La lettre juridique n°824 du 14 mai 2020 : Comptabilité publique

[Brèves] Le cumul de poursuites et de sanctions en cas de gestion de fait conforme à la Constitution

Réf. : Cons. const., décision n° 2020-838/839 QPC du 7 mai 2020 (N° Lexbase : A27643LX)

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par Marie-Claire Sgarra

le 13 Mai 2020

Les dispositions de l’article L. 133-11 du Code des juridictions financières (N° Lexbase : L1111LEU), en ce qu'elles excluent le prononcé d'une amende uniquement en cas de poursuite sur le fondement de l'article 433-12 du Code pénal (N° Lexbase : L1916AMW), sont conformes à la Constitution.

Telle est la solution retenue par le Conseil constitutionnel dans une décision du 7 mai 2020 (Cons. const., décision n° 2020-838/839 QPC du 7 mai 2020 N° Lexbase : A27643LX).

Pour rappel, par deux décisions, le Conseil d’Etat a admis les QPC relatives à la constitutionnalité de ces dispositions (CE 6° ch., 7 février 2020, n° 436066 N° Lexbase : A93933DA et 436124 N° Lexbase : A93943DB, inédits au recueil Lebon).

Aux termes de l’article L. 133-11 du Code des juridictions financières : « Les comptables de fait peuvent, dans le cas où ils n’ont pas fait l’objet pour les mêmes opérations des poursuites prévues à l’article 433-12 du Code pénal (délit d'immixion), être condamnés à l’amende par la Cour des comptes en raison de leur immixtion dans les fonctions de comptable public. Le montant de l’amende tient compte de l’importance et de la durée de la détention ou du maniement des deniers, des circonstances dans lesquelles l’immixtion dans les fonctions de comptable public s’est produite, ainsi que du comportement et de la situation matérielle du comptable de fait. Son montant ne pourra dépasser le total des sommes indûment détenues ou maniées ».

Les requérants soutiennent que les dispositions de l’article L. 131-11 du Code des juridictions financières « excluent le prononcé d’une amende uniquement en cas de poursuite sur le fondement de l’article 433-12 du Code pénal et sont contraires au principe de nécessité des délits et des peines et porteraient ainsi atteintes aux droits et libertés garantis par la Constitution et notamment au principe de la nécessