La lettre juridique n°355 du 18 juin 2009 : Entreprises en difficulté

[Chronique] La Chronique mensuelle de droit des entreprises en difficulté de Pierre-Michel Le Corre et Emmanuelle Le Corre-Broly - Juin 2009

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[Chronique] La Chronique mensuelle de droit des entreprises en difficulté de Pierre-Michel Le Corre et Emmanuelle Le Corre-Broly - Juin 2009. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3211810-chronique-la-chronique-mensuelle-de-droit-des-entreprises-en-difficulte-de-pierremichel-le-corre-et-
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le 07 Octobre 2010

Lexbase Hebdo - édition privée générale vous propose de retrouver, cette semaine, la chronique de Pierre-Michel Le Corre et Emmanuelle Le Corre-Broly, retraçant l'essentiel de l'actualité juridique rendue en matière de procédures collectives. Ont été sélectionnés, ce mois-ci, deux arrêts rendus pas la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 12 mai 2009 : le premier, bénéficiant d'une publicité maximale (annoté P+B+R+I), répond à l'importante question de savoir si la caution du débiteur peut utiliser le recours subrogatoire, après clôture de la liquidation judiciaire du débiteur principal ; le second, qui statue sur l'excès de pouvoir commis par le juge-commissaire, permet d'évoquer le contenu de la déclaration de créance du crédit-bailleur et d'aborder la question de la voie de recours sur le jugement statuant sur recours formé à l'encontre de l'ordonnance du juge-commissaire.
  • Le recours subrogatoire de la caution contre le débiteur principal après clôture de la procédure pour insuffisance d'actif (Cass. com., 12 mai 2009, n° 08-13.430, FS-P+B+I+R N° Lexbase : A7969EGA)

Une caution est un débiteur accessoire. Elle n'est tenue que pour autrui. Dans l'esprit de l'institution, elle ne doit pas supporter définitivement le poids de la dette. C'est la raison pour laquelle elle peut recourir en remboursement contre le débiteur. La caution a le droit d'obtenir du débiteur le remboursement de ce qu'elle a payé en ses lieu et place. Le remboursement suppose un paiement préalable. A priori, en conséquence, le recours de la caution interviendra après paiement, soit à titre subrogatoire, soit à titre personnel. Cependant, l'article 2309-2° du Code civil (N° Lexbase : L1208HIL, C. civ., art. 2032, 2°, anc. N° Lexbase : L2267ABL) autorise un recours de la caution avant paiement.

Comment s'articulent ces recours en paiement de la caution en cas de procédure collective du débiteur principal ? Subsistent-ils ? Sont-ils soumis à des conditions particulières. L'arrêt commenté apporte de très précieux enseignements en la matière, en répondant plus spécifiquement à une question sujette à discussion : la caution peut-elle utiliser le recours subrogatoire, après clôture de la liquidation judiciaire du débiteur principal ?

En l'espèce, une banque consent deux prêts à une personne physique, garantis par le cautionnement d'une caution professionnelle. En 1995, le débiteur est déclaré en redressement judiciaire et placé, l'année suivante, en liquidation judiciaire. La caution désintéresse la banque. Puis, la clôture de la procédure de liquidation judiciaire du débiteur pour insuffisance d'actif est prononcée. La caution, qui n'avait pas déclaré sa créance de recours personnel pouvait-elle recourir en remboursement contre le débiteur principal en utilisant le recours subrogatoire ? A cette question, la Cour de cassation, par un très important arrêt appelé à la plus large diffusion possible (P+B+I+R), répond par l'affirmative : "la caution qui a payé aux lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci soit en exerçant un recours subrogatoire sous réserve que le créancier ait déclaré sa créance soit en exerçant un recours personnel dès lors qu'elle a elle-même déclaré sa créance".

