alinéa 3, du Code des assurances, quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier ; qu'une assignation en référé en vue de la nomination d'un expert constitue une action en justice", pour en déduire que "la cour d'appel [...] a décidé à bon droit que l'action de l'EFS à l'encontre de la SHAM était prescrite".

Le demandeur au pourvoi avait bien tenté d'infléchir une jurisprudence bien établie en tentant de convaincre que dans l'interprétation de l'article L. 114-1 du Code des assurances, "seule l'action en justice tendant à la reconnaissance d'un droit à l'encontre de l'assuré peut être considérée comme l'action exercée par un tiers contre l'assuré au sens de l'article L. 114-1 du Code des assurances ; que tel n'est pas le cas d'une action en référé initiée sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile se bornant à voir désigner un expert, sans que soit demandée la moindre condamnation à l'encontre de l'assuré, ni que soit visée sa responsabilité".

A suivre cette logique, c'est à compter de l'assignation au fond par la tierce victime contre l'assurée, le 22 juillet 2004, qu'aurait dû débuter le délai biennal, rendant recevable l'appel en garantie au 21 mars 2005.

Quelle que soit l'ingéniosité du raisonnement, il a contre lui la lettre de l'article L. 114-1 du Code des assurances, qui, lorsqu'il énonce : "quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier", ne distingue pas selon le type d'action initiée par ce tiers contre l'assuré. Ubi lex non distinguit !

Finalement, le seul problème pour l'assuré aura été de ne pas pouvoir bénéficier des dispositions de la réforme du 17 juin 2008.

Les lecteurs sauront, eux, le bénéfice qu'ils pourraient en tirer !

Sébastien Beaugendre, Maître de conférences, Faculté de droit de Nantes, Membre de l'IRDP (Institut de Recherche en Droit Privé)


(1) Et nos obs., Un avocat n'est pas un mandataire spécial en matière d'assurance vie (Cass. civ. 2, 19 février 2009, n° 08-11.901, FS-P+B N° Lexbase : A4018ED8), in Chronique en droit des assurances dirigée par Véronique Nicolas, Professeur, avec Sébastien Beaugendre, Maître de conférences - Mai 2009, Lexbase Hebdo n° 349 du 7 mai 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N0563BK3).
(2) M. Bauer, T. Fossier et L. Pécaut-Rivolier, La réforme des tutelles, ombres et lumières, Dalloz 2006, chap. 1.1 à 1.9 ;T. Fossier, Le rapport du groupe Jean Favard sur le dispositif de protection des majeurs, JCP éd. G, 2000, act., p. 1055 ; T. Fossier, La réforme de la protection des majeurs, guide de lecture de la loi du 5 mars 2007, JCP éd. G, 2007, 1, 118.
(3) Dalloz Action, Droit de la famille, sous la direction de P. Murat, n° 332.11, p. 975 et 976 par Th. Fossier.
(4) Cass. civ. 2, 19 février 2009, préc. et les réf. préc..
(5) Et nos obs., Insanité d'esprit et état cérébral lacunaire : la différence est importante aussi en matière de contrats d'assurance vie (Cass. civ. 1, 1er juillet 2009, n° 08-13.402, F-P+B N° Lexbase : A5807EIW), in Chronique en droit des assurances dirigée par Véronique Nicolas, Professeur, avec Sébastien Beaugendre, Maître de conférences - Septembre 2009, Lexbase Hebdo n° 362 du 10 septembre 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N7456BLQ).

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[Questions à...] Plan de départs volontaires... nouvelle alternative au PSE ? - Questions à Maître Elisabeth Laherre, Avocate à la Cour, Coblence & Associés

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N9389BLC

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par Fany Lalanne, Rédactrice en chef Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 24 Octobre 2012

Très en vogue, le plan de départs volontaires semble bien être la "marotte" du moment. Air France-KLM annonçait encore, début septembre, un plan de départs volontaires portant sur quelques 1 500 postes en France. Idem, dans une moindre mesure, pour Prisma presse ou, encore, Altran Technologies, PSA, Renault, SFR, France télévision... cette notoriété ne saurait, cependant, être, à elle, seule gage de sécurité.
Le plan de départs volontaires, de par son intitulé même, pourrait, en effet, presque faire oublier qu'il s'inscrit nécessairement dans le cadre de suppressions d'emploi devant, le plus souvent, se traduire par un licenciement économique et par la nécessité de mettre en place un plan social. Cette ambiguïté pourrait expliquer qu'il persiste un certain flou juridique entourant cette forme de départ qui, si elle est fréquente, n'en reste pas moins originale. Pour faire le point sur la question, Lexbase Hebdo - édition sociale a rencontré Maître Elisabeth Laherre, Avocate à la Cour, Coblence & Associés.

Lexbase : Départ négocié, transaction, rupture conventionnelle, plan de départs volontaires, quelle différence entre ces modes de rupture "volontaire", tout du moins consentie, du contrat de travail ?

Elisabeth Laherre : La notion de départ négocié n'est pas une notion juridique, mais elle s'entend de toute rupture négociée du contrat de travail.
La transaction se distingue, quant à elle, du fait qu'elle consiste en un accord mis en place pour solutionner un litige consécutif à une rupture déjà intervenue. Elle diffère donc du départ négocié, car il ne s'agit pas d'un mode de rupture.
En revanche, la rupture conventionnelle est bien un mode autonome de rupture (1), l'employeur et le salarié convenant d'un commun accord des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. Elle obéit à une procédure spécifique et est entourée d'un certain nombre de garanties pour le salarié, notamment le droit aux allocations chômage.
Le plan de départs volontaires constitue également une forme de départ négocié. En revanche, cette notion reste une notion jurisprudentielle et n'est pas encadrée par la loi, sauf à s'inscrire dans un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) (C. trav., art. L. 1233-61 N° Lexbase : L1236H9N) (2) ou un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) (C. trav., art. L. 2242-16 N° Lexbase : L2395H9L) (3).

Le contexte économique justifie sans doute la multiplication, ces derniers mois, des plans de départs volontaires, ils existent pourtant depuis longtemps. Ainsi, un arrêt de la Cour de cassation du 8 février 1989 (4) retenait déjà qu'un salarié peut renoncer à percevoir une indemnité compensatrice de préavis en cas de rupture immédiate du contrat prévue par l'accord négocié avec l'employeur. Il faut, cependant, attendre deux arrêts de 2003 pour que les conditions de validité des ruptures amiables pour motif économique soient précisées (5).

Lexbase : Alternative au licenciement, il n'existe pourtant pas de procédure définie propre au plan de départs volontaires, certaines sociétés procèdent à des licenciements économiques avec des indemnités majorées, alors que d'autres utilisent la rupture conventionnelle, qui ouvre droit à une indemnité et aux allocations chômage. Quelle procédure préconisez-vous ?

Elisabeth Laherre : Il y a une règle simple résultant de l'article L. 1237-16 du Code du travail (N° Lexbase : L8479IAB), qui exclut les ruptures conventionnelles lorsqu'un PSE ou un accord GPEC existent. En revanche, lorsque la rupture conventionnelle concerne une catégorie professionnelle qui n'est pas visée par le PSE ou l'accord GPEC, elle peut être mise en place. Mais il faut rester vigilant et ne pas oublier que mettre en place des ruptures conventionnelles pour éviter un PSE peut être risqué à un double niveau. D'une part, la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) peut refuser l'homologation et, d'autre part, et indépendamment, le salarié peut contester cette rupture en disant qu'il y a eu fraude et qu'il a été victime d'un vice du consentement. Dans cette dernière hypothèse, la rupture conventionnelle sera annulée et le contrat de travail continuera de produire ses effets.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier les dispositions de l'article L. 1231-4 du Code du travail (N° Lexbase : L1068H9G), comme le rappelle un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 6 novembre 2008 (6) : les parties ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles en matière de licenciement. Dès lors, si jamais les ruptures conventionnelles envisagées sont trop proches d'un PSE visant des catégories professionnelles quasi similaires, il y a risque d'annulation.

La question qui peut se poser est celle de savoir si l'employeur court un risque quand il envisage de mettre en place moins de dix départs en rupture conventionnelle. Des divergences existent. Personnellement, je trouve cela risqué lorsque le motif économique est évident. Il faut, en effet, garder à l'esprit le fait que la rupture conventionnelle est une rupture amiable. La Cour de cassation jugeait ainsi, dans un arrêt du 11 février 2009 (7), que la rupture amiable du contrat de travail intervenue en dehors du champ d'application du plan de sauvegarde de l'emploi établi à l'occasion d'une réduction d'effectifs pour motif économique et qui fait suite à un différend entre les parties sur l'exécution et la rupture du contrat n'est pas valable.

Un autre cas de figure peut également se présenter, lorsque le salarié, après avoir signé une rupture conventionnelle, n'est pas remplacé. Si le fait qu'il y ait un changement d'organisation a posteriori ne veut pas nécessairement dire qu'il y a fraude, le simple fait que celui-ci sous-tende des licenciements économiques peut, néanmoins, s'avérer risqué pour l'employeur.

Pour résumer, il est donc dangereux d'utiliser la rupture conventionnelle lorsque l'on n'envisage pas de remplacer le salarié ou lorsqu'elle fait suite à des refus de modification de contrat et lorsque plus de dix salariés sont concernés.

Lexbase : A cet égard, un plan de départs volontaires s'inscrit-t-il automatiquement dans un plan de sauvegarde de l'emploi ?

Elisabeth Laherre : Le plan de départs volontaires doit effectivement être intégré dans un PSE dès lors que plus de dix salariés sont concernés. La Cour de cassation est tout à fait claire à ce sujet. Dans son arrêt du 11 février 2009 (8), elle retient sans ambiguïté possible que la rupture amiable établie en dehors du PSE doit être annulée.

Ce postulat découle de l'article L. 1233-3 du Code du travail (N° Lexbase : L8772IA7) : dès lors que les motifs sont non inhérents à la personne du salarié et résultent d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives, notamment, à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, l'application des dispositions de ce chapitre s'impose. On peut donc convenir d'une rupture amiable pour motif économique à partir du moment où l'on respecte les dispositions posées par l'article L. 1233-3, ce qui explique la nécessité d'inscrire son plan de départs volontaires dans un PSE ou un accord GPEC.

Concernant les accords GPEC, il faut rappeler que le cadre les entourant est très strict (C. trav., art. L. 2242-15 et s.), ils doivent notamment comporter une liste des emplois menacés. Par ailleurs, inclure un plan de départs volontaires dans un accord GPEC pose la question de savoir s'il faut, en outre, consulter le comité d'entreprise (CE) sur un PSE. Là encore, les positions sont divergentes. Si certains soutiennent que, à partir du moment où le plan de départs volontaires s'intègre dans un accord GPEC, il n'est pas nécessaire d'inscrire ces départs dans le cadre d'un PSE et que la consultation du CE sur ce point n'est donc pas requise, d'autres avancent le contraire. Pour ma part, a fortiori lorsque la rupture résulte d'un accord GPEC avec, en toile de fond, des difficultés économiques (GPEC à "chaud"), il est plus prudent pour l'employeur de mettre en place un PSE et il me semble dangereux de se contenter du seul accord GPEC.

Lexbase : Quel intérêt, alors, pour les entreprises, d'élaborer un plan de départs volontaires ?

Elisabeth Laherre : Les plans de départs volontaires se développent, car les ruptures pour motif économique se multiplient et il reste très compliqué de mettre en place une procédure de licenciement économique dès lors que plus de dix salariés sont concernés. Le contentieux collectif peut retarder la mise en oeuvre du PSE : les tribunaux suspendent régulièrement les procédures d'information et de consultation du CE. De nombreuses entreprises se trouvent condamnées et sont contraintes de suspendre ou d'annuler leur PSE. Le contentieux post licenciement portant sur le motif économique, le reclassement et l'ordre des licenciements est également abondant et risqué et les entreprises sont souvent condamnées, car il reste difficile de prouver qu'il est impossible de reclasser un salarié lorsque l'on fait partie d'un grand groupe. Sans parler des conflits sociaux.

Le plan de départs volontaires permet de contourner ces difficultés. Il est socialement plus acceptable pour les salariés, mais aussi pour les syndicats, qui ne vont pas être amenés à jouer un rôle de bouclier. Pour l'employeur, cela lui permet d'éviter les conflits sociaux et de limiter les contentieux, voire d'en éviter certains. Quand il y a plan de départs volontaires, les ruptures du contrat de travail sont des ruptures amiables, il ne peut donc y avoir de contentieux sur le motif économique, puisque ce n'est pas un licenciement. De même, il ne saurait y avoir de contentieux sur l'ordre des licenciements qui ne s'applique pas aux ruptures amiables.

Ce sont les raisons pour lesquelles les entreprises ont intérêt à élaborer un plan de départs volontaires même si, avec leur multiplication, de nouveaux contentieux risquent de surgir. Certains points sont, cependant, d'ores et déjà acquis, comme le fait, par exemple, de devoir proposer une convention de reclassement personnalisé et donc, par analogie, un congé de reclassement (9).

Des décisions récentes nous apportent certains enseignements utiles. Ainsi, dans une décision du 16 janvier 2009 (10), le TGI de Nanterre précise que la trop grande restriction du périmètre du volontariat doit être considérée comme illicite, car risquant d'aboutir à du volontariat contraint. De même, dans une décision du 10 avril 2009 (11), la cour d'appel de Versailles sanctionne, sur le terrain de la rupture d'égalité, le volontariat limité à certains sites. Cette décision est un peu troublante, car difficile à mettre en oeuvre en cas de fermeture de site. A mon sens, le volontariat n'a pas à être élargi à des populations non impactées, sauf si le départ des volontaires permet le reclassement de populations impactées. Sur ce point la décision de la cour d'appel de Versailles ne dit pas si l'employeur peut refuser le départ volontaire d'un salarié qui n'appartient pas à une catégorie ou au site impactés si cela ne permet pas le reclassement des salariés impactés. A mon sens, ce refus est légitime s'il est prévu dans le plan.

