La lettre juridique n°344 du 2 avril 2009 : Procédure civile

[Chronique] La chronique de procédure civile d'Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble II - mars 2009

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[Chronique] La chronique de procédure civile d'Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble II - mars 2009. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3211612-chronique-la-chronique-de-procedure-civile-d-b-etienne-verges-professeur-a-luniversite-de-grenoble-i
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le 07 Octobre 2010

Lexbase Hebdo - édition privée générale vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualité en procédure civile réalisée par Etienne Vergès, agrégé des facultés de droit et Professeur à l'Université de Grenoble II. L'actualité de la procédure civile de ce début d'année est marquée par plusieurs arrêts importants de l'Assemblée plénière, de la Chambre mixte et de la deuxième chambre civile. Cette chronique se concentrera sur trois arrêts marquants : un arrêt d'Assemblée plénière du 27 février 2009 énonçant que le fait de se contredire au détriment d'autrui dans une même instance peut conduire à l'irrecevabilité de la prétention sous certaines conditions ; un arrêt de la Cour de cassation, réunie en Chambre mixte le 13 mars 2009, qui rappelle que dans une procédure orale, le juge doit statuer sur une demande incidente déposée par écrit au greffe antérieurement au désistement d'appel ; et, enfin, un arrêt de la deuxième chambre civile du 19 février dont il ressort que la réouverture des débats emporte révocation de l'ordonnance de clôture seulement lorsque l'affaire est renvoyée à la mise en état. I - Fin de non-recevoir : l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui, l'estoppel procédural devant l'Assemblée plénière

Le fait de se contredire au détriment d'autrui dans une même instance peut conduire à l'irrecevabilité de la prétention sous certaines conditions (Ass. plén., 27 février 2009, n° 07-19.841, Société Sédéa électronique c/ Société Pace Europe (anciennement dénommée X-Com multimédia communications), P+B+R+I N° Lexbase : A3925EDQ)

L'estoppel désigne le principe juridique qui interdit de se contredire au détriment d'autrui. Ce principe, issu du droit anglais, a été exporté en droit international avant d'être repris en droit français et notamment en droit des contrats. Son application procédurale a fait l'objet de plusieurs débats doctrinaux et la Cour de cassation en a fait application récemment. Dans un arrêt remarqué de la première chambre civile du 6 juillet 2005 (1), la Cour de cassation a considéré qu'une partie qui avait formé une demande d'arbitrage et avait participé, sans réserve, durant neuf années à la procédure d'arbitrage était "irrecevable, en vertu de la règle de l'estoppel" à invoquer devant la juridiction française, saisie d'une demande d'exequatur, la nullité de la convention d'arbitrage.

L'estoppel transposé à la procédure interdit donc à un plaideur d'invoquer successivement dans la même instance des prétentions contradictoires.

L'espèce étudiée conduit l'estoppel devant l'Assemblée plénière par renvoi sur ordonnance du premier président. Il convient donc ici de considérer que la Cour de cassation a souhaité apporter une solution de principe en la matière.

Les faits étaient relativement complexes. De façon synthétique, la société Sédéa électronique avait passé deux commandes de récepteurs de télévision par satellites, d'abord à la société X-Com multimédia et, ensuite, à la société Distratel. Tous les récepteurs étaient fabriqués par X-Com multimédia mais l'acquéreur avait emprunté deux canaux de distribution différents. Malheureusement, les récepteurs furent inutilisables, car le producteur n'avait pas reçu la licence nécessaire à leur fabrication. L'acquéreur (Sédéa) forma deux actions en justice distinctes contre le producteur, X-Com multimédia, puis contre le distributeur, Distratel, puisque deux lots distincts avaient été achetés.

La première action contre X-Com multimédia fut portée devant le juge des référés du tribunal de commerce de Grenoble. L'acquéreur demandait la livraison sous astreinte d'un premier lot de récepteurs promis par le producteur, mais non fournis par lui. La seconde action contre Distratel fut portée devant le tribunal de commerce de Tours. L'acquéreur demandait alors l'annulation de la vente d'un second lot de récepteurs livrés par le distributeur.

La contradiction entre les deux actions était évidente. S'agissant des mêmes récepteurs, qui étaient produits et livrés sans licence, l'acquéreur demandait, d'une part, la livraison sous astreinte d'un premier lot et, d'autre part, l'annulation de la vente d'un second lot. La cour d'appel déclara la seconde action irrecevable au motif "qu'il ressort de l'examen des procédures successivement menées [...] par la société Sédéa que celle-ci n'a pas cessé de se contredire au détriment de ses adversaires, et retient que ce comportement doit être sanctionné, en vertu du principe suivant lequel une partie ne peut se contredire au détriment d'autrui (théorie de l'estoppel)".