Aux termes de l'article L. 622-32, alinéa 1er, du Code de commerce (N° Lexbase : L3752HBL, anciennement loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, art. 169, al. 1er N° Lexbase : L6564AHL), dans sa rédaction antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises (loi n° 2005-845, 26 juillet 2005, de sauvegarde des entreprises N° Lexbase : L5150HGT), de l'article L. 643-11-I (N° Lexbase : L3943HBN), dans sa rédaction issue de la loi de sauvegarde des entreprises, "le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur". La clôture de la liquidation judiciaire entraîne ainsi, par principe, interdiction de reprise des poursuites individuelles de la part des créanciers antérieurs. Le principe de l'absence de reprise des poursuites individuelles interdit à un créancier antérieur d'obtenir un titre de condamnation contre le débiteur. Il lui interdit aussi d'entreprendre l'exécution sur le débiteur.

L'absence de reprise des poursuites individuelles équivaut, sur un plan économique, à une suppression de la dette. Telle n'est cependant pas la réalité juridique. La créance ne disparaît pas. Seule l'action en justice est ôtée au créancier, ce qui justifie, par exemple, que le créancier puisse, s'appuyant sur l'existence de la créance, opposer l'exception d'inexécution (1).

Il a déjà été observé, dans ces colonnes, qu'il ne pouvait y avoir équivalence pure et simple entre suppression du droit de poursuite et extinction de la créance. La Cour de cassation, appliquant cette distinction, décide que l'impossibilité de reprendre les poursuites individuelles ne fait pas obstacle au jeu de dispositions en matière de cotisations de retraite (2). Si le débiteur veut bénéficier à taux plein des prestations, sa seule ressource sera de payer son créancier, sans pourtant qu'il s'agisse d'une exception véritable au jeu de l'interdiction de reprise des poursuites individuelles après clôture de la procédure pour insuffisance d'actif. L'absence de régularisation ne privera pas l'assuré de tout droit aux prestations, mais cela aura pour effet d'exclure la période pendant laquelle les cotisations n'ont pas été payées du calcul du montant des prestations (3). La solution a ainsi été posée dans une espèce où la veuve du professionnel indépendant réclamait des prestations décès, alors que son mari avait été placé en liquidation judiciaire avant son décès (4).

Parmi les exceptions à l'interdiction du droit de reprise des poursuites individuelles, figure, depuis la loi du 10 juin 1994 (loi n° 94-475, relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises N° Lexbase : L9127AG7), l'article L. 622-32-II du Code de commerce, qui énonce que "la caution ou le coobligé qui a payé aux lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci". Ce texte nous avait semblé faire naître une difficulté à l'utilisation du recours subrogatoire de la caution désireuse d'obtenir de la part du débiteur son remboursement. Cette difficulté du recours subrogatoire résulte de la suppression de l'action en paiement du créancier contre le débiteur, en cas de clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif. Le créancier antérieur ne retrouve pas l'exercice de son droit de poursuite individuelle contre le débiteur, alors qu'il peut poursuivre la caution. Si la caution utilise le recours subrogatoire, investie des droits du créancier, il nous avait semblé qu'elle serait également privée de la possibilité de recourir contre le débiteur (5), sauf si le créancier se trouvait dans les exceptions au principe énoncé d'interdiction de reprise des poursuites individuelles. Ainsi, la caution n'aurait-elle pu s'orienter que vers l'utilisation du recours personnel (6).

L'opinion contraire admettant le recours subrogatoire de la caution avait, toutefois, été soutenue (7). Notre collègue Françoise Pérochon écrivait ainsi : "C'est aussi un souci d'équité qui fonde l'exception prévue par l'article L. 643-11- II (anciennement l'article L. 622-32-II), en faveur de la caution ou du coobligé qui a payé au lieu et place du débiteur. Le texte ne distingue pas entre les différentes actions de la caution, mais les auteurs excluent en général l'action subrogatoire, ce qui n'est pas notre opinion : en effet, l'article 2306 du Code civil prévoit la subrogation de la caution à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur ; en l'occurrence, le droit du créancier n'est pas éteint, seule est paralysée l'action correspondante [...] sauf exception au profit, précisément, de la caution". Ainsi, selon notre excellente collègue, la distinction entre le droit et l'action justifiait la possibilité pour la caution recourant contre le débiteur principal après clôture de la procédure de liquidation judiciaire de ce dernier d'utiliser le recours subrogatoire. C'est exactement la solution retenue par la Cour de cassation, qui se rallie ouvertement à l'opinion de Françoise Pérochon.

