La lettre juridique n°754 du 20 septembre 2018 : Droit des étrangers

[Jurisprudence] «Délit de solidarité» : le Conseil constitutionnel étend l’immunité de l’article L. 622-4 du CESEDA au nom du principe de fraternité

Réf. : Cons. const., décision n° 2018-717/718 QPC, du 6 juillet 2018 (N° Lexbase : A1710XWA)

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N5498BXW

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par Serge Slama, Professeur de droit public, Université Grenoble Alpes, CESICE

le 19 Septembre 2018

Mots-clés : Droit des étrangers / Constitutionnalité / Délit de solidarité / Fraternité / Loi "Asile - Immigration"

La décision commentée [1] fera date en raison de la reconnaissance de la valeur constitutionnelle du principe de fraternité et de l’un de ses corollaires, la liberté d’aider d’autrui à titre humanitaire. Cette nouvelle liberté fondamentale permet au Conseil constitutionnel d’étendre l’exemption pénale de l’article L. 622-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L8952IU4), qui était réservée à la seule aide au séjour irrégulier, à l’aide à la circulation dès lors que la seconde constitue l’accessoire de la première, ainsi que l’immunité humanitaire du 3° de ce même article. Toutefois, sur le fondement d’un raisonnement critiquable, le juge constitutionnel exclut expressément que l’exemption puisse bénéficier aux cas d’aide à l’entrée irrégulière. Il écarte aussi les griefs tirés de la méconnaissance des principes de légalité des délits et des peines et de nécessité et de proportionnalité des peines. En outre, dans la mesure où le Conseil constitutionnel n’a pas exercé de contrôle de constitutionnalité sur l’article L. 622-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L8951IU3) on ne peut valablement considérer que le «délit de solidarité», selon l’expression consacrée, a été «aboli». Alors qu’il avait jusqu’au 1er décembre 2018 pour modifier l’article L.622-4, le législateur a d’ores et déjà saisi l’occasion de l’examen du projet de loi «asile-immigration-intégration» (loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie N° Lexbase : L9696LLP), pour faire évoluer l’immunité tout en exigeant, de manière critiquable, que l’aide au séjour ou à la circulation apportée soit «exclusivement» dans un but humanitaire.

Si la décision «Cédric H.» du 6 juillet 2018 est assurément une «grande» décision du Conseil constitutionnel ce n’est pas parce qu’elle aurait permis l’abolition de ce qu’on appelle communément le «délit de solidarité» [2], c’est-à-dire la possibilité de poursuivre une personne qui, de manière désintéressé, aide un sans-papier, mais en raison de la reconnaissance, pour la première fois, de la valeur constitutionnelle du principe de fraternité ainsi que la consécration, comme corollaire, d’une nouvelle liberté garantie par la Constitution : la liberté d’aider autrui à titre humanitaire. C’est d’ailleurs le caractère «nouveau» de ce grief d’inconstitutionnalité qui avait formellement justifié la transmission par la Cour de cassation [3] des deux QPC déposées par Cédric Herrou et Pierre-Alain Mannoni à l’occasion des pourvois en cassation introduits contre les décisions de la cour d’appel d’Aix les condamnant sur le fondement de l’article L. 622-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et écartant à leur bénéfice l’exemption pénale de l’article 622-4, 3° [4].

 

En se plaçant délibérément sur le caractère nouveau, et non sur le caractère sérieux, de la question de constitutionnalité, la Cour de cassation indiquait d’ores et déjà l’importance qu’elle accordait à ce grief et à ce que le Conseil constitutionnel se prononce expressément sur la reconnaissance de valeur et du caractère normatif du principe de fraternité.

 

Preuve de l’importance de la décision, le président du Conseil constitutionnel, Laurent Fabius, a de manière inhabituelle pris la parole publiquement pour la commenter en insistant sur le fait qu’ «à l’instar de la liberté et de l’égalité qui sont les deux autres termes de la devise de notre République, la fraternité devra être respectée comme principe constitutionnel par le législateur et elle pourra être invoquée devant les juridictions» [5]. Cela constitue la confirmation que les Sages de la rue Montpensier ont entendu faire de la décision n° 2018/717-718 QPC une «grande» décision marquant l’histoire constitutionnelle. Les occasions sont, en effet, peu fréquentes pour le juge constitutionnel de constater pour la première fois la valeur constitutionnelle d’un principe républicain et de consacrer une nouvelle liberté fondamentale invocable par les justiciables devant les juridictions.

 

Le Conseil constitutionnel ne se prononce, toutefois, pas expressément sur la constitutionnalité de l’article L. 622-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - cette fameuse disposition du statut des étrangers qui depuis 1938 permet de réprimer toute personne, physique ou morale, qui «aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un étranger en France». Certes, la Cour de cassation a bien transmis au juge constitutionnel deux QPC portant sur les dispositions des articles L. 622-1 et L. 622-4 (dans sa rédaction résultant de la loi «Valls» du 31 décembre 2012 N° Lexbase : L8109IUU). Toutefois, même si deux dispositions fondent les condamnations de l’agriculteur et du chercheur, et sont donc bien applicables au litige (cons. 2), le Conseil constitutionnel a, eu égard à l’argumentation des parties et des nombreuses associations tiers intervenantes [6], décidé de restreindre la QPC à l’examen des seuls mots «au séjour irrégulier» figurant au premier alinéa de l'article L. 622-4 (qu’il va censurer en reportant l’effet de sa décision au 1er décembre 2018) ainsi que du 3° de ce même article (à propos duquel il va formuler une réserve d’interprétation d’effet immédiat). La stratégie des requérants a, en effet, été de focaliser la discussion constitutionnelle sur l’étendue de l’immunité pénale, insuffisante à leurs yeux, et non sur l’incrimination en elle-même. Même si la seule solution pour réellement «abolir» le «délit de solidarité» serait de réécrire ou d’abroger l’article L. 622-1 afin d’exclure que toute aide désintéressée de cette incrimination, il était évident, en l’état de la jurisprudence, que le Conseil constitutionnel ne remettrait pas en cause la définition de ce délit aussi large soit-elle [7].