Lexbase : A contrario, quels en sont les inconvénients ?

Elizabeth Laherre : Outre ces nouveaux contentieux, un autre inconvénient doit être souligné, celui du risque de désorganisation de l'entreprise. Le principe d'égalité de traitement impose, en effet, de ne pas écarter certains salariés du "droit" à volontariat. Finalement, l'employeur a une capacité de refus limitée et contrôlée. S'il n'a pas bien préparé son plan de départs volontaires, les meilleurs de ses salariés risquent de partir, ce qui pourrait induire des problèmes de fonctionnement. C'est pour cela que, lorsque l'employeur souhaite mettre en place un plan de départs volontaires, il a tout intérêt à bien le préparer, en définissant précisément les populations concernées, son organisation cible et les conditions du refus.

Lexbase : Le plan de départs volontaires évite-t-il à l'employeur de faire un plan de reclassement interne ?

Elisabeth Laherre : Normalement, s'il y a PSE, il doit y avoir plan de reclassement. Là encore, une décision de la cour d'appel de Versailles du 1er avril 2009 (12) est riche d'enseignements. Elle nous indique, en effet, que l'employeur est tenu de proposer un plan de reclassement externe... mais pas interne, quand il s'interdit de procéder à des licenciements en cas d'insuffisance de départs volontaires. Les salariés qui ne souhaitent pas partir, conservant leur emploi, ceci exclut toute nécessité de rechercher un reclassement interne. Cela me semble être une décision logique... mais elle reste unique.

Lexbase : A cet égard, le plan de départs volontaires semble être victime de son succès. Cet été encore, un équipementier automobile se retrouvait avec trop de postulants au départ. Si la situation n'est pas inédite, elle pose la question de savoir si une entreprise peut se trouver contrainte de licencier plus de salariés qu'initialement prévu ?

Elisabeth Laherre : A partir du moment où le plan de départs volontaires s'inscrit dans un plan de sauvegarde, il faut une consultation du CE et l'employeur se retrouve ainsi dans l'obligation de donner dès le début le nombre de salariés dont la rupture du contrat est envisagée au départ et il ne peut en accroître le nombre en cours de procédure... à moins de réouvrir une période de volontariat. Il est donc plus prudent de s'en tenir au nombre de départs initialement prévu. Ceci suppose d'établir au préalable des critères de volontariat, comme l'existence d'un projet personnel et de définir les motifs de refus. L'absence de projet personnel viable peut être un critère de refus. En revanche, si tous les salariés présentent un projet personnel, quels doivent être les critères de refus ? A mon sens, on ne peut pas utiliser les critères d'ordre des licenciements, ce qui serait inadéquat, ni de pertinence du projet, ni même de date du dépôt du projet. Peut-être faudrait-il se tourner vers la situation personnelle du salarié (âge, difficultés potentielles de reclassement...) et favoriser ceux qui, par exemple, ont trouvé un poste en CDI ou veulent créer leur société plutôt que ceux dont le projet serait moins viable ? Pour l'instant, il reste encore difficile de se prononcer tant le contentieux est récent.

Pour les autres volontaires en excédent, l'employeur peut décider de faire un autre plan, cela peut aller assez vite. Mais il reste important de gérer ce volontariat excédentaire, pour éviter tout risque de contentieux, comme il est indispensable de justifier les refus de départ en volontariat...


(1) C. trav., art. L. 1237-11 (N° Lexbase : L8512IAI) à L. 1237-16, issus de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008, portant modernisation du marché du travail (N° Lexbase : L4999H7B) et lire les obs. de S. Tournaux, Article 5 de la loi portant modernisation du marché du travail : la rupture conventionnelle du contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 312 du 9 juillet 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N5222BGI).
(2) "Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, lorsque le projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile".
(3) "La négociation prévue à l'article L. 2242-15 (N° Lexbase : L2393H9I) peut également porter : 1° Sur les matières mentionnées aux articles L. 1233-21 (N° Lexbase : L1145H9B) et L. 1233-22 (N° Lexbase : L1147H9D) selon les modalités prévues à ce même article ; 2° Sur la qualification des catégories d'emplois menacés par les évolutions économiques ou technologiques".
(4) Cass. soc., 8 février 1989, n° 86-11.022, Société Pum plastique et compagnie c/ Urssaf d'Angers (N° Lexbase : A8596AAM).
(5) Cass. soc., 2 décembre 2003, 2 arrêts, n° 01-46.540, Crédit lyonnais c/ M. Christian Marais, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A3402DAA) et n° 01-46.176, M. Eric Baracassa c/ Société Etienne Lacroix tous artifices, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A3401DA9). Lire les obs. de Ch. Radé, Le triomphe de l'accord de rupture amiable du contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 98 du 10 décembre 2003 - édition sociale (N° Lexbase : N9682AAT)
(6) Cass. soc., 6 novembre 2008, n° 07-43.325, Société d'exploitation Alice création, F-D (N° Lexbase : A1715EB7) et les obs. de G. Auzero, L'interdiction de renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles en matière de licenciement, Lexbase Hebdo n° 327 du 19 novembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N7492BHX).
(7) Cass. soc., 11 février 2009, n° 08-40.095, Mme Sophie Toulet, FS-P+B (N° Lexbase : A1380EDH) et les obs. de Ch. Radé, Rappels sur une espèce en voie de disparition : la rupture amiable du contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 339 du 25 février 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N5759BI7).
(8) Cass. soc., 11 février 2009, n° 08-40.095, préc..
(9) Cass. soc., 16 décembre 2008, n° 07-15.019, Société Jean Caby, venant aux droits de la société par actions simplifiée Imperator, FS-P+B (N° Lexbase : A8971EBU) et les obs. de S. Tournaux, L'obligation de proposer une convention de reclassement personnalisé en cas de résiliation amiable fondée sur un motif économique, Lexbase Hebdo n° 334 du 21 janvier 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N3522BIB).
(10) TGI Nanterre, 16 janvier 2009, n° 09/00124, Comité d'entreprise de l'UES Cap Gemini c/ SAS Cap Gemini outsourcing services (N° Lexbase : A6770ECQ).
(11) CA Versailles, 14ème ch., 10 avril 2009, n° 09/00183.
(12) CA Versailles, 14ème ch., 1er avril 2009, n° 09/01005, Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et autres c/ SAS Renault (N° Lexbase : A4821GNU).

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Rel. individuelles de travail

[Jurisprudence] La Cour de cassation, le juge du fond et la transaction : flou artistique

Réf. : Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-42.273, M. Ben Amar Chetioui c/ Société Océangrais manutention et a., F-D (N° Lexbase : A1145ELY)

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N9402BLS

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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 07 Octobre 2010



Décidément, il est bien difficile de comprendre quoi que ce soit à la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation en matière de transaction, et bien malin qui peut dire aujourd'hui avec certitude où s'arrête le pouvoir de contrôle du juge sur l'exigence de concessions réciproques ! C'est ce constat désabusé que l'on peut faire à la lecture d'un nouvel arrêt inédit en date du 16 septembre 2009. D'apparence classique (I), l'arrêt nous semble s'inscrire difficilement dans un ensemble cohérent et on peine à comprendre aujourd'hui la logique du contrôle judiciaire portant sur les concessions consenties par les parties (II).



