La lettre juridique n°620 du 9 juillet 2015

La lettre juridique - Édition n°620

Éditorial

"Uberisation" et conflit social : la prédiction de Durkheim

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N8318BUM

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

Le 09 Juillet 2015


"Uberisation" de la société : le néologisme fait écho dans les papiers, bons comme mauvais, de la presse généraliste comme spécialisée. Mais, toute emprunte de modernisme qu'elle semble revêtir, cette "uberisation" n'est en fait que le symptôme d'une "nouvelle" division du travail qui tente de s'immiscer dans les rapports sociaux, sous couvert de la liberté -ici, de commerce- que permettrait internet.

Car, il ne faut pas s'y tromper : cet "uberisation" marque, en fait, le retour de la "solidarité mécanique", qui s'appuie sur les similitudes unissant les individus, propre aux sociétés primitives ; celle que craignait Durkheim, dans sa thèse, De la division du travail social, publiée en 1893 !

Qu'est que cette "uberisation", que d'aucuns pensent inéluctable avec l'essor du commerce et de la communication électronique ? C'est l'idée selon laquelle n'importe qui peut exercer, plus qu'occasionnellement, une activité contre rémunération, sans que cette activité puisse être qualifiée, pour elle, de métier ou de profession. C'est, par conséquent, la déprofessionnalisation de l'activité économique ; déprofessionnalisation niant, a fortiori, toute réglementation d'une profession. De quel droit ? Celui de l'égalité entre les individus, d'abord ; de la liberté de commerce, ensuite ; et de la similitude -ou supposée telle- des compétences, pour les activités/métiers/professions peu techniques ou scientifiques.

Posée comme cela, on pourrait s'en contenter et dire que cette "uberisation", qui touche le domaine des transports individuels, de la location immobilière -avec AirBnB-, est la rencontre d'un besoin, la recherche d'économies pour le consommateur en période de crise interminable, et d'un moyen, internet qui supprime les barrières institutionnelles de la commercialisation, voire même l'intermédiation au sens classique -encore que les plateformes clouées au pilori aujourd'hui par les Gouvernements français et américain puissent être cataloguées d'intermédiaires-.

Le problème fondamental, au-delà des répercussions économiques sur certaines professions (taxi, hôtellerie, etc.), au-delà de la distorsion concurrentielle inhérente -illégale ?- à la libéralisation de l'activité économique, au mépris d'une réglementation asservissante pour les vrais professionnels de la profession, c'est justement les conséquences sociales de cette "solidarité mécanique" innervant peu à peu la société : la naissance de conflits destructeurs du lien social. Les manifestations et les exactions de ces dernières semaines, clos -momentanément- par la suspension d'Uberpop, étaient prédites par Durkheim, il y a 125 ans !

Pourquoi ? Parce que la division du travail n'est pas une nécessité simplement économique, mais une obligation pour conforter le lien social justement ; et que cette division doit se faire selon ce que Durkheim appelle "la solidarité organique". Elle n'est pas affaire uniquement de spécialisation professionnelle, comme le pensait Adam Smith, père du libéralisme. Auquel cas, effectivement, l'absence de nécessaire spécialisation pour une profession entraînerait une division du travail aux contours bien diffus. C'est en fait cette "solidarité organique", qui s'appuie sur la différenciation des tâches au sein des sociétés modernes et sur le droit restitutif -et non punitif comme pour la solidarité mécanique- qui assure une conscience collective et une paix sociale.

A l'inverse, avec l'"uberisation" de la société, c'est l'apogée de la conscience individuelle. Et, considérer que tout individu peut accomplir toute activité/métier/profession, même occasionnellement, parce que ses compétences sont, de fait, similaires à celles de professionnels, conduit à une augmentation des conflits, à une concurrence destructrice. Durkheim reprend, d'ailleurs, les théories de Darwin sur la lutte intra-espèce pour la survie. Or, c'est bien la complémentarité et l'équilibre des relations sociales qui permettent de conserver ce lien social et d'éviter le conflit.

Alors que faire face à ce phénomène mondial et massif de déprofessionnalisation ? Le paradigme est le suivant : les sociétés occidentales militent, et protègent, la liberté sur internet ; la liberté d'expression s'entend. Sans doute parce qu'elle ne présente que peu d'impact sur l'économie réelle, sur l'organisation sociale du travail en particulier -encore que-. Mais, justement, lorsque cette liberté tend à conquérir le terrain de l'économie réelle, la réaction politique est des plus confuses. Certes le commerce électronique est encadré juridiquement, bien que cet encadrement soit intervenu plutôt tardivement pour ne concurrencer que raisonnablement le commerce traditionnel. Mais là finalement, le numérique n'intervient qu'à titre d'intermédiaire. La prestation est entièrement physique et similaire à une activité traditionnelle. La réponse de "la solidarité mécanique" à une trop grande distorsion, c'est la répression : c'est ce qui se passe lorsque l'on tente d'interdire Uberpop pour exercice illégal d'une profession encore réglementée. Il en sera de même pour AirBnB sur un autre fondement que devront trouver les hôteliers (obligations sanitaires, fiscalité afférente...). Aussi, on comprend dès lors que, si la seule réponse sociale au déséquilibre de la "solidarité mécanique" est la répression des excès de cette solidarité primitive, le conflit est encore et toujours la conséquence de cette similarité des "travailleurs", de cette déspécialisation des professions.

Et, l'on ne peut pas s'étonner que la lutte contre l'"uberisation" de la société révèle un rapport de force et un lobbying acharné pour la survie de certaines professions. Ce lobbying reçoit alors l'écoute (taxi) ou non (avocats, notaires, huissiers) des politiques suivant leur influence auprès des gouvernants... et les incidents civils émaillant la France entière. Comme si la complexité du monde pouvait faire fi de l'exigence de capacité et de prudence qui justifie encore la réglementation de certaines professions.

Est-ce cela le nouveau rapport social que présage l'"uberisation" de notre société ?

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Aide juridictionnelle

[Jurisprudence] Aide juridictionnelle et absence de l'avocat

Réf. : Cass. civ. 2, 4 juin 2015, n° 14-18.884, F-D (N° Lexbase : A2288NKX)

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N8138BUX

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par Gaëlle Deharo, Professeur, Laureate International Universities (ESCE), Centre de recherche sur la justice et le procès, Université Paris 1

Le 09 Juillet 2015

Par un arrêt du 4 juin 2015, la Cour de cassation a retenu que, si les juridictions doivent attendre la décision du bureau d'aide juridictionnelle avant de se prononcer sur le litige dont elles sont saisies, l'absence de l'avocat désigné au titre de l'aide à l'audience des débats ne fait pas, en soi, obstacle à ce qu'il soit statué. Dans le cadre d'une procédure l'opposant à la Caisse primaire d'assurance maladie, le demandeur avait sollicité et obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Un avocat avait été désigné et avait déposé des conclusions avant d'indiquer ne plus intervenir pour le demandeur. Celui-ci avait sollicité un renvoi qui lui fut accordé. Mais il n'avait pas ensuite comparu à l'audience et ne s'était pas fait représenter.

Les juges du fond, relevant que l'appelant doit comparaître personnellement ou se faire représenter, avaient conclu que l'appel n'était pas soutenu et l'avaient débouté de toutes ses demandes. Un pourvoi fut formé contre cette décision.

Le demandeur à la cassation relevait que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance d'un avocat et à celle de tous les officiers publics ou ministériels dont la procédure requiert le concours. Cette assistance doit constituer un droit concret et effectif. En se déterminant par la considération que le demandeur n'avait pas comparu à l'audience et ne s'y était pas fait représenter, quand il résultait des mentions de l'arrêt relatives à la procédure que l'appelant avait, précédemment, sollicité le report de l'audience en faisant état d'une difficulté concernant la désignation d'un avocat pour le représenter au titre de l'aide juridictionnelle, la cour d'appel aurait violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L7558AIR) et l'article 25 de la loi du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique (N° Lexbase : L8607BBE).

Le pourvoi tire argument de la jurisprudence classique rappelant que le droit à l'assistance et à la représentation doit être un droit concret et effectif (I). La Cour de cassation, quant à elle, vérifie que le demandeur était en mesure de bénéficier de l'aide d'un avocat et distingue selon que la demande de renvoi est formulée pour permettre de solliciter l'aide juridictionnelle ou au motif que l'avocat a renoncé à apporter son concours au plaideur (II).

I - Assistance et représentation : un droit concret et effectif

En application de l'article 899 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0369ITT), les parties, sauf dispositions contraires, sont tenues de constituer avocat. Le principe, devant la cour d'appel, est donc celui de la représentation obligatoire. Dans cette perspective, l'aide juridictionnelle est un bénéfice accordé aux personnes qui sont dans l'impossibilité d'exercer effectivement leurs droits en justice, en raison de l'insuffisance de leurs ressources (1). Elle procure le concours des avocats et de tous les officiers publics et ministériels (2). Aussi, la Cour européenne des droits de l'Homme a jugé qu'elle peut être considérée comme "déterminante pour le droit d'accès à un tribunal" (3) et impose aux Etats de garantir l'aide judiciaire lorsque la représentation par un avocat est obligatoire ou lorsque la complexité de la procédure l'impose (4).

L'accès à l'aide juridictionnelle n'est toutefois effectivement garanti que si les juges attendent pour statuer au fond que la demande d'aide juridictionnelle ait été examinée par le bureau d'aide juridictionnelle compétent. Dans cette perspective, les exigences du procès équitable imposent à la juridiction saisie de ne pas statuer lorsqu'une partie est dans l'attente d'une attribution de l'aide juridictionnelle.

Une distinction doit cependant être faite :

- lorsque la demande d'aide juridictionnelle a été formée avant la date de l'audience (6). La demande d'aide juridictionnelle ne produit effet que si elle a été formée avant l'audience et aux fins d'obtenir l'aide juridictionnelle. Sur le fondement des dispositions de l'article 25 de la loi du 10 juillet et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L7558AIR), la Cour de cassation, dans un arrêt du 12 mars 2015 a cassé la décision des juges du fond qui avaient statué sur une opposition après avoir constaté que son auteur n'avait pas comparu alors que celui-ci avait sollicité, avant la date de l'audience, le bénéfice de l'aide juridictionnelle qui lui a été accordé en cours de délibéré (7).

Les juridictions, informées de l'existence d'une demande d'aide juridictionnelle, doivent donc attendre la décision du bureau de l'aide juridictionnelle avant de se prononcer sur le litige dont elles sont saisies. Toutefois, l'absence de l'avocat pour assister le bénéficiaire de l'aide à l'audience des débats ne fait pas obstacle à ce qu'il soit statué (8).

- lorsque la demande d'aide juridictionnelle a été formée en cours de délibéré. Les juges du fond n'ont pas à ordonner le renvoi de l'affaire dès lors que, la procédure étant orale, une partie ne s'est pas présentée à l'audience, bien que régulièrement convoquée et n'a formé une demande d'aide juridictionnelle qu'en cours de délibéré (9).

En l'espèce, la demande d'aide juridictionnelle avait été formée avant la date de l'audience et imposait aux juges d'attendre que le bénéficiaire ait été mis en mesure de recevoir l'assistance d'un avocat. Celui-ci avait été désigné, mais avait ensuite décidé de ne plus intervenir pour son client. La difficulté ne trouvait donc pas sa source dans la procédure d'admission à l'aide juridictionnelle, mais dans la relation de l'avocat et de son client.

II - L'objet de la demande de renvoi

L'aide juridictionnelle est régie par les dispositions de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 (N° Lexbase : L0627ATE) pris pour son application (10). Plus spécialement, les articles 24 et suivants précisent les effets de l'aide juridictionnelle. L'article 25 dispose que "le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance d'un avocat et à celle de tous officiers publics ou ministériels dont la procédure requiert le concours. Les avocats et les officiers publics ou ministériels sont choisis par le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle. Ils peuvent l'être également par l'auxiliaire de justice choisi ou désigné. A défaut de choix ou en cas de refus de l'auxiliaire de justice choisi, un avocat ou un officier public ou ministériel est désigné, sans préjudice de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, par le Bâtonnier ou par le président de l'organisme professionnel dont il dépend. L'auxiliaire de justice qui prêtait son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle avant que celle-ci ait été accordée doit continuer de le lui prêter. Il ne pourra en être déchargé qu'exceptionnellement et dans les conditions fixées par le Bâtonnier ou par le président de l'organisme dont il dépend".

La Cour de cassation doit donc concilier le droit d'accès à une juridiction, soutenue par cette disposition, et le respect des règles de procédure. En ce sens, elle tient compte des difficultés rencontrées par les justiciables pour obtenir la désignation d'un avocat une fois l'aide juridictionnelle obtenue (11). Aussi, lorsqu'un plaideur a obtenu l'aide juridictionnelle qu'il avait sollicitée et n'a pas bénéficié du concours d'un avocat, la juridiction ne peut se contenter de relever que le plaideur est non comparant pour le condamner (12) ou confirmer la décision critiquée.

La Cour de cassation a clairement posé la règle selon laquelle "si les juridictions doivent attendre la décision du bureau d'aide juridictionnelle avant de se prononcer sur le litige dont elles sont saisies, l'absence de l'avocat désigné au titre de l'aide à l'audience des débats ne fait pas obstacle à ce qu'il soit statué" (13). Les juges du fond doivent donc s'assurer que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle avait bien été en mesure (14) d'obtenir le concours, utile (15), d'un avocat (16). En conséquence, lorsque l'avocat avait été désigné mais n'a pas comparu, l'absence de l'avocat à l'audience ne constitue pas en soi une violation du principe de la contradiction et des exigences du procès équitable (17). Il ne suffit pas que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle n'ait pas comparu et n'ait pas été assisté d'un avocat pour que les juges du fond soient empêchés de statuer (18). Plus spécialement, la Cour de cassation avait, dans une décision précédente, jugé que les juges du fond qui avaient constaté que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, "qui s'était vu désigner un conseil pour l'assister au titre de l'aide juridictionnelle, avait été régulièrement convoqué, mais n'avait pas comparu et ne s'était pas fait représenter à l'audience", avaient pu statuer sans méconnaître les règles régissant l'aide juridictionnelle et les exigences du procès équitable (19).

Sous cet éclairage, le moyen du pourvoi n'avait que peu de chances de prospérer, le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle s'étant lui-même vu désigner un avocat et ayant été régulièrement convoqué. Dans un arrêt récent, la Cour de cassation avait déjà précisé que les juges ne sont pas tenus d'attendre pour statuer si le renvoi de l'affaire est sollicité au motif que l'avocat qu'il avait contacté avait renoncé à lui apporter son concours et non pour lui permettre de solliciter l'aide juridictionnelle, laquelle n'avait formé cette demande que pendant le cours du délibéré (20). Or, tel était le cas en l'espèce : le demandeur ne sollicitait pas le renvoi pour obtenir l'aide juridictionnelle mais afin de remplacer l'avocat qui avait été initialement désigné.

Cette circonstance est reprise dans les motifs de la décision du 4 juin 2015. Confirmant la jurisprudence antérieure, la Cour de cassation relève que le demandeur "avait été mis en mesure d'être assisté par l'avocat désigné à cette fin par le bâtonnier, lequel n'avait pas, le jour de l'audience, relevé cet avocat de son mandat, c'est sans méconnaître les règles régissant l'aide juridictionnelle et exigences du procès équitable que les juges du fond ont confirmé le jugement déféré".