La Cour de cassation était confrontée à deux questions corrélatives. Il lui fallait se prononcer, dans un premier temps, sur la consécration, en droit processuel français, de la règle de l'estoppel qui n'est contenue dans aucun texte de procédure, mais découle des principes de bonne foi et de loyauté procédurale. Si elle retenait le jeu de l'estoppel, il lui fallait, dans un second temps, trouver une sanction procédurale adaptée.

La Cour de cassation, malgré plusieurs motifs détaillés, répond à ces questions avec une certaine ambiguïté et l'arrêt ne peut être interprété qu'après une lecture attentive des documents communiqués sur le site de la Cour de cassation : le rapport du conseiller rapporteur et l'avis de l'avocat général.

D'abord, la Cour de cassation vise expressément l'article 122 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1414H47), plaçant ainsi l'estoppel dans le domaine des fins de non-recevoir. Ensuite, elle affirme "que la seule circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement fin de non-recevoir". Enfin, elle retient qu'en l'espèce, "les actions engagées par la société Sédéa n'étaient ni de même nature, ni fondées sur les mêmes conventions et n'opposaient pas les mêmes parties, la cour d'appel a violé le texte susvisé". La Cour de cassation en déduit implicitement que les conditions de l'estoppel n'étaient par réunies en l'espèce.

La solution mérite d'être éclairée dans la mesure où les formules, essentiellement négatives, de l'arrêt permettent de reconstituer le régime de l'estoppel établi par l'Assemblée plénière.

En premier lieu, le chapeau de l'arrêt, interprété a contrario indique que la circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui peut emporter une fin de non-recevoir. On trouve ici une confirmation de la solution adoptée par la première chambre civile dans son arrêt du 6 juillet 2005. L'Assemblée plénière confirme la création d'une nouvelle fin de non-recevoir jurisprudentielle. Elle poursuit ainsi l'extension de la liste non limitative de l'article 122 du Code de procédure civile (2). La solution mérite une approbation de principe dans la mesure où le comportement d'une partie qui se contredit au cours d'une même instance au détriment de son adversaire peut être assimilé à un comportement déloyal. En revanche, la sanction choisie cantonne l'estoppel aux prétentions des parties. En effet, seules les prétentions peuvent être considérées comme de véritables actions au fond susceptibles d'être sanctionnées au visa de l'article 122 du Code de procédure civile (3). A contrario, la simple contradiction de moyens au cours d'une même instance ne semble pas relever du mécanisme de l'estoppel tel qu'il est entendu par l'Assemblée plénière.

Ensuite, la Cour de cassation écarte l'application de l'estoppel en l'espèce, en expliquant que les deux actions engagées successivement par la société Sédéa n'étaient "ni de même nature, ni fondées sur les mêmes conventions et n'opposaient pas les mêmes parties". On peut supposer, ici, que la Cour de cassation pose trois conditions cumulatives nécessaires au déclenchement de l'estoppel. Les deux actions successives doivent concerner les mêmes parties, le même objet (les mêmes conventions dit l'arrêt) et doivent être de même nature (peut-on parler ici d'identité de causes ?). Il semble alors que l'on retrouve la règle de la triple identité de parties, d'objet et de cause utilisée habituellement pour mettre en oeuvre la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée. L'arrêt n'est pas aussi net, mais la ressemblance est tout de même frappante. L'identité d'objet est expressément visée par le conseiller rapporteur lorsqu'il évoque l'identité de convention. En revanche, le rapprochement est plus délicat entre la "nature" et la "cause de l'action".

Mais cette triple identité ne traduit pas exactement l'esprit du mécanisme de l'estoppel, lequel agit comme la sanction du comportement déloyal d'un plaideur qui trompe son adversaire en utilisant successivement deux stratégies contradictoires. Ce revirement d'action oblige alors l'adversaire à modifier radicalement sa stratégie de défense au cours de la même instance. L'estoppel serait  donc constitué lorsque la contradiction d'action "créé une apparence trompeuse" au cours d'une instance ; apparence qui porte préjudice à l'adversaire dans l'exercice de sa défense (4). Les deux conditions de la mise en oeuvre de l'estoppel seraient : la contradiction frauduleuse et le préjudice qui en découle.