Formellement l’article L. 622-1 peut donc encore faire l’objet d’une QPC et le «délit d’hospitalité», selon l’expression de Jacques Derrida, existe toujours [8]. Dans l’absolu l’article L. 622-4, 3° pourrait d’ailleurs aussi faire l’objet d’une nouvelle question de constitutionnalité puisque pour tenter de se conformer à la décision n° 2018/717-718 le Gouvernement a saisi l’opportunité qui lui offrait, après l’échec de la commission mixte paritaire, l’examen en seconde lecture devant l’Assemblée nationale du projet de loi «asile-immigration-intégration» pour faire amender en séance le texte (amendement n°472 des députés "LREM" du 21 juillet 2018 et n°479 des députés "Modem"). Si celui-ci procède bien à une extension de l’exemption pénale à «toute autre aide» apportée, le but poursuivi doit être désormais «exclusivement» humanitaire. On peut penser que le Gouvernement a ainsi entendu exclure du bénéfice de l’immunité les personnes qui aident les migrants également par militantisme. On peut, néanmoins, se demander si l’ajout de cet adverbe ne restreint pas abusivement la réserve d’interprétation formulée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 juillet.

Malgré ces tergiversations, il n’en reste pas moins que la reconnaissance de la valeur constitutionnelle du principe de fraternité, défendue de longue date par le Professeur Michel Borgetto [9], et la consécration de la liberté d’aider autrui à titre humanitaire permet au Conseil constitutionnel d’étendre l’exemption pénale de l’article L. 622-4 mais aussi le champ des possibles du contrôle de constitutionnalité (I). Toutefois, la conciliation de ce principe avec l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public, dont fait partie la lutte contre l’immigration irrégulière, amène, de manière critiquable, le juge constitutionnel à faire une application à géométrie variable de ce principe en laissant la possibilité pour le législateur de maintenir certaines formes de pénalisation d’actes de solidarité dès lors qu’elle n’est pas guidée par un but humanitaire (II).

 

I - Au nom de la fraternité : une extension de l’immunité pénale de l’article L. 622-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du champ des possibles du contrôle de constitutionnalité

 

La reconnaissance de la valeur constitutionnelle du principe de fraternité, et de son invocabilité en QPC, constitue un progrès indéniable du contrôle de constitutionnalité (A.). Et ce d’autant plus que ce principe est immédiatement concrétisé par la consécration d’une nouvelle liberté fondamentale, invocable elle-aussi en QPC mais aussi, selon toute vraisemblance, en référé-liberté. Elle permet, en l’espèce, au Conseil de censurer l’article L. 622-4 en ce qu’il n’incluait pas l’aide à la circulation irrégulière qui constitue, aux yeux du juge constitutionnel, un accessoire de l’aide au séjour, du champ de cette immunité familiale ou humanitaire (B.).

 

A - Un progrès indéniable du contrôle de constitutionnalité : la reconnaissance de la valeur constitutionnelle de la fraternité et de son invocabilité en QPC

 

La valeur constitutionnelle du principe de fraternité ne faisait aucun doute. Il s’agit même d’un des principes matriciels le plus fréquemment mentionné dans la Constitution de 1958 (N° Lexbase : L7403HHN) et l’un des plus constants des constitutions et de la devise républicaines. C’est même un des principes distinctifs entre les constitutions républicaines et celles des autres régimes (monarchiques, impériaux ou autoritaires). On connaît aussi l’attachement des révolutionnaires et des quarante-huitards à ce principe, notamment sous l’influence de la franc-maçonnerie [10].

Dès la Révolution les trois termes «Liberté, Egalité, Fraternité» s’imposent comme éléments constitutifs de la devise républicaine [11]. Eclipsés sous le Directoire, le Consulat, la Restauration et la Monarchie de Juillet, ils redeviennent la devise officielle de la République en 1848 aussi bien sous la IIème que la IIIème Républiques. Remplacée par le triptyque «Travail, Famille, Patrie» sous le régime de Vichy, la devise est naturellement rétablie par la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L1356A94) (article 2) et reprise, sans discussion, par la Constitution de 1958 (article 2, alinéa 4) [12].

La fraternité est mentionnée et concrétisée à deux reprises dans le Préambule de la Constitution de 1848 puis dans celle de 1946. Il est aussi fait mention de ce principe, en sus de son article 2 mentionnant la devise, à deux autres reprises dans la Constitution de 1958 : d’une part, le Préambule de la Constitution qualifie la fraternité, au même titre que la liberté et l’égalité, d’«idéal commun» sur lequel sont fondées les institutions nouvelles offertes aux territoires d’outre-mer manifestant leur volonté d’y adhérer (soit la «Communauté» alors instituée aux articles 77 à 87, abrogés en 1995) ; le premier alinéa de l’article 72-3 dispose enfin que «la République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité».

Au regard de ces solides bases constitutionnelles il y avait donc tout lieu de penser que le Conseil constitutionnel ne pouvait valablement déclarer sans fondement la QPC transmise visant à la reconnaissance de la valeur constitutionnelle du principe de fraternité.

Et de manière limpide, le Conseil constate dans son considérant 7 qu’«il ressort» de ces dispositions, et du Préambule de 1946, que «la fraternité est un principe à valeur constitutionnelle». La formulation utilisée est exactement la même que celle de la décision de 1994 par laquelle il avait consacré la valeur constitutionnelle du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine qui «ressortait» de la première phrase du Préambule de 1946 [13].

Mais si cette valeur constitutionnelle ne faisait aucun doute on pouvait davantage s’interroger sur juridicité et son contenu précis, notamment lorsque ce principe est invoqué en QPC. Ainsi, le Conseil constitutionnel n’a pas encore eu l’occasion de donner un contenu concret en QPC au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine [14]. Mais depuis 2008, il a été clairement affirmé, à propos de la Charte de l’environnement, aussi bien par le juge constitutionnel [15] que le juge administratif [16] que toutes les dispositions de celles-ci, quel que soit leur degré de normativité, sont invocables devant un juge.

 

Certains universitaires, en particulier le Professeur Michel Borgetto, à qui il faut rendre hommage tant il a été le promoteur infatigable de la fraternité depuis sa thèse de référence [17], défendaient la valeur constitutionnelle de ce principe mais aussi sa juridicité. Dans un point de vue publié par la Revue (grenobloise) des droits et libertés fondamentaux (RDLF) le directeur du CERSA soutenait en ce sens la possibilité d’«identifier un certain nombre de conséquences ou de traductions juridiques générales […] au-delà, d’en déduire l’application particulière qui devrait en être faite s’agissant des dispositions litigieuses» [18]. Ont sûrement, également, pesé dans la consécration de la juridicité du principe de fraternité les prises de position d’anciens membres du Conseil. En effet, Guy Canivet avait soutenu, dans une conférence mise en ligne sur le site de la juridiction constitutionnelle, que «l’idée selon laquelle la fraternité se révèlerait incapable de légitimer et de fonder des droits et obligations juridiquement contraignants est démentie aussi bien par l’analyse historique que par la théorie juridique» [19]. Dans le même sens Jean-Claude Colliard annonçait que «viendrait maintenant le temps de la fraternité» [20].

La prédiction du regretté doyen s’est avéré juste. Mais quel contenu fallait-il donner à ce principe ?  Sans s’engager plus en avant, le Conseil consacre uniquement dans sa décision du 6 juillet une nouvelle liberté fondamentale, de circonstance, en consacrant la liberté d’aider à titre humanitaire son prochain, y compris s’il est en situation irrégulière.

 

B - La consécration de la liberté fondamentale d’aider autrui à titre humanitaire, invocable en QPC et en référé-liberté

 

Dans ses écrits, Michel Borgetto défend l’idée que le principe de fraternité à deux dimensions, l'une collective, fondée sur l’exigence de solidarité et l’autre, individuelle (ou plus précisément interindividuelle), fondée sur l’exigence de tolérance à l’égard, par exemple, des formes d’entraide apportées à des personnes en détresse en dépit de leur caractère délictueux [21]. Prudemment, le Conseil constitutionnel ne précise pas davantage les composantes du principe constitutionnel de fraternité, laissant ouvert le champ des possibles. Il se contente uniquement -et c’est déjà beaucoup- de lui reconnaître un contenu «cousu main» visant à juger de la constitutionnalité de l’immunité de l’article L. 622-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en faisant découler, dans son considérant 8, de ce principe une nouvelle liberté constitutionnelle, à savoir «la liberté d'aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national».

 

Il est probable que le juge constitutionnel n’a pas voulu aller plus en avant dans la détermination du contenu matériel du principe de fraternité, afin de ne pas s’interdire par la suite de possibles futurs développements de ce principe mais aussi, d’un point de vue stratégique, pour ne pas provoquer la crainte du Gouvernement ou l’ire du Législateur ou des accusations du «Gouvernement des juges» [22]. Il se réserve donc la possibilité, à d’autres occasions, de donner, ou pas, un contenu plus précis et de déduire d’autres corollaires de ce principe matriciel. Le commentaire des services du Conseil (p. 19) ne fait d’ailleurs pas mystère que ce principe «pourra éventuellement trouver d’autres applications à l’avenir»…

 

Le progrès pour la défense des droits de l’Homme est donc indéniable dans la mesure où le principe de fraternité et la liberté nouvelle dégagée dans l’affaire «Cédric H.» pourront non seulement être invoqués en QPC par des justiciables à l’encontre d’autres dispositions législatives anti-solidaires qui y contreviendraient mais aussi devant le juge judiciaire et le juge administratif. Le champ des possibles est donc largement ouvert.

 

Le principe et la nouvelle liberté fondamentale ont d’ailleurs d’ores et déjà été invoqués en référé-liberté dans une requête à l’encontre d’un arrêté anti-mendicité du maire de Besançon. Et, sans faire droit à la requête, le juge des référés du TA de Besançon a déduit, dans une ordonnance du 28 août -qui a donné lieu à un appel devant le Conseil d’Etat-, du principe de fraternité «la liberté fondamentale d’aider autrui dans un but humanitaire» [23].

 

Mais comme le relève ce juge des référés bisontin le Conseil constitutionnel a aussi considéré que ce principe «ne revêt […] pas un caractère général et absolu et doit être conciliée, notamment avec l’objectif de préservation de l’ordre public», Dans sa décision n° 2018/717-718 QPC, le Conseil a, en effet, fait une application à géométrie variable du principe de fraternité par sa conciliation avec l’exigence de lutte contre l’immigration irrégulière, composante de l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public.

 

II - Au nom de la lutte contre l’immigration irrégulière : une application à géométrie variable de la solidarité

 

A la lecture de la décision du 6 juillet 2018, l’enthousiasme suscité par la consécration de la valeur constitutionnelle de la fraternité est rapidement refroidi lorsqu’on découvre que le juge constitutionnel tempère la portée de ce principe au nom de l’exigence de lutte contre l’immigration irrégulière. Par ce truchement, le juge constitutionnel module sa portée selon que l’aide humanitaire apportée concerne la circulation, qui doit bénéficier de la même immunité que le séjour, ou l’entrée qui en est exclue (A). Il écarte aussi les griefs portant sur la méconnaissance des principes de légalité des délits et des peines et de nécessité et de proportionnalité des peines en considérant que le législateur avait pu valablement ne pas prévoir «d'exemption pénale, hors du cercle familial, en cas d'aide au séjour irrégulier dans un but autre qu'humanitaire», interrogeant par suite la portée de la décision s’agissant des actes de solidarité qui ne poursuivent pas un but exclusivement humanitaire mais s’inscrivent aussi dans une démarche militante (B).

 

A - Une extension de l’exemption pénale de l’article L. 622-4 à l’aide à la circulation irrégulière

 

Pour tempérer la portée du principe de fraternité à l’égard des étrangers, le Conseil constitutionnel rappelle d’abord, d’une part et de manière classique depuis 1993, qu’ «aucun principe non plus qu'aucune règle de valeur constitutionnelle n'assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d'accès et de séjour sur le territoire national» [24] et d’autre part, comme il le fait depuis 2011, que ce principe doit se concilier avec «l'objectif de lutte contre l'immigration irrégulière» qui participe à l’objectif de valeur constitutionnelle de la sauvegarde de l'ordre public [25].

En premier lieu, le résultat de cette conciliation permet au Conseil constitutionnel d’invalider L. 622-4, 3° car ces dispositions ne permettaient le bénéfice de l’exemption pénale qu’au bénéfice de la personne mise en cause pour aide au séjour irrégulier et non pour aide à la circulation «lorsqu’elle constitue l'accessoire de l'aide au séjour de l'étranger et si elle est motivée par un but humanitaire» (cons. 13).

Le même raisonnement aurait dû conduire le juge constitutionnel à invalider aussi le fait que cette exemption ne concerne pas non plus l’aide à l’entrée irrégulière.

Pourtant, faisant une application à géométrie variable du principe de fraternité, le Conseil estime que dans ce cas l’objectif de lutte contre l’immigration irrégulière l’emporte de manière absolue sur le principe de fraternité, car l’aide à l’entrée, juge-t-il, «a nécessairement pour conséquence (…) de faire naître une situation illicite» (cons. 12).

En consultant le commentaire officiel de la décision (pp. 21-22) on comprend qu’aux yeux du juge constitutionnel il y avait lieu de distinguer ces deux formes d’aide car la première consistant «à contribuer à l’entrée d’un étranger ne disposant pas du droit à séjourner sur le territoire national», elle «crée par principe une situation irrégulière» alors que la seconde n’a pas la même conséquence s’agissant d’un étranger «déjà présent sur le territoire». Elle peut tout au plus contribuer «à maintenir une situation irrégulière». Un tel raisonnement ne peut que surprendre.

En effet, d’une part, sur le plan des principes, on aurait pourtant pu penser que comme le principe de dignité, le principe de fraternité a nécessairement un caractère absolu et indifférencié à l’égard du bénéficiaire de la fraternité. Le juge constitutionnel le reconnaît d’ailleurs puisque la liberté d’aider autrui dans un but humanitaire concerne toute personne «sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national». De la même façon qu’ils sont indifférents à la situation administrative de la personne aidée, des gestes de fraternité apportée à autrui sont totalement indifférents à la question de savoir s’il est nécessaire, ou non, de franchir une frontière….

 

D’autre part, et d’un point de vue plus juridique, il est tout aussi illicite pour un étranger d’entrer irrégulièrement sur le territoire que de s’y maintenir. En outre, il est inexact de considérer que l’aide apportée à une entrée irrégulière contribue nécessairement à la création d’une situation irrégulière car, dans la pratique, particulièrement dans les cols alpins, on s’aperçoit que les migrants qui traversent les frontières sont souvent des demandeurs d’asile, des mineurs isolés ou d’autres catégories d’étrangers particulièrement vulnérables (étrangers gravement malades, personnes victime de la traite de l’être humain, etc.) qui bénéficient d’un droit au séjour. En outre, s’agissant des demandeurs d’asile la traversée irrégulière d’une frontière n’est pas répréhensible en vertu de l’article 33 de la Convention de Genève de 1951 (N° Lexbase : L6810BHP).  Du reste, même si le délit d’entrée irrégulière figure toujours à l’article L.621-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L1717I3Y) alors que le délit de séjour irrégulier a été abrogé par la loi «Valls» en 2012 à la suite de décisions de la Cour de justice de l’Union européenne [26] et de la Cour de cassation [27], le délit d’entrée irrégulière aurait aussi dû évoluer à la suite de l’arrêt «Affum» [28]. C’est d’ailleurs chose faite puisque se conformer au droit de l’Union européenne, le texte de la loi «Collomb» adopté par le Parlement prévoit d’abroger cette disposition [29].

Certes on peut comprendre la différence de régime juridique entre l’aide à l’entrée et l’aide au séjour irréguliers au regard de la Directive 2002/90/CE du Conseil du 28 novembre 2002 définissant l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irréguliers (N° Lexbase : L7681A8Y), qui elle-même vient appliquer le Protocole de Palerme de 2002 des Nations Unies visant à lutter contre la traite de l’être humain. Pour l’aide à l’entrée ou au transit, l’article 1-1, a. de cette Directive prescrit aux Etats d’adopter des sanctions appropriées à l’encontre de quiconque «aide sciemment» un ressortissant d’un Etat tiers de l’Union européenne «à pénétrer» ou à «transiter» illégalement sur le territoire d'un Etat membre. Dans ce cas, l’article 1-2 autorise expressément les Etats, sans l’imposer, de décider de ne pas prévoir de sanctions dans les cas où le comportement en cause «a pour but d'apporter une aide humanitaire à la personne concernée». En revanche, s’agissant de l’aide au séjour irrégulier, les sanctions ne sont possibles, selon l’article 1-1, b. qu’à l’égard de quiconque aide «sciemment, dans un but lucratif» [30] un ressortissant de pays tiers à séjourner illégalement [31]. Mais dans ce cas-là la Directive couvre implicitement l’aide au séjour à titre humanitaire puisqu’elle est nécessairement non lucrative. Ainsi, le droit de l’Union européenne, sans l’imposer, n’interdit pas aux Etats d’exclure l’aide humanitaire aussi bien du champ de l’aide au séjour que l’aide à l’entrée et au transit irréguliers.

En second lieu, on conçoit mal pourquoi le Conseil constitutionnel précise que l’aide à la circulation serait nécessairement «l’accessoire de l’aide au séjour» alors que ces infractions sont distinctes dans l’article L. 622-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en droit de l’Union européenne.

Le commentaire autorisé justifie la solution adoptée par le Conseil par le fait que l’aide à la circulation «est susceptible de se confondre avec l’aide au séjour dans la mesure où elle suppose nécessairement que la personne étrangère en situation irrégulière se trouve déjà sur le territoire national». Curieusement pour fonder cette décision, le commentaire se réfère au commentaire par Jacques-Henri Robert d’une décision de la Cour de cassation de 2004. Dans cette affaire [32] un chauffeur de taxi avait été mis en cause car il avait transporté des migrants jusqu’à la Manche. Et dans son commentaire le professeur Robert avait noté que «ni les juges du fond ni la Cour de cassation n'allèguent de telles circonstances qui rendraient plus délictueuse l'activité litigieuse. Ils ne cherchent pas non plus à dissocier la 'circulation', évidemment établie et le 'séjour', plus discutable, mais il est vrai que si les étrangers 'circulent' sur le territoire ils y 'séjournent' nécessairement» [33]. C’est donc une opinion doctrinale qui fonde un raisonnement pour le moins critiquable du juge constitutionnel. Même le commentaire des services du Conseil concède in fine qu’en réalité «l’aide à la circulation irrégulière recouvre une disparité de situations, dans lesquelles cette circulation est plus ou moins rattachable au séjour irrégulier» (p. 22).

Par suite, le Conseil constitutionnel censure l’article L. 622-4 seulement en tant qu’il n’inclut pas l’aide à la circulation dans le périmètre de l’exemption pénale au même titre que l’aide au séjour irrégulier.  Il écarte en revanche que l’aide à l’entrée puisse bénéficier de la moindre immunité. Heureusement, le commentaire officiel rappelle utilement, que «l’aide à l’entrée irrégulière n’est pas pénalement réprimée lorsque l’acte constitutif de l’aide est, compte tenu d’un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la personne dès lors que cela constitue alors, en application de l’article 122-7 du Code pénal (N° Lexbase : L2248AM9relatif à l’état de nécessité [34], une cause d’irresponsabilité pénale» (p. 21).

 

On sait, en effet, que dans les cols alpins les sauveteurs en montagne étaient inquiets du risque de poursuites lorsqu’ils portent assistance aux migrants en détresse et parfois, à la suite d’un sauvetage, les véhiculent.

Dans sa décision n° 2018-770 DC du 6 septembre 2018 portant sur la loi «Collomb» (N° Lexbase : A4476X38), il mentionne utilement et expressément à propos de la pénalisation de l’aide à l’entrée irrégulière qu’il est loisible au législateur «de réprimer ce délit, dès lors que, en application de l'article 122-7 du Code pénal, n'est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace autrui, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne, à moins d'une disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace» (cons. 107). Par suite, il confirme dans cette décision qu’en n'instituant pas d'exemption pénale en cas d'aide à l'entrée irrégulière même si celle-ci est apportée dans un but humanitaire, «le législateur n'a pas opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre le principe de fraternité et l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public» (cons. 108).

 

Pour des raisons de sécurité juridique, le Conseil constitutionnel donne, dans sa décision du 6 juillet, au législateur jusqu’au 1er décembre 2018 pour revoir sa copie avant que l’article L. 622-4 ne soit abrogé. Une telle modulation des effets dans le temps tombe à point nommé puisqu’en première lecture du projet de loi «Collomb», l’Assemblée avait d’ores et déjà adopté l’amendement gouvernemental n° 1172  visant à étendre l’immunité pénale applicable au séjour irrégulier à la circulation.

Mais, une fois n’est pas coutume, le Conseil constitutionnel a été plus loin qu’une censure platonique, comme il l’a fréquemment fait durant l’état d’urgence, en ajoutant à sa censure des mots «séjour irrégulier» de l’article L. 622-4 une réserve d’interprétation portant sur l’immunité humanitaire du 3° de cette disposition.

 

B - Les ambiguïtés sur l’extension de l’immunité de l’article L. 622-4, 3° aux (seules ?) fins humanitaires

 

L’habileté des conseils de Cédric Herrou et Pierre-Alain Mannoni a permis de porter le débat sur la limitation de l’immunité humanitaire de l’article L. 622-4, 3°. Cette immunité qui était au cœur de deux arrêts de cours d’appel ayant condamné l’agriculteur et le chercheur résultait d’une vision étriquée de cette immunité par la loi «Valls» de 2012.

Rappelons que l’immunité humanitaire résulte initialement d’une transposition a minima par la loi du 26 novembre 2003 [35] de la «clause humanitaire» de la Directive du 28 novembre 2002 [36]. La formulation retenue par cette loi «Sarkozy», inspirée de la définition de l’état de nécessité, enserrait l’immunité pour motif humanitaire dans d’étroites limites [37]. Par la suite, à l’occasion de la polémique déclenchée par Eric Besson à propos du manifeste des délinquants de la solidarité [38], le ministre de l’Immigration et de l’identité nationale avait publié, avec la ministre de la Justice, Michèle Alliot-Marie, deux circulaires censées clarifier les conditions d’application de l’immunité aux personnes œuvrant dans un contexte humanitaire. Les associations d’aide aux plus démunis, en particulier Emmaüs, les Restos du Cœur ou le Secours catholique, étaient en effet inquiètes du risque de poursuites de leurs salariés ou bénévoles qui assistent, à titre humanitaire, de manière inconditionnelle, toute personne, y compris des sans-papiers. Si le Conseil d’Etat avait alors validé, moyennant certaines réserves, ces circulaires [39], ce contentieux avait servi de levier aux associations pour obtenir, après l’élection de François Hollande à la présidence de la République, que l’article L. 622-4, 3° soit réécrit.

Mais le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, avait alors volontairement limité cette immunité au seul fait pour toute personne physique ou morale de fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux afin d’assurer à l’étranger «des conditions de vie dignes et décentes» ou «toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de celui-ci» et à la condition que l’acte reproché n’ait donné lieu «à aucune contrepartie directe ou indirecte» [40].

Pourtant dès l’adoption de la loi de 2012 [41], des parlementaires de la majorité socialiste avaient souligné que la rédaction de cette disposition était «trop restrictive pour protéger du risque de poursuites pénales les personnes manifestant de façon désintéressée, de quelque façon que ce soit, leur solidarité à l’égard d’un étranger en situation irrégulière» [42].

En tout état de cause, c’est cette rédaction alambiquée qui a permis, dans le contexte de rétablissement des contrôles frontaliers, aux autorités publiques de multiplier les poursuites et condamnations à l’encontre de bénévoles et militants de la Vallée de la Roya ou du Briançonnais afin de dissuader le soutien apporté aux migrants, comme l’illustrent les affaires Herrou et Mannoni.

Saisi du caractère limitatif de cette immunité de l’article L. 622-4, 3°, le Conseil constitutionnel formule une réserve d’interprétation constructive en estimant que ces dispositions ne sauraient, sans méconnaître le principe de fraternité, être interprétées «autrement que comme s'appliquant en outre à tout autre acte d'aide apportée dans un but humanitaire» (cons. 15). Cela revient donc à étendre substantiellement l’immunité humanitaire bien au-delà de la liste fastidieuse, et parcellaire, des cas énumérés par le législateur de 2012. En outre, le juge constitutionnel précise, à la fin de sa décision, la portée de cette réserve d’interprétation en estimant que cette immunité doit s'appliquer non seulement aux actes tendant à faciliter ou à tenter de faciliter, le séjour irrégulier mais aussi la circulation irrégulière «lorsque ces actes sont réalisés dans un but humanitaire» (cons. 24).

En outre, l’avantage d’une telle réserve d’interprétation est qu’elle ne s’applique pas de manière différée au 1er décembre 2018 mais immédiatement aux affaires en cours. Ainsi en raison du principe d’application de la loi pénale la plus douce (rétroactivité in mitius), les différentes personnes faisant l’objet actuellement de poursuites ou condamnations non définitives (notamment, après cassation, MM. Herrou et Mannoni), doivent pouvoir bénéficier de cette extension de l’immunité à tous les cas d’actes d’aide au séjour ou à la circulation réalisés dans un but humanitaire (celle-ci, on l’aura compris, ne s’applique néanmoins pas à l’aide à l’entrée qui concerne certains dossiers en cours).

 

Ainsi, par exemple, la militante d’Amnesty International Martine Landry a été relaxée le 13 juillet 2018 par le tribunal correctionnel de Nice dans un jugement qui a retenu qu’ «en poursuivant comme objectif premier la prise en charge de [deux jeunes] par l’Etat français, [elle] n’a à aucun moment cherché à se soustraire à la loi alors qu’elle a de sa propre initiative amené les deux mineurs auprès des autorités de police ; s’inscrivant ainsi dans le respect du droit et notamment de la CEDH [...] et de la Constitution française en son article 2, en poursuivant une action fraternelle dans un but humanitaire» [43].

 

La réserve d’interprétation formulée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 juillet n’est toutefois pas une surprise car il existait, dans sa jurisprudence, trois précédents dans lesquels, il avait, en vain, déjà pris en compte l’assistance humanitaire apportée par des associations aux sans-papiers [44].