(1) S. Guinchard, C. Chainais, F. Ferrand, Procédure civile. Droit interne et droit de l'Union européenne, Dalloz, 2014, n° 216, p. 209.
(2) S. Guinchard, C. Chainais, F. Ferrand, Procédure civile, op. cit., n° 238, p. 222.
(3) CEDH, 10 juillet 2008, n° 9090/06 (N° Lexbase : A5463D99) ; N. Fricéro, Atteinte au droit d'accès à un tribunal, Procédures, 2008, comm., 235.
(4) CEDH, 9 octobre 1979, Req. 6289/73 (N° Lexbase : A2971EBN), série A, n° 32 ; C. Jamin (Dir.), Avocats, JCP éd. G, 2007, I, 151, n° 7.
(5) Cass. civ. 2, 18. Janvier 2007, n° 06-10.294, FS-P+B+R (N° Lexbase : A6271DTG) ; J. Bougrab, L'aide juridictionnelle, droit fondamental effectif, JCP éd. G, 2007, act., 56.
(6) Cass. civ. 2, 12 mars 2015, n° 14-12.416, F-D (N° Lexbase : A3125ND4) ; Cass. civ. 2, 28 juin 2012, n° 11-20.680, F-P+B (N° Lexbase : A1266IQX) ; Cass. civ. 2, 5 décembre 2013, n° 12-22.041, F-D (N° Lexbase : A8408KQH).
(7) Cass. civ. 2, 12 mars 2015, n° 14-12.416, F-D (N° Lexbase : A3125ND4).
(8) Cass. civ. 2, 6 janvier 2011, n° 09-17.375, F-D (N° Lexbase : A7442GNX), Procédures, 2011, comm., 82, obs. Perrot ; Cass. soc., 29 septembre 2004, n° 02-44.605, F-D (N° Lexbase : A4781DDG).
(9) Cass. civ. 2, 19 mars 2015, n° 14-15.763, F-D ([LXB=A1942NEN ]) ; Cass. civ. 2, 3 avril 2008, trois arrêts, n° 07-12.341 (N° Lexbase : A7713D7S), n° 07 -12.342 (N° Lexbase : A7714D7T) et n° 07-12.343 (N° Lexbase : A7715D7U), F-D.
(10) J.-P. Dumas, L'aide juridictionnelle et le pourvoi en cassation, JCP éd. G, 2009, 296.
(11) Cass. civ. 2, 22 février 2012, n° 11-10.307, F-D (N° Lexbase : A3254IDU) ; pour une hypothèse dans laquelle l'aide juridictionnelle a été sollicitée mais non obtenue : Cass. civ.2, 3 avril 2008, trois arrêts, n° 07-12.341, 07-12.342, 07-12.343, F -D.
(12) Cass. civ. 2, 5 février 2009, n° 07-21.246, F-D (N° Lexbase : A9515ECE).
(13) Cass. civ. 2, 6 janvier 2011, n° 09-17.375, F-D (N° Lexbase : A7442GNX), comm. 82, obs. R. Perrot ; Cass. civ. 2, 21 octobre 2010, n° 09-16.962, F-D (N° Lexbase : A4218GC9) ; Cass. civ. 2, 25 septembre 2014, n° 13-22.799, F-D (N° Lexbase : A3024MXB).
(14) Cass. civ. 2, 18 octobre 2012, n° 11-24.187, F-D (N° Lexbase : A7070IUE) ; Cass. soc., 29 septembre 2004, n° 02-44.605, F-D (N° Lexbase : A4781DDG). Adde Cass. civ. 3, 7 mai 2003, n ° 01-16.936, FS-P+B (N° Lexbase : A0205B7Q) ; V. pour l'hypothèse d'un avocat omis du tableau : Cass. civ. 2, 8 juillet 2004, n°02-15.374, FS-P+B (N° Lexbase : A0235DD3).
(15) Cass. civ. 2, 6 mai 2004, n° 02-16.165, F-P+B (N° Lexbase : A1610DCM).
(16) Cass. civ. 2, 21 février 2008, n° 07-10.592, F-D (N° Lexbase : A0614D7U) ; Cass. civ. 2, 25 septembre 2014, n° 13-19.469, F-D (N° Lexbase : A3215MXD). V. également Cass. civ. 2, 5 décembre 2013, n° 12-14.553, F-D (N° Lexbase : A8396KQZ) ; Cass. civ. 2, 17 octobre 2013, n° 12-24.300, F -D (N° Lexbase : A0989KNX) ; Cass. civ. 2, 28 juin 2012, n° 11-20.680, F-P+B ([LXB=A1266IQX ]) ; Cass. civ. 3, 19 décembre 2012, n° 11-26.778, FS-D (N° Lexbase : A1756IZ3).
(17) Cass. soc., 23 septembre 2008, n° 07-42.657, F-D (N° Lexbase : A5026EAE). - Adde Cass. soc., 24 novembre 2004, n° 02-45.126, F-P+B (N° Lexbase : A0304DEY).
(18) Cass. civ. 2, 10 novembre 2010, n° 09-17.172, F-P+B (N° Lexbase : A9006GGN).
(19) Cass. civ. 2, 9 juillet 2009, n° 08-16.997, F-D (N° Lexbase : A7408EI9).
(20) Cass. civ. 2, 19 mars 2015, n° 14-15.763, F-D (N° Lexbase : A1942NEN).

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Bancaire

[Brèves] Délai de grâce accordé à l'emprunteur : report du point de départ du délai de forclusion biennale au premier incident de paiement non régularisé survenu après l'expiration de ce délai

Réf. : Cass. civ. 1, 1er juillet 2015, n° 14-13.790, FS-P+B (N° Lexbase : A5537NMZ)

Lecture: 1 min

N8358BU4

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Le 14 Juillet 2015

Le délai de suspension accordé en application de l'article L. 313-12 du Code de la consommation (N° Lexbase : L1529HIH) emporte le report du point de départ du délai de forclusion au premier incident de paiement non régularisé survenu après l'expiration de ce délai. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 1er juillet 2015 (Cass. civ. 1, 1er juillet 2015, n° 14-13.790, FS-P+B N° Lexbase : A5537NMZ). En l'espèce, suivant offre préalable du 12 juin 2007, un établissement de crédit a consenti un prêt personnel à un particulier. Le 13 octobre 2009, ce dernier a saisi le tribunal d'instance d'une demande de délais sur le fondement de l'article L. 313-12 du Code de la consommation. Par jugement en date du 26 juillet 2010, le tribunal a suspendu l'exécution des obligations de l'emprunteur pour une durée de deux ans et dit que le remboursement des échéances suspendues s'étalerait sur vingt-quatre mensualités à compter du terme contractuel défini à la convention de prêt. Le 28 septembre 2012, l'établissement de crédit l'a assigné en paiement du solde du prêt. La cour d'appel de Nancy (CA Nancy, 9 janvier 2014, n° 13/00809 N° Lexbase : A0921KTB) a déclaré forclose l'action en paiement de ce dernier, retenant que le report du délai de forclusion prévu par l'article L. 311-37 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6496AB9) ne peut s'appliquer au rééchelonnement judiciaire et que l'article L. 313-12 du même code ne prévoit aucun aménagement du délai de forclusion. Sur pourvoi formé par l'établissement de crédit, la Cour de cassation énonçant la solution précitée, censure l'arrêt d'appel au visa des articles L. 311-37, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 (N° Lexbase : L6505IMU ; disposition désormais prévue par l'article L. 311-52 du Code de la consommation N° Lexbase : L9554IMS), et L. 313-12 du Code de la consommation, ensemble les articles 1244-1 (N° Lexbase : L1358ABW) et 1244-2 (N° Lexbase : L1359ABX) du Code civil (cf. l’Ouvrage "Droit bancaire" N° Lexbase : E0889AT4).

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Contrats et obligations

[Brèves] Renonciation implicite à la garantie des vices rédhibitoires de l'article L. 213-1 du Code rural

Réf. : Cass. civ. 1, 1er juillet 2015, n° 13-25.489, F-P+B (N° Lexbase : A5400NMX)

Lecture: 2 min

N8321BUQ

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Le 10 Juillet 2015

Dans le cadre d'une vente d'animaux domestiques, les dispositions relatives aux vices rédhibitoires de l'article L. 213-1 du Code rural et de la pêche maritime (N° Lexbase : L4590I4R) peuvent être écartées par une convention contraire, laquelle peut être implicite et résulter de la destination des animaux vendus et du but que les parties se sont proposé et qui constitue la condition essentielle du contrat. Tel est l'apport de l'arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 1er juillet 2015 (Cass. civ. 1, 1er juillet 2015, n° 13-25.489, F-P+B N° Lexbase : A5400NMX). En l'espèce, les époux P. ont acquis, à l'occasion d'une vente aux enchères, un cheval de courses appartenant à Mme B. moyennant un prix de 46 466 euros. Les époux acquéreurs ayant constaté que le cheval souffrait d'ataxie, une maladie congénitale, ont assigné Mme B. en résolution de la vente et dommages-intérêts y afférents pour vice cachés. Les juges de première instance ayant débouté les époux P., ces derniers ont fait appel, arguant du fait que la maladie du cheval le rendait impropre à sa destination de reproducteur. La cour d'appel (CA Limoges, 22 août 2013, n°12/00243 N° Lexbase : A2801KKX) a prononcé la résolution de la vente et condamné Mme B au remboursement des frais de reproduction exposés par les acquéreurs, aux motifs que du prix du cheval pouvait, notamment, être déduit la volonté des parties de substituer aux dispositions du Code rural, une convention entre le vendeur et l'acheteur portant sur les qualités substantielles du cheval. La Cour de cassation approuve les juges du fond et énonce que la convention dérogeant implicitement aux dispositions de l'article L. 213-1 du Code rural peut résulter de la destination des animaux vendus et du but que les parties se sont proposé qui constitue la condition essentielle du contrat. Ainsi, le fait que le cheval litigieux ait été vendu aux enchères par l'intermédiaire d'une agence spécialisée à un prix plus élevé que celui d'un cheval de loisir et les indications des époux P. concernant l'avenir sportif du cheval, suffit à écarter l'application des articles L. 213-1 et suivants du Code rural (cf. l’Ouvrage "Contrats spéciaux" N° Lexbase : E7915EXG).

newsid:448321

Contrat de travail

[Jurisprudence] Limites à l'emploi de la langue française dans la relation de travail

Réf. : Cass. soc., 24 juin 2015, n° 14-13.829, FS-P+B (N° Lexbase : A9944NLU)

Lecture: 5 min

N8289BUK

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par Gilles Auzero, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

Le 09 Juillet 2015

Si la maîtrise d'une ou de plusieurs langues étrangères constituent, de manière indéniable, une nécessité et/ou un atout pour occuper certains emplois salariés, il importe, néanmoins, de veiller à préserver la langue française des tendances hégémoniques d'autres langues et, spécialement, de l'anglais. A cet égard, le législateur a pris soin d'exiger que tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail soit rédigé en français (C. trav., art. L. 1321-6, al. 2 N° Lexbase : L1851H9G). Le dernier alinéa de ce même texte énonce, toutefois, une exception à cette exigence, disposant que "ces dispositions ne sont pas applicables aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers". C'est cette exception qui était précisément en cause dans l'affaire ayant conduit à l'arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation, en date du 24 juin 2015.
Résumé

Dès lors qu'un salarié, destinataire de documents rédigés en anglais et destinés à la détermination de la part variable de sa rémunération contractuelle, est citoyen américain, il ne peut se plaindre du fait que ces documents ne sont pas rédigés en français.

Observations

I - De l'importance de la langue française

Les exigences légales. Introduit dans le Code du travail par la fameuse loi "Toubon" du 4 août 1994 (1), l'article L. 1321-6 dispose, en son alinéa 2, que doit être rédigé en français, "tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail" (2). Cette disposition fait écho aux prescriptions de l'article L. 1221-3 du Code du travail (N° Lexbase : L0771H9G) qui dispose, quant à lui, que le contrat de travail établi par écrit est rédigé en français.

Les précisions jurisprudentielles. Bien que l'article L. 1321-6 figure dans un titre du Code du travail consacré au règlement intérieur et que son alinéa premier vise cet acte juridique, la formule de son alinéa 2 est particulièrement large et dépasse tant le règlement intérieur que les documents qui peuvent lui être assimilés.

C'est ce que confirme la jurisprudence de la Cour de cassation qui, dans un arrêt en date du 29 juin 2011 (3), a fait application de l'article L. 1321-6 du Code du travail à "des documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuelle" d'un salarié. La Chambre sociale a décidé, dans cette espèce, que les documents en cause, qui étaient rédigés en anglais, était inopposables au salarié demandeur, de nationalité française.

Il ne fait guère de doute que c'est cette solution que faisait valoir une salariée dans l'affaire ayant conduit à l'arrêt sous examen, à propos de documents fixant, là aussi, sa rémunération variable. La Cour de cassation a cependant retenu une solution diamétralement opposée à celle énoncée dans l'arrêt précité, et cela de manière parfaitement justifiée au regard de la lettre même de l'article L. 1321-6 du Code du travail.

II - De l'importance de la nationalité du salarié

L'affaire. Etait, en l'espèce, en cause une salariée engagée, à compter du 18 septembre 2000 par la société I2 Technologies, aux droits de laquelle vient la société JDA Software France, en qualité de consultant senior. Par lettre du 27 juillet 2007, la salariée avait pris acte de la rupture du contrat de travail en reprochant à l'employeur un plan de rémunération variable qu'elle estimait inacceptable. Après avoir obtenu du juge des référés l'octroi de provisions à valoir sur sa créance, la salariée avait saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes.

La salariée reprochait à l'arrêt attaqué d'avoir limité la condamnation de l'employeur à une somme au titre de la part variable de la rémunération pour l'année 2007. A l'appui de son pourvoi, elle soutenait qu'il résulte de l'article L. 1321-6 du Code du travail que tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail doit être rédigé en français. En particulier, lorsque les documents fixant les objectifs nécessaires à la détermination de la rémunération variable contractuelle sont rédigés dans une langue étrangère, le salarié peut se prévaloir de leur inopposabilité. En l'espèce, la salariée soulignait que les objectifs pour le calcul de la rémunération variable 2007 avaient été rédigés exclusivement en langue anglaise et qu'aucune traduction ne lui avait été remise durant la relation de travail, de sorte qu'ils lui étaient inopposables. En conséquence, en calculant la somme due au titre de la rémunération variable 2007 sur la base de ces objectifs, sans s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.

On l'admettra, les faits étaient forts proches de ceux ayant conduit à l'arrêt précité du 29 juin 2011 ; à une différence près cependant, et d'une importance à ce point considérable qu'elle conduit la Cour de cassation a rejeté les prétentions de la salariée.

Une solution pleinement justifiée. Ainsi que le rappelle d'abord la Cour de cassation, "il résulte de l'article L. 1321-6, alinéa 3, du Code du travail, que la règle selon laquelle tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail doit être rédigé en français n'est pas applicable aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers". Elle affirme, ensuite, "qu'ayant constaté que la salariée, destinataire de documents rédigés en anglais et destinés à la détermination de la part variable de la rémunération contractuelle, était citoyenne américaine, la cour d'appel n'avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante".