La Cour de cassation précise que la caution recourant contre le débiteur principal après clôture de la liquidation judiciaire peut utiliser l'un des deux recours ouverts par le droit commun : le recours subrogatoire et le recours personnel. Mais la Cour de cassation soumet l'utilisation de l'un ou de l'autre recours à des conditions précises.

Pour utiliser le recours subrogatoire, il faut évidemment que le droit du créancier, que l'on veut utiliser par subrogation, ne soit pas éteint. Cela suppose donc, précise la Cour de cassation, que le créancier ait déclaré sa créance. A défaut, la créance est éteinte et la subrogation est impossible, puisque la caution serait alors subrogée dans les doits inexistants de celui qui a cessé d'être créancier. Mais il faut immédiatement préciser que la solution n'est valable que sous l'empire de la législation du 25 janvier 1985, applicable aux faits de l'espèce dont a eu à connaître la Cour de cassation. Au contraire, sous l'empire de la loi de sauvegarde des entreprises, la créance non déclarée n'est plus éteinte. Il n'y a donc pas d'obstacle à ce que la caution recourt contre le débiteur principal, puisque les droits du créancier n'ont pas disparu, faute d'extinction.

Observons que, même sous l'empire de la législation du 25 janvier 1985, la déclaration de créance de recours de la caution est inutile, dès lors la Cour de cassation juge, dans la présente espèce, qu'il est question du recours subrogatoire.

Pour utiliser le recours personnel, précise la Cour de cassation, la caution doit avoir, elle-même, déclaré sa créance de recours. La Haute juridiction a, en effet, eu l'occasion de préciser que le fait générateur de la créance de recours personnel de la caution se trouve non dans le paiement, mais dans le cautionnement (8). Il en est ainsi de la créance de recours de la caution avant paiement de l'article 2309 du Code civil (N° Lexbase : L1208HIL), qui est une variété de recours personnel (9). Cette solution justifie le caractère antérieur au jugement d'ouverture de la créance de recours personnel, dès lors que le cautionnement a été souscrit avant ledit jugement. Ici encore, la réserve de la déclaration de créance n'existe, toutefois, que sous l'empire de la législation antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises, car, depuis cette loi, la créance non déclarée n'est plus éteinte, ce qui justifie que le recours personnel soit maintenu, même si la caution n'a pas déclaré au passif sa créance de recours personnel.

Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université de Nice Sophia Antipolis, Directeur du CERDP (ex Crajefe) et Directeur du Master 2 Droit des difficultés d'entreprises

  • Excès de pouvoir du juge-commissaire, contenu de la déclaration de créance du crédit-bailleur et créance postérieure (Cass. com., 12 mai 2009, n° 08-13.861, F-D N° Lexbase : A9790EGP)

Nonobstant les avertissements qui leur ont été adressés (10), de nombreux crédit-bailleurs continuent à faire état dans leur déclaration de créance de loyers "à échoir". Cette façon de faire -dont les conséquences peuvent être fâcheuses pour le créancier (11)- a conduit la Chambre commerciale de la Cour de cassation à rendre, le 12 mai 2009, un arrêt qui nous donne l'occasion non seulement d'évoquer le contenu de la déclaration de créance du crédit-bailleur, mais également, d'aborder la question de la voie de recours sur le jugement statuant sur recours formé à l'encontre de l'ordonnance du juge-commissaire.