Résumé

Si, pour déterminer si les concessions sont réelles, le juge peut restituer aux faits, tels qu'ils ont été énoncés par l'employeur dans la lettre de licenciement, leur véritable qualification, il ne peut, sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve.

Ayant relevé que l'indemnité versée à titre transactionnel au salarié, supérieure à un mois de son salaire brut, ne pouvait être, au regard de l'aléa existant au moment de la signature de la transaction sur le différend opposant les parties, considérée comme dérisoire, la cour d'appel, qui ne pouvait trancher le litige relatif à la demande en requalification, a légalement justifié sa décision.

I - Le juge et l'existence des concessions réciproques

  • Transaction et concessions réciproques

Même si le Code civil ne l'impose pas, l'exigence de concessions réciproques constitue l'essence même de la transaction (1), et il n'est, dès lors, pas étonnant que la Cour de cassation exerce son contrôle sur la qualification opérée par les juges du fond (2) sur cette condition de validité (3). Mais quelle est la marge de manoeuvre du juge lorsqu'il a entre les mains la transaction signée par les contractants et que l'un d'entre eux, généralement le salarié, en demande l'annulation, parce qu'il s'est rendu compte, un peu tard, qu'il n'a pas perçu ce à quoi il avait droit ?

  • Etendue du contrôle judiciaire des concessions

Il est évident que, pour que l'exigence de concessions réciproques soit satisfaite, il est nécessaire de constater l'existence de concessions, avant même que de s'intéresser à leur importance.

A cet égard, la Cour de cassation considère que, même si le juge n'a pas à s'intéresser aux faits visés dans la transaction (4), il contrôle tout de même d'autres éléments, ce qui impose aux parties de motiver a minima l'acte, singulièrement l'étendue des concessions consenties (5). Le juge vérifiera, également, si la procédure du licenciement a bien été respectée, singulièrement si la lettre de licenciement était suffisamment motivée (6), ou si les faits qualifiés par les contractants de fautifs pouvaient valablement recevoir la qualification convenue (7). Pour ce faire, le juge pourra se fonder sur tous les éléments de fait visés dans la transaction (8).

  • Confirmation des termes du contrôle

Ce sont ces principes qui se trouvent, ici, rappelés par la Haute juridiction dans ce nouvel arrêt en date du 16 septembre 2009. Comme l'indique la Cour, "si, pour déterminer si les concessions sont réelles, le juge peut restituer aux faits, tels qu'ils ont été énoncés par l'employeur dans la lettre de licenciement, leur véritable qualification, il ne peut, sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve".

II - Le juge et l'importance des concessions réciproques

  • Etendue du contrôle du juge

La Cour de cassation s'est toujours refusée à opérer un contrôle de proportionnalité des concessions, considérant qu'il appartenait aux parties de déterminer souverainement l'étendue de leur renonciation. La Cour vérifie, toutefois, que les concessions consenties ne sont pas dérisoires, ce qui équivaudrait à une absence de concessions (9). Il s'agit donc, pour emprunter au vocabulaire des spécialistes de droit administratif, d'opérer un simple contrôle minimum.

L'examen de la jurisprudence livre d'intéressants enseignements sur la notion de concessions dérisoires (10), car les juges doivent tenir compte de trois éléments au moins : le montant de l'indemnité perçue par le salarié, l'écart entre ce montant et les prétentions initiales des parties (11) et les sommes englobées dans le montant compte tenu de la qualification des faits adoptée par les parties. Dernièrement, il a été jugé qu'un montant "inférieur à deux mois de salaire était dérisoire et ne constituait pas une véritable concession de la part de l'employeur" (12).

  • Etonnante confirmation en l'espèce

Ce sont cette méthode et les contours concrets de la notion de "concessions dérisoires", qui se trouvent de nouveau illustrés dans cet arrêt en date du 16 septembre 2009, mais dans une affaire où on pouvait raisonnablement douter du caractère non dérisoire du montant attribué, compte tenu du montant perçu par le salarié.

Un salarié avait été licencié pour motif économique et les parties avaient signé une transaction moyennant le paiement d'une indemnité de 1 750 euros au salarié, correspondant à l'équivalent d'un mois et demi de salaire. Ce salarié, prétendant qu'il n'avait pas été tenu compte de l'ancienneté acquise dans l'entreprise lors de précédentes périodes d'intérim pour le calcul de ses indemnités, avait saisi la juridiction prud'homale d'une demande en requalification de son contrat et en paiement de diverses indemnités, nonobstant la transaction. La cour d'appel de Rouen l'avait débouté et le rejet du pourvoi marque l'épilogue judiciaire de l'affaire.

Au soutien de son pourvoi, le demandeur faisait valoir que les juges du fond, pour écarter le grief tiré du caractère dérisoire des concessions consenties par l'employeur au regard des prétentions initiales des parties, auraient dû apprécier l'étendue des droits du salarié dans l'hypothèse où l'ensemble des contrats d'intérim conclus antérieurement par le salarié aurait été requalifié en une seule et même convention à durée indéterminée.

L'argument était astucieux, car nous avons rappelé que les juges doivent, pour apprécier l'existence des concessions, restituer aux faits leur exacte qualification, ce qui pouvait laisser suggérer que le juge pourrait également s'interroger sur la qualification des actes juridiques conclus antérieurement par les parties, et pas seulement sur les faits visés dans la transaction.

Par ailleurs, la faible importance de la somme avait déjà conduit la Cour de cassation à admettre le caractère dérisoire des concessions consenties.

Il n'a pourtant pas convaincu la Haute juridiction qui demeure, ici, dans une posture très classique, en affirmant que le juge ne peut "sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve". La formule prend, d'ailleurs, tout son sens si on la rapporte à celle qui avait été adoptée par la juridiction d'appel qui avait justifié le rejet des prétentions par le fait que le montant "ne pouvait être, au regard de l'aléa existant au moment de la signature de la transaction sur le différend opposant les parties, considérée comme dérisoire".

La référence à l'aléa est également classique, car l'incertitude qui règle sur l'étendue des droits des parties constitue véritablement l'une des causes possibles de la transaction (13). C'est parce que les parties ne sont pas certaines d'avoir tout à fait raison et qu'elles ne veulent pas courir le risque d'un procès long, coûteux et à l'issue incertaine, qu'elles transigent.

  • Une jurisprudence cohérente ?

Mais qu'il nous soit permis, ici, de douter de la cohérence d'ensemble de la jurisprudence concernant l'étendue du contrôle du juge, car nous ne comprenons pas pourquoi celui-ci pourrait contrôler la qualification de "faute", alors que le différend entre les parties porterait précisément sur cette question, et pourquoi il ne pourrait pas contrôler celle de contrat à durée indéterminée, s'agissant d'une succession de missions d'intérim auprès du même utilisateur, alors que là encore le différend tranché par la transaction porterait sur cette question ?