Il est difficile de ne pas pleinement approuver cette solution, comme il est difficile de ne pas s'étonner de l'argumentation qui était développée dans le pourvoi. En effet, ainsi que le précise, on ne peut plus clairement, l'alinéa 3 de l'article L. 1321-6, les dispositions des deux premiers alinéas "ne sont pas applicables aux documents reçus de l'étranger ou destinés à des étrangers". Outre que la salariée était étrangère, le document litigieux relevait bien de la catégorie des documents "comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail". Il se confirme ainsi, dans le droit fil de la jurisprudence de 2011, qu'il convient d'avoir une compréhension large de cette catégorie. Au demeurant, la salariée ne contestait pas la qualification des documents puisqu'elle demandait expressément leur soumission aux prescriptions de l'article L. 1321-6, du moins à ses deux premiers alinéas.

On remarquera que la Cour de cassation ne se contente pas de relever que la salariée était étrangère et destinataire de documents susceptibles de relever de la catégorie évoquée à l'alinéa 2 du texte précité. Elle prend soin de préciser qu'elle était citoyenne américaine et destinataire de documents en anglais. On peut donc raisonnablement penser que la salariée était en mesure de comprendre ces documents. Cela étant, et à s'en tenir à la lettre de l'article L. 1321-6 du Code du travail, seul compte le fait que les documents sont destinés à des étrangers pour exclure l'obligation qu'ils soient rédigés en français. Partant, on pourrait considérer qu'il importe peu que les documents ne soient pas rédigés dans la langue maternelle du salarié. La solution retenue par la Cour de cassation ne semble pas aller en ce sens et il paraît importer que le salarié étranger soit en mesure de comprendre les documents comportant des obligations ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son travail. Cela nous paraît devoir être approuvé, pour d'évidentes raisons.

On remarquera que lorsque le salarié est français, il importe, en revanche, peu que celui-ci puisse être en mesure de comprendre des documents rédigés dans une autre langue que le français. Cette assertion, qui s'évince de l'arrêt précité du 29 juin 2011, doit, là aussi, être approuvée. Outre qu'elle évite de délicats problèmes de preuve relatifs au degré de compréhension par le salarié d'une langue étrangère, elle préserve, autant que faire se peut, l'usage du français.


(1) Loi n° 94-665, 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française (N° Lexbase : L5290GUH).
(2) L'alinéa 1er de ce même texte dispose, quant à lui, que "le règlement intérieur est rédigé en français. Il peut être accompagné de traductions en une ou plusieurs langues".
(3) Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-67.492, FP-P+B (N° Lexbase : A6483HUN) ; Bull. civ. V, n° 167 ; RDT, 2011, p. 663, obs. P. Lokiec.

Décision

Cass. soc., 24 juin 2015, n° 14-13.829, FS-P+B (N° Lexbase : A9944NLU).

Cassation partielle (CA Versailles, 15 janvier 2014).

Texte visé : C. trav., art. L. 1321-6 (N° Lexbase : L1851H9G).

Mots-clefs : salarié étranger ; document fixant la rémunération variable ; langue de rédaction.

Lien base : (N° Lexbase : E7650ES7).

newsid:448289

Domaine public

[Brèves] Non-appartenance d'une voie au domaine public routier communal en l'absence d'acte translatif de propriété

Réf. : Cass. civ. 1, 1er juillet 2015, n° 14-14.807, F-P+B (N° Lexbase : A5513NM7)

Lecture: 1 min

N8365BUD

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Le 14 Juillet 2015

Ni l'ouverture d'une voie à la circulation publique, ni son classement dans la voirie communale ne peuvent, en l'absence d'acte translatif de propriété, avoir pour effet d'incorporer cette voie dans le domaine public routier communal, juge la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 1er juillet 2015 (Cass. civ. 1, 1er juillet 2015, n° 14-14.807, F-P+B N° Lexbase : A5513NM7). Une copropriété composée de deux immeubles édifiés sur diverses parcelles situées sur le territoire d'une commune est traversée par un chemin qui permet d'accéder à un couvent. Reprochant au syndicat des copropriétaires de ladite résidence d'avoir fait installer une barrière automatique en amont de ce chemin, l'association propriétaire du bâtiment qui abrite le couvent a saisi le juge des référés aux fins de voir ordonner l'enlèvement de cet ouvrage. Le syndicat des copropriétaires, soutenant que la voie litigieuse lui appartenait, a soulevé l'illégalité de la délibération du conseil municipal l'ayant classée dans la voirie communale. Pour ordonner l'enlèvement de la barrière, l'arrêt attaqué, se prononçant sur l'apparence du caractère public du chemin en cause, retient, d'une part, que celui-ci est ouvert à la circulation du public et spécialement aménagé à cette fin, d'autre part, que, par délibération du conseil municipal, il a été porté à l'inventaire des voies urbaines. Il en déduit que tout aménagement susceptible de restreindre l'accès au couvent constitue un trouble manifestement illicite justifiant la compétence du juge des référés. La Cour suprême annule cette décision au regard du principe précité et de la violation des articles 1er et 2 de l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959, relative à la voirie des collectivités locales, alors en vigueur, ensemble l'article L. 141-1 du Code de la voirie routière (N° Lexbase : L8823AEI).

newsid:448365

Conflit collectif

[Brèves] Impossibilité de limiter le droit de grève en raison de l'obligation de garantir un service minimum de transport en commun

Réf. : Cass. soc., 30 juin 2015, n° 14-10.764, FS-P+B (N° Lexbase : A5493NME)

Lecture: 2 min

N8345BUM

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Le 15 Juillet 2015

L'obligation légale faite à l'employeur, entreprise chargée d'un service public de transport terrestre de personnes, d'élaborer un plan de transports et d'information des usagers et de garantir un service minimum ne peut permettre de limiter l'exercice du droit de grève en l'absence de disposition légale l'interdisant et de manquement à l'obligation de négocier. Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 30 juin 2015 (Cass. soc., 30 juin 2015, n° 14-10.764, FS-P+B N° Lexbase : A5493NME).
En l'espèce, à la suite de l'échec de négociation, le syndicat X a déposé un préavis de grève le 18 mars 2013 pour la période du 25 mars au 12 avril 2013, consistant en des arrêts de travail quotidiens de 55 minutes et affectant l'ensemble du personnel. La société de transport en commun Y a saisi le juge des référés aux fins de constater que le préavis est constitutif d'un trouble manifestement illicite et d'ordonner sous astreinte la suspension de ses effets. La cour d'appel a fait droit à sa demande au motif que les arrêts quotidiens à différentes heures de la journée empêchaient l'employeur de prévoir les lieux où les autobus seraient laissés en stationnement pendant les arrêts de travail et de s'assurer des conditions dans lesquelles les grévistes reprendraient leur activité à l'issue de ceux-ci, et ne lui permettent pas de disposer des éléments nécessaires à l'élaboration d'un plan de transports et d'information des usagers et d'assurer ainsi le service minimum dû aux usagers en vertu de la loi et, d'autre part, que les troubles générés qui contraignent les passagers à descendre des véhicules en cours de trajet avant d'avoir atteint leur destination, ne doivent pas être mésestimés s'agissant de jeunes cherchant à rejoindre un établissement scolaire ou leur domicile et de personnes âgées.
Le syndicat forme alors un pourvoi en cassation auquel la Haute juridiction accède. En énonçant le principe susvisé, elle casse l'arrêt de la cour d'appel au visa de l'alinéa 7 du Préambule de la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L6821BH4) et de l'article L. 1222-4 du Code des transports (N° Lexbase : L8192INQ). Par des motifs insuffisants à caractériser une désorganisation de l'entreprise et alors que l'empêchement pour l'employeur, résultant des modalités de la grève définies dans un préavis régulier, d'organiser un plan de transport et d'information des usagers ne constitue pas un abus du droit de grève caractérisant un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé les articles précités (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2549ETL).

newsid:448345

Conflit collectif

[Brèves] Obligation d'informer l'employeur des revendications professionnelles collectives au moment de l'arrêt de travail en cas d'exercice du droit de grève

Réf. : Cass. soc., 30 juin 2015, n° 14-11.077, FS-P (N° Lexbase : A5369NMS)

Lecture: 1 min

N8346BUN

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Le 11 Juillet 2015

L'exercice normal du droit de grève n'étant soumis à aucun préavis, sauf dispositions législatives le prévoyant, il nécessite seulement l'existence de revendications professionnelles collectives dont l'employeur doit avoir connaissance au moment de l'arrêt de travail, peu important les modalités de cette information. Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 30 juin 2015 (Cass. soc., 30 juin 2015, n° 14-11.077, FS-P N° Lexbase : A5369NMS).
En l'espèce, M. X a été engagé le 1er janvier 1987 par la société Z en qualité d'agent d'entretien pour occuper en dernier lieu les fonctions d'ouvrier paysagiste. Le 22 décembre 2006, il a cessé le travail avec sept autres salariés, bloquant l'accès à l'entreprise et revendiquant le paiement d'un acompte sur le treizième mois. Après avoir heurté avec son véhicule le directeur et le gérant de l'entreprise qui tentaient d'entrer dans l'entreprise, le salarié a été licencié pour faute grave. Ce dernier a alors saisi la juridiction prud'homale en annulation de son licenciement. La cour d'appel l'a débouté de sa demande et retenu le licenciement pour faute grave. Il forme alors un pourvoi en cassation.
En vain. En énonçant le principe susvisé, la Haute juridiction rejette le pourvoi de ce dernier. La cour d'appel, ayant constaté que l'employeur avait été tenu dans l'ignorance des motifs de l'arrêt de travail, à savoir le versement d'un acompte sur le treizième mois, et n'avait été informé de cette revendication qu'en demandant aux intéressés les raisons du blocage des portes de l'entreprise, en a déduit à bon droit que le salarié initiateur de ces faits ne pouvait se prévaloir de la protection attachée au droit de grève (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2484ET8).

newsid:448346

Famille et personnes

[Jurisprudence] La Cour de cassation et la GPA étrangère : l'ignorance, après l'hostilité

Réf. : Ass. plén., 3 juillet 2015, deux arrêts, n° 14-21.323 (N° Lexbase : A4482NMX) et n° 15-50.002 (N° Lexbase : A4483NMY), P+B+R+I

Lecture: 10 min

N8350BUS

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par Adeline Gouttenoire, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, Directrice de l'Institut des Mineurs de Bordeaux

Le 10 Juillet 2015

Nouvel épisode de la saga relative à l'effet en France des conventions de gestation pour autrui exécutées à l'étranger, les arrêts rendus le 3 juillet 2015 par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation (Ass. plén., 3 juillet 2015, deux arrêts, n° 14-21.323 et n° 15-50.002, P+B+R+I) étaient très attendus après la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme l'année dernière dans les affaires "Mennesson" (1) et "Labassée" (2). Malheureusement, ces deux arrêts ne constituent pas le final de la série... En effet, si ces deux décisions, l'une de rejet et l'autre de cassation, constituent sans nul doute un revirement de jurisprudence bienvenu, leur portée dépend étroitement de leur contexte et ne correspondent qu'à une hypothèse spécifique de gestation pour autrui comme l'explique très clairement le communiqué de presse de la Cour de cassation publié avec les arrêts, sur le site de la Haute juridiction (3).

I - Une hypothèse spécifique

Parents biologiques. Dans les deux affaires soumises à la Cour de cassation, l'existence d'une convention de gestation pour autrui conclue entre un Français et une mère porteuse russe, exécutée en Russie, était établie malgré certaines dénégations des hommes en cause. L'acte de naissance russe mentionnait comme père, l'homme qui avait eu recours à une mère porteuse et qui se présentait comme son géniteur, et en qualité de mère, cette même mère porteuse qui avait accouché de l'enfant et qui l'avait ensuite abandonné. La question de la filiation des parents d'intention n'était donc pas posée. Il n'y avait, en effet, aucune mère d'intention dans aucune des deux affaires puisque la convention avait été initiée par un homme célibataire (ou en couple homosexuel mais qui n'en faisait pas état), la question de la filiation d'une femme qui n'aurait pas accouché de l'enfant n'ayant pas lieu d'être. Pour ce qui concerne le père, l'homme mentionné dans l'acte était à la fois le commanditaire de l'enfant et, a priori, son père biologique et c'est en cette dernière qualité qu'il était mentionné dans l'acte de naissance.

Transcription d'un acte étranger. En outre, la demande portait précisément sur la transcription directe d'un acte de naissance étranger sur les registres d'état civil français et non sur la reconnaissance d'un jugement, encore moins sur l'établissement au fond d'un lien de filiation, même si, dans les deux espèces, le père avait également procédé à une reconnaissance de l'enfant en France. En effet, les autorités russes n'avaient pas fait jouer à la convention de mère porteuse d'effets particuliers sur la filiation (ces conventions sont autorisées dans ce pays par une loi fédérale mais à certaines conditions) laquelle avait été établie à l'égard des deux parents de l'enfant comme si celui-ci n'était pas issu d'une convention de gestation pour autrui, et il n'est même pas certain qu'elle ait été invoquée au moment de l'établissement de l'acte de filiation.

Cette hypothèse spécifique avait déjà fait l'objet d'une décision minoritaire de la cour d'appel de Rennes du 21 février 2012 (4) mais elle était, également, celle des arrêts rendus par la Cour de cassation le 13 septembre 2013 (5) et le 19 mars 2014 (6). Dans ces dernières espèces, il s'agissait, en effet, d'un homme qui avait conçu un enfant avec une femme indienne, dans le cadre d'une convention de gestation pour autrui qui n'apparaissait en aucune façon dans l'acte de naissance. Après sa naissance, l'enfant, reconnu par ses deux parents (y compris donc la mère porteuse), avait été abandonné par sa mère au profit de son père qui l'avait ramené en France.

Absence d'atteinte à l'indisponibilité de l'état des personnes. Dans les affaires de 2013 et 2014, comme dans celles de 2015, et, contrairement aux hypothèses ayant donné lieu aux arrêts de 2011 (7) qui concernaient des conventions de gestation pour autrui entre une mère porteuse et un couple, il n'y avait pas d'atteinte à l'indisponibilité de l'état des personnes puisque les actes mentionnaient comme parents de l'enfant la femme qui l'avait mis au monde et celui qui en était -ou prétendait en être- le géniteur, les protagonistes des deux affaires ayant fait comme si l'enfant était né d'une relation entre la mère porteuse et le père de l'enfant. Même si en Russie, la convention de gestation pour autrui est autorisée à certaines conditions, qui n'étaient d'ailleurs peut-être pas satisfaites par les hommes en cause, les autorités russes n'avaient pas, en l'espèce, organisé les effets de la convention de GPA comme avaient pu le faire les autorités californiennes dans l'affaire "Mennesson" par exemple.

II - Un revirement limité

Solution de 2013. Dans les arrêts de 2013 et 2014, la Cour de cassation avait affirmé que les actes de naissance des enfants ne pouvaient être transcrits sur les registres de l'état civil français, dès lors que les éléments réunis par le ministère public caractérisaient l'existence d'un processus frauduleux comportant une convention de gestation. Au regard de cette affirmation, les arrêts du 3 juillet 2015 constituent bien un revirement de jurisprudence puisqu'ils affirment la solution inverse.