Dans l'espèce rapportée, une société avait obtenu le financement en crédit-bail de mobil homes auprès d'une société financière. A la suite du prononcé du redressement judiciaire du crédit-preneur, le crédit-bailleur avait déclaré sa créance non seulement au titre des loyers échus au jour du jugement d'ouverture, mais également au titre des loyers "à échoir". Le contrat avait été continué par l'administrateur judiciaire, lequel s'était vu réclamer par le bailleur le paiement d'une certaine somme correspondant au loyer échu depuis le jugement d'ouverture. Dès lors que la créance de loyers "à échoir" avait été déclarée au passif, l'administrateur judiciaire soutenait que le crédit-bailleur avait perdu le bénéfice de percevoir les loyers au titre d'une créance postérieure au jugement d'ouverture. En effet, la créance ne pouvait pas à la fois relever de l'article L. 621-43 du Code de commerce (N° Lexbase : L6895AI9, devenu C. com., art. L. 622-24 N° Lexbase : L3455ICX depuis la loi de sauvegarde des entreprises -créance devant être déclarée au passif-) et de l'article L. 621-32 du même code (N° Lexbase : L6884AIS, devenu C. com., art. L. 622-17 N° Lexbase : L3493ICD -créance postérieure-). Sur requête de l'administrateur judiciaire, le juge-commissaire -suivi en cela par le tribunal- avait jugé que la société financière avait perdu le bénéfice de percevoir les loyers au titre d'une créance née postérieurement au jugement d'ouverture et que la somme litigieuse relevait de l'article L. 621-43 -c'est-à-dire constituait une créance supportant le régime des créances antérieures puisque déclarée au passif-.

Le crédit-bailleur avait relevé appel-nullité du jugement ayant confirmé l'ordonnance du juge-commissaire. Pour sa part, la cour d'appel avait déclaré cet appel recevable et annulé le jugement ainsi que l'ordonnance du juge-commissaire. Le liquidateur judiciaire s'était alors pourvu en cassation. Au soutien de son pourvoi, il faisait valoir que le jugement par lequel le tribunal statue sur le recours formé contre les ordonnances rendues par le juge-commissaire dans la limite de ses attributions ne peut pas faire l'objet d'un recours (12). Le liquidateur soutenait, en outre, que le crédit-bailleur était privé d'intérêt à agir, dès lors que le juge-commissaire avait rendu une ordonnance conforme à sa déclaration de créance.

Par l'arrêt rapporté, la Chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi. Le rejet du pourvoi est, notamment, motivé par le fait que le juge-commissaire a excédé ses pouvoirs dès lors "qu'aucun texte ne confère de pouvoir au juge-commissaire pour statuer sur une créance née régulièrement après l'ouverture de la procédure collective" et qu'ainsi "l'arrêt [d'appel] retient exactement que dès lors que la créance de la société OSEO n'avaient pas été définitivement admise pour l'intégralité des sommes déclarées, le juge-commissaire ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs, décider que cette société avait perdu le bénéfice de percevoir les loyers au titre de l'article L. 621-32 du Code de commerce" (devenu C. com., L. 622-17).

La solution doit être approuvée. En effet, l'ancien article L. 623-4 du Code de commerce (N° Lexbase : L7033AIC, devenu L. 661- 4 N° Lexbase : L3386ICE -article dont on peut noter qu'il transforme l'exception en principe puisque, désormais, tous les jugements rendus sur décision du juge-commissaire sont susceptibles de recours alors qu'auparavant ces jugements était insusceptibles d'appel sauf en matière de revendications-) indique explicitement que les voies de recours sur les jugements statuant sur opposition aux ordonnances du juge-commissaire sont fermées lorsque le juge-commissaire reste "dans les limites de ses attributions". Ainsi, a contrario, si le juge-commissaire sort des limites de ses attributions, il y a ouverture des voies de recours. Le recours nullité est alors recevable contre le jugement statuant sur le recours formé contre une ordonnance du juge-commissaire qui a commis un excès de pouvoir (13). Il a été observé que cette possibilité de faire constater un excès de pouvoir constitue l'antidote à ce que certains ont appelé "l'ivresse du pouvoir" (14).

Si le tribunal refuse de revenir sur la solution posée par le juge-commissaire, qui contient pourtant un excès de pouvoir, il commet lui-même un excès de pouvoir. La décision du tribunal doit alors être annulée, ce qui a été le cas dans l'espèce rapportée.