En écartant les griefs tirés de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines et de ceux de nécessité et de proportionnalité des peines résultant de l’article 8 de la DDHC de 1789 (N° Lexbase : L1372A9P), le Conseil constitutionnel confirme l’étendue de cette immunité en estimant que dès lors qu’avec sa réserve «l'immunité pénale prévue par le 3° de l'article L. 622-4 s'applique à tout acte d'aide au séjour apportée dans un but humanitaire», le législateur n’a pas méconnu ces principes «en ne prévoyant pas d'exemption pénale, hors du cercle familial, en cas d'aide au séjour irrégulier dans un but autre qu'humanitaire» (cons. 20.). Là aussi, il avait déjà eu maintes occasions de confronter les immunités, notamment familiales, de ce délit aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines, sur lesquels il n’exerce qu’un contrôle restreint [45], mais aussi au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine [46].

Toutefois cette réserve d’interprétation n’est pas dénuée d’ambiguïté. Car si toutes les actions d’aide au séjour et à la circulation irréguliers à des fins humanitaires sont désormais immunisées [47], la difficulté est d’une part d’identifier ce qu’est un but humanitaire et d’autre part de déterminer si des actions guidées par d’autres motifs -principalement militants- peuvent aussi reposer sur une finalité humanitaire.

Malgré le cinglant désaveu infligé par le juge constitutionnel [48], dès que la décision a été rendue publique, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, s’en est satisfait. En effet, dans un communiqué, il a estimé qu’elle «conforte la position qu’a tenue le Gouvernement lors du débat sur le projet de loi asile, immigration et intégration» et a réaffirmé que l’exemption pénale pour l’aide apportée dans un but humanitaire «ne doit pas s’étendre à l’aide apportée dans un but militant».

Il est vrai que l’amendement n° 1172, adopté par l’Assemblée en première lecture, avait d’ores et déjà étendu l’immunité humanitaire au fait de fournir des conseils et de l’accompagnement, non seulement juridiques mais aussi «linguistiques ou sociaux». Alors que le Sénat était revenu sur cette avancée, certains députés de la majorité «LREM-Modem» ont tenté, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel, d’obtenir une nouvelle extension de l’immunité (N°CL262, du 7 juillet, adoptée en commission et N°CL204 du 6 juillet). Toutefois, avec la volonté de ne pas faire bénéficier de cette immunité les personnes agissant aussi par militantisme [49], le Gouvernement a fait modifier, en séance, ces amendements (amendement n°472 des députés "LREM" du 21 juillet 2018 et n°479 des députés "Modem") en prévoyant expressément, comme cela a été mentionné en introduction, que l’immunité du L. 622-4, 3° n’est susceptible de bénéficier qu’aux personnes physiques ou morales dont l’acte reproché n’a «donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte» et «a consisté à fournir  des conseils ou accompagnements juridiques, linguistiques ou sociaux, ou toute autre aide apportée dans un but exclusivement humanitaire» (article 38 du texte adopté).

Dans cette nouvelle rédaction le législateur exclut donc que l’aide apportée puisse avoir un autre but qu’humanitaire. Pourtant cela ne résulte pas de manière évidente de la décision du 6 juillet qui n’a jamais indiqué que le but humanitaire devait être exclusif. En ce sens d’ailleurs le commentaire autorisé indique qu’«En émettant cette réserve, le Conseil constitutionnel n’a toutefois pas épuisé la question des limites exactes de l’immunité en matière d’aide au séjour et à la circulation des étrangers. En effet, il appartiendra au législateur, s’il entend intervenir à nouveau sur cette question, et, en tout état de cause, aux juridictions compétentes, de déterminer comment doit exactement être apprécié le «but humanitaire» et dans quelle mesure celui-ci peut se combiner avec des actions à visées «militantes» (p. 24). Par suite, rendre la finalité humanitaire exclusive de tout autre but ne nous semble pas conforme à la décision du 8 juillet. La nouvelle rédaction de l’article L. 622-4, 3° s’expose donc à une nouvelle censure dans le cadre d’une nouvelle QPC. Quatre-vingts ans après son invention, le délit d’aide à l’irrégularité n’a pas fini de défrayer la chronique judiciaire et médiatique…

 

 


[1] Déclaration de conflit d’intérêt : sans être auteur de la QPC nous avons connaissance du dossier pour avoir été consulté, comme expert de la question et dans le cadre d’une défense pro bono, par les conseils du requérant.

[2] Cf., les critiques de Paul Cassia sur son blog, Ce qui reste(ra) du délit de solidarité, 9 juillet 2018 ; des «Unes» de journaux comme Le Figaro du 6 juillet ou Le Monde du 7 juillet 2018 qui annoncent, à tort et comme le plupart des médias, l’abolition du «délit de solidarité». V., contra, Kim Hullot-Guiot et Ulysse Bellier, «Délit de solidarité» : la fraternité érigée en principe constitutionnel, Libération, 6 juillet 2018. V., aussi notre analyse, préparatoire à ce commentaire, La fraternité est constitutionnelle mais la solidarité reste un délit, AOC, 13 juillet 2018.

[3] Cass. crim., 9 mai 2018, F-D, deux arrêts, n° 17-85.737 (N° Lexbase : A6218XMA) et n° 17-85.736 (N° Lexbase : A6181XMU).

[4] Cf., CA d’Aix-en-Provence, 13ème ch., 8 août 2017, n° 2017/568 (N° Lexbase : A6565WQ9) ; CA Aix-en-Provence, 13ème ch., 11 septembre 2017, n° 2017/628 (N° Lexbase : N7658BWK) ; V., aussi, nos obs., Délit de solidarité : actualité d’un délit d’une autre époque, Lexbase éd. pub., 2017, n° 456).

[5] Aide aux migrants : le Conseil constitutionnel entérine le «principe de fraternité», AFP, 6 juillet 2018.

[6] V., sur le site du Gisti, les mémoires, observations et tierces interventions de ce dossier QPC. A noter que la CNCDH a aussi, de manière inédite, produit des observations. Toutefois, sans que cela soit mentionné dans la décision, celles-ci ont été déclarées irrecevables car la CNCDH ne dispose pas de la personnalité morale. Elles ont pu, néanmoins, être prises en compte car l’une des associations admises comme tiers intervenantes, la LDH, qui est par ailleurs membre de la CNCDH, a également produit ces observations.

[7] Le commentaire officiel de la décision souligne le caractère très large de l’incrimination (en s’appuyant principalement sur l’étude de Marc Segonds, «Etrangers», J.-Cl. Lois pénales spéciales, Fasc. 20, 2016, § 2).

[8] Jacques Derrida, Quand j’ai entendu l’expression "délit d’hospitalité"…, Plein droit, 1997, n° 3, réédité dans Le Monde, 19 janvier 2018.

[9] Cf., son décryptage de la décision : M. Borgetto, Principe de fraternité» : comment traduire la décision du Conseil constitutionnel ?, Club des juristes, 10 juillet 2018.