De deux choses l'une ; ou le juge contrôle les qualifications et, dans cette hypothèse, il les contrôle toutes, ou il se contente de vérifier que la transaction a été conclue dans des conditions qui préservent le consentement du salarié, et que chacun a abandonné une partie de ses prétentions initiales. Mais l'entre-deux dans lequel se situe aujourd'hui la Cour de cassation ne nous paraît guère compréhensible...


(1) Aubry et Rau, Cours de droit civil français, LGDJ, 4ème éd. 1871, tome 4, §. 418, p. 657.
(2) La volonté affichée de la Cour de cassation de reprendre le contrôle de la qualification de "concessions réciproques" remonte, en effet, à un arrêt du 18 octobre 1989 (Cass. soc., 18 octobre1989, n° 86-44145, Société Sécurité protection surveillance c/ M. Boileau N° Lexbase : A0466CI4, Bull. civ. V, n° 604 ; D., 1990, somm., p. 163, obs. A. Lyon-Caen).
(3) Cass. soc., 13 novembre 1959, JCP éd. G, 1960, II, 11450, note G.H. Camerlynck.
(4) Cass. soc., 27 février 1996, n° 92-44.997, Mme Georgette Antoine c/ Société générale de prestations et autres (N° Lexbase : A2470AGL), RJS, 1996, n° 405 ; Cass. soc., 14 juin 2000, n° 97-45.065, Société BMH c/ M. Pfendler (N° Lexbase : A3557AUB), Dr. soc., 2001, p. 27, chron. G. Couturier : "le juge ne peut, sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette dernière avait pour objet de clore en se livrant à un examen des éléments de faits et de preuve pour déterminer le bien-fondé du motif du licenciement économique du salarié". Dernièrement, Cass. soc., 26 avril 2007, n° 06-40.718, Société Aquarine, F-P (N° Lexbase : A0696DWP), v. les obs. de S. Martin-Cuenot, Transaction sur licenciement nul est également annulée, Lexbase Hebdo n° 260 du 16 mai 2007 - édition sociale (N° Lexbase : N0740BBZ).
(5) Cass. soc., 23 janvier 2001, n° 98-41.992, M. Jean-Marc Lamotte (N° Lexbase : A2287AIK), Dr. soc., 2001, p. 320, obs. G. Couturier.
(6) Cass. soc., 12 juillet 2006, n° 03-46.446, Mme Anne-Marie Costantini, F-D (N° Lexbase : A4257DQQ).
(7) Cass. soc., 6 avril 1999, n° 96-43.467, M Deshayes c/ Société Technifil (N° Lexbase : A4610AGT), Dr. soc., 1999, p. 641, obs. B. Gauriau : "le juge peut, sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, restituer aux faits énoncés dans la lettre de licenciement leur véritable qualification" (transaction visant des faits comme étant susceptibles de justifier un licenciement pour faute grave alors qu'il ne s'agissait que d'insuffisance professionnelle, qui n'est jamais constitutive d'une faute) ; Cass. soc., 18 décembre 2001, n° 99-40.649, M. Michel Prudhomme c/ société Mane et Fils, FS-P (N° Lexbase : A7222AXR), Dr. soc., 2002, p. 360, obs. B. Gauriau ; Cass. civ. 1, 25 mai 2005, n° 02-15.938, M. Daniel Prat c/ M. Achille Camozzi, F-D (N° Lexbase : A4137DI3).
(8) Cass. soc., 26 avril 2007 , n° 06-40.718, préc..
(9) Dernièrement, Cass. soc., 15 mai 2009, n° 07-40.576, Société AVL Ditest France c/ M. Serge Houssin, F-D (N° Lexbase : A5419D89), et nos obs., Transaction et sécurisation des procédures : l'équation est-elle vraiment parfaite ?, Lexbase Hebdo n° 306 du 26 mai 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N9807BEX).
(10) Sur une étude, notre chron. préc..
(11) Dernièrement, Cass. soc., 15 novembre 2007, n° 06-42.991, Société Hasbro France, FS-D (N° Lexbase : A7427DZ4) ; Cass. soc., 27 mai 2009, n° 08-41.084, M. Daniel Gillen, F-D (N° Lexbase : A3965EHC) : "l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte".
(12) Cass. soc., 15 mai 2009, n° 07-40.576, préc..
(13) Pour une critique du rôle joué par l'aléa dans la transaction, notre chron., L'ordre public social et la renonciation du salarié, Dr. soc., 2002, p. 931-938.

Décision

Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-42.273, M. Ben Amar Chetioui c/ Société Océangrais manutention et a., F-D (N° Lexbase : A1145ELY)

Rejet de CA Rouen, ch. soc., 18 septembre 2007

Texte concerné : C. civ., art. 2044 (N° Lexbase : L2289ABE)

Mots-clef : transaction ; concessions réciproques ; caractère dérisoire

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Avocats

[Questions à...] Le point sur l'acte contresigné par un avocat - questions à Maître Michel Bénichou, président de la Fédération des Barreaux d'Europe

Lecture: 6 min

N9384BL7

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par Anne Lebescond, Journaliste juridique

Le 07 Octobre 2010


Etienne Blanc, député UMP et avocat, a déposé, le 21 juillet 2009, sur le bureau de l'Assemblée nationale une proposition de loi introduisant un nouveau chapitre sur l'acte contresigné par un avocat à la loi du 31 décembre n° 71-1130, du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (N° Lexbase : L6343AGZ). Un mois plus tard, Nicolas Sarkozy affiche son attachement à cet acte et son intention de voir la proposition de loi soulevée et votée rapidement. Depuis les premiers travaux réalisés en 2003 par le groupe de travail composé des Professeurs Jean-Luc Albert, Xavier Delcros et Christophe Jamin (devenus par la suite membres de la commission "Darrois"), l'acte d'avocat a, donc, fait son chemin. Il parvient, semble-t-il, à s'imposer, en dépit des vives contestations des notaires, qui y voient une façon pour les avocats de concurrencer leurs actes authentiques et d'investir, à terme, leurs monopoles. Quelles sont ses chances de succès ?

Pour faire le point sur ce sujet sensible, mais, surtout, essentiel pour la profession d'avocat, Lexbase Hebdo - édition professions s'est entretenue avec Michel Bénichou, président de la Fédération des Barreaux d'Europe.

Lexbase : L'acte contresigné par un avocat viendrait consacrer une situation de fait quant à la responsabilité de ce dernier. Laquelle est-elle ?

Michel Bénichou : L'acte contresigné par un avocat consacre une responsabilité importante de l'avocat. Celle-ci, à l'origine, était liée à l'activité contentieuse de l'avocat. Elle était, donc, limitée à la "perte d'une chance". Il s'agissait essentiellement de l'hypothèse où l'avocat n'avait pas fait appel dans le délai fixé ou n'avait pas inscrit les sûretés nécessaires.

Actuellement, le rôle de rédacteur d'acte de l'avocat est consacré. Dès lors, sa responsabilité est importante.

Il devient, au fur et à mesure du temps, un arbitre, un rédacteur impartial qui doit, quelles que soient les circonstances, quelque soit son client, donner un équilibre à l'acte et préserver les droits des deux parties.

Lexbase : Quelles seraient les caractéristiques de l'acte d'avocat ? Quels avantages procurerait-il pour les parties ?

Michel Bénichou : L'acte d'avocat ne serait pas assorti de la force exécutoire.

Ce serait la différence essentielle avec l'acte authentique. Pour le reste, cet acte -signé par les parties et par l'avocat (ou les avocats)- aurait une force probante accrue. En effet, cette force probante est due au fait que l'avocat, avant signature, aura à vérifier l'identité, la capacité des parties et leur compréhension du contenu de l'acte.

Cet acte sera plus difficilement contestable. L'avantage en est évident. Nous sommes dans une société de contractualisation. La sécurité juridique est l'objectif. Cet acte va l'accroître comme l'a indiqué, très clairement, le Président de la République dans le communiqué saluant le dépôt du rapport "Darrois".

Lexbase : Le 11 septembre 2008 a été présenté, lors d'un colloque organisé à Lyon par le Barreau de Lyon et le CNB, l'acte sous signature juridique (lire N° Lexbase : N1885BHB). Il était, alors, envisagé que cet acte pourrait être contresigné par un professionnel du droit visé à l'article 56 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (N° Lexbase : L6343AGZ). Le projet de loi ne vise, quant à lui, que les avocats. Pourquoi cette restriction ? Existe-t-il d'autres points sur lesquels la réflexion a évolué ?

Michel Bénichou : Les avocats plaidaient pour un acte "sous signature juridique " ouvert à tous les professionnels du droit règlementés.

Cet acte devait, dès lors, s'insérer dans le Code civil. Tel était le projet que nous avions présenté aux autres professions règlementées. Or, les notaires s'y sont formellement opposés.

Dès lors, le rapport "Darrois" en a tiré les conséquences et a proposé un acte contresigné par le seul avocat.

Aujourd'hui, on constate que d'autres professions revendiquent cet acte, dont les experts-comptables qui ne semblent pas être des professionnels du droit. Les notaires ont toujours des oppositions formelles en pensant que cet acte pourrait concurrencer l'acte authentique. Or, nous avons clairement indiqué qu'il ne serait pas assorti de la force exécutoire. L'acte authentique restera l'acte rituel, formel et assorti au monopole des notaires que nous connaissons.

Nous tirons les conséquences de l'opposition formelle de cette profession à l'évolution du droit et la préservation de la sécurité juridique. Nous sommes encore dans un pays où les monopoles semblent inexpugnables, en dépit de la volonté de la Commission européenne de voir le marché des services juridiques se moderniser.

Toutefois, nous savons que, dans tous les cas, l'Etat sera toujours aux côtés des notaires. Il existe une véritable fusion entre l'Etat et cette profession, bien organisée, bien défendue, pratiquant un lobbying important. Elle a convaincu l'Etat de la nécessité de sa présence, de son action et l'Etat, quelque soient les gouvernements, défend toujours au niveau national et au niveau européen la seule profession de notaire.

Pour les avocats, nous savons ce qu'il en est. Nous attendons et espérons un changement d'attitude.

Lexbase : L'acte d'avocat pose la question de sa conservation. Quelles sont les pistes en la matière ?

Michel Bénichou : La conservation de l'acte d'avocat est fondamentale. Elle est prévue.

Nous avons créé le réseau privé virtuel avocats (RPVA), qui est géré par le Conseil National des Barreaux. C'est au travers de ce réseau que la conservation se fera. Un Office national de conservation sera créé.

Par ailleurs, parmi les obligations déontologiques, figurera celle d'avoir un registre des actes contresignés par l'avocat.

Dès lors, nous aurons une double conservation : individuelle, par l'avocat ; collective, par le Conseil National des Barreaux.

Lexbase : Existe-t-il des équivalents actuels ou à intervenir de l'acte d'avocat dans d'autres pays ?

Michel Bénichou : Actuellement, il n'existe pas d'acte d'avocat en Europe. Les belges, les italiens et les espagnols sont très intéressés, ainsi que d'autres pays européens, par l'importation de cet acte, lorsqu'il sera créé en France.

Ils ont bien conscience que la création de l'acte d'avocat améliorera la compétitivité européenne et internationale des avocats français.

Or, aujourd'hui, ceux-ci sont défavorisés par rapport, notamment, aux avocats anglais qui bénéficient du "deed", acte ayant une valeur importante, non formel et que les solicitors font régulièrement. Cet acte permet, notamment, le transfert des biens immobiliers.

Dans d'autres pays (Portugal, Roumanie...), il existe, de même, l'acte authentique d'avocat. Ce ne sont pas nos revendications. Aujourd'hui, nous demandons un acte contresigné par l'avocat, faute d'avoir un acte sous signature juridique. Cet acte sera assorti seulement, mais fortement, de la force probante et dépourvu de la force exécutoire, liée à l'acte authentique.

Lexbase : La proposition de loi présentée par M. Etienne Blanc sur le contreseing de l'avocat sera soumise au vote de l'Assemblée nationale. Etes-vous optimiste ? Que répondre aux notaires, qui craignent une concurrence quant à la délivrance des actes authentiques ?

Michel Bénichou : J'espère que la proposition de loi présentée par Etienne Blanc, député, sera soumise prochainement au vote de l'Assemblée nationale.

Il y a une difficulté pour trouver le créneau législatif permettant le débat.

D'autres professions font actuellement un "lobbying" intense auprès des députés et sénateurs pour les convaincre de l'inutilité de cet acte. Or, ce sont les mêmes professions qui bénéficient de monopoles et d'avantages concurrentiels immenses sur la profession d'avocat.

Apparemment, les notaires craignent la concurrence alors qu'ils bénéficient d'un monopole absolu en matière de transfert de biens immobiliers et d'autres actes.

A l'époque où le marché des services juridiques s'ouvre, où la Commission dénonce depuis 2003 des monopoles injustifiés, on peut s'étonner de cette position et de l'absence d'intervention des pouvoirs publics. Néanmoins, les avocats ne veulent pas concurrencer les notaires pour le transfert des biens immobiliers et leur acte monopolistique.

Les avocats veulent bénéficier des droits générés par leur rôle de rédacteurs d'actes et leur responsabilité accrue. Cela est demandé par la profession, mais, également, par les consommateurs qui veulent de la sécurité juridique et qui l'auront grâce à l'acte contresigné par l'avocat.

Je ne suis pas spécialement optimiste. Je connais la puissance du notariat. Si la profession d'avocat échoue et ne parvient pas à convaincre députés et sénateurs, alors même que le Président de la République s'est clairement exprimé en faveur de l'acte contresigné par l'avocat, alors, comme l'avait dit Loisel, à l'aube du XVIIème siècle, nous serions ramenés au rang de "gens de néant".

Cela signifiera que la profession d'avocat ne pèse pas par rapport à la profession de notaire et n'existe pas au regard de l'Etat, du Gouvernement et du Parlement.