Fondements. Dans les deux arrêts de 2015, la Cour de cassation se fonde sur l'article 47 du Code civil (N° Lexbase : L1215HWW) interprété à la lumière de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L4798AQR), le tout éclairé -même si la Cour de cassation ne le dit pas- par les arrêts "Mennesson" et "Labassée" du 26 juin 2014. L'article 47 du Code civil, qui est repris in extenso par la Cour de cassation dans le visa de l'arrêt de cassation, dispose que "l'acte de naissance concernant un Français, dressé en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays, est transcrit sur les registres de l'état civil sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondant pas à la réalité".

Cassation pour violation de la loi. Dans le premier arrêt (n° 14-21.323), la Haute juridiction casse pour violation de la loi l'arrêt d'appel qui avait, suivant en cela la jurisprudence de la Cour de cassation et particulièrement les arrêts de 2013 et 2014, refusé la transcription de l'acte de naissance de l'enfant sur les registres d'état civil français, au motif "qu'il existe un faisceau de preuves de nature à caractériser l'existence d'un processus frauduleux comportant une convention de gestation pour le compte d'autrui conclue entre le père et la mère mentionnés dans l'acte". Selon la Cour de cassation, "en statuant ainsi, alors qu'elle n'avait pas constaté que l'acte était irrégulier, falsifié ou que les faits qui y étaient déclarés ne correspondaient pas à la réalité, la cour d'appel a violé les textes susvisés".

Rejet du pourvoi. Pour rejeter le pourvoi dans le second arrêt (n° 15-50.002), la Cour de cassation affirme que la cour d'appel de Rennes "ayant constaté que l'acte de naissance n'était ni irrégulier, ni falsifié et que les faits qui y étaient déclarés correspondaient à la réalité, en a déduit à bon droit que la convention de gestation pour autrui conclue [entre le père et la mère indiqués par ledit acte] ne faisait pas obstacle à la transcription de l'acte de naissance".

Rejet de la fraude. On ne saurait dire plus clairement que, désormais, et contrairement à ce que la Cour de cassation avait affirmé en 2013 et 2014, le seul fait que l'enfant ait été conçu dans le cadre d'une gestation pour autrui ne suffit pas à empêcher la transcription sur les registres d'état civil français de son acte de naissance étranger. Autrement dit, la fraude constituée par le recours à la gestation pour autrui n'est plus un obstacle à la reconnaissance en France de l'acte de naissance étranger. La Cour de cassation écarte désormais la fraude, argument au demeurant peu convaincant, du débat relatif à l'effet, en France, des conventions de gestation pour autrui exécutée à l'étranger.

Les attendus des arrêts de 2015 ne sont pas sans rappeler celui des avis du 22 septembre 2014 (8) dans lesquels la Cour de cassation a affirmé que le recours à l'assistance médicale à la procréation à l'étranger dans des conditions différentes de celles exigées par la loi française ne fait pas obstacle à l'adoption par l'épouse de la mère de l'enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l'adoption sont réunies et qu'elle est conforme à l'intérêt de l'enfant. Ainsi, les conditions de la conception assistée de l'enfant sont, désormais, en elles-mêmes indifférentes à la reconnaissance de sa filiation, du moins dès lors que l'acte en lui-même ne les mentionne pas d'une façon ou d'une autre.

Analyse formelle de la validité de l'acte étranger. Pour fonder son revirement, la Cour de cassation se réfugie, de manière inédite, pour elle dans le contexte de la GPA et comme l'avait fait avant elle la cour d'appel de Rennes en 2012 (cf. supra), dans l'analyse formelle de l'acte étranger dont la transcription était sollicitée sur le fondement de l'article 47 du Code civil, et constate que la régularité de l'acte n'était pas contestée au regard des exigences de ce texte. En effet, l'acte en lui même ne faisait pas état de la convention et traduisait la réalité de la filiation de l'enfant, tant du côté paternel que maternel. Alors, qu'avant 2015, la Cour de cassation considérait que l'existence d'une convention de mère porteuse empêchait toute transcription d'un acte de naissance d'un enfant conçu par convention de gestation pour autrui, elle revient donc sur cette position dans les arrêts du 3 juillet, à la suite de la condamnation de la France par la Cour européenne.

Interprétation de l'article 47 du Code civil à la lumière de l'article 8 de la Cour européenne des droits de l'Homme. Le revirement de la Cour de cassation a, en effet, bien été inspiré par la condamnation européenne des arrêts "Mennesson" et "Labassée", comme en témoigne le visa du premier arrêt citant "ensemble" les articles 47 du Code civil et l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme. Selon la Haute juridiction, ces arrêts européens imposent de reconnaître l'état civil d'un enfant constaté dans un acte régulier au regard des règles étrangères. Il s'agit en réalité d'une interprétation a minima des arrêts européens, sur le fondement d'une règle technique.

Absence de motivation au regard des droits fondamentaux. On ne peut que remarquer la sécheresse de l'arrêt, fondé sur une disposition technique, dans un domaine où le débat était jusque là fortement marqué par le recours aux droits fondamentaux -y compris dans les arrêts antérieurs de la Cour de cassation- et ne contenant aucune motivation. Sans aucun doute, intentionnellement, la Cour de cassation a privé sa décision de toute référence aux droits fondamentaux, à l'exception du visa de l'article 8 de la CESDH dans l'un des arrêts. Alors que la cour d'appel de Rennes, contre l'arrêt de laquelle le pourvoi a été rejeté, s'était fondée sur la primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant, la Cour de cassation ne dit mot de ce principe et ne vise pas non plus le droit à l'identité de l'enfant, comme l'ont fait la Cour européenne dans les arrêts "Mennesson" et "Labassée" et le Conseil d'Etat dans l'arrêt du 12 septembre 2014 (9) validant la circulaire visant à accorder la nationalité aux enfants nés de GPA. Cette absence de motivation s'inscrit certainement dans la volonté de la Cour de cassation de limiter la portée de son revirement.

Portée limitée du revirement. La Cour de cassation ne répond qu'à la question qui lui est posée, c'est-à-dire, comme le précise le communiqué de presse, celle de savoir si "le refus de transcription sur les actes de l'état civil français de l'acte de naissance d'un enfant dont au moins l'un des parents est français, régulièrement établi dans un pays étranger, peut-il être motivé par le seul fait que la naissance est l'aboutissement d'un processus comportant une convention de GPA ?". La Cour de cassation répond par la négative à cette question mais seulement dans l'hypothèse qui lui était soumise, dans laquelle les parents mentionnés étaient présentés comme les père et mère biologiques de l'enfant. Surtout, dans les deux affaires qui ont donné lieu aux arrêts commentés, il n'était porté aucune atteinte aux principes fondamentaux du droit des personnes tels que l'indisponibilité du corps humain ou de l'état des personnes. La réponse que ferait la Cour de cassation si tel avait été le cas, et, notamment, si l'acte de naissance avait indiqué une mère d'intention comme mère juridique de l'enfant, ne peut donc être déduite des arrêts de 2015. Le communiqué de presse précise, d'ailleurs, que "les espèces soumises à la Cour de cassation ne soulevaient pas la question de la transcription de la filiation établie à l'étranger à l'égard de parents d'intention : la Cour ne s'est donc pas prononcée sur ce cas de figure".

Quant aux conséquences que pourraient avoir le fait que le père mentionné sur l'acte ne soit pas, en réalité, le père biologique de l'enfant, elles ne peuvent pas non plus être mesurées au regard des arrêts du 3 juillet 2015. Il est certain que, contrairement à ce qu'avait proposé le procureur général Jean-Claude Marin dans ces nouveaux arrêts, la Cour de cassation ne fait pas dépendre la transcription de l'acte de la preuve de la paternité biologique du père indiqué sur l'acte de naissance. Toutefois, on ne peut pas exclure que, dans une telle hypothèse, une action en contestation de paternité puisse être intentée par le ministère public, une fois la filiation transcrite sur les registres d'état civil français. Autrement dit, ces arrêts ne sont qu'une réponse partielle à un problème aux multiples facettes qu'il conviendrait peut être, enfin, de résoudre de manière globale par une intervention législative !

Il n'en reste pas moins qu'ils constituent une avancée pour certains enfants -ce dont on ne manquera pas de se féliciter- sans pour autant, heureusement, que la prohibition de la gestation pour autrui en France ne soit remise en cause comme en témoigne d'ailleurs la condamnation par le tribunal correctionnel de Bordeaux le 1er juillet 2015, d'un couple homosexuel ayant eu recours à une mère porteuse ayant accouché en France (10).


(1) CEDH, 26 juin 2014, Req. 65192/11 (N° Lexbase : A8551MR7).
(2) CEDH, 26 juin 2014, Req. 65941/11 (N° Lexbase : A8552MR8).
(3) Communiqué relatif à l'inscription à l'état civil d'enfants nés à l'étranger d'une GPA, 3 juillet 2015, cf. Le site de la Cour de cassation.
(4) CA Rennes, 21 février 2012, n° 11/02758 (N° Lexbase : A1524IDS), AJ. Famille, 2012, p. 226, obs. C. Siffrein-Blanc.
(5) Cass. civ. 1, 13 septembre 2013, n° 12-18.315 (N° Lexbase : A1669KLE), et n° 12-30.138 (N° Lexbase : A1633KL3), FP-P+B+I+R ; RJPF, 2013, n°11, p. 6, obs. M.-C. Le Boursicot ; D., 2014, p. 1171, obs. F. Granet-Lambrechts.
(6) Cass. civ. 1, 19 mars 2014, n° 13-50.005, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0784MHI), RJPF, 2014, n°5, obs. I. Corpart ; D., 2014, p. 905, obs. H. Fulchiron et C. Bidaud-Garon.
(7) Cass. civ. 1, 6 avril 2011, trois arrêts, n° 09-66.486 (N° Lexbase : A5705HMA), n° 10-19.053 (N° Lexbase : A5707HMC) et n° 09-17.130 (N° Lexbase : A5704HM9), FP-P+B+R.
(8) Cass. avis, 22 septembre 2014, n° 15010 (N° Lexbase : A9175MWQ) et n° 15011 (N° Lexbase : A9174MWP), v. nos obs., Le recours à la PMA à l'étranger n'est pas un obstacle à l'adoption d'un enfant par la concubine de sa mère, Lexbase Hebdo du 2 octobre 2014 n° 585 - édition privée (N° Lexbase : N3933BU9).
(9) CE 2° et 7° s-s-r., 12 décembre 2014, n° 367324 (N° Lexbase : A3276M7H), JCP éd. G, 2015, p. 144, obs. A. Gouttenoire.
(10) Cette décision fera l'objet d'un commentaire dans la revue Lexbase Hebdo du 15 juillet 2015 n° 621 - édition privée.

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Famille et personnes

[Jurisprudence] La Cour de cassation et la GPA étrangère : l'ignorance, après l'hostilité

Réf. : Ass. plén., 3 juillet 2015, deux arrêts, n° 14-21.323 (N° Lexbase : A4482NMX) et n° 15-50.002 (N° Lexbase : A4483NMY), P+B+R+I

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par Adeline Gouttenoire, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, Directrice de l'Institut des Mineurs de Bordeaux

Le 10 Juillet 2015

Nouvel épisode de la saga relative à l'effet en France des conventions de gestation pour autrui exécutées à l'étranger, les arrêts rendus le 3 juillet 2015 par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation (Ass. plén., 3 juillet 2015, deux arrêts, n° 14-21.323 et n° 15-50.002, P+B+R+I) étaient très attendus après la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme l'année dernière dans les affaires "Mennesson" (1) et "Labassée" (2). Malheureusement, ces deux arrêts ne constituent pas le final de la série... En effet, si ces deux décisions, l'une de rejet et l'autre de cassation, constituent sans nul doute un revirement de jurisprudence bienvenu, leur portée dépend étroitement de leur contexte et ne correspondent qu'à une hypothèse spécifique de gestation pour autrui comme l'explique très clairement le communiqué de presse de la Cour de cassation publié avec les arrêts, sur le site de la Haute juridiction (3).

I - Une hypothèse spécifique

Parents biologiques. Dans les deux affaires soumises à la Cour de cassation, l'existence d'une convention de gestation pour autrui conclue entre un Français et une mère porteuse russe, exécutée en Russie, était établie malgré certaines dénégations des hommes en cause. L'acte de naissance russe mentionnait comme père, l'homme qui avait eu recours à une mère porteuse et qui se présentait comme son géniteur, et en qualité de mère, cette même mère porteuse qui avait accouché de l'enfant et qui l'avait ensuite abandonné. La question de la filiation des parents d'intention n'était donc pas posée. Il n'y avait, en effet, aucune mère d'intention dans aucune des deux affaires puisque la convention avait été initiée par un homme célibataire (ou en couple homosexuel mais qui n'en faisait pas état), la question de la filiation d'une femme qui n'aurait pas accouché de l'enfant n'ayant pas lieu d'être. Pour ce qui concerne le père, l'homme mentionné dans l'acte était à la fois le commanditaire de l'enfant et, a priori, son père biologique et c'est en cette dernière qualité qu'il était mentionné dans l'acte de naissance.

Transcription d'un acte étranger. En outre, la demande portait précisément sur la transcription directe d'un acte de naissance étranger sur les registres d'état civil français et non sur la reconnaissance d'un jugement, encore moins sur l'établissement au fond d'un lien de filiation, même si, dans les deux espèces, le père avait également procédé à une reconnaissance de l'enfant en France. En effet, les autorités russes n'avaient pas fait jouer à la convention de mère porteuse d'effets particuliers sur la filiation (ces conventions sont autorisées dans ce pays par une loi fédérale mais à certaines conditions) laquelle avait été établie à l'égard des deux parents de l'enfant comme si celui-ci n'était pas issu d'une convention de gestation pour autrui, et il n'est même pas certain qu'elle ait été invoquée au moment de l'établissement de l'acte de filiation.

Cette hypothèse spécifique avait déjà fait l'objet d'une décision minoritaire de la cour d'appel de Rennes du 21 février 2012 (4) mais elle était, également, celle des arrêts rendus par la Cour de cassation le 13 septembre 2013 (5) et le 19 mars 2014 (6). Dans ces dernières espèces, il s'agissait, en effet, d'un homme qui avait conçu un enfant avec une femme indienne, dans le cadre d'une convention de gestation pour autrui qui n'apparaissait en aucune façon dans l'acte de naissance. Après sa naissance, l'enfant, reconnu par ses deux parents (y compris donc la mère porteuse), avait été abandonné par sa mère au profit de son père qui l'avait ramené en France.

Absence d'atteinte à l'indisponibilité de l'état des personnes. Dans les affaires de 2013 et 2014, comme dans celles de 2015, et, contrairement aux hypothèses ayant donné lieu aux arrêts de 2011 (7) qui concernaient des conventions de gestation pour autrui entre une mère porteuse et un couple, il n'y avait pas d'atteinte à l'indisponibilité de l'état des personnes puisque les actes mentionnaient comme parents de l'enfant la femme qui l'avait mis au monde et celui qui en était -ou prétendait en être- le géniteur, les protagonistes des deux affaires ayant fait comme si l'enfant était né d'une relation entre la mère porteuse et le père de l'enfant. Même si en Russie, la convention de gestation pour autrui est autorisée à certaines conditions, qui n'étaient d'ailleurs peut-être pas satisfaites par les hommes en cause, les autorités russes n'avaient pas, en l'espèce, organisé les effets de la convention de GPA comme avaient pu le faire les autorités californiennes dans l'affaire "Mennesson" par exemple.

