Jurisprudence : TA Melun, du 17-11-2011, n° 0705997


TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE MELUN
N° 0705997/3
___________
SOCIETE STOK PROMOTION
___________
Mlle Prévot
Rapporteur
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M. L'hôte
Rapporteur public
___________
Audience du 27 octobre 2011
Lecture du 17 novembre 2011
___________
C
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Melun
(3ème Chambre)
Vu la requête, enregistrée le 4 août 2007, présentée pour la SOCIETE STOK PROMOTION, dont le siège est 26 boulevard Paul Vaillant Couturier à Ivry-sur-Seine (94200), par Me Cagneux ; la SOCIETE STOK PROMOTION demande au tribunal de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des contributions supplémentaires à ce même impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 2002 et de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme exposée par elle au titre de frais non compris dans les dépens ;
Elle soutient que c'est à tort que l'administration a réintégré à son résultat au titre de l'exercice 2002 la provision constituée sur les titres de participation de la société Stok France au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1996 ; que cette provision était imposable au taux de 19 % ; qu'elle a été réintégrée au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1996 pour un montant de 1 100 000 francs ; que la reprise sur provision opérée par le service vérificateur au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2002 constitue une double imposition ; que le service vérificateur ne pouvait procéder à la réintégration au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2002 de la provision constituée pour créance douteuse au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1994 et de la provision complémentaire constituée au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1995 ; que l'erreur constatée s'est produite plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit ; que la correction symétrique des bilans doit en conséquence s'opérer jusqu'à l'exercice d'origine de l'omission, soit 1994, en vertu des dispositions de l'article 38-4 bis alinéa 2 du code général des impôts et de la doctrine administrative 4 A-10-06 du 29 juin 2006 invocable sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; qu'elle a constitué une provision complémentaire de 200 000 francs au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1995 à raison de la somme versée à la société Stok France en vue de l'apurement de son passif ; que la perte était nettement précisée
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par le protocole de règlement amiable signé entre les banques et la société Stok France ; que le risque de non recouvrement de la créance résultait d'événements en cours à la clôture de l'exercice ; que la provision était justifiée au cours des exercices postérieurs à sa constitution car la liquidation judiciaire de la société Stok France était toujours en cours ;
Vu la décision par laquelle le directeur des services fiscaux du Val-de-Marne a statué sur la réclamation préalable ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2008, présenté par le directeur des services fiscaux du Val-de-Marne qui conclut au rejet de la requête ;
Il fait valoir que l'inscription des provisions en comptabilité n'était étayée d'aucune pièce justificative ; que les provisions portent sur des titre et des prêts accordés à la société Stok France qui a le même gérant que la société requérante ; que la société ne prouve pas, par les pièces qu'elle produit, que la réintégration opérée au titre de l'exercice 1996 n'a pas été compensée par une déduction au titre du même exercice ; qu'elle aurait dû produire des justificatifs pour tous les exercices clos entre 1996 et 2002 afin de justifier les retraitements fiscaux annuellement opérés ; que l'extrait du grand-livre ne fait nullement apparaître les titres de la société Stok France ; que la provision relevant du régime d'imposition dérogatoire n'a pas été correctement reportée dans la liasse fiscale ; que la requérante n'a jamais fourni les pièces permettant d'établir le caractère normal de la décision de gestion relative à l'investissement réalisé, la régularité de la constitution de la provision, le mode de détermination de son montant, la réalité de la créance et son évolution au cours des six années suivant sa constitution ; que la provision était par suite irrégulière dès l'origine ; que la requérante a indiqué au cours du débat oral et contradictoire avoir constitué la provision pour créance irrécouvrable à la suite de la procédure de liquidation judiciaire de la société Stok France, soit le 31 octobre 1996 ; qu'aucun document permettant d'apprécier la situation de solvabilité de la