Au regard des faits de l'espèce, si le juge-commissaire s'était contenté d'admettre la créance déclarée, le recours du créancier à l'encontre de l'ordonnance d'admission aurait été irrecevable. En effet, la déclaration de créance est analysée comme une demande en justice (15). A ce titre, le créancier qui déclare sa créance est le demandeur à l'instance d'admission. Si le juge-commissaire admet la créance telle qu'elle a été déclarée, il est alors entièrement fait droit à la demande présentée par le créancier, de sorte que toute voie de recours exercée par ce dernier serait jugée irrecevable dès lors que le créancier n'a pas succombé et n'a donc pas d'intérêt à exercer le recours... Cependant, en l'espèce, le juge-commissaire avait jugé que le créancier avait perdu le bénéfice de percevoir les loyers au titre de l'article L. 621-32 du code de commerce (devenu C. com., art. L. 622-17), dès lors que la somme litigieuse avait été incluse dans sa déclaration de créance au passif. Par là-même, le juge-commissaire avait statué sur la créance postérieure, attribution que ne lui confère pas la loi. Une juridiction du fond, comme le fait ici la Cour de cassation, avait déjà considéré, sous l'empire de la législation antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises, que le juge-commissaire qui statue sur une créance postérieure dite "de l'article 40" (C. com., art. L. 621-32), commet un excès de pouvoir (16). En conséquence, c'est à juste titre qu'avait été déclaré recevable l'appel-nullité formé par le créancier à l'encontre de l'ordonnance du juge-commissaire.

Si, d'un point de vue procédural, le créancier triomphe puisque l'arrêt de la cour d'appel ayant déclaré recevable l'appel nullité n'est pas cassé par les Hauts magistrats, le crédit bailleur n'est pas pour autant tiré d'affaire.

En effet, le créancier avait, à tort, demandé l'admission au passif des loyers "à échoir" au titre du contrat de crédit-bail après l'ouverture de la procédure collective. Si le juge-commissaire fait droit à cette demande, le créancier, ainsi qu'il a été indiqué ci-avant, ne pourra pas être recevable en son appel contre cette décision dès lors qu'il n'aura pas succombé. La conséquence de l'admission définitive au passif sera alors de ne pouvoir remettre en cause son contenu. On sait, en effet, que l'admission au passif emporte irrévocabilité de la décision du juge-commissaire et qu'il n'est plus possible, ensuite, de discuter de l'existence, du montant, mais surtout ici de la nature de la créance (17). Ainsi, le caractère antérieur de la créance ne pourrait plus être discuté. L'autorité de chose jugée attachée à cette décision d'admission au passif empêchera alors au juge de rendre une décision considérant que la même créance est, au contraire, une créance postérieure bénéficiant, sous l'empire de la législation ancienne, des dispositions de l'article L. 621-32 du Code de commerce, devenu depuis la loi de sauvegarde des entreprises l'article L. 622-17. Le créancier ne pourrait ainsi plus prétendre à la qualité de créancier postérieur devant être payé selon les conditions contractuelles dès lors qu'une décision -l'ordonnance d'admission- a considéré que cette créance est une créance antérieure admise au passif...

Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences à l'Université du Sud-Toulon-Var, Directrice du Master 2 Droit de la banque et de la société financière de la Faculté de droit de Toulon