II - Un revirement limité

Solution de 2013. Dans les arrêts de 2013 et 2014, la Cour de cassation avait affirmé que les actes de naissance des enfants ne pouvaient être transcrits sur les registres de l'état civil français, dès lors que les éléments réunis par le ministère public caractérisaient l'existence d'un processus frauduleux comportant une convention de gestation. Au regard de cette affirmation, les arrêts du 3 juillet 2015 constituent bien un revirement de jurisprudence puisqu'ils affirment la solution inverse.

Fondements. Dans les deux arrêts de 2015, la Cour de cassation se fonde sur l'article 47 du Code civil (N° Lexbase : L1215HWW) interprété à la lumière de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L4798AQR), le tout éclairé -même si la Cour de cassation ne le dit pas- par les arrêts "Mennesson" et "Labassée" du 26 juin 2014. L'article 47 du Code civil, qui est repris in extenso par la Cour de cassation dans le visa de l'arrêt de cassation, dispose que "l'acte de naissance concernant un Français, dressé en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays, est transcrit sur les registres de l'état civil sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondant pas à la réalité".

Cassation pour violation de la loi. Dans le premier arrêt (n° 14-21.323), la Haute juridiction casse pour violation de la loi l'arrêt d'appel qui avait, suivant en cela la jurisprudence de la Cour de cassation et particulièrement les arrêts de 2013 et 2014, refusé la transcription de l'acte de naissance de l'enfant sur les registres d'état civil français, au motif "qu'il existe un faisceau de preuves de nature à caractériser l'existence d'un processus frauduleux comportant une convention de gestation pour le compte d'autrui conclue entre le père et la mère mentionnés dans l'acte". Selon la Cour de cassation, "en statuant ainsi, alors qu'elle n'avait pas constaté que l'acte était irrégulier, falsifié ou que les faits qui y étaient déclarés ne correspondaient pas à la réalité, la cour d'appel a violé les textes susvisés".

Rejet du pourvoi. Pour rejeter le pourvoi dans le second arrêt (n° 15-50.002), la Cour de cassation affirme que la cour d'appel de Rennes "ayant constaté que l'acte de naissance n'était ni irrégulier, ni falsifié et que les faits qui y étaient déclarés correspondaient à la réalité, en a déduit à bon droit que la convention de gestation pour autrui conclue [entre le père et la mère indiqués par ledit acte] ne faisait pas obstacle à la transcription de l'acte de naissance".

Rejet de la fraude. On ne saurait dire plus clairement que, désormais, et contrairement à ce que la Cour de cassation avait affirmé en 2013 et 2014, le seul fait que l'enfant ait été conçu dans le cadre d'une gestation pour autrui ne suffit pas à empêcher la transcription sur les registres d'état civil français de son acte de naissance étranger. Autrement dit, la fraude constituée par le recours à la gestation pour autrui n'est plus un obstacle à la reconnaissance en France de l'acte de naissance étranger. La Cour de cassation écarte désormais la fraude, argument au demeurant peu convaincant, du débat relatif à l'effet, en France, des conventions de gestation pour autrui exécutée à l'étranger.

Les attendus des arrêts de 2015 ne sont pas sans rappeler celui des avis du 22 septembre 2014 (8) dans lesquels la Cour de cassation a affirmé que le recours à l'assistance médicale à la procréation à l'étranger dans des conditions différentes de celles exigées par la loi française ne fait pas obstacle à l'adoption par l'épouse de la mère de l'enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l'adoption sont réunies et qu'elle est conforme à l'intérêt de l'enfant. Ainsi, les conditions de la conception assistée de l'enfant sont, désormais, en elles-mêmes indifférentes à la reconnaissance de sa filiation, du moins dès lors que l'acte en lui-même ne les mentionne pas d'une façon ou d'une autre.

Analyse formelle de la validité de l'acte étranger. Pour fonder son revirement, la Cour de cassation se réfugie, de manière inédite, pour elle dans le contexte de la GPA et comme l'avait fait avant elle la cour d'appel de Rennes en 2012 (cf. supra), dans l'analyse formelle de l'acte étranger dont la transcription était sollicitée sur le fondement de l'article 47 du Code civil, et constate que la régularité de l'acte n'était pas contestée au regard des exigences de ce texte. En effet, l'acte en lui même ne faisait pas état de la convention et traduisait la réalité de la filiation de l'enfant, tant du côté paternel que maternel. Alors, qu'avant 2015, la Cour de cassation considérait que l'existence d'une convention de mère porteuse empêchait toute transcription d'un acte de naissance d'un enfant conçu par convention de gestation pour autrui, elle revient donc sur cette position dans les arrêts du 3 juillet, à la suite de la condamnation de la France par la Cour européenne.

Interprétation de l'article 47 du Code civil à la lumière de l'article 8 de la Cour européenne des droits de l'Homme. Le revirement de la Cour de cassation a, en effet, bien été inspiré par la condamnation européenne des arrêts "Mennesson" et "Labassée", comme en témoigne le visa du premier arrêt citant "ensemble" les articles 47 du Code civil et l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme. Selon la Haute juridiction, ces arrêts européens imposent de reconnaître l'état civil d'un enfant constaté dans un acte régulier au regard des règles étrangères. Il s'agit en réalité d'une interprétation a minima des arrêts européens, sur le fondement d'une règle technique.

Absence de motivation au regard des droits fondamentaux. On ne peut que remarquer la sécheresse de l'arrêt, fondé sur une disposition technique, dans un domaine où le débat était jusque là fortement marqué par le recours aux droits fondamentaux -y compris dans les arrêts antérieurs de la Cour de cassation- et ne contenant aucune motivation. Sans aucun doute, intentionnellement, la Cour de cassation a privé sa décision de toute référence aux droits fondamentaux, à l'exception du visa de l'article 8 de la CESDH dans l'un des arrêts. Alors que la cour d'appel de Rennes, contre l'arrêt de laquelle le pourvoi a été rejeté, s'était fondée sur la primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant, la Cour de cassation ne dit mot de ce principe et ne vise pas non plus le droit à l'identité de l'enfant, comme l'ont fait la Cour européenne dans les arrêts "Mennesson" et "Labassée" et le Conseil d'Etat dans l'arrêt du 12 septembre 2014 (9) validant la circulaire visant à accorder la nationalité aux enfants nés de GPA. Cette absence de motivation s'inscrit certainement dans la volonté de la Cour de cassation de limiter la portée de son revirement.

Portée limitée du revirement. La Cour de cassation ne répond qu'à la question qui lui est posée, c'est-à-dire, comme le précise le communiqué de presse, celle de savoir si "le refus de transcription sur les actes de l'état civil français de l'acte de naissance d'un enfant dont au moins l'un des parents est français, régulièrement établi dans un pays étranger, peut-il être motivé par le seul fait que la naissance est l'aboutissement d'un processus comportant une convention de GPA ?". La Cour de cassation répond par la négative à cette question mais seulement dans l'hypothèse qui lui était soumise, dans laquelle les parents mentionnés étaient présentés comme les père et mère biologiques de l'enfant. Surtout, dans les deux affaires qui ont donné lieu aux arrêts commentés, il n'était porté aucune atteinte aux principes fondamentaux du droit des personnes tels que l'indisponibilité du corps humain ou de l'état des personnes. La réponse que ferait la Cour de cassation si tel avait été le cas, et, notamment, si l'acte de naissance avait indiqué une mère d'intention comme mère juridique de l'enfant, ne peut donc être déduite des arrêts de 2015. Le communiqué de presse précise, d'ailleurs, que "les espèces soumises à la Cour de cassation ne soulevaient pas la question de la transcription de la filiation établie à l'étranger à l'égard de parents d'intention : la Cour ne s'est donc pas prononcée sur ce cas de figure".

Quant aux conséquences que pourraient avoir le fait que le père mentionné sur l'acte ne soit pas, en réalité, le père biologique de l'enfant, elles ne peuvent pas non plus être mesurées au regard des arrêts du 3 juillet 2015. Il est certain que, contrairement à ce qu'avait proposé le procureur général Jean-Claude Marin dans ces nouveaux arrêts, la Cour de cassation ne fait pas dépendre la transcription de l'acte de la preuve de la paternité biologique du père indiqué sur l'acte de naissance. Toutefois, on ne peut pas exclure que, dans une telle hypothèse, une action en contestation de paternité puisse être intentée par le ministère public, une fois la filiation transcrite sur les registres d'état civil français. Autrement dit, ces arrêts ne sont qu'une réponse partielle à un problème aux multiples facettes qu'il conviendrait peut être, enfin, de résoudre de manière globale par une intervention législative !

Il n'en reste pas moins qu'ils constituent une avancée pour certains enfants -ce dont on ne manquera pas de se féliciter- sans pour autant, heureusement, que la prohibition de la gestation pour autrui en France ne soit remise en cause comme en témoigne d'ailleurs la condamnation par le tribunal correctionnel de Bordeaux le 1er juillet 2015, d'un couple homosexuel ayant eu recours à une mère porteuse ayant accouché en France (10).


(1) CEDH, 26 juin 2014, Req. 65192/11 (N° Lexbase : A8551MR7).
(2) CEDH, 26 juin 2014, Req. 65941/11 (N° Lexbase : A8552MR8).
(3) Communiqué relatif à l'inscription à l'état civil d'enfants nés à l'étranger d'une GPA, 3 juillet 2015, cf. Le site de la Cour de cassation.
(4) CA Rennes, 21 février 2012, n° 11/02758 (N° Lexbase : A1524IDS), AJ. Famille, 2012, p. 226, obs. C. Siffrein-Blanc.
(5) Cass. civ. 1, 13 septembre 2013, n° 12-18.315 (N° Lexbase : A1669KLE), et n° 12-30.138 (N° Lexbase : A1633KL3), FP-P+B+I+R ; RJPF, 2013, n°11, p. 6, obs. M.-C. Le Boursicot ; D., 2014, p. 1171, obs. F. Granet-Lambrechts.
(6) Cass. civ. 1, 19 mars 2014, n° 13-50.005, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0784MHI), RJPF, 2014, n°5, obs. I. Corpart ; D., 2014, p. 905, obs. H. Fulchiron et C. Bidaud-Garon.
(7) Cass. civ. 1, 6 avril 2011, trois arrêts, n° 09-66.486 (N° Lexbase : A5705HMA), n° 10-19.053 (N° Lexbase : A5707HMC) et n° 09-17.130 (N° Lexbase : A5704HM9), FP-P+B+R.
(8) Cass. avis, 22 septembre 2014, n° 15010 (N° Lexbase : A9175MWQ) et n° 15011 (N° Lexbase : A9174MWP), v. nos obs., Le recours à la PMA à l'étranger n'est pas un obstacle à l'adoption d'un enfant par la concubine de sa mère, Lexbase Hebdo du 2 octobre 2014 n° 585 - édition privée (N° Lexbase : N3933BU9).
(9) CE 2° et 7° s-s-r., 12 décembre 2014, n° 367324 (N° Lexbase : A3276M7H), JCP éd. G, 2015, p. 144, obs. A. Gouttenoire.
(10) Cette décision fera l'objet d'un commentaire dans la revue Lexbase Hebdo du 15 juillet 2015 n° 621 - édition privée.

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Fiscalité des entreprises

[Jurisprudence] Application aux provisions pour pertes ou charges de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit

Réf. : CE 9° et 10° s-s-r., 11 mai 2015, n° 370533, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A8890NHQ)

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par Vincent Dussart, Professeur de droit public à l'Université Toulouse 1 Capitole et Responsable du Master 2 droit fiscal de l'entreprise

Le 09 Juillet 2015

Une entreprise ne peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle qu'à la condition, notamment, que ces pertes ou charges apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice. Dès lors, l'inscription non justifiée en provision d'une somme pendant plusieurs exercices successifs, même si les montants sont identiques, constitue la répétition d'une erreur. Par suite, cette erreur, même lorsqu'elle a été commise pour la première fois au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, ne peut être corrigée dans le bilan d'ouverture du premier de ces exercices. Telle est la solution dégagée par le Cosneil d'Etat dans un arrêt rendu le 11 mai 2015 (CE 9° et 10° s-s-r., 11 mai 2015, n° 370533, mentionné aux tables du recueil Lebon). Au cas présent, à la suite d'une vérification de comptabilité, une SCP a fait l'objet de redressements notifiés au titre de l'exercice 2002. Ces rectifications portaient notamment sur une provision pour créance douteuse (1) passée par cette société sur une dette due par sa filiale, une SARL, d'un montant de 215 082 euros. Les deux sociétés étaient gérées par le même dirigeant. La SCP a fait valoir, devant le juge du fond (TA Melun, 17 novembre 2011, n° 0705997 N° Lexbase : A8367KIQ) que la provision en litige avait été initialement constatée le 31 décembre 1994. Elle détenait, depuis l'exercice clos en 1992 une créance sur la SARL, dont le solde s'élevait alors à 267 970 euros.

Au titre de l'exercice clos en 1995, elle a, de plus, inscrit en comptabilité une dotation complémentaire d'un montant de 30 490 euros, en vue de contribuer à l'apurement du passif de sa filiale. La SCP a voulu justifier le caractère déductible des provisions en cause à la clôture des exercices en 1994 et 1995 en arguant des difficultés financières rencontrées par la SARL. Pour mettre en oeuvre cette justification la société requérante s'est fondée sur la circonstance que la SARL n'avait pu effectuer aucun remboursement de sa créance au cours de l'exercice clos en 1994. Elle a également soutenu que la totalité de la créance litigieuse n'était pas recouvrable à la clôture des exercices en 1994 et 1995, en produisant un protocole d'accord de règlement amiable, conclu le 29 mars 1995, entre des établissements bancaires créanciers et différentes sociétés du groupe, dont la SARL, en vue de désintéresser les créanciers par l'attribution de terrains, et une note sur le groupe établie le 25 février 1997 par le mandataire ad hoc nommé le 31 mars 1995 par le président du tribunal de commerce de Paris pour assister le gérant dans le cadre de la procédure de règlement amiable de son groupe.

Ces justifications de provisions n'ont pas convaincu les juges du fond (ni le juge de cassation d'ailleurs). La provision a donc, comme le soutenait l'administration, été jugée injustifiée. Partant, la SCP se trouvait être en situation délicate.

Le Conseil d'Etat avait donc à juger une question touchant à la complexe question de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit mais donc aussi de ce que certains ont pu appeler le "droit à l'oubli". L'article 38-2 du CGI (N° Lexbase : L3125I7U) dispose, en effet, que le bénéfice imposable est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués par l'exploitant ou par les associés au cours de l'exercice.

Dans un arrêt du 15 juin 1966 (2), le Conseil d'Etat a consacré le principe dit "de la correction symétrique des bilans" consistant à corriger de manière symétrique le bilan d'ouverture d'un exercice des erreurs entachant le bilan de clôture de l'exercice précédent en cas d'erreurs affectant l'actif net du bilan.

Les juges du Palais Royal ont, dans un arrêt de 1973 (3), limité cependant les effets de cette règle : le bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit doit être considéré comme intangible. Ainsi est née la règle dite de "l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit" (4). Cependant dans une décision de 2004 (5), le Conseil d'Etat a modifié sa jurisprudence en considérant qu'il convenait d'abandonner cette règle et que les omissions ou erreurs qui se retrouvent dans les écritures de bilan d'exercice en exercice devaient être corrigées de manière symétrique de bilan en bilan, dès lors qu'elles ne revêtent pas pour le contribuable qui les invoque un caractère délibéré, et alors même que tout ou partie de ces exercices seraient couverts par les règles de prescription prévues aux articles L. 168 (N° Lexbase : L8487AE3) et L. 169 (N° Lexbase : L9777I3I) du LPF. Cependant, le législateur est intervenu par la loi de finances rectificative pour 2004 (article 43) (6) afin de faire échec à ce revirement de jurisprudence. Il a donc rétabli, sous certaines conditions, le principe d'intangibilité du bilan d'ouverture. Pour les impositions établies avant le 1er janvier 2005, l'article 43-IV a maintenu, au seul profit de l'Etat et à l'exclusion du contribuable, le bénéfice des conséquences de la jurisprudence du Conseil d'Etat. Le Conseil constitutionnel, saisi d'une QPC sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du paragraphe IV de l'article 43 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, l'a censuré (7).

La règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit est inscrite désormais à l'article 38-4 bis du CGI. La rédaction de cet article était légèrement différente au moment du jugement au fond de l'affaire.

I - La limitation du "droit à l'oubli" pour des provisions injustifiées

L'article 38-4 bis disposait dans sa rédaction applicable aux faits que "pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du LPF ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci". Le deuxième alinéa du même article indique que "les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit". Ce deuxième alinéa introduit donc une sorte de "droit à l'oubli". Par la décision du 11 mai 2015, le Conseil est donc venu limiter ce dernier en ce qui concerne les provisions injustifiées.

Normalement le deuxième alinéa aurait dû permettre à la SCP de rattacher à l'exercice 1994 ce qu'elle a présenté comme une erreur et, partant, éviter la rectification. En effet, il apparaît que l'erreur avait plus de sept ans. L'entreprise considérait ainsi que le droit à l'oubli pouvait jouer. La provision a été inscrite d'année en année pendant plusieurs exercices, dès lors le Conseil d'Etat a estimé qu'il s'agissait là de la répétition d'une même erreur et a donc estimé que l'alinéa 2 de l'article 38-4 bis du CGI ne pouvait jouer. L'erreur initiale ne peut être oubliée puisqu'elle a été répétée. Le contribuable ne pouvait alors demander la correction symétrique de cette erreur dans le bilan d'ouverture du 1er exercice non prescrit alors même que cette erreur a été réalisée initialement il y a plus de sept ans.

En l'espèce, il ressort des faits que l'entreprise ne pouvait justifier le caractère de la provision inscrite comme l'ont jugé au fond le tribunal administratif de Melun (8) et la cour administrative d'appel de Paris (9). Le Conseil d'Etat a donc validé l'interprétation de l'administration fiscale dans cette affaire.

II - Les conséquences sur le principe d'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit

La solution est clairement défavorable aux contribuables. En effet, si une erreur trouvant son origine dans un exercice prescrit est répétée plusieurs années malgré la prescription des exercices, elle pourra entraîner une rectification après le délai de sept ans prévu à l'article 38 bis 4 deuxième alinéa du CGI.

Dans un avis du 17 mai 2006 (10), le Conseil d'Etat avait déjà estimé qu'il résultait des dispositions de l'article 38 bis 4 que "le principe d'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit, tel que défini au premier alinéa, est applicable pour le calcul du bénéfice imposable, sauf si le contribuable est en droit de se prévaloir de l'une des exceptions prévues par les deuxième et troisième alinéas. Dans ce cas, il est possible de rectifier l'actif net du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit et de rattacher l'erreur ou l'omission commise à son exercice d'origine".

Le Conseil avait également interprété le deuxième alinéa de l'article 38 bis 4 : une erreur ou une omission affectant l'évaluation d'un élément quelconque du bilan d'un des exercices non prescrits peut, si elle a été commise au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, être corrigée de manière symétrique dans les bilans de clôture et d'ouverture des exercices non prescrits, y compris dans le bilan d'ouverture du premier d'entre eux.

Le Conseil avait alors précisé qu'"en revanche, la circonstance qu'une méthode erronée a été appliquée pour la première fois lors d'un exercice clos depuis plus de sept ans, puis de manière constante d'exercice en exercice, faussant à chaque fois l'évaluation d'un même poste du bilan (selon un principe identique, mais pour des montants variant en fonction de la composition effective de ce poste), ne suffit pas à justifier que la correction de la valeur de ce poste au cours d'un des exercices non prescrits puisse être effectuée également dans le bilan d'ouverture du premier de ces exercices ; il ne pourrait en aller ainsi que si et dans la mesure où les éléments individualisés du poste concerné dans ce bilan d'ouverture, parce qu'ils avaient également figuré dans le bilan de clôture d'un des exercices clos depuis plus de sept ans, ont affecté l'évaluation de ce bilan d'ouverture d'une erreur intervenue au cours d'un de ces exercices clos depuis plus de sept ans". Le Conseil d'Etat concrétise donc, dans l'arrêt du 11 mai 2015, les positions qu'il avait déjà émises dans son avis de 2006.

L'article 324-1 du plan comptable général dispose : "A la date de clôture, la valeur nette comptable des éléments de passif est comparée à leur valeur d'inventaire à la même date. Les provisions pour risques et charges sont revues à chaque date d'établissement des comptes et ajustées pour refléter la meilleure estimation à cette date". Le Conseil d'Etat en fait donc une application fiscale rigoureuse en obligeant les entreprises à réexaminer "fiscalement" leurs provisions à chaque clôture des comptes.

Les entreprises sont donc prévenues qu'elles ne pourront plus bénéficier du "droit à l'oubli" dans des conditions aussi favorables que jusqu'à présent. La garantie prévue au deuxième alinéa de l'article 38 4 bis du CGI ne pourra plus couvrir les provisions injustifiées même depuis plus de sept ans.


(1) Sur cette notion, voir P. Serlooten, Droit fiscal des affaires, 14ème éd., 2015, p. 185-186, n° 232.
(2) CE 8° s-s., 15 juin 1966, n° 62140, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0617B8D).
(3) CE 7°, 8° et 9° s-s-r., 31 octobre 1973, n° 88207, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A7634AYE).
(4) Pour un point sur cette question, voir M. Cozian et F. Deboissy, Précis de fiscalité de l'entreprise, 38ème éd., 2014, p. 909 et s.. Voir également, P. Serlooten, Droit fiscal des affaires, 14ème éd., 2015, p. 91 et s..
(5) CE Ass. plén., 7 juillet 2004, n° 230169, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0698DD9) concl. P. Collin, RJF, 10/2004, n°1019, note J.-L. Pierre, Revue de droit fiscal, 2005, n° 12, comm. n° 302.
(6) Loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004, de finances rectificative pour 2004 (N° Lexbase : L5204GUB).
(7) Cons. const., 10 décembre 2010, décision n° 2010-78 QPC (N° Lexbase : A7113GME) ; voir, A. Le Quinio, Le principe de garantie des droits s'impose également en matière fiscale, Commentaire de la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-78 QPC du 10 décembre 2010, Jurisprudence du Conseil constitutionnel, octobre 2010-mars 2011, Revue française de droit constitutionnel, juillet 2011, n° 87, p. 586 et s. ; E. Meier et G.-H. Boucheron, Rétroactivité fiscale : le deuxième rendez-vous aura été le bon, Revue de droit fiscal, 2010, n° 51-52, p. 2 et s. ; S. Austry, QPC et contentieux fiscal. Le jour se lèverait-il enfin aussi pour les contribuables ?, Feuillet rapide fiscal social, 14 janvier 2011, n° 2/11 ; C. de la Mardière, La réticence du Conseil constitutionnel à sanctionner les validations législatives, Constitutions, avril-juin 2011, n° 2011-2, p. 191 et s..
(8) TA Melun, 17 novembre 2011, n° 0705997.
(9) CAA Paris, 30 mai 2013, n° 12PA00344, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A7604MQP).
(10) CE 3° et 8° s-s-r., 17 mai 2006, n° 288511, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4954DQK).

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Impôts locaux

[Brèves] Taxe professionnelle : cas d'exonération dans le cadre d'une location d'un immeuble nu

Réf. : CE 9° s-s., 3 juillet 2015, n° 371094, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A5805NMX)

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N8337BUC

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Le 10 Juillet 2015

La location d'un immeuble nu par son propriétaire ne présente pas le caractère d'une activité professionnelle, permettant l'assujettissement à la taxe professionnelle, sauf dans l'hypothèse où, à travers cette location, le bailleur ne se borne pas à gérer son propre patrimoine mais poursuit, selon des modalités différentes, une exploitation commerciale antérieure ou participe à l'exploitation du locataire. Il en va de même lorsqu'un immeuble nu est donné en sous-location par une personne qui en dispose en vertu d'un contrat de crédit-bail. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 3 juillet 2015 (CE 9° s-s., 3 juillet 2015, n° 371094, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A5805NMX). En l'espèce, une société, propriétaire et, à titre accessoire, crédit-preneur, des immeubles exploités sous des enseignes de luxe, qu'elle donne à bail à ses filiales, a sollicité vainement la restitution des cotisations minimales de taxe professionnelle qu'elle a spontanément acquittées. Toutefois, les Hauts magistrats ont donné raison à la société requérante. En effet, selon ces derniers, pour juger que l'activité de location d'immeubles nus exercée par la société présentait un caractère professionnel au sens de du I de l'article 1447 du CGI (N° Lexbase : L0819IPZ), sur la circonstance que les moyens matériels et intellectuels mis en oeuvre étaient importants, la cour administrative d'appel de Versailles (CAA Versailles, 14 mai 2013, n° 12VE01807) a commis une erreur de droit .

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Marchés publics

[Jurisprudence] Une erreur dans la notification du délai de stand still rend recevable le référé contractuel

Réf. : CE 2° et 7° s-s-r., 17 juin 2015, n° 388457, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5442NL7)

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N8290BUL

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par Ana Gonzalez, Avocat au barreau de Paris, cabinet Alma Monceau

Le 09 Juillet 2015

Dans un arrêt rendu le 17 juin 2015, le Conseil d'Etat a retenu que les dispositions de l'article L. 551-14 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L1603IE4) n'ont pas pour effet de rendre irrecevable un référé contractuel introduit par un concurrent évincé qui avait antérieurement présenté un référé précontractuel alors qu'il était dans l'ignorance du rejet de son offre et de la signature du marché, par suite d'un manquement du pouvoir adjudicateur au respect des dispositions prévoyant une information des concurrents évincés sur ce point. Il a ajouté que ces dispositions ne sauraient non plus avoir pour effet de rendre irrecevable le référé contractuel du concurrent évincé ayant antérieurement présenté un référé précontractuel qui, bien qu'informé du rejet de son offre par le pouvoir adjudicateur, ne l'a pas été du délai de suspension que ce dernier s'imposait entre la date d'envoi de la notification du rejet de l'offre et la conclusion du marché, lorsqu'une telle information doit être donnée dans la notification du rejet. Surtout, le Conseil d'Etat précise ici qu'il en va de même lorsque cette notification indique un délai inférieur au délai minimum prévu par les dispositions applicables, alors même que le contrat aurait été finalement signé dans le respect de ce délai minimum. Un office public de l'habitat ("OPH") a lancé un marché relatif à la pose et à l'entretien de compteurs d'eau selon la procédure de l'appel d'offres ouvert (1), conformément à l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, relative aux marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs non soumis au Code des marchés publics (N° Lexbase : L8429G8P).

Le pouvoir adjudicateur a notifié leur éviction aux candidats non retenus et a précisé qu'un délai de suspension (ou "stand still") de cinq jours serait respecté avant la signature du contrat.

Une entreprise évincée saisit le juge du référé précontractuel d'une demande d'annulation de la procédure, et "transforme" son recours en référé contractuel en raison de la signature du marché en cours d'instance.

Il faut préciser que le pouvoir adjudicateur, bien qu'ayant indiqué un délai de stand still erroné, avait respecté le délai réglementaire de seize jours avant de signer.

La requête est regardée comme irrecevable par le premier juge au motif que le pouvoir adjudicateur avait, dans les faits, respecté le délai de seize jours avant de signer.

Le Conseil d'Etat censure l'ordonnance et retient que, si le délai de suspension notifié aux candidats évincés est inférieur au délai minimal, ils sont néanmoins recevables à contester le marché en référé contractuel, y compris lorsque, in fine, le délai réglementaire (de seize ou onze jours) a bien été respecté par le pouvoir adjudicateur.

Sur le plan de la recevabilité, cet arrêt rappelle la portée de l'obligation d'information des candidats évincés sur la recevabilité du référé contractuel (I). Il fournit par ailleurs une illustration du contrôle du juge sur les manquements susceptibles de conduire à l'annulation du marché (II).

I - Portée de l'obligation d'information des candidats évincés sur la recevabilité du référé contractuel

Le Conseil d'Etat apporte des précisions relatives à la portée (B) de l'obligation de notification aux candidats évincés du délai de suspension (A).

A - La règle de l'obligation de notification aux candidats évincés du délai de suspension

Règle issue, pour les marchés soumis à l'ordonnance du 6 juin 2005, de l'article 46, I, 1°) du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005, pris en application de l'ordonnance du 6 juin 2005, l'obligation de notification du délai de suspension aux candidats évincés est particulièrement importante pour ces derniers.

Ainsi, et après avoir sélectionné un candidat, le pouvoir adjudicateur est tenu, avant la conclusion d'un contrat, d'observer un délai de stand still afin de permettre aux candidats évincés de former un référé précontractuel devant le juge administratif ou judiciaire, selon la nature du contrat, dans le but de contester la procédure de passation.

Ce délai d'au moins seize jours, ou onze jours en cas de transmission électronique, doit être respecté entre la date d'envoi de la notification de l'attribution du marché et la date de conclusion du marché, et notifié aux candidats évincés.

La jurisprudence administrative a eu l'occasion, dans un arrêt "Office Public de l'Habitat interdépartementale de l'Essonne, du Val d'Oise et des Yvelines" (2), de faire application de ce principe et de sanctionner le pouvoir adjudicateur n'ayant pas notifié aux candidats évincés le délai de suspension. Le juge judiciaire fait également application de ce principe (3).

B - Conséquences de l'indication d'un délai de suspension erroné

En principe, un référé contractuel ne peut être engagé que si le requérant a été privé du droit d'exercer un référé précontractuel (4). Il n'obtiendra, par ailleurs, l'annulation du contrat que s'il montre qu'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence a affecté ses chances d'obtenir le contrat (5).

Si le référé contractuel ne peut être introduit par un requérant évincé, après que ce dernier a exercé un référé précontractuel, il en est autrement dès lors que le pouvoir adjudicateur n'a pas notifié le délai de suspension aux candidats évincés (6).

Dès lors, le candidat évincé peut "transformer" son référé précontractuel en référé contractuel (7).

Le juge apprécie le caractère suffisant des informations données aux candidats évincés (8).