société ni les démarches mises en oeuvre pour obtenir le recouvrement des créances n'a été présenté ; que les dispositions de l'article 38-4 bis du code général des impôts ne trouvent à s'appliquer qu'à compter des exercices clos le 1er janvier 2005 alors que la reprise de la provision a été effectuée au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2002 ; que cet article ne concerne que les « erreurs et omissions », et non les actes anormaux de gestion ; que ces dispositions ne sont pas non plus applicables à une erreur résultant de l'application systématique d'une méthode erronée ; que le montant de la provision était manifestement excessif ; que la provision aurait dû être réévaluée au cours des exercices suivant sa constitution ; que les dispositions de l'instruction administrative du 29 juin 2006 n'étaient pas applicables à des redressements notifiés plus d'un an auparavant ; que le règlement amiable homologué par le président du tribunal de commerce a conféré un caractère certain à la perte, qui ne pouvait par suite plus faire l'objet d'une quelconque provision en application des dispositions de l'article 39-1 du code général des impôts ;
Vu le mémoire, enregistré le 20 juin 2008, présenté pour la SOCIETE STOK PROMOTION qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;
Elle soutient en outre que sa participation au capital de la société Stock France ne peut être remise en cause ; qu'elle justifie de la situation nette négative de ladite société au titre des exercices 1994 à 1996 ; qu'un protocole de règlement amiable a été suivi par l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire le 1er novembre 1996 ; que la provision pour dépréciation de titres de participation a donc été régulièrement constituée ; que la constitution d'une provision pour créance douteuse se justifiait par les difficultés financières rencontrées par
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la société Stok France au titre de l'exercice 1994 puisqu'un mandataire avait été nommé le 30 novembre 1994 afin de solder les dettes de la société ; que la provision constituée au titre de l'exercice 1995 se justifie par le risque de non recouvrement de la somme de 200 000 francs versée à la société Stok France en vue de l'apurement du passif de cette dernière ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 décembre 2008, présenté par le directeur des services fiscaux du Val-de-Marne qui persiste dans ses conclusions ;
Vu le mémoire, enregistré le 31 janvier 2009, présenté pour la SOCIETE STOK PROMOTION qui conclut aux mêmes fins que la requête ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2011 :
- le rapport de Mlle Prévot ;
- et les conclusions de M. L'hôte, rapporteur public ;
Considérant que l'administration, qui est en droit de rapporter aux résultats du plus ancien des exercices non prescrits le montant des provisions figurant au bilan de clôture de cet exercice, dans la mesure où celles-ci ont été estimées irrégulièrement constituées, et alors même que les dotations faites à ce compte de provisions seraient antérieures à l'ouverture de l'exercice, a réintégré aux résultats de l'exercice 2002, deux provisions pour risque constituées par la SOCIETE STOK PROMOTION respectivement au titre de l'exercice clos en 1996 et au titre de l'exercice clos en 1994, et destinées à constater d'une part la dépréciation de titres de participation détenus dans le capital de la société Stok France, et d'autre part la perte probable de la créance correspondant à des prêts consentis à la même société ;
Sur la provision pour dépréciation de titres de participation :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment (…) : 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (…) Par dérogation aux dispositions des premier et dixième alinéas qui précèdent, la provision pour dépréciation qui résulte éventuellement de l'estimation du portefeuille est soumise au régime fiscal des moins-values à long terme défini au 2 du I de l'article 39 quindecies ; si elle devient ultérieurement sans objet, elle est comprise dans les plus-values à long terme de l'exercice, visées au 1 du I de l'article 39 quindecies. » ;
