Lexbase Social n°842 du 5 novembre 2020 : Télétravail

[Le point sur...] Comment prévenir les risques psychosociaux en télétravail ?

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par Corinne Potier, Avocat associé et Olivier Mambré, Avocat counsel, Flichy Grangé Avocats

le 04 Novembre 2020

De confinement en reconfinement, le recours massif au télétravail constituera certainement l’un des phénomènes marquant de l’année 2020.

Ainsi, de mars à mai 2020, le télétravail est devenu la norme pour environ un tiers des salariés français, alors qu’ils n’étaient que 3 % en 2017 à le pratiquer au moins un jour par semaine [1].

Si le nombre de salariés en télétravail a baissé entre juin et septembre 2020, le confinement en vigueur depuis le 30 octobre devrait marquer le retour du télétravail généralisé pour les salariés pouvant effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance.

Dans le contexte de l’épidémie de Covid-19, le ministère du Travail a établi un protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise.

Ce document constitue, selon le Conseil d’État, « un ensemble de recommandations pour la déclinaison matérielle de l’obligation de sécurité de l’employeur dans le cadre de l’épidémie de Covid-19 en rappelant les obligations qui existent en vertu du Code du travail [2] ».

Dans sa version actualisée au 29 octobre 2020, il est précisé que « dans les circonstances exceptionnelles, liées à la menace de l’épidémie, il [le télétravail] doit être la règle pour l’ensemble des activités qui le permettent. Dans ce cadre, le temps de travail effectué en télétravail est porté à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance ».

La crise sanitaire et le développement des technologies de l’information et de la communication devraient accélérer de façon durable l’essor du télétravail, ainsi qu’en atteste le nombre croissant de signatures d’accords d’entreprise encadrant cette pratique. Ainsi, 1474 accords d’entreprises sur le télétravail ont été signés depuis le début de l’année.

Les organisations patronales et syndicales ont prévu d’ouvrir une négociation sur ce thème.

À ce jour, le télétravail est encadré par un ANI de 2005 (N° Lexbase : L0119KIA) et les dispositions L. 1222-9 (N° Lexbase : L0292LMR) à L. 1222-11 du Code du travail créées par la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 (N° Lexbase : L5099ISN) et modifiées par l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 (N° Lexbase : L7629LGN).

Aux termes de l’article L. 1222-9 du Code du travail, « le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux, de façon volontaire, en utilisant les technologies de l’information et de la communication ».

Ainsi, le télétravail ne constitue ni un statut juridique, ni un régime dérogatoire mais « une forme d’organisation du travail » qui recouvre des situations très différentes selon la taille de l’entreprise, la nature et le secteur d’activité, mais également le contexte de mise en œuvre du télétravail (normal dans des circonstances exceptionnelles comme celles que nous connaissons) et les formes de celui-ci (occasionnel ou régulier, total ou partiel, à domicile ou dans un dans un tiers lieu).

Actuellement mis œuvre par de nombreuses entreprises pour permettre la continuité de l’activité et garantir la protection des travailleurs face à l’épidémie de Covid-19, ce mode d’organisation du travail était à l’origine envisagé comme un facteur d’amélioration de la qualité de vie au travail. Ainsi, dans son préambule, l’ANI du 19 juillet 2005 introduit le télétravail comme « le moyen pour les salariés de concilier vie professionnelle et vie sociale et de leur donner une plus grande autonomie dans l’accomplissement de leurs tâches ». De nombreuses entreprises ont intégré le télétravail dans leurs accords sur la Qualité de Vie au Travail. Les avantages du télétravail sont connus : suppression des temps de transport, meilleure conciliation entre la vie privée et la vie professionnelle. Il favorise également l’autonomie du salarié et permet plus de flexibilité.

Paradoxalement, il a été constaté que le télétravail, en ce qu’il éloigne le salarié de son lieu de travail et de la collectivité des travailleurs, peut être à l’origine de risques psychosociaux. Cette notion, qui n’est pas définie juridiquement, désigne « les risques pour la santé mentale, physique et sociale engendrés par les conditions d’emploi et les facteurs organisationnels et relationnels susceptibles d’interagir avec le fonctionnement mental » [3]. Elle recouvre principalement le stress, ainsi que les violences internes (conflits, harcèlement moral ou sexuel…) et externes (insultes, menaces, agressions, incivilités) rencontrées par les travailleurs. Les risques psychosociaux comportent une dimension éminemment subjective, qui rend difficile leur appréhension.

Ces risques peuvent entraîner des pathologies, telles que des dépressions, des maladies psychosomatiques, des problèmes de sommeil, mais aussi favoriser des TMS, les maladies cardio-vasculaires.