[10] C’est toujours le cas aujourd’hui. Ainsi, après la décision du 6 juillet, le Grand Orient de France publiait un communiqué intitulé «La fraternité, du devoir moral au principe constitutionnel» dans lequel il notait : «Au moment même où le Grand Orient de France lance un appel à la Fraternité», il semble que les sages du Conseil constitutionnel lui aient répondu -volontairement ou non-  favorablement en rendant constitutionnellement effectif le principe de Fraternité».

[11] M. Borgetto, La devise «Liberté, Egalité, Fraternité», PUF, 1997, p. 5.

[12] J. Portermer, La souveraineté, in Comité national chargé de la publication des travaux préparatoires des institutions de la Ve République, Documents pour service à l’Histoire de l’élaboration de la Constitution du 4 octobre 1958, vol. 4, Commentaires sur la Constitution, La documentation française, 2001, p. 218 cité dans le commentaire officiel de la décision

[13] Décision n° 94-343/344 DC du 27 juillet 1994 (N° Lexbase : A8305ACL), cons. 2.

[14] En 1998, il a néanmoins déduit de ce principe et de principes particulièrement nécessaires à notre temps du Préambule de 1946 «la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent» sous forme d’un objectif de valeur constitutionnelle (Décision n° 98-403 DC, 29 juillet 1998 N° Lexbase : A8749ACZ). V., aussi pour deux autres invocations du principe de dignité en droit des étrangers, Cons. const., décision n° 2006-539 DC, du 20 juillet 2006, Loi relative à l'immigration et à l'intégration (N° Lexbase : A4953DQI) ; Cons. const., décision n° 2007-557 DC, du 15 novembre 2007, Loi relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile (N° Lexbase : A5565DZ7). Pour sa part, Conseil d’Etat a déjà eu l’occasion, en référé-liberté, de reconnaître la dignité de la personne humaine comme une liberté fondamentale invocable par des particuliers notamment sous le prisme de la prohibition des traitements inhumains et dégradants (cf., Véronique Champeil-Desplats et Serge Slama, Qu’elle protège ou qu’elle punisse, la dignité n’est pas la même pour tous, La Revue des droits de l’Homme [En ligne], Actualités Droits-Libertés, mis en ligne le 30 mai 2014 ; CE référé, 23 novembre 2015, n° 394540, N° Lexbase : A6882NX8).

[15]  Cons. const., décision n° 2008-564 DC, du 19 juin 2008, Loi relative aux organismes génétiquement modifiés (N° Lexbase : A2111D93).

[16] CE, Ass., 12 avril 2013, n° 342409, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0988KCL).

[17] M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public français. Le passé, le présent et l’avenir de la solidarité, LGDJ, 1993 : «Compte tenu tout à la fois de sa présence au sein de la devise nationale, de l’insertion de celle-ci au sein de la Constitution et de la référence expresse qui y est faite dans certaines dispositions de celle-ci, la fraternité peut et doit donc se saisir, dans cette perspective, comme un principe à part entière du droit public français, ayant vocation à inspirer et à légitimer un certain nombre de solutions dans plusieurs domaines bien déterminés».

[18] Michel Borgetto, Sur le principe constitutionnel de fraternité, RDLF, 2018 chron. n° 14. Cette «porte large» a été produite, à notre demande et à celle de Thomas Perroud, par Michel Borgetto pour l’Association de défense des libertés constitutionnelles (ADELICO). Ce point de vue a été relayé auprès du Conseil constitutionnel dans les secondes observations des avocats des requérants.

[19] G. Canivet, La fraternité dans le droit constitutionnel françaisConférence en l’honneur de Charles Doherty Gonthier, 20-21 mai 2011 publié in LexisNexis, 2012, p. 465-466.

[20] J-C Colliard, «Liberté, égalité, fraternité » in L’Etat de droit : mélanges en l’honneur de Guy Braibant, Dalloz, 1996 cité dans le commentaire officiel, p. 18. On peut penser que parmi les membres actuels Nicole Maestracci a joué un rôle déterminant dans cette QPC.

[21] Cela est, également, mentionné dans le commentaire officiel.

[22] A la suite de la décision du 6 juillet 2018, les députés Guillaume Larrivé et Eric Ciotti ont, néanmoins, déposé un amendement surréaliste au projet de loi constitutionnelle visant à permettre au législateur de neutraliser une décision du Conseil constitutionnel (V., le communiqué sur le compte tweeter de G. Larrivée).

[23] TA Besançon, du 28 aout 2018, n° 1801454 (N° Lexbase : A0438X3M). Toutefois, le juge des référés estime que «le requérant ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement du principe de fraternité, d’une quelconque liberté fondamentale de mendier. Ainsi, qu’il a été dit, le principe de fraternité n’implique que la liberté fondamentale d’aider autrui dans un but humanitaire». Pire, il valide l’arrêté en estimant qu’«en édictant l’arrêté critiqué qui, exécuté, a pour effet d’éloigner des quartiers les plus passants du centre-ville de Besançon certaines catégories de personnes particulièrement vulnérables, le maire de la commune de Besançon a, indirectement mais nécessairement, porté atteinte à la liberté d’aider autrui, laquelle ne prend, parfois, spontanément corps qu’à la vue des personnes dans le besoin. Pour être effective, la liberté d’aider requiert en effet d’avoir conscience de l’opportunité d’en faire usage». Alors que l’avocat a annoncé avoir fait appel de cette ordonnance, la mairie a abrogé son arrêté. Le Conseil d’Etat a donc prononcé un non-lieu à statuer.

[24] Il s’agit de la reprise du considérant de principe dégagé dans une décision du 13 août 1993 portant «statut constitutionnel des étrangers», Cons. const., décision 2011-120 QPC du 8 avril 2011 (N° Lexbase : A5889HM3) à propos de la loi «Pasqua II», constamment confirmé depuis.

[25] Le Conseil constitutionnel avait déjà admis la restriction de la liberté individuelle des étrangers au nom de cet objectif qu’il a consacré en 2011 cf., Cons. const., décision n° 2011-631 DC, du 9 juin 2011 (N° Lexbase : A4307HTP), cons. 64.

[26] CJUE, 28 avril 2011, aff. C-61/11 PPU, (N° Lexbase : A2779HPM) ; CJUE, 6 décembre 2011, aff. C-329/11 (N° Lexbase : A4929H3X).

[27] Cass. civ. 1, 5 juillet 2012, FS-P+B+R+I, n° 11-19.250 (N° Lexbase : A4776IQX), Bull. 2012, I, n° 158.