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Considérant qu'une dépréciation de l'évaluation de titres de participation détenus par une société commerciale, par application des dispositions précitées du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, soumise au régime des moins-values à long terme, ne peut affecter ses résultats d'exploitation ; qu'est, par suite, sans incidence la circonstance invoquée par la requérante de la régularité comptable de la provision constituée ; que la SOCIETE STOK PROMOTION fait valoir qu'elle n'a pas déduit du bénéfice imposable de l'exercice clos le 31 décembre 1996, la provision constituée à hauteur de 1 100 000 francs pour faire face à la dépréciation des titres de participation qu'elle détenait dans le capital de la société Stock France ; qu'il résulte de la liasse fiscale produite au titre de l'exercice 1996, que la requérante a effectivement réintégré la provision, effectuée comptablement, pour la détermination de son résultat fiscal ; que si l'administration soutient que la réintégration opérée peut avoir été compensée par la déduction effectuée au titre de la déduction de 1 308 459 francs relative au régime des sociétés mères et des filiales, la société établit, par la production du grand livre comptable au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1996 que ladite déduction correspondait à la déduction, prévue à l'article 145 du code général des impôts, des revenus de ses filiales comptabilisés au compte n° 763000 ; qu'il résulte en revanche des liasses fiscales déposées par la requérante au titre des exercices clos des 31 décembre 1997 au 31 décembre 2002, premier exercice non prescrit, que la société requérante n'avait pas effectué le retraitement fiscal de la provision litigieuse ; qu'il suit de là que l'administration était fondée à réintégrer la provision litigieuse aux résultats de la société au titre de l'exercice 2002 ;
Sur la provision pour créances douteuses :
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts qu'une entreprise peut porter en provision, au passif du bilan de clôture d'un exercice, des sommes correspondant à des pertes ou charges qu'elle ne supportera qu'ultérieurement, à la condition, notamment, que le mode de calcul de la provision soit propre à exprimer avec une approximation suffisante le montant probable desdites pertes ou charges ;
Considérant que la société requérante a constitué, au titre de l'année 1994, une provision d'un montant de 1 411 082 francs correspondant au solde des créances qu'elle détenait sur la société Stok France, au motif que celle-ci rencontrait des difficultés financières ; qu'elle a effectué, à la clôture de l'exercice suivant, une dotation complémentaire pour un montant de 200 000 francs, correspondant à la somme qu'elle aurait de nouveau versée à la société Stok France pour contribuer à l'apurement du passif de cette dernière ; que l'administration a réintégré au bénéfice imposable de la société requérante la somme totale du prêt, pour un montant de 245 608 euros au motif que, dès lors que celle-ci ne justifiait ni de la nature, ni de la réalité, ni des motifs des avances consenties, la provision avait été irrégulièrement constituée dès l'origine ; que l'intéressée, qui se borne à invoquer la situation financière dégradée de la société Stok France dès l'année 1994, ce dont elle justifie par l'ouverture, le 30 novembre 1994 d'une procédure de règlement amiable entre la société Stok France et ses créanciers, et l'existence d'une procédure de liquidation judiciaire de ladite société, ouverte le 31 octobre 1996, ne saurait toutefois être regardée comme établissant l'existence de la créance à laquelle cette provision correspondrait, dès lors qu'il résulte au surplus des documents produits qu'elle ne figurait pas parmi les créanciers partie au protocole de règlement amiable du 29 mars 1995 ; qu'il résulte de ce qui précède que l'administration a pu, à bon droit, réintégrer au bénéfice imposable de l'exercice clos en 2002, la provision constituée à raison de la créance litigieuse et reconduite au titre des exercices 1996 à 2002 ; que
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les erreurs et omissions entachant les écritures comptables à l'origine des redressements n'étant pas dépourvues de caractère délibéré, la société requérante n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir qu'il aurait dû être procédé à la correction symétrique des bilans ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de la SOCIETE STOK PROMOTION ne peut qu'être rejetée ; que, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au demeurant non chiffrées, ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SOCIETE STOK PROMOTION est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la SOCIETE STOK PROMOTION et au directeur départemental des finances publiques du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2011, à laquelle siégeaient :
Mme Sichler, présidente,
Mlle Prévot, conseiller,
Mlle Deroc, conseiller,
Lu en audience publique le 17 novembre 2011.
Le rapporteur,
Signé : M. PREVOT
La présidente,
Signé : F. SICHLER
Le greffier,
Signé : H. KELI
La République mande et ordonne au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution du présent jugement.
Pour expédition conforme,
Le Greffier
S. GENDRY

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