Pour les entreprises, les risques psychosociaux ont également des répercussions organisationnelles et économiques (absentéisme, turn-over, augmentation des accidents du travail, dégradation du climat social, …).

Selon un sondage publié le 28 mai 2020, si les salariés et télétravailleurs français pensent que le télétravail va se développer (88 %), qu’il est positif pour l’environnement (86 %) et qu’il est efficace (58 %). En revanche, 68 % des sondés redoutent ses effets psychologiques (68 %) et 61 % ses effets sur la vie personnelle (61 %) [4].

Selon un autre sondage réalisé en septembre 2020, 60 % des personnes sondées estiment que le travail à distance « crée un stress supplémentaire lié au manque d'interaction, au sentiment de solitude, ou à l'afflux d'e-mails et de réunions virtuelles » et 67 % voient un risque « de ne jamais déconnecter » [5].

Ces risques spécifiques générés par le télétravail doivent être pris en compte par l’employeur dans le cadre de ses obligations générales de prévention, et plus encore lorsque le télétravail est imposé par des circonstances exceptionnelles telles que la crise sanitaire actuelle (I.).

Rappelons que l’employeur est responsable de la santé mentale de ses salariés, qu’ils travaillent sur site ou à distance. Le recours au télétravail n’est pas synonyme pour l’employeur d’externalisation du risque. Or, le fait que le salarié effectue sa prestation de travail hors les murs de l’entreprise rend l’évaluation et la prévention des risques plus délicates.

L’employeur doit donc procéder à une évaluation des risques pertinente, qui lui permettra d’identifier les facteurs d’émergence des RPS en situation de télétravail (II.) et de mettre en place des mesures de préventions adéquates, en s’inspirant des bonnes pratiques en la matière (III.).

I. Les obligations de prévention des RPS en situation de télétravail

1.1 L’employeur est tenu aux mêmes obligations de droit commun vis-à-vis du salarié en télétravail que des salariés travaillant dans les locaux de l’entreprise (C. trav., art. L. 1222-10 N° Lexbase : L8105LGB).

Les dispositions légales et conventionnelles relatives à la santé et à la sécurité des travailleurs sont applicables aux télétravailleurs. L’employeur doit veiller à leur strict respect (ANI du 19 juillet 2005 relatif au télétravail, art. 8).

À ce titre, le salarié en télétravail bénéficie des mêmes formations à la sécurité et fait l’objet d’un suivi par le service de santé au travail dans les mêmes conditions que les autres salariés.

Enfin, le télétravailleur est couvert par la législation sur les risques professionnels. À ce titre, les atteintes psychiques du télétravailleur sont susceptibles d’être pris en charge en tant qu’accident du travail ou maladie professionnelle, dans le cadre du système complémentaire (CSS, art. L. 461-1, al. 9 N° Lexbase : L8868LHW).

À cet égard, l’article L. 1222-9 du Code du travail, modifié par l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, prévoit que « l’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l'exercice de l'activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail au sens de l'article L. 411-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5211ADD) ».

Ces dispositions soulèvent des difficultés d’ordre pratique, s’agissant notamment de la preuve de la matérialité du fait accidentel par le salarié d’une part, et d’autre part de son rattachement à « l’exercice de l’activité professionnelle », alors que la frontière entre la vie privée et l’exercice de l’activité professionnelle a tendance à s’estomper en télétravail, particulièrement pour les salariés non soumis à un horaire de travail.

Le critère de l’autorité de l’employeur devient lui-même plus difficile à appréhender en situation de télétravail.

Or, les enjeux financiers pour les employeurs sont importants en cas de reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie ou d’un accident, compte tenu notamment des modalités de tarification des accidents du travail pour les entreprises de plus de 20 salariés.

1.2 L’évaluation des risques est au cœur de la démarche de prévention des risques (C. trav., art. L. 4121-2 N° Lexbase : L6801K9R). L’identification, l’analyse et le classement des risques permettent de définir les mesures de prévention adéquates, couvrant les dimensions techniques, humaines et organisationnelles.

Dans le cadre de la démarche d’évaluation des risques, l’employeur doit évaluer et prévenir les risques psychosociaux au même titre que les autres risques professionnels pour l’ensemble des salariés en y associant les instances représentatives du personnel ainsi que le service de santé au travail et les salariés eux-mêmes, dans la mesure du possible.

À la différence des risques physiques, les risques psychosociaux sont potentiellement présents dans tous les contextes de travail.