Ces deux conditions ne sont pas reprises par la Cour de cassation dans l'espèce commentée mais elles ressortent assez nettement du rapport et de l'avis accompagnant l'arrêt. Avec cette décision d'Assemblée plénière, l'estoppel a acquis ses lettres de noblesse procédurale, mais ce mécanisme entrainera certainement un contentieux qui conduira la Cour de cassation à définir avec plus de précisions les conditions de sa mise en oeuvre.

II - Procédure orale : effet d'une demande incidente déposée par écrit au greffe de la juridiction

Dans une procédure orale, le juge doit statuer sur une demande incidente déposée par écrit au greffe antérieurement au désistement d'appel (Cass. mixte, 13 mars 2009, n° 07-17.670, M. Stéphane Contargyris c/ M. Vincent Bourgeois, P+B+R+I N° Lexbase : A8022EDH)

Le particularisme de la procédure orale tient au fait que la juridiction n'est, en principe, saisie que des prétentions exposées devant elle par oral le jour de l'audience. Toute autre prétention ne saurait être considérée comme recevable (5). Cette procédure ne favorise pas toujours la loyauté des débats. Ainsi, certains plaideurs attendent-ils le jour de l'audience pour exposer leurs moyens ou communiquer leurs preuves.

Une difficulté se présente, également, en appel lorsque l'intimé dépose par écrit des demandes incidentes au greffe de la juridiction et que l'appelant se désiste de son appel. La question se pose, alors, de savoir si les demandes incidentes déposées par écrit ont une valeur dans la procédure orale et saisissent la cour d'appel. Cette difficulté a donné lieu à une divergence d'interprétation entre deux chambres de la Cour de cassation. Dans un arrêt du 14 mars 2007 (6), la Chambre sociale a estimé que des conclusions d'appel incident, envoyées par écrit avant le désistement de l'appelant principal, manifestaient une opposition à l'extinction de l'instance et anéantissaient les effets du désistement. A l'inverse, dans un arrêt du 10 janvier 2008 (7), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation avait jugé "qu'en matière de procédure orale, le désistement formulé par écrit, antérieurement à l'audience, produit immédiatement son effet extinctif", empêchant ainsi à un appel incident de prospérer.

La question de l'effet du désistement d'appel exercé avant l'audience s'est posée une nouvelle fois en septembre 2008 devant la deuxième chambre civile et cette dernière a renvoyé la question en Chambre mixte.

Dans l'espèce étudiée, une personne avait formé un appel principal et l'intimé avait ensuite déposé au greffe des conclusions d'appel incident par lesquelles il demandait à la juridiction de condamner son adversaire pour appel abusif. L'appelant se désista alors par écrit avant le jour de l'audience. Il fut pourtant condamné par la cour à des dommages-intérêts.

Dans son pourvoi, l'appelant principal faisait valoir "qu'en application de l'article 401 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6502H7X), dans le cadre d'une procédure orale, le désistement écrit du demandeur antérieurement à toute demande incidente produit un effet extinctif d'instance immédiat".

L'article 401 du Code de procédure civile n'est pas aussi clair. Il prévoit que "le désistement de l'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente". La question se pose donc de savoir si l'appel incident ou la demande incidente ne peut être pris en compte que s'il est formé à l'oral le jour de l'audience, ou s'il produit ses effets dès qu'il est déposé par écrit au greffe de la juridiction.

En d'autres termes, la question posée par l'arrêt était de savoir s'il était possible d'introduire une dose d'écrit dans une procédure orale.

La Cour de cassation réunie en Chambre mixte répond à cette question par l'affirmative. Elle considère "que, lorsque dans une procédure orale une demande incidente a été formulée par un écrit déposé au greffe antérieurement au désistement d'appel, l'égalité des armes et l'exigence d'un procès équitable imposent qu'il soit statué sur la demande incidente soutenue à l'audience".

La Cour de cassation invoque le principe de l'égalité des armes pour justifier sa décision. La référence est bienvenue. Si l'on admettait que le désistement d'appel formulé avant l'audience produise un effet extinctif malgré un appel incident déposé nécessairement par écrit, on privilégierait les droits procéduraux de l'appelant à titre principal au détriment de l'appelant à titre incident. Le premier aurait alors la maîtrise de l'instance jusqu'à l'audience. En interjetant un appel principal, il conserverait la possibilité de neutraliser l'action de son adversaire à tout moment en se désistant de son recours. En conséquence, l'appelant à titre incident ne verrait pas sa prétention tranchée par la juridiction du fond.