(1) CA Douai, 17 avril 1992, cité dans P. Le Cannu, P. Lucheux, M. Pitron et J.-P., Sénéchal, Prévention, redressement et liquidation judiciaires, GLN Joly, 1995, n° 743, note 132 ; adde P. Le Cannu, Droit commercial, Entreprises en difficulté, refonte de l'ouvrage de M. Jeantin, Précis Dalloz, 7ème éd., 2006, n° 1225.
(2) CA Angers, 3 octobre 1996, Organic c/ M. Lebrun ; CA Aix-en-Provence, 14ème ch. soc., 30 novembre 1998, Cancava c/ M. Agrenay.
(3) Cass. civ. 2, 17 janvier 2007, n° 04-30.797, Mme Monique Gaudout, épouse Rougier, FS-P+B (N° Lexbase : A6135DTE), Bull. civ. II, n° 6, G. Auzero, L'absence de règlement intégral des cotisations antérieures pour insuffisance d'actifs ne prive pas l'assuré ou ses ayants droit de tout droit aux prestations, Lexbase Hebdo n° 246 du 1er février 2007 - édition sociale (N° Lexbase : N8265A9Y), D., 2007, AJ p. 449, obs. A. Lienhard, D., 2008, pan. 576, obs. P.-M. Le Corre, Act. proc. coll., 2007/8, n° 84, note C. Régnaut-Moutier, JCP éd. E, 2007, chron. 2119, p. 223, n° 6, obs. Ph. Pétel, RTDCom., 2007/2, p. 452, n° 7, obs. A. Martin-Serf ; Cass. com., 13 mars 2007, n° 05-20.396, Mme Maria Fernanda Da Cunha Rodrigues, épouse Guerra Frade Malheiro, F-P+B (N° Lexbase : A6879DUC), Bull. civ. IV, n° 85, D., 2008, pan. 576, obs. P.-M. Le Corre, Act. proc. coll., 2007/8, n° 84, note C. Régnaut-Moutier, JCP éd. E, 2007, chron. 2119, p. 23, n° 6, obs. Ph. Pétel, E. Le Corre-Broly in La chronique mensuelle de Pierre-Michel Le Corre, Lexbase Hebdo n° 257 du 26 avril 2007 - édition privée générale (N° Lexbase : N8867BAN).
(4) Cass. com., 13 mars 2007, n° 05-20.396, préc. et note préc..
(5) Cass com., 8 juin 1993, n° 91-13.295, Mme Bonneau c/ Banque nationale de Paris (N° Lexbase : A5619ABQ), Bull. civ. IV, n° 230, JCP éd. G, 1993, II, 22174, note J. Ginestet, Bull. Joly, 1993, 911, obs. M. Jeantin, Defrénois, 1994, 577, obs. J.-P. Sénéchal ; Cass. com., 28 juin 1994, n° 90-12.974, Crédit lyonnais, inédit (N° Lexbase : A9986A4M), Dr. Sociétés, 1994, n° 155, obs. Y. Chaput.
(6) V., aussi en ce sens, J.-Cl. Com., J. Vallansan, fasc. 2770, [Clôture pour insuffisance d'actif], éd. 2008, n° 61 ; M. Texier Les effets sur le cautionnement de la remise de dette consentie au débiteur dans le cadre de procédures organisées, RTDCom., 2008, p. 25 et s., sp. p. 43, n° 57.
(7) F. Pérochon et R. Bonhomme, Entreprises en difficulté - Instruments de crédit et de paiement, LGDJ, 7ème éd., 2006, n° 503.
(8) Cass. com., 1er mars 2005, n° 02-13.176, M. Louis, Pierre, Marie Gaborit c/ M. Edouard Guinard, F-D (N° Lexbase : A0946DHI) ; P.-M. Le Corre, La créance de recours de la caution solvens après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, Lexbase Hebdo n° 168 du 19 mai 2005 - édition affaires (N° Lexbase : N4227AIE), Cass. com., 8 janvier 2008, n° 07-10.394, Société Storus, F-D (N° Lexbase : A2749D39), RTDCom., 2009/1, p. 211, n° 7, obs. A. Martin-Serf, S. Beaugendre, in Chronique en droit des assurances dirigée par Véronique Nicolas, Professeur, avec Sébastien Beaugendre, Maître de conférences, Lexbase Hebdo n° 291 du 7 février 2008 - édition privée générale (N° Lexbase : N0518BEW) ; Cass. com., 1er avril 2008, n° 07-12.238, M. Florent Rovira, F-D (N° Lexbase : A7710D7P), JCP éd. E, 2008, chron. 