Leur évaluation nécessite l’identification des facteurs de risque de stress, de violences externes et de violences internes par unité de travail de l’entreprise. Il convient d’apprécier le niveau de risque auquel les salariés sont soumis au regard de situations de travail réelles, sur la base de critères préalablement définis.

S’agissant plus particulièrement de l’évaluation des risques psychosociaux en situation de télétravail, il devra être distingué selon le contexte de recours au télétravail (planifié ou imposé dans des circonstances exceptionnelles), de ses modalités de mise en œuvre (fréquence, nombre de jours télé-travaillés, lieu d’exercice) et des salariés concernés.

À cet égard, il est certain que le recours au télétravail total nécessite une vigilance accrue, les risques étant susceptibles d’être majorés dans une telle situation.

Les résultats de l’évaluation des risques sont retranscrits dans le document unique d’évaluation des risques (DUER) (C. trav., art. R. 4121-1 N° Lexbase : L9062IPC).

La mise en œuvre du télétravail constitue un aménagement important modifiant les conditions de travail qui rend nécessaire la mise à jour du DUER en application de l’article R. 4121-2 du Code du travail (N° Lexbase : L9061IPB).

Les ordonnances de référé rendues dans le cadre de la reprise et de la poursuite de l’activité dans le contexte de la Covid-19 ont rappelé la nécessité pour l’employeur d’évaluer les risques psychosociaux en cas de modification substantielle des conditions de travail.

Ainsi, par ordonnance du 9 avril 2020, le tribunal judiciaire de Paris (TJ Paris, Référé, 9 avril 2020, n° 20/52223 N° Lexbase : A32273L4) a ordonné à La Poste de mettre à jour son document unique d’évaluation des risques en intégrant notamment les « risques psychosociaux résultant de l’épidémie ».

Par ordonnance du 14 avril 2020 (TJ Nanterre, Référé, 14 avril 2020, n° 20/00503 N° Lexbase : A79303KW), confirmée par la cour d’appel de Versailles (CA Versailles, 24 avril 2020, n° 20/01993 N° Lexbase : A99883K7), le tribunal judiciaire de Nanterre a ordonné à Amazon de procéder, en y associant les représentants du personnel, à l’évaluation des risques professionnels inhérents à l’épidémie de Covid-19 sur l’ensemble de ses entrepôts.

Dans sa décision, le tribunal a indiqué « qu’il est particulièrement nécessaire que cette évaluation rende compte des effets sur la santé mentale induits notamment par les changements organisationnels incessants (modification des plages de travail et de pause, télétravail, …), les nouvelles contraintes de travail, la surveillance soutenue mise en place quant au respect des règles de distanciation et les inquiétudes légitimes des salariés par rapport au risque de contamination à tous les niveaux de l’entreprise. »

Si le télétravail n’a pas été identifié par les juges comme source de RPS en tant que tel, il est cité parmi « les changements organisationnels incessants susceptibles d’avoir des conséquences sur la santé mentale des salariés ».

Il pourrait être objecté que ces décisions ont été rendues dans un contexte anxiogène et source de multiples inquiétudes pour les salariés (peur d’être contaminé, peur pour ses proches, peur de perdre son emploi…) et que le recours contraint au « télétravail de crise » n’est pas comparable au télétravail mis en œuvre de façon volontaire et dans des conditions normales.

Il n’en demeure pas moins que le télétravail, même mis en œuvre dans des conditions normales, en ce qu’il constitue une modification importante des conditions de travail, est susceptible d’avoir un impact sur la santé mentale des salariés qui doit être pris en compte dans l’évaluation des risques, à l’instar de ce qui est attendu en matière de restructurations (notamment : CAA Versailles, 22 octobre 2014, n° 14VE02408 N° Lexbase : A1158M7Z).

1.3 En application de l’article L. 4121-1 du Code du travail (N° Lexbase : L8043LGY), l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

Dans le cadre de la prévention des risques psychosociaux, l’employeur doit définir avec les acteurs de la prévention des mesures concrètes pour éviter notamment l'isolement du télétravailleur et le risque de sur-connexion (suivi de son travail, aide à l'organisation, obligation de participer aux réunions dans l'entreprise, accès aux informations diffusées par l'entreprise, mise en place d'entretiens périodiques avec son manager, son chef de service, etc.…)

II. Les facteurs d’émergence des RPS en situation de télétravail

Sans que cela ne dispense l’employeur de la mise en œuvre d’une évaluation des risques pertinente, qui seule, permet d’évaluer le risque au regard de la diversité des situations rencontrées et de déterminer les mesures de prévention adéquates, les principaux facteurs d’émergence des RPS en situation de télétravail concernent l’environnement de travail (2.1), les relations de travail à distance (2.2), la gestion du temps et de la charge de travail (2.3).

