Réf. : Cass. civ. 1, 13 mars 2024, n° 22-20.216, F-D N° Lexbase : A60582UW
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par Hélène Nasom-Tissandier, Maître de conférences HDR, Université Paris Dauphine-PSL, CR2D
le 17 Avril 2024
► La lettre, postérieure à la reconnaissance de dette, dont il était allégué qu'elle constituait une menace d'exclusion de la communauté religieuse à laquelle tous appartenaient, n'était pas révélatrice d'une contrainte exercée au moment de l'acte ; la cour d'appel, qui a procédé aux recherches prétendument omises, a pu en déduire que le requérant ne démontrait ni le défaut de remise des fonds ni le vice allégué, de sorte qu'il devait être condamné au paiement.
Faits et procédure. En l’espèce, le requérant a signé le 25 février 2017 une reconnaissance de dette en faveur du prêteur aux termes de laquelle il reconnaissait lui devoir une certaine somme, au titre d'un prêt sans intérêt. Faute de règlement à l'échéance fixée, le prêteur a assigné le bénéficiaire en paiement. La cour d’appel accueille sa demande (CA Versailles, 16 juin 2022, n° 21/04685 N° Lexbase : A007678C) et le requérant se pourvoit en cassation. Il reproche en particulier aux juges du fond de n’avoir pas tenu compte d’éléments postérieurs à la signature et l’enregistrement de la reconnaissance de dette pour prouver le vice du consentement, alors que « si, pour entraîner la nullité du contrat, le vice du consentement d'une partie doit être caractérisé à la date de l'engagement de l'intéressé, la preuve de l'existence de ce vice peut résulter d'éléments postérieurs à la date de formation du contrat ».
Solution. La Cour de cassation rend un arrêt de rejet en renvoyant à l’interprétation souveraine des juges du fond de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis : « la lettre, postérieure à la reconnaissance de dette, dont il était allégué qu'elle constituait une menace d'exclusion de la communauté religieuse à laquelle tous appartenaient, n'était pas révélatrice d'une contrainte exercée au moment de l'acte ». Elle en déduit que le requérant ne démontre pas le vice allégué.
Cette décision semble presque anodine, elle est pourtant l’occasion pour la Cour de cassation de rappeler que les règles de preuve du vice du consentement s’appliquent à la reconnaissance de dette. La validité du consentement doit s’apprécier au jour de l’engagement de l’intéressé mais la preuve de l’existence du vice peut résulter d’éléments postérieurs à la date de formation du contrat (Cass. com., 13 décembre 1994, n° 92-12.626 N° Lexbase : A6841ABY ; Cass. civ. 3, 13 janvier 1999, n° 96-18.309 N° Lexbase : A2555CH4 ; Cass. civ. 1, 17 novembre 2011, n° 10-25.369 N° Lexbase : A9472HZT). En l’espèce, contrairement à ce qui leur était reproché, les juges du fond ont tenu compte de l’élément postérieur à la formation du contrat mais n’ont pas admis qu’il prouvait une contrainte suffisante pour caractériser la violence.
Quant à la force probante de la reconnaissance de dette, la Haute cour se situe dans le droit fil de la jurisprudence antérieure selon laquelle en présence d’une reconnaissance de dette, la charge de la preuve est inversée. Il résulte d’une jurisprudence constante que celui qui demande le remboursement d’une somme d’argent supporte la charge de la preuve du prêt (Cass. civ. 1, 6 mai 1997, n° 95-11.151 N° Lexbase : A0296ACX ; Cass. civ. 1, 7 mars 2006, n° 02-20.374 N° Lexbase : A4939DNA). Toutefois, la charge de la preuve du défaut ou de l’illicéité de la cause pèse sur celui qui l’invoque (Cass. civ. 1, 19 juin 2008, n° 06-19.056 N° Lexbase : A2145D9C ; Cass. civ. 1, 14 janvier 2010, n° 08-18.581 N° Lexbase : A2963EQS) : c’est à l’emprunteur d’établir que le prêteur ne lui a pas remis les fonds. La reconnaissance de dette établit donc une présomption de cause (Cass. civ. 1, 22 janvier 2020, n° 18-24.295 {"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 56316714, "corpus": "sources"}, "_target": "_blank", "_class": "color-sources", "_title": "Cass. civ. 1, 22-01-2020, n\u00b0 18-24.295, F-D, Cassation", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: A59323CP"}} : « il incombe à celui qui a souscrit une reconnaissance de dette de démontrer que son engagement manquait de cause, et non au créancier de rapporter la preuve du versement effectif de la somme litigieuse entre les mains du débiteur »).
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