[28] CJUE, 7 juin 2016, aff. C-47/15 (N° Lexbase : A9687RR9) ; V., aussi, Cass. civ. 1, 28 janvier 2015, n° 13-28.349, FS-P+B+I (N° Lexbase : A4101NA7).

[29] Abrogation de l’article L. 621-2, 2° par l’article 35 du texte de loi adopté.

[30] Alors même que la France était à l’initiative de cette Directive, elle a été chichement transposée dans la mesure où la loi «Sarkozy» de novembre 2003 n’a pas redéfini l’incrimination d’aide au séjour irrégulier en la limitant à la seule aide dans un but lucratif, ce qui aurait eu pour effet de limiter les cas de «délit de solidarité».

[31] Saisi du grief de contrariété de l’article L. 622-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à la Directive de 2002, le Conseil d’Etat a considéré, sans poser de question préjudicielle, que cette directive «n'interdit […] pas aux Etats membres de sanctionner aussi l'aide au séjour irrégulier à des fins non lucratives ; que dès lors la circulaire, qui ne fait que réitérer les dispositions du 3° de l'article L. 622-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en permettant de sanctionner l'aide au séjour irrégulier non seulement dans un but lucratif mais aussi dans un but non lucratif, est conforme aux objectifs de cette Directive » (CE référé, 15 janvier 2010, n° 334879 N° Lexbase : A7598EQH ; CE 2° et 7° s-s-r., 19 juillet 2010, n° 334878, Gisti et autres, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9998E43).

[32] Lors de la polémique de 2009 sur le délit de solidarité, cette affaire avait défrayé la chronique (et donné lieu à un célèbre dessin de Charlie Hebdo).

[33] Jacques-Henri Robert, Taxi pour Douvres, note sous Cass. crim., 21 janvier 2004, n° 03-80328, Droit pénal, 2004, comm. 87.

[34] Voir la décision du tribunal correctionnel de Foix de 2009 pour une illustration s’agissant d’un mineur isolé, TGI Foix, 28 septembre 2009.

[35] Paragraphe III de l’ancien article 21 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, devenu 3° de l’article L. 622-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec l’ordonnance du 24 novembre 2004 : «De toute personne physique ou morale, lorsque l’acte reproché était, face à un danger actuel ou imminent, nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l’intégrité physique de l’étranger, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace ou s’il a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte».

[36] S. Slama, Délit de solidarité : les origines, Plein droit, 2009/3, n° 82, p. I.

[37] La Commission nationale consultative des droits de l’Homme a notamment estimé, dans un avis du 19 novembre 2009, que «l’immunité prévue au paragraphe 3 de l’article L. 622-4 est beaucoup trop étroite pour couvrir les actions qu’implique la défense des droits de l’Homme et devrait à tout le moins reprendre l’idée, incluse dans les textes européens, que sont exclues de l’incrimination les actions sans but lucratif» (Avis sur l’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers, p. 3).

[38] Voir, notamment, la lettre d’Eric Besson aux signataires du manifeste et le communiqué associatif  «Délit de solidarité : Besson ment !».

[39] CE référé, 15 janvier 2010, n° 334879 (N° Lexbase : A7598EQH) ; CE 2° et 7° s-s-r., 19 juillet 2010, n° 334878 (N° Lexbase : A9998E43).

[40] A la suite de la polémique déclenchée par Eric Besson, la loi du 16 juin 2011 a légèrement modifié le 3° de l’article L. 622-4 en remplaçant les mots : «sauvegarde de la vie ou de l’intégrité physique de l’étranger» par ceux de «sauvegarde de la personne de l’étranger».

[41] Pour une application cf., Jacques-Henri Robert, note sous Cass. crim., 4 mars 2015, n° 13-87.185, FS-P+B+I (N° Lexbase : A8877NCR), Droit pénal, 2015, comm. 66.

[42] Rapport n° 85 (Sénat - 2012-2013) de M. Gaëtan Gorce, fait au nom de la commission des lois, déposé le 24 octobre 2012, p. 45.

[43] TGI Nice, 13 juillet 2018, n° 17300000114 (N° Lexbase : A2998X3G). Le parquet a fait appel de ce jugement de relaxe.

[44] Décision n° 96-377 DC du 16 juillet 1996 (N° Lexbase : A8343ACY), cons. 13 ; Décision n° 98-399 DC du 5 mai 1998 (N° Lexbase : A8746ACW) ; cons. 7 ; Cons. const., décision n° 2004-492 DC, du 2 mars 2004, Loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (N° Lexbase : A3770DBA), cons. 18.

[45] Cons. const., décision n° 2003-484 DC, du 20 novembre 2003 (N° Lexbase : A1952DAK), cons. 23 ; Décision n° 96-377 DC du 16 juillet 1996, précitée, cons. 13 ; Cons. const., décision n° 2004-492 DC, du 2 mars 2004, préc. ; Cons. const., décisions n° 96-377 DC du 16 juillet 1996, Loi tendant à renforcer la répression du terrorisme et des atteintes aux personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public et comportant des dispositions relatives à la police judiciaire, (N° Lexbase : A8343ACY) cons. 13.

[46] Cons. constit., déc., n° 96-377 DC du 16 juillet 1996, préc., cons. 11.

[47] Le commentaire officiel de la décision est très clair sur cette portée : «Le principe de fraternité impose donc que bénéficient de l’exemption pénale tous les actes d’aide apportée à des fins humanitaires [souligné par le commentaire], qu’ils consistent à faciliter ou tenter de faciliter le séjour en France d’un étranger en situation irrégulière ou, comme il se déduit de la censure prononcée plus haut dans la décision, à faciliter ou tenter de faciliter sa circulation lorsque celle-ci constitue seulement ‘l’accessoire de l’aide au séjour de l’étranger’» (p. 23).

[48] Dans ses observations devant le Conseil constitutionnel, le Premier ministre défendait par la voix du secrétaire général du Gouvernement que «les dispositions du texte constitutionnel qui consacrent la fraternité n’ont pas, en elles-mêmes, une portée normative susceptible de leur conférer le caractère de droit ou liberté garanti par la Constitution».

[49] L’amendement n° 1172 précisait, dans le même sens, que «l’Etat a le droit et la responsabilité de contrôler ses frontières, et ne peut tolérer le contournement de ces contrôles, contournement bien souvent motivé par une volonté politique, celle de faire échec à l’action de l’Etat, plutôt que par le souhait de venir au secours de situations de détresse. Ainsi que l’a jugé récemment la cour d’appel d’Aix-en-Provence, n’entrent pas dans les exemptions prévues par la loi les actions militantes qui s’inscrivent moins dans la réponse à une situation de détresse que dans une contestation globale de la loi, contestation qui constitue en elle-même une contrepartie».

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