Pour autant, la Cour de cassation pose des conditions strictes à la recevabilité de l'appel incident. D'une part, l'appel doit avoir été déposé par écrit au greffe de la juridiction, d'autre part, ce dépôt doit avoir eu lieu antérieurement au désistement d'appel principal. Si ces conditions sont réunies, on applique alors l'article 401 du Code de procédure civile, à savoir que le désistement d'appel principal ne peut mettre fin à l'instance que s'il est accepté par l'appelant à titre incident.

III - Réouverture des débats par la juridiction de jugement et révocation de l'ordonnance de clôture

La réouverture des débats emporte révocation de l'ordonnance de clôture seulement lorsque l'affaire est renvoyée à la mise en état (Cass. civ. 2, 19 février 2009, n° 07-19.504, FS-P+B 1er moyen, 1ère branche N° Lexbase : A2603EDR)

La réouverture des débats par la juridiction de jugement est un mécanisme problématique lorsque la procédure est écrite. Ce mécanisme s'impose lorsque le juge souhaite soulever d'office un moyen qu'il découvre durant l'audience ou qu'une partie produit une pièce essentielle à la solution du litige après l'ordonnance de clôture. L'article 444 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6548H7N) dispose alors que "le président peut ordonner la réouverture des débats". L'expression "réouverture des débats" est pour le moins floue. Si l'on combine l'article 444 précité avec l'article 783 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L7021H78), on doit en déduire que la seule hypothèse de réouverture des débats consiste dans la révocation de l'ordonnance de clôture. En effet, la clôture de la mise en état interdit aux parties de déposer des conclusions ou pièces devant la juridiction (8). En cas de réouverture des débats, les parties doivent nécessairement produire de nouvelles conclusions et la révocation de l'ordonnance semble donc s'imposer à moins que la juridiction de jugement ne préfère avoir recours à la technique de la note en délibéré qui n'emporte pas réouverture des débats (9).

Cette dichotomie entre réouverture des débats (avec révocation de l'ordonnance de clôture) et notes en délibéré vient d'être bouleversée par un arrêt rendu par la deuxième chambre civile le 19 février 2009, publié au Bulletin et sur le site de la Cour de cassation.

En l'espèce, la juridiction du fond avait rendu un premier arrêt dans lequel elle ordonnait un sursis à statuer et procédait à la réouverture des débats en renvoyant la cause à une audience de la mise en état. L'une des parties avait profité de cette réouverture pour présenter une demande nouvelle en dommages-intérêts. Cette demande fut déclarée recevable par la cour d'appel. Le pourvoi contestait la recevabilité de la demande nouvelle en invoquant le fait que la réouverture des débats n'avait pas emporté la révocation de l'ordonnance de clôture et qu'une prétention formulée après la clôture ne pouvait être admise devant la juridiction de jugement.

La Cour de cassation rejette le pourvoi par un motif laconique : "mais attendu que la réouverture des débats emporte révocation de l'ordonnance de clôture lorsque l'affaire est renvoyée à la mise en état".

La formule ne semble pas emporter de révolution procédurale. Si la juridiction de jugement renvoie l'affaire à la mise en état, on admet que le renvoi emporte, même implicitement, révocation de l'ordonnance de clôture.

Mais le communiqué publié sur le site de la Cour de cassation indique le sens caché de l'arrêt. Selon ce texte, "La Cour fait ainsi une distinction entre la décision de réouverture des débats accompagnée d'un renvoi à la mise en état et celle qui n'est pas assortie d'un tel renvoi".

Il y aurait ainsi une réouverture sans renvoi à l'instruction. Et le communiqué ajoute : "dans ce dernier cas, et selon une jurisprudence constante la réouverture des débats n'emporte pas révocation de l'ordonnance de clôture et laisse l'affaire au stade du jugement". Il cite ainsi cinq arrêts qui affirment de façon constante que "la réouverture des débats n'emporte pas la révocation de l'ordonnance de clôture lorsqu'elle est ordonnée en application des dispositions de l'article 444 du nouveau Code de procédure civile pour permettre aux parties de conclure sur une question précisée".