2013, n° 7, obs. Ph. Simler ; Cass. com. 8 juillet 2008, n° 07-16.686, Société Storus, F-D (N° Lexbase : A6325D97), Gaz. proc. coll., 2008/4, p. 47, n° 1, note L.-C. Henry, RTDCom., 2009/1, p. 211, n° 7, obs. A. Martin-Serf ; Cass. com., 30 septembre 2008, n° 07-18.479, M. Philippe Blériot, F-D (N° Lexbase : A5948EAK) ; Cass. com., 30 septembre 2008, deux arrêts, n° 07-16.687, Société Storus, F-D (N° Lexbase : A5906EAY) et n° 07-16.688, Société Storus, F-D (N° Lexbase : A5907EAZ), RTDCom, 2009/1, p. 211, n° 7, obs. A. Martin-Serf.
(9) Cass. com., 3 février 2009, n° 06-20.070, Mme Maria Carlino, divorcée de Bruijn, FS-P+B (N° Lexbase : A9438ECK), JCP éd. E, 2009, 1347, n° 12, obs. M. Cabrillac.
(10) V. nos obs., Le contenu de la déclaration de créance du crédit-bailleur ou "qui trop déclare, rien n'obtient", Banque et Droit n° 57, janvier-février 1998, p. 3 et s. ; La déclaration de créance du bailleur financier et du crédit-bailleur, Gaz. proc. coll., 2005/1, p. 14.
(11) V.articles préc..
(12) Notons que, depuis la loi de sauvegarde des entreprises, les jugements rendus sur décisions du juge-commissaire sont, par principe, susceptibles d'appel (C. com., art. L. 661-4 N° Lexbase : L3386ICE).
(13) Ainsi, Cass. com., 5 décembre 2006, n° 05-20.272, M. Roger Baldet, F-D (N° Lexbase : A8416DSI), Gaz. proc. coll., 2007/2, p. 27, note I. Rohart-Messager ; Cass. civ. 1, 20 février 2007, n° 06-13.134, M. Maurice Médioni, F-P+B (N° Lexbase : A3070DUA), Bull. civ. IV, n° 61 ; Cass. com., 27 février 2007, n° 05-13.415, Société Les Traiteurs sétois, F-D (N° Lexbase : A5910DUG) ; Cass. com., 5 juin 2007, n° 05-16.964, M. Jean-Noël Duveau, F-D (N° Lexbase : A5488DW8), Rev. proc. coll., 2008, p. 69, n° 8, note Ch. Lebel ; Cass. com., 24 mars 2009, n° 07-15.879, M. Jean Valeriot, F-D (N° Lexbase : A1932EEB).
(14) V. G. Bolard, L'appel nullité, D., 1988, chron. p. 177, n° 35, utilisant cette expression.
(15) Cass. com., 14 décembre 1993, n° 93-11690, Société financière pour le crédit-bail c/ Société européenne de location de véhicules et de matériels industriels et autres, publié au bulletin (N° Lexbase : A4985CH4), Bull. civ. IV, n° 471, RJDA, 1994, n° 1, p. 12, concl. M.-C. Piniot, Bull. Joly, 1994, 196, note Jeantin, JCP éd. E, 1994, II, 573, note M.-J. Campana et J.-M. Calendini, JCP éd. G, 1994, II, 22200, note J.-P. Rémery, Banque, avril 1994, 93, obs. J.-L. Guillot, Rev. sociétés, 1994, 100, note Y. Chartier, RTDCom., 1994, p. 367, obs. A. Martin-Serf ; Cass. com., 14 février 1995, n° 93-12.064, Société Solovam crédit et autre c/ Société européenne de location de véhicules et de matériels industriels et autre (N° Lexbase : A1126ABC), Bull. civ. IV, n° 43, LPA, 1995, n° 91, p. 13, note P. Alix, Bull. Joly, 1995, 442, note J.-J. Daigre.
(16) CA Orléans, ch. com., éco. et fin., 28 août 2001, RJDA, 2002/3, n° 277, p. 234.
(17) Cass com., 5 novembre 2003, n° 00-17.773, M. Daniel Schutz c/ M. Gilles Duchamp, FS-D (N° Lexbase : A0582DAS) ; Cass. com., 19 mai 2004, n° 01-15.741, Mme Isabelle Didier, mandataire judiciaire c/ Société CDR créances, F-D (N° Lexbase : A2656DCD).

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