Le Conseil d'Etat apporte ici trois précisions importantes : le dispositif n'a pas pour effet de rendre irrecevable un référé contractuel présenté par un candidat qui avait antérieurement présenté un référé précontractuel :

- alors qu'il était dans l'ignorance du rejet de son offre et de la signature du marché par suite d'un manquement du pouvoir adjudicateur à son obligation d'informer les candidats ;
- ni dans l'hypothèse où le candidat n'est pas informé du délai de suspension ;
- ni enfin dans l'hypothèse où le pouvoir adjudicateur "indique un délai [de stand still] inférieur au délai minimum prévu [...] alors même que le marché aurait été finalement signé dans le respect de ce délai minimum".

Autrement dit, une "erreur de plume" dans l'indication du délai, sans conséquence sur la date effective de signature, permet au candidat évincé d'actionner le référé contractuel, y compris si le délai de seize (ou onze) jours a finalement été respecté pour signer le marché.

Une vigilance particulière s'impose donc dans la rédaction des courriers d'éviction.

II - Contrôle du juge sur les manquements susceptibles de conduire à l'annulation du marché

Une fois le référé contractuel regardé comme recevable, le candidat n'obtiendra la censure du marché qu'à la double condition de démontrer que la violation du délai de stand still a obéré son recours en référé précontractuel et qu'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence a été commis à son détriment (A). La sanction n'est toutefois pas automatique (B).

A - Complexité des conditions à remplir pour faire censurer le contrat

L'arrêt rapporté illustre la teneur du contrôle du juge sur les critères d'attribution : s'il ne peut, selon la solution classique, se substituer au pouvoir adjudicateur dans l'examen des mérites respectifs des candidats, les critères et leur notation sont soumis au contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation (9).

Il résulte de la jurisprudence que le pouvoir adjudicateur doit porter à la connaissance des candidats la pondération des sous-critères d'analyse des offres, dans la mesure où elle exerce une influence sur la présentation des offres et sur le choix, et que les sous-critères doivent être regardés comme des critères (10).

Au cas présent, le requérant parvient à démontrer que le pouvoir adjudicateur avait omis de porter à la connaissance des candidats la pondération des sous-critères d'analyse du prix, critère pondéré à 50 %. Cette omission caractérise un manquement.

Eu égard à la note obtenue par le requérant sur les différents sous-critères, le défaut d'information sur leur pondération a affecté ses chances d'emporter le marché.

Le juge apprécie ici souverainement que le faible écart de points (un point) entre le lauréat et la société requérante, qui était par ailleurs la moins chère, a affecté ses chances d'emporter le marché.

B - La sanction : l'annulation différée du contrat

Conformément à l'article L. 551-19 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L6357IQI), le juge examine ensuite si des motifs tirés de raisons impérieuses d'intérêt général (11) pourraient justifier une sanction alternative à l'annulation du marché. Il les écarte tous.

Fait rare dans le cadre de cette procédure, parfois proche du "parcours du combattant" pour le candidat évincé, le requérant bien-fondé obtient donc l'annulation du marché au terme de la procédure de référé contractuel.

Cela étant, lorsque le juge prononce l'annulation du contrat, il est en mesure d'en différer l'effet (12), selon la formule : "compte tenu notamment de la nécessité d'assurer la continuité des prestations [...] durant le délai nécessaire au lancement d'une nouvelle procédure" (13).

En l'espèce, le juge prononce l'annulation avec un effet différé de quatre mois (délai classique) afin de garantir la continuité des prestations de relevé et de maintenance des compteurs, avec l'intérêt général qui s'y attache, pendant l'organisation d'une nouvelle procédure d'attribution.


(1) Décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005, fixant les règles applicables aux marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs mentionnés à l'article 3 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 (N° Lexbase : L6446HEH), art. 28 et 29.
(2) CE 2° et 7° s-s-r., 24 juin 2011, n° 346665 et n° 346746, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A3555HU9).
(3) Cass. com., 6 janvier 2015, n° 13-20.213, F-D ([LXB=A0769M9D)]) et lire nos obs., Le référé contractuel vu par le juge judiciaire : conséquences du défaut de notification du délai de "stand still" aux candidats évincés, Lexbase Hebdo n° 364 du 5 mars 2015 - édition publique (N° Lexbase : A0769M9D).
(4) CJA, art. L. 551-14 (N° Lexbase : L1603IE4).
(5) CJA, art. L. 551-18 (N° Lexbase : L1598IEW).
(6) CE 2° et 7° s-s-r., 24 juin 2011, n° 346665 et n° 346746, mentionné aux tables du recueil Lebon, préc..
(7) CE 2° et 7° s-s-r., 10 novembre 2010, n° 340944, mentionné dans les tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A8947GGH).
(8) CE 2° et 7° s-s-r., 18 décembre 2012, n° 363342, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A1288IZQ) : "Considérant qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait du dossier qui lui était soumis que cette notification mentionnait, outre le délai de suspension de la signature du marché, le classement de l'offre de la société [X] en deuxième position, les notes qui lui avaient été attribuées et celles qu'avait reçues l'offre retenue, inférieure à la sienne pour le critère du prix mais supérieure pour le critère de la valeur technique, de sorte que les motifs de rejet de l'offre de la société [X] et de choix de l'attributaire se déduisaient nécessairement des termes de cette notification, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a dénaturé les pièces du dossier ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la métropole Nice Côte d'Azur est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée".
(9) CE 2° et 7° s-s-r., 20 février 2013, n° 363244, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A2762I8S) : "Considérant que s'il appartient au juge des référés précontractuels de relever un manquement aux obligations de mise en concurrence résultant de la définition par le pouvoir adjudicateur d'un système d'évaluation des offres susceptible de conduire au choix de celle qui n'est pas économiquement la plus avantageuse, un tel manquement ne peut résulter que d'une erreur manifeste du pouvoir adjudicateur dans le choix des critères et de leurs modalités de mise en oeuvre, eu égard aux diverses possibilités dont il dispose en la matière".
(10) CE 2° et 7° s-s-r., 18 juin 2010, n° 337377, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A9865EZE): "Considérant que ces dispositions imposent au pouvoir adjudicateur d'informer les candidats des critères de sélection des offres ainsi que de leur pondération ou hiérarchisation ; que si le pouvoir adjudicateur décide, pour mettre en oeuvre ces critères de sélection des offres, de faire usage de sous-critères également pondérés ou hiérarchisés, il doit porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation de ces sous-critères dès lors que, eu égard à leur nature et à l'importance de cette pondération ou hiérarchisation, ils sont susceptibles d'exercer une influence sur la présentation des offres par les candidats ainsi que sur leur sélection et doivent en conséquence être eux-mêmes regardés comme des critères de sélection" ; CE 2° et 7° s-s-r., 1er avril 2009, n° 321752, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5008EE9).
(11) CE 2° et 7° s-s-r., 30 novembre 2011, n° 350788, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A1061H3P), préc..
(12) CE 2° et 7° s-s-r., 1er juin 2011, n° 346405, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0433HT9), : "Compte tenu de la nécessité d'assurer la continuité des prestations de dépannage et d'entretien des ascenseurs durant le délai nécessaire au lancement d'une nouvelle procédure de publicité et de mise en concurrence et à l'attribution des nouveaux marchés correspondant aux lots en cause et de l'intérêt général qui s'attache à ce que cette continuité soit préservée, il y a lieu de ne prononcer l'annulation de ces deux marchés qu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la date de la présente décision".
(13) CE 2° et 7° s-s-r., 30 novembre 2011, n° 350788, publié au recueil Lebon, préc. ; ou CE 2° et 7° s-s-r., 23 novembre 2011, n° 349746, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A9963HZZ).

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Procédure civile

[Brèves] Contrariété entre deux décisions dont l'une émane du juge pénal et l'autre du juge civil : la Cour de cassation admet le pourvoi

Réf. : Ass. plén., 3 juillet 2015, n° 14-13.205, P+B+R+I (N° Lexbase : A5553NMM)

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Le 09 Juillet 2015

Le pourvoi dirigé contre deux décisions, dont l'une émane du juge pénal et l'autre du juge civil, est recevable lorsque, même non rendues en dernier ressort et alors qu'aucune d'elles n'est susceptible d'un recours ordinaire, elles sont inconciliables et aboutissent à un déni de justice. Telle est la solution retenue par un arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, rendu le 3 juillet 2015 (Ass. plén., 3 juillet 2015, n° 14-13.205, P+B+R+I N° Lexbase : A5553NMM ; cf., également, Ass. plén., 29 novembre 1996, n° 93-20.799 N° Lexbase : A5114CKM et Chbre mixte, 11 décembre 2009, n° 08-86.304, P+B+R+I N° Lexbase : A4579EPB). En l'espèce, par jugement du 2 février 1998, le tribunal de grande instance de Toulon a condamné M. X à payer à une banque une certaine somme en exécution d'un engagement de caution solidaire d'un prêt contracté par M. Y. Par un arrêt du 15 décembre 2004, la chambre correctionnelle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a jugé que cet engagement de caution était un faux en écritures publiques commis par M. Y au préjudice de M. X. La même cour a, le 8 mars 2012, dit que la banque avait régulièrement déclaré sa créance au passif du redressement judiciaire de M. X et que celui-ci était irrecevable à contester l'existence de son obligation. Relevant que ces décisions sont inconciliables et aboutissent à un déni de justice, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation décide, sous le visa des articles 4 du Code civil (N° Lexbase : L2229AB8) et 618 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6776H74), d'annuler le jugement du 2 février 1998, dès lors qu'il prononce une condamnation sur le fondement d'un acte dont la falsification a été établie par une décision pénale définitive, et l'arrêt du 8 mars 2012, qui en est la suite. La Cour de cassation précise ainsi sa doctrine en matière de contrariété entre deux décisions dont l'une émane du juge pénal et l'autre du juge civil (cf. l’Ouvrage "Procédure civile" N° Lexbase : E1482EUG).

newsid:448328

Responsabilité administrative

[Brèves] Juridiction compétente pour connaître d'un litige consécutif à un dommage causé par un véhicule dont le conducteur est un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions

Réf. : T. confl., 6 juillet 2015, n° 4009 (N° Lexbase : A5881NMR)

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N8373BUN

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Le 10 Juillet 2015

Seul le juge judiciaire est compétent pour connaître d'un litige consécutif à un dommage causé par un véhicule dont le conducteur est un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions, énonce le Tribunal des conflits dans un arrêt rendu le 6 juillet 2015 (T. confl., 6 juillet 2015, n° 4009 N° Lexbase : A5881NMR). Les époux X ont été victimes d'un accident de la circulation, leur véhicule ayant été frontalement heurté par un véhicule de police circulant à contresens. Par un jugement correctionnel du 25 septembre 2013, le tribunal de grande instance de Créteil, après avoir prononcé une condamnation pénale à l'encontre du fonctionnaire conduisant le véhicule de police, a décliné sa compétence pour connaître de l'action civile des époux X dirigée contre l'Etat. Ils ont ensuite recherché, en leur nom et en celui de leurs enfants, la responsabilité de l'Etat devant le tribunal administratif de Melun. Par une ordonnance du 17 février 2015, la présidente du tribunal administratif a décliné la compétence de la juridiction administrative pour connaître de ce litige et, compte tenu du jugement correctionnel du 25 septembre 2013, a renvoyé au Tribunal des conflits le soin de statuer sur la compétence. Le Tribunal des conflits indique que les préjudices dont les époux X demandent réparation découlent de l'action d'un véhicule. Même si la faute commise par le conducteur du véhicule de police n'est pas détachable du service, la responsabilité de l'Etat ne saurait être engagée que sur le fondement des dispositions de la loi n° 57-1424 du 31 décembre 1957 (N° Lexbase : L1477G89) attribuant aux seuls tribunaux judiciaires compétence pour statuer sur toute action en responsabilité tendant à la réparation des dommages causés par un véhicule. Dès lors, le litige ressortit à la seule compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire (cf. l’Ouvrage "Responsabilité administrative" N° Lexbase : E3681EUU).

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Sociétés

[Jurisprudence] Le quasi-usufruit sur la distribution des réserves : le traitement fiscal de la dette de restitution de l'usufruitier de droits sociaux

Réf. : Cass. com., 27 mai 2015, n° 14-16.246, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6622NI4)

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N8295BUR

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par Bernard Saintourens, Professeur à l'Université de Bordeaux et Frédérique Julienne, Maître de conférences - HDR à l'Université de Bordeaux

Le 09 Juillet 2015

L'articulation entre le droit des sociétés et le démembrement de droit que constitue l'usufruit représente un facteur important de contentieux au vu des difficultés techniques qu'elle induit. Ces difficultés sont aggravées par l'existence d'un régime d'usufruit dérogatoire, à savoir le quasi-usufruit qui, prévu à l'article 587 du Code civil (N° Lexbase : L3168ABX), a vocation à s'appliquer aux biens consomptibles. Pour mémoire, ce dispositif implique une extension des pouvoirs de gestion de l'usufruitier lui conférant le droit des disposer des biens en contrepartie d'une obligation de restitution par équivalant en fin d'usufruit. Pour la première fois, la Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans une décision rendue le 27 mai 2015, précise la nature des droits exercés par l'usufruitier de parts sociales sur les réserves distribuées sous formes de dividendes en se référant au quasi-usufruit.
L'élément déclencheur du contentieux était une question d'ordre fiscal opposant les ayants droit d'une succession à l'administration fiscale. Les ayants droit prétendaient pouvoir obtenir la rectification de la déclaration de succession initiale au motif d'une erreur d'évaluation du passif. L'enjeu portait sur le sort d'une dette de restitution dont le défunt était débiteur à l'égard du nu-propriétaire, au titre de sa qualité d'usufruitier sur des parts sociales après la perception de dividendes. La cour d'appel de Paris (1) a rejeté la demande au motif que le quasi-usufruit à l'origine de la dette était de nature conventionnelle. A l'appui de cette analyse, les juges du fond avançaient l'existence d'un accord intervenu entre les nus-propriétaires et l'usufruitier afin de verser les réserves distribuées sous forme de dividendes à ce dernier. Il découlait de cette qualification, la soumission de la dette aux dispositions de l'article 773, 2° du Code général des impôts (N° Lexbase : L9876IWP) qui prévoit un régime particulier de déduction régi par une présomption de fictivité. Le problème juridique posé à la Haute juridiction consistait à déterminer la nature de la dette de restitution issue du quasi-usufruit portant sur des dividendes. La décision de la cour d'appel est cassée par les juges de la Chambre commerciale de la Cour de cassation qui fixent dans un attendu en tête de l'arrêt un principe de qualification de la nature des droits de l'usufruitier appliqués à la distribution de réserves sous forme de dividendes avant d'en tirer les conséquences sur le plan fiscal. Selon l'arrêt commenté, dans l'hypothèse où "la collectivité des associés décide de distribuer un dividende par prélèvement sur les réserves, le droit de jouissance de l'usufruitier de droits sociaux s'exerce, sauf convention contraire, sous la forme d'un quasi-usufruit", "de sorte que l'usufruitier se trouve tenu d'une dette de restitution exigible au terme de l'usufruit et qui, prenant sa source dans la loi, est déductible de l'actif successoral lorsque l'usufruit s'éteint par la mort de l'usufruitier".

A la lumière de cet arrêt il convient donc désormais de distinguer deux régimes distincts de traitement des dividendes perçus par l'usufruitier de droits sociaux. Lorsque les dividendes lui sont attribués par décision de l'assemblée générale annuelle d'approbation des comptes et d'affectation des résultats, on doit appliquer le régime commun de l'usufruit : l'usufruitier encaisse les sommes sans obligation de restitution au nu-propriétaire. En revanche, lorsque les dividendes sont, comme en l'espèce, prélevés sur les réserves, ils relèvent de l'article 587 du Code civil et l'usufruitier est tenu d'une restitution par équivalent au terme de l'usufruit.