La solution répétée avec constance est plus que surprenante. L'ordonnance de clôture interdit formellement aux parties de déposer des conclusions et la Cour de cassation déroge explicitement à l'article 783 du Code de procédure civile dans tous les arrêts précités, en affirmant que la juridiction de jugement peut recevoir de nouvelles conclusions des parties sans révoquer l'ordonnance de clôture. Certes, la Haute juridiction fait un usage parcimonieux de cette jurisprudence. Une demande incidente de dommages-intérêts présentée après la réouverture est irrecevable (Cass. civ. 2, 9 novembre 2000, n° 98-22.865, M. Charles Damis, M. Robert Damis, M. Robert Damis N° Lexbase : A7756AHQ). Il en est de même des conclusions qui contiennent des moyens nouveaux sans lien avec les observations demandées (Cass. civ. 1, 20 mai 2003, n° 01-01.071, F-D N° Lexbase : A1483B9S) ou d'une assignation en intervention forcée (Cass. civ. 2, 10 mars 2004, n° 02-14.971, F-D N° Lexbase : A4882DBG). En d'autres termes, seuls les moyens permettant de répondre à la question posée par la juridiction pourront être contenus dans les conclusions déposées après la réouverture des débats.

On sent bien que cette jurisprudence est inspirée par un certain pragmatisme. Lorsque la juridiction a simplement besoin d'une réponse à une question précise, il n'est pas nécessaire de révoquer l'ordonnance de clôture, mais la procédure étant écrite, il faut tout de même permettre aux parties de conclure. Toutefois, ne devrait-on pas considérer que dans cette situation, la juridiction devrait avoir recours aux notes en délibéré ? De nouvelles conclusions sont-elles réellement nécessaires ?

Quoi qu'il en soit, l'arrêt commenté du 19 février 2009 confirme implicitement la jurisprudence de la deuxième chambre civile qui ouvre à la juridiction de jugement trois possibilités lorsqu'elle doit provoquer à nouveau un débat : elle peut se contenter d'une note en délibéré. Elle peut aussi rouvrir les débats et autoriser les parties à conclure sans révoquer l'ordonnance de clôture. Elle peut, enfin, renvoyer la cause à une audience de la mise en état. Ce renvoi emporte alors automatiquement révocation de l'ordonnance de clôture et ouvre de plus larges possibilités aux parties (demandes nouvelles notamment).

Etienne Vergès, Agrégé des Facultés de droit, Professeur à l'Université de Grenoble


(1) Cass. civ. 1, 6 juillet 2005, n° 01-15.912, M. Abrahim Rahman Golshani c/ Gouvernement de la République islamique d'Iran, FS-P+B (N° Lexbase : A8785DI9), Bull. civ. I, n° 302, D., 2006, Jur., p. 1424, obs. E. Agostini ; RTDCom., 2006, p. 309, obs. E. Loquin ; Revue des contrats, 1er octobre 2006, n° 4, p. 1279, note B. Fauvarque-Cosson ; Revue arbitrage, 2005, 993, note Ph. Pinsolle.
(2) Comme elle avait pu le faire à propos des clauses de conciliation : Cass. mixte, 14 février 2003, n° 00-19.423, M. Daniel Poiré c/ M. Daniel Tripier, P (N° Lexbase : A1830A7W).
(3) L'article 122 du Code de procédure civile énonce que la fin de non-recevoir tend "à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande".
(4) Avis de M. de Gouttes.
(5) Par exemple, le dépôt de conclusion devant la cour d'appel ne supplée pas le défaut de comparution de la partie qui a déposé les conclusions : Cass. soc., 19 octobre 1988, n° 86-10.160, M. Dupuy c/ Caisse de retraite des notaires (N° Lexbase : A8584AA8).
(6) Cass. soc., 14 mars 2007, n° 05-43.351, M. Philippe Moginot, F-P+B+R+I (N° Lexbase : A6782DUQ).
(7) Cass. civ. 2, 10 janvier 2008, n° 06-21.938, Mme Karine Tan Luong Ann, F-P+B (N° Lexbase : A2700D3E).
(8) C. proc. civ., art. 783, al. 1 : "Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office".
(9) C. proc. civ., art. 445 (N° Lexbase : L6549H7P).
(10) Cass. civ. 2, 14 mai 1997, n° 95-17.009, M. Chouraqui c/ Consorts Benhamou et autres (N° Lexbase : A0580ACH), Bull. civ. II, n° 144 ; Cass. civ. 2, 9 novembre 2000, n° 98-22.865, M. Charles Damis, M. Robert Damis, M. Robert Damis (N° Lexbase : A7756AHQ), Bull. civ. II, n°149 ; Cass. civ. 1, 20 mai 2003, n° 01-01.071, F-D (N° Lexbase : A1483B9S) ; Cass. com., 19 juin 2001, n° 98-18.616, Société CEG c/ M. Guy Migliorisi (N° Lexbase : A6158ATA) ; Cass. civ. 2, 10 mars 2004, n° 02-14.971, F-D (N° Lexbase : A4882DBG).

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