2.1 L’environnement de travail

Le télétravail s’effectue le plus souvent au domicile personnel du salarié ce qui peut être source de tensions. En effet, selon la configuration du logement et l’entourage familial, le télétravailleur aura plus ou moins de faciliter à séparer la sphère privée de la sphère professionnelle (présence d’autres membres de la famille…).

En l’absence notamment d’espace dédié à l’activité professionnelle, le domicile ne permet pas toujours des conditions de travail satisfaisantes.

En outre, la modification de l’environnement de travail entraîne une séparation avec le collectif de travail, qui peut être à l’origine d’un sentiment d’isolement. Cet isolement est susceptible d’être un facteur de stress, le salarié n’ayant, en cas de difficulté, pas d’interlocuteur accessible directement et immédiatement.

Cet isolement peut également être renforcé par la dépendance aux nouvelles technologies qu’implique le télétravail en cas de dysfonctionnement (problème de connexion, lenteurs, etc…) ou par un manque de maîtrise par le salarié des outils informatiques.

En outre, l’éloignement rend plus difficile le repérage des situations d’addiction ou de souffrance au travail.

2.2 Les relations de travail à distance

Le télétravail réduit les sollicitations et les interruptions professionnelles de toute nature. En cela, il favorise la concentration et l’autonomie. À l’inverse, en diminuant le nombre d’interactions, le télétravail peut nuire à la communication, au processus d’apprentissage des compétences et à la créativité. En outre, le risque de perte de motivation existe.

Par ailleurs, le télétravail nécessite une plus grande autonomie qui peut se révéler source d’angoisse selon les individus.

Enfin, le télétravailleur peut avoir le sentiment de ne plus bénéficier des mêmes informations et des mêmes droits que les salariés restant au bureau et souffrir d’un manque de visibilité vis-à-vis de ses collègues et de sa hiérarchie.

À l’inverse, les salariés qui ne sont pas éligibles au télétravail pourraient se sentir lésés et nourrir, à ce titre, du ressentiment.

2.3 La gestion du temps et de la charge de travail

L’autonomie et la flexibilité dans la gestion du temps et de la charge de travail peuvent s’avérer être des facteurs d’émergence de RPS.

Le salarié peut être enclin à empiéter sur sa vie privée pour terminer sa prestation de travail. Le télétravailleur aura ainsi tendance à se reconnecter le soir ou le week-end, pour terminer une tâche urgente, compenser une interruption pour des motifs personnels non prévue etc….

Ce phénomène est amplifié par la forte utilisation des TIC, avec un risque d’excès de connexions professionnelles susceptible de porter atteinte à la santé du salarié.

Une étude récente a montré un allongement de la durée de travail de 48,5 minutes par jour en télétravail [6].

À l’inverse, les interférences de la sphère personnelle sur l’activité professionnelle peuvent générer du stress. Le salarié, qui face à ces interférences, ne fait pas preuve d’autodiscipline, peut éprouver des difficultés à s’organiser et à gérer son temps de travail.

III.  Les bonnes pratiques d’organisation du travail à distance

3.1 Définir un cadre et des règles claires

Définir un cadre et des règles claires pour le télétravail contribue à la sérénité des relations de travail et participe, à ce titre, à la prévention des risques psychosociaux.

Aussi, pour ces raisons, la signature d’un accord collectif ou la rédaction d’une charte, si elles ne sont pas obligatoires, sont vivement recommandées.

L’accord ou la charte doivent règlementer les conditions de recours au télétravail ainsi que les modalités de son exercice en distinguant le télétravail régulier, occasionnel, en circonstances exceptionnelles. Ces documents doivent impérativement préciser :

1° les conditions de passage en télétravail, en particulier en cas d'épisode de pollution mentionné à l'article L. 223-1 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L3442LUZ), et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
2° les modalités d'acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
3° les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
4° la détermination des plages horaires durant lesquelles l'employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail ;

5° les modalités d'accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail, en application des mesures prévues à l'article L. 5213-6 (N° Lexbase : L7307K9I ; article L. 1222-9 du Code du travail).

Il est recommandé de compléter ces dispositions en précisant notamment :

  • les conditions d’éligibilité au télétravail (métiers éligibles, contrats de travails concernés, condition d’ancienneté, degré d’autonomie requis, matériels informatiques et connexion internet dont doit disposer le salarié, conformité des installations électriques…) ;
  • les modalités de mise en place du télétravail (entrée dans le dispositif, période d’adaptation…) ;
  • les modalités d’organisation du télétravail (lieux de télétravail autorisés ; nombre et répartition des jours télétravaillés ; conditions d’utilisation des équipements, protection des données…) ;
  • l’accompagnement et le suivi du télétravail (informations, formations, entretiens…) ;
  • la santé et la sécurité du télétravailleur (Information des télétravailleurs de la politique en matière de santé et de sécurité et règles relatives aux écrans ; prise en compte des risques spécifiques au télétravail, et notamment des risques psychosociaux…) ;
  • le cas échéant, la prise en charge des frais occasionnés par télétravail.