Deux enseignements peuvent donc être tirés de cette décision : l'usufruitier est titulaire d'un quasi-usufruit sur les dividendes liés à la distribution des réserves (I) et la dette de restitution née de ce quasi-usufruit est déductible de l'actif successoral (II).

I - La nature des droits de l'usufruitier sur les dividendes prélevés sur les réserves : un quasi-usufruit

Pour la première fois, les juges de la Chambre commerciale identifient clairement la nature des droits de l'usufruitier à l'égard des réserves distribuées sous forme de dividendes: l'usufruitier de parts sociales bénéficie par principe d'un quasi-usufruit. Deux indications importantes sont apportées sur la qualification juridique de ce quasi-usufruit. D'une part, il s'agit d'un quasi usufruit légal et, d'autre part, il s'agit d'un quasi-usufruit ouvert aux aménagements conventionnels.

En premier lieu, les juges s'attachent à préciser l'origine du quasi-usufruit relatif aux dividendes. Selon la décision commentée, il trouve sa source dans la loi. Le fondement de cette qualification repose donc sur l'article 587 du Code civil qui a vocation à délimiter le domaine naturel du quasi-usufruit à savoir, les choses dont on ne peut faire usage sans les consommer. Le rapprochement entre cette solution et les décisions antérieures relatives au sort des dividendes versés par suite de l'assemble générale annuelle permet de dissocier deux régimes. Tout d'abord, lorsque les dividendes sont attribués en assemblée générale annuelle, ils sont qualifiés de fruits (2). A ce titre, ils relèvent du régime de droit commun de l'usufruit. Ils sont donc encaissés définitivement par l'usufruitier titulaire du droit de jouissance. Ensuite, lorsque les dividendes résultent d'une décision de distribution par prélèvement sur les réserves, ils sont soumis au régime du quasi-usufruit impliquant une restitution par équivalent de la somme encaissée par l'usufruitier au nu-propriétaire au terme du démembrement de droit. La solution retenue se justifie par la nature juridique des dividendes qui dans cette hypothèse-là sont analysés comme des créances de somme d'argent à l'égard de la société. La jurisprudence considère, en effet, que l'usufruit portant sur des créances "dégénère" en quasi-usufruit à l'échéance (3) ce qui offre la faculté pour le titulaire d'en percevoir le montant.

Il convient dès lors de distinguer clairement le sort des droits sociaux de celui des dividendes qui sont attachés à la distribution de réserves. Alors que les droits sociaux relèvent d'un usufruit ordinaire (4), les juges excluant à leur égard les dispositions de l'article 587 du Code civil, les réserves distribuées sous forme de dividendes sont, quant à elles, susceptibles d'être soumises à ce régime dérogatoire mais une fois uniquement qu'elles sont distribuées. Le "fait générateur" de l'application de la technique du quasi-usufruit découle alors de la décision de distribution de réserves. Cet élément spécifique de qualification légitime la question de la pertinence du raisonnement par analogie entre le régime du quasi-usufruit des dividendes et celui d'une créance ordinaire assortie d'un terme. Alors que les juges d'appel avaient mis en avant la décision de distribution pour rejeter la nature légale de la dette issue du quasi-usufruit, les juges de la Chambre commerciale retiennent une solution contraire. Le régime du quasi-usufruit est une hypothèse légale de l'article 587 du Code civil lorsqu'il s'agit de dividendes prélevés sur les réserves. En pratique, il sera nécessaire d'attirer l'attention des usufruitiers sur l'incidence de la décision de mise en réserve des bénéfices annuels sur l'existence d'une obligation de restitution dans l'hypothèse d'une mise en distribution ultérieure.

En deuxième lieu, les juges apportent une précision sur la portée de la qualification de quasi-usufruit sur les dividendes distribués. Cette dernière n'est pas d'ordre public et laisse donc une place aux conventions contraires. L'aménagement conventionnel aurait alors pour objectif d'écarter l'application de l'article 587 du Code civil et de priver l'usufruitier de tout droit sur les sommes mises en distribution. En effet, ces sommes prélevées sur les réserves n'ayant pas la nature de fruits, elles appartiennent au nu-propriétaire. Cette solution conforte le rôle traditionnellement laissé à la liberté conventionnelle dans le cadre des démembrements de droit que ce soit dans leur constitution ou dans leur gestion. Ainsi, est-on libre de créer conventionnellement un démembrement de droit non prévu dans le Code civil (5) ou, encore, d'aménager, par exemple, la répartition des travaux entre l'usufruitier et le nu-propriétaire. Cette liberté conventionnelle représente un enjeu particulier dans le cadre du quasi-usufruit au vu de la modification des pouvoirs de gestion qu'il induit au bénéfice de l'usufruitier. Ce dernier se voit, en effet, doter d'un pouvoir de disposition des biens et non plus d'un simple pouvoir de jouissance. Le nu-proriétaire, quant à lui, perdant la titularité d'un droit réel, se voit attribuer un droit personnel représenté par une créance de restitution due au terme du démembrement. L'intérêt d'un recours aux aménagements conventionnels consiste dès lors à éviter que l'usufruitier puisse percevoir et disposer des réserves distribuées sous forme de dividendes. Il pourra se justifier, notamment, lorsque le titulaire de l'usufruit se trouve dans une situation l'empêchant de gérer ses biens ou de présenter des garanties suffisantes de remboursement.

Le régime du quasi-usufruit induit donc l'existence d'une créance de restitution au bénéfice du nu-propriétaire qui, comme l'illustre l'arrêt commenté, est susceptible de soulever des difficultés de traitement au regard du droit des successions.

II - La dette de restitution née du quasi-usufruit : une dette déductible de l'actif successoral

L'enjeu attaché à la qualification de la nature des droits de l'usufruitier sur les dividendes était en l'espèce d'ordre fiscal. Il s'agissait de déterminer si la dette de restitution à laquelle l'usufruitier décédé était tenu à l'égard du nu-propriétaire, en tant que titulaire du quasi-usufruit, était ou non déductible de l'actif successoral dans le cadre de l'imposition de la succession.

L'actif net imposable est, en effet, déterminé en déduisant le passif successoral de l'actif brut imposable (6). En principe, les dettes du défunt existant au jour de l'ouverture de la succession sont déductibles de l'actif brut successoral à l'exception de certaines dettes présumées fictives ou éteintes. En l'espèce, le point de difficulté consistait à déterminer si la dette de restitution constituait une dette fictive telle que l'article 773, 2° du Code général des impôts la définit. Relèvent de cette qualification toutes dettes d'origine contractuelle consenties par le de cujus au profit de ses héritiers ou de personnes réputées interposées. La présomption de fictivité tombe, cependant, par la preuve contraire lorsque la dette a été consentie par un acte authentique ou par un acte sous seing privé ayant date certaine avant l'ouverture de la succession autrement que par le décès d'une des parties contractantes.

Le point essentiel consistait pour les juges à trancher sur la nature de la dette de restitution : est-elle d'origine contractuelle ou d'origine légale ?

Cette problématique a donné lieu à une analyse divergente entre les juges de la cour d'appel et les juges de la Chambre commerciale de la Cour de cassation. Ces derniers rejettent la nature contractuelle en considérant que le quasi-usufruit qui a donné naissance à la dette litigieuse trouve sa source dans l'article 587 du Code civil. Cette solution est respectueuse de la nature de la décision prise par les associés de distribuer des réserves sous forme de dividendes. Cette décision relève, en effet, de la qualification d'acte unilatéral pris par la société et non de celle de contrat. En cohérence avec cette analyse, les juges du droit excluent la soumission de la dette du régime dérogatoire de l'article 773, 2° du Code général des impôts.

Cette solution illustre, alors, l'impact de la personne morale que constitue la société sur le jeu des présomptions fiscales de fictivité dans les relations familiales en présence d'un démembrement de droit. L'écran de la personne morale est en mesure de faire échec à cette présomption et de constituer un instrument intéressant d'optimisation patrimoniale. Dans la même logique, la jurisprudence considère que l'affectation des bénéfices votée par l'usufruitier à un compte de réserve n'est pas constitutive d'une donation consentie au nu-propriétaire (7).


(1) CA Paris, Pôle 5, 5ème ch., 25 février 2014, n° 11/12774 (N° Lexbase : A8419MEK).
(2) Cass. com., 5 octobre 1999, n° 97-17.377 (N° Lexbase : A8136AGG), Bull. Joly Sociétés, novembre 1999, § 258, note A. Couret ; Dr sociétés, 1999, n° 183, obs. H. Hovasse.
(3) Cass. civ. 1, 4 octobre 1989, n° 87-11.142 (N° Lexbase : A0784CG7), JCP éd. G., 1990, II, 21519, note J.-F. Pillebout ; RTDCiv., 1990, obs. F. Zenati.
(4) Cass. civ. 1, 4 avril 1991, 89-17.351, publié (N° Lexbase : A4632AHZ), Bull. civ. I, n° 129.
(5) Cass. civ. 3, 31 octobre 2012, FS-P+B+R (N° Lexbase : A3197IWC) Bull. civ. III, n° 159 ; D., 2012, 2596, obs. V.-A. Tadros ; D., 2013, 53, note L. d'Avout et B. Mallet-Bricout, RTDCiv., 2013, obs. Gautier ; S. Jean et G. Beaussonie, La création prétorienne d'un droit de jouissance spéciale à durée indéterminée, Lexbase Hebdo n° 507 du 29 novembre 2012 - édition privée (N° Lexbase : N4669BT4).
(6) F. Douet, Précis de droit fiscal de la famille, LexisNexis, n° 2150.
(7) Cass. com., 10 février 2009, n° 07-21.806, FS-P+B (N° Lexbase : A1249EDM) ; RJF, 5/09, n° 514.

newsid:448295

Sociétés

[Brèves] Révision coopérative : détermination des seuils

Réf. : Décret n° 2015-800 du 1er juillet 2015, fixant les seuils au-delà desquels les sociétés coopératives sont soumises à la procédure de révision et adaptant la révision coopérative aux sociétés coopératives de production (N° Lexbase : L7803I9U)

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Le 10 Juillet 2015

La loi relative à l'économie sociale et solidaire (loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 N° Lexbase : L8558I3D) a créé une obligation générale, pour les sociétés coopératives et leurs unions dont l'activité dépasse certains seuils, de se soumettre tous les cinq ans à un contrôle, dit "révision coopérative", destiné à vérifier la conformité de leur organisation et de leur fonctionnement aux principes et aux règles de la coopération et à l'intérêt des adhérents, ainsi qu'aux règles coopératives spécifiques qui leur sont applicables et, le cas échéant, à leur proposer des mesures correctives. Un décret, publié au Journal officiel du 3 juillet 2015, définit ces seuils (décret n° 2015-800 du 1er juillet 2015, fixant les seuils au-delà desquels les sociétés coopératives sont soumises à la procédure de révision et adaptant la révision coopérative aux sociétés coopératives de production N° Lexbase : L7803I9U). Ainsi, les sociétés coopératives agricoles et leurs unions ainsi que les sociétés d'intérêt collectif agricole sont tenues de se soumettre à la révision coopérative lorsqu'elles dépassent, à chaque clôture de deux exercices consécutifs, les seuils fixés ci-dessous, pour deux des trois critères suivants : 50 pour le nombre moyen d'associés ; 2 000 000 d'euros de chiffre d'affaires HT ; 1 000 000 d'euros pour le total du bilan. Les seuils pour les sociétés coopératives maritimes et leurs unions sont les suivants : 3 pour le nombre moyen de salariés employés au cours de chacun des exercices ; 75 000 euros de chiffre d'affaires HT ; et 100 000 euros pour le total du bilan. Les sociétés coopératives de commerçants détaillants sont tenues de se soumettre à la révision coopérative lorsqu'elles dépassent, à chaque clôture de deux exercices consécutifs, les seuils suivants : 100 pour le nombre moyen d'associés et 3 000 000 d'euros de chiffre d'affaires HT. Les banques mutualistes et coopératives et les sociétés coopératives de consommation sont tenues de se soumettre à la révision coopérative lorsque le nombre moyen de salariés employés à chaque clôture de deux exercices consécutifs est supérieur à 50. Le décret prévoit, en outre, les dérogations et adaptations apportées au régime de révision applicable aux sociétés coopératives de production quelle que soit l'importance de leur activité, pour tenir compte de la spécificité de ces sociétés. Elles sont ainsi tenues de se soumettre à la révision coopérative dès qu'elles comprennent au moins deux associés, sans condition de seuil. Les dispositions de ce décret entrent en vigueur le 1er octobre 2015 (cf. l’Ouvrage "Droit des sociétés" N° Lexbase : E4810E4W).

newsid:448355

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Assujettissement à la TVA d'un loueur en meublé effectuant des prestations para-hôtelières

Réf. : CAA Marseille, 25 juin 2015, n° 13MA00457, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A6228NMM)

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Le 16 Juillet 2015

En principe, selon la 6ème Directive-TVA (N° Lexbase : L9279AU9), ne peuvent faire l'objet d'une exonération de TVA, dans la législation des Etats membres, les locations de logements meublés qui correspondent à des opérations d'hébergement, soit hôtelières, soit assimilables à ces dernières. Les critères utiles à la distinction entre la location d'un logement meublé susceptible d'être exonérée et la mise à disposition d'un tel logement dans des conditions l'apparentant à un hébergement hôtelier et, de ce fait, obligatoirement soumise à la TVA, doivent être propres à garantir que ne soient exonérés du paiement de cette taxe que des assujettis dont l'activité ne remplit pas la ou les fonctions essentielles des entreprises hôtelières, avec lesquelles ils ne se trouvent donc pas en situation de concurrence potentielle. Ainsi, aux termes de l'article 261 D du CGI (N° Lexbase : L7342IGZ), les critères définis par la loi n'exigent pas que les prestations para-hôtelières soient effectivement rendues, mais seulement que le loueur en meublé dispose des moyens nécessaires pour répondre aux éventuelles demandes. Pour apprécier si des prestations para-hôtelières sont proposées dans des conditions plaçant le loueur en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières, les conditions de qualité et de prix caractérisant ces prestations peuvent, notamment, être prises en compte. Telle est la solution retenue par la cour administrative d'appel de Marseille dans un arrêt rendu le 25 juin 2015 (CAA Marseille, 25 juin 2015, n° 13MA00457, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A6228NMM). Au cas présent, la requérante exerce une activité de loueur en meublé qui a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a estimé que les conditions prévues par le 4° de l'article 261 D du CGI n'étaient pas remplies et, qu'en conséquence, elle n'était pas assujettie à la TVA pour son activité. L'administration a donc rappelé la TVA déductible qui avait fait l'objet de remboursements antérieurs. Toutefois, la cour a fait droit à la demande de la requérante. En effet, en l'espèce, cette dernière assure trois des prestations prévues par le 4° de l'article 261 D du CGI (fourniture du linge de maison, réception de la clientèle et nettoyage régulier des locaux), le service de location en meublé proposé doit être regardé comme offert en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières. Ainsi, c'est à tort que l'administration a refusé d'assujettir à la TVA cette activité .

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