Il faudra donc en tirer les conséquences, d'une part, en externe par rapport aux députés et sénateurs ayant refusé ce texte et, d'autre part, en interne quant à notre organisation.

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Rel. individuelles de travail

[Jurisprudence] Le caractère indifférent de la "position prise par le salarié" inapte à l'égard de son reclassement

Réf. : Cass. soc., 16 septembre 2009, 2 arrêts, n° 08-42.212, Société Groupe Volkswagen France, F-P+B (N° Lexbase : A1144ELX) et n° 08-42.301, M. Noël Guillier, F-D (N° Lexbase : A1147EL3)

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N9390BLD

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par Sébastien Tournaux, Maître de conférences à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV

Le 07 Octobre 2010

L'inaptitude physique du salarié est actuellement la cible de tous les regards. Outre la conclusion récente, par les partenaires sociaux, d'un accord national interprofessionnel portant, notamment, sur les questions d'inaptitude physique au travail (1), il est de plus en plus souvent relevé "l'abondance du contentieux relatif au fonctionnement de la médecine du travail" et aux licenciements pour inaptitude (2). La Cour de cassation est très régulièrement saisie de questions relatives à l'inaptitude physique, comme ce fut encore le cas dans deux arrêts rendus par la Chambre sociale le 16 septembre 2009. L'essentiel des questions traitées par la Cour dans ces affaires porte sur l'influence que peut avoir la prise de position d'un salarié quant à son éventuel reclassement à la suite d'une déclaration d'inaptitude. S'il n'y a, sur le fond, rien de profondément nouveau dans les solutions rendues par la Haute juridiction en la matière (I), on constate, néanmoins, un effort de structuration, voire de systématisation de la jurisprudence antérieure sur cette question, effort qui devrait mener à l'apparition d'une nouvelle composante dans la définition de l'obligation de reclassement à la charge de l'employeur en cas d'inaptitude (II).


Résumé

Pourvoi n° 08-42.212 : l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout emploi dans l'entreprise, ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, de rechercher des possibilités de reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagements du temps de travail au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient.

Pourvoi n° 08-42.301 : l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, ne peut limiter ses propositions de reclassement en fonction de la volonté présumée des intéressés de les refuser.

I - Une solution classique : l'indifférence de la position prise par le salarié sur la recherche de reclassement de l'employeur

  • L'obligation de rechercher le reclassement du salarié inapte : une obligation d'une forte intensité

Lorsqu'à l'issue d'une période de suspension du contrat de travail d'un salarié consécutive à une maladie ou à un accident non professionnel, le médecin du travail constate l'inaptitude totale ou partielle de celui-ci à l'emploi précédemment occupé, l'employeur est tenu de lui "propose[r] un autre emploi approprié à ses capacités" dans l'entreprise (3). L'obligation est d'une intensité particulière, ce qui s'explique notamment par la rédaction du texte dont l'usage du verbe "proposer" au présent de l'indicatif devrait quasiment inciter à y voir une obligation de résultat.

Cette intensité se manifeste au travers de la rigueur avec laquelle la Cour de cassation encadre cette obligation de reclassement. Sans détailler de manière exhaustive les règles entourant ce reclassement, notons, par exemple, que la jurisprudence impose la recherche du reclassement au niveau du groupe si l'entreprise appartient à une telle entité (4). Mesure emblématique de l'intensité de l'obligation de reclassement, la Cour de cassation impose, également, à l'employeur de rechercher le reclassement alors même que le médecin du travail a conclu à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise (5).

  • La perturbation de l'obligation de reclassement par le comportement du salarié

Les règles encadrant l'obligation en rendent, parfois, l'exécution délicate pour l'employeur. Cette impression peut encore être accentuée lorsque le salarié, par ses paroles ou par ses actes, semble indiquer à l'employeur qu'il ne sera, dans tous les cas de figure, pas intéressé par un reclassement dans l'entreprise ou dans le groupe.

La tentation peut alors être grande de ne pas gaspiller une trop grande énergie à la recherche d'une proposition de reclassement dont on sait, à l'évidence, qu'elle ne permettra pas le maintien du salarié dans l'entreprise. A l'impossible, nul n'est tenu ! C'est sur cette question de l'importance de la position prise par le salarié au regard de son reclassement que les deux arrêts commentés prennent position.

  • En l'espèce

Dans la première affaire, un salarié avait été déclaré inapte à tout emploi dans l'entreprise et licencié en raison de son inaptitude physique et de l'impossibilité pour l'employeur de le reclasser. Parmi les différents arguments soutenus par l'employeur pour justifier l'impossibilité de reclasser le salarié figurait celui selon lequel le salarié aurait, en réalité, prémédité son inaptitude physique, une lettre produite par l'employeur semblant démontrer l'existence d'une collusion frauduleuse entre le salarié, son médecin traitant et le médecin du travail.

La cour d'appel saisie jugea le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse pour manquement de l'employeur à son obligation de reclassement. Les juges du fond ne sont pas désavoués par la Chambre sociale de la Cour de cassation qui dispose que "l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout emploi dans l'entreprise, ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, de rechercher des possibilités de reclassement" (6).

Dans la seconde affaire, un salarié, engagé sur un poste d'opérateur polyvalent, était déclaré inapte à de nombreux postes de l'entreprise, un reclassement demeurant possible aux yeux du médecin du travail "à un poste sans manutention de charges lourdes et piétinement continu, par exemple, un poste de traitement thermique, cariste, approvisionnement en sable et parachèvement". L'employeur proposa un poste au traitement technique à mi-temps au salarié qui le refusa. Face à ce refus, l'employeur s'abstint de lui proposer un poste de cariste à temps partiel et le licencia.

La cour d'appel jugea, cette fois, que l'employeur avait convenablement assumé son obligation de reclassement, estimant, au sujet du poste de cariste, que "s'agissant d'un temps partiel, il aurait entraîné le même refus du salarié". Cette solution est cassée par la Chambre sociale au visa de l'article L. 1226-2 du Code du travail. La Cour de cassation estime, en effet, dans cette affaire, que "l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié ne peut limiter ses propositions de reclassement en fonction de la volonté présumée des intéressés de les refuser" (7).

II - Une formulation nouvelle de l'influence de la position prise par le salarié sur la recherche de reclassement de l'employeur

  • L'influence de l'avis du salarié systématisée : l'indifférence de la "position prise par le salarié"

Quels enseignements peut-on retenir de ces deux solutions ?

Il faut d'abord relever que ce n'est pas la première fois que la formule "quelle que soit la position prise par le salarié" est utilisée. Un arrêt de 2006 avait déjà usé de cette formule dans une affaire tout à fait symptomatique de la problématique posée par l'avis du salarié sur son reclassement (8). Dans cette espèce, un salarié déclaré inapte avait fait savoir à son employeur qu'il n'accepterait aucune proposition de reclassement pour un poste géographiquement situé au-delà d'un rayon de 50 km de son emploi précédemment occupé. L'employeur se limita donc à des propositions respectant cette requête, mais se vit, ensuite, reprocher par le juge de ne pas avoir respecté son obligation de reclassement, la Cour de cassation arguant du fait que la recherche de l'employeur devait s'effectuer "quelle que soit la position prise par le salarié" (9).

La formule, par sa généralité, semble être destinée à couvrir toutes les hypothèses dans lesquelles le salarié, par sa parole ou par ses actes, donne son avis ou prend position sur le reclassement qui va lui être proposé. La Cour de cassation fait donc un effort de systématisation qui pourrait être destiné à couvrir différentes hypothèses.

  • Une formule applicable aux exigences du salarié en matière de reclassement

Cela recouvre d'abord, comme dans les affaires étudiées, les situations dans lesquelles l'employeur pourrait présumer que le salarié va refuser la proposition de reclassement qu'il s'apprête à lui faire. Il est pourtant logique que l'employeur ne puisse être dispensé de son obligation en raison d'une telle présomption et ce pour au moins deux raisons. D'abord, parce qu'il serait particulièrement délicat de faire le départ entre les différentes positions du salarié et qu'un contrôle très complexe découlerait de l'acceptation d'une adaptation de l'intensité de l'obligation de reclassement en fonction du comportement ou de l'avis du salarié. Ensuite parce que, quel que soit l'avis émis implicitement ou explicitement par le salarié, il n'y a aucune certitude que celui-ci refusera finalement une proposition faite en dehors des exigences qu'il aurait posées ou semblé poser.

  • Une formule applicable au cas de refus implicite du salarié d'être reclassé

Cette formule semble suffisamment générale, ensuite, pour inclure d'autres situations dans lesquelles la Cour de cassation a jugé que la position prise par le salarié ne devait avoir d'incidence sur la matérialité de l'obligation de reclassement à la charge de l'employeur. Ainsi en va-t-il, par exemple, de la renonciation par le salarié au reclassement qu'il pourrait concéder via la conclusion d'un accord de rupture amiable. La Cour de cassation a jugé qu'une telle rupture amiable conclue à la suite d'une déclaration d'inaptitude était illicite (10). La raison première de cette solution tient évidemment au respect du statut protecteur accordé au salarié malade (11). Mais il peut également être soutenu que cette solution permet d'interdire au salarié de renoncer au bénéfice de l'obligation de reclassement et, ainsi, de refuser de prendre en considération la position prise par le salarié au regard de celui-ci.

De la même manière, pourraient entrer dans le giron de cette formule les situations dans lesquelles un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat en invoquant un harcèlement moral alors qu'il vient d'être déclaré inapte à son emploi. La Cour de cassation avait, en effet, jugé que, malgré la très forte probabilité que le salarié ne souhaite pas être reclassé dans l'entreprise, l'employeur devait, néanmoins, respecter son obligation de reclassement (12).

Il est probable que la généralité de cette formule peut mener à des situations pratiques parfois ubuesques dans lesquelles l'employeur est tenu à une obligation dont il est certain qu'elle ne mènera à aucun reclassement. Si l'absurdité de ces situations peut être acceptée, c'est d'abord parce que, comme nous l'avons relevé, le Code du travail fait de l'obligation de reclassement un devoir d'une forte intensité pour l'employeur et, ensuite, parce qu'il est certainement plus simple de ne pas entrer dans une distinction qui impliquerait l'analyse de la volonté du salarié, explicite ou présumée, et nécessiterait une bien hasardeuse plongée dans la psychologie de cette volonté.


(1) Protocole d'accord sur la modernisation de la médecine du travail du 11 septembre 2009 et nos obs., L'ANI du 11 septembre 2009 : réforme des services de santé au travail et du rôle préventif du médecin du travail, Lexbase Hebdo n° 364 du 24 septembre 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N9275BL4).
(2) J. Savatier, Aptitude et inaptitude au travail, Dr. soc., 2009, p. 257.
(3) C. trav., art. L. 1226-2 (N° Lexbase : L1006H97).
(4) Cass. soc., 24 octobre 1995, n° 94-40.188, Société Décolletage plastique c/ M. Jadault (N° Lexbase : A1451ABD) ; Dr. soc., 1996, p. 94, obs. D. Corrignan-Carsin.
(5) Cass. soc., 27 octobre 1993, n° 90-42.560, Société Lemonnier c/ M. Da Silva, publié (N° Lexbase : A1762AAI) ; Cass. soc., 20 septembre 2006, n° 05-40.526, M. François Lombard, FS-P+B (N° Lexbase : A3090DRU).
(6) Nous soulignons.
(7) Nous soulignons.
(8) Cass. soc., 28 juin 2006, n° 04-48.646, M. Stéphane Watteau, F-D (N° Lexbase : A1094DQL).
(9) Deux autres arrêts de la Chambre sociale utilisèrent cette formule avant les deux arrêts commentés. V. Cass. soc., 2 juillet 2008, n° 07-42.890, Société civile professionnelle (SCP) Le Lay-Broliquier-Fresneau, F-D, (N° Lexbase : A5025D9Y) et Cass. soc., 20 mai 2009, n° 06-45.926, Société Lacto centre, F-D (N° Lexbase : A1852EH3).
(10) Cass. soc., 29 juin 1999, n° 96-44.160, M. Lavenir c/ Société Publitex (N° Lexbase : A4617AG4).
(11) L'analogie avec les arrêts "Perrier" de 1974 interdisant les modes de rupture tirés du droit civil s'agissant de salariés représentants du personnel est éloquent (Cass. soc., 2 juillet 1974, n° 73-11263, Syndicat CFDT c/ Société Perrier SA N° Lexbase : A7656CEB). Sur cette question, v. J. Pélissier, A. Lyon-Caen, A. Jeammaud, E. Dockès, Les grands arrêts du droit du travail, Dalloz, 4e éd., p. 367.
(12) Cass. soc., 30 mai 2007, n° 06-41.652, Société Distrileader Bouches-du-Rhône, F-D (N° Lexbase : A5187DWZ) et les obs. de S. Martin-Cuenot, Absolutisme de l'obligation de reclassement ?, Lexbase Hebdo n° 264 du 14 juin 2007 - édition sociale (N° Lexbase : N3893BBS).

Décisions

1° Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-42.212, Société Groupe Volkswagen France, F-P+B (N° Lexbase : A1144ELX)

Rejet, CA Rennes, 8ème ch., 20 mars 2008

Texte cité : C. trav., art. L. 4624-1 (N° Lexbase : L1874H9B)

Mots-clés : inaptitude physique ; licenciement ; obligation de reclassement ; position prise par le salarié à l'égard du reclassement

Lien base :

2° Cass. soc., 16 septembre 2009, n° 08-42.301, M. Noël Guillier, F-D (N° Lexbase : A1147EL3)

Cassation, CA Orléans, ch. soc., 27 mars 2008

Texte visé : C. trav., art. L. 1226-2 (N° Lexbase : L1006H97)

Mots-clés : inaptitude physique ; licenciement ; obligation de reclassement ; position prise par le salarié à l'égard du reclassement

Lien base :

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