3.2 Veiller à la charge de travail et à une utilisation raisonnée des nouvelles technologies

Le télétravail, qui constitue un mode d’organisation du travail, ne doit générer aucune modification du temps et de la charge de travail.

Le suivi de l’activité et de la charge de travail des télétravailleurs peut s’avérer complexe en raison de la distance. Il importe donc que l’évaluation de l’activité et de la charge de travail fassent l’objet d’échanges réguliers entre le salarié et sa hiérarchie.

Les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail sont obligatoirement contenues dans l’accord collectif ou la charte organisant le télétravail.

Même en l’absence d’accord collectif ou de charte, l’article L. 1222-10 du Code du travail prévoit que l’employeur est tenu d’organiser un entretien annuel qui porte sur les conditions et la charge de travail.

L’employeur doit en outre veiller tout particulièrement à une utilisation raisonnée par les télétravailleurs des nouvelles technologies. En effet, leur environnement de travail à domicile fait qu’ils sont plus fortement exposés à des risques de sur-connexion.

Cet impératif renvoie au droit à la déconnexion qui doit être un enjeu collectif afin de réguler l’utilisation des nouvelles technologies.

3.3 Maintenir le collectif de travail

Le protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise établi par le ministère du Travail recommande aux employeurs de « veiller au maintien des liens au sein du collectif de travail et à la prévention des risques liés à l’isolement des salariés en télétravail ».

Face au risque d’isolement du salarié en télétravail, il est essentiel pour l’employeur de maintenir les liens au sein du collectif de travail.

Dans cette perspective, il est conseillé de favoriser une modalité de télétravail avec quelques jours obligatoires de présence par semaine sur le lieu de travail. En outre, il est primordial d’entretenir le lien social en instaurant :

  • une plage horaire de disponibilité à distance du manager ;
  • des réunions d’équipe périodique sur site et en visio-conférence ;
  • des jours de présence sur le lieu de travail avec le manager ;
  • un accès à une ressource d’informations commune et un partage d’informations afin que tous les salariés aient le même niveau d’information ;
  • des événements et moments de convivialité.

Le manager a un rôle essentiel dans le maintien du collectif de travail. Il doit s’approprier cette nouvelle forme d’organisation du travail.

Il est donc recommandé de sensibiliser les managers aux bonnes pratiques managériales en matière de télétravail ainsi qu’à l’identification et à la prévention des risques psychosociaux.

Toutes les activités professionnelles ne sont pas compatibles avec le télétravail et tous les salariés n’ont pas nécessairement les aptitudes nécessaires au télétravail, en termes d’autonomie et d’organisation et d’autodiscipline. En outre, certaines personnes ne souhaitent pas télétravailler et vivent mal ce qu’elles perçoivent comme une mise à l’écart du collectif.

Quand il est possible, en dehors de circonstances exceptionnelles, le télétravail s’inscrit dans une démarche d’amélioration des conditions de travail. À ce titre, sa mise en œuvre, qui repose sur le volontariat, nécessite des règles claires, une confiance réciproque et un accompagnement du télétravailleur.

En cas de circonstances exceptionnelles comme celles que nous connaissons actuellement, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l'activité et garantir la protection des salariés (C. trav., art. L. 1222-11). À ce titre, il peut être imposé au salarié, sans formalisme particulier.

Dans ce contexte, la poursuite du télétravail rend plus que jamais nécessaire l’évaluation des risques spécifiques au télétravail, et spécialement des risques psychosociaux, s’agissant d’un télétravail imposé et pas nécessairement encadré.

 

[1] Analyses DARES « Quels sont les salariés concernés par le travail » - novembre 2019.

[2] CE référé, 19 octobre 2020, n° 444809 (N° Lexbase : A15623YI).

[3] Mesurer les facteurs psychosociaux de risque au travail pour les maîtriser, rapport du collège d’expertise sur le suivi des risques psychosociaux au travail faisant suite à la demande du ministre du Travail.

[4] Odoxa pour Saegus et BFM Business.

[5] OpinionWay pour Harmonie Mutuelle – « Les Français et le télétravail ».

[6] Etude menée par des chercheurs de la Harvard Business School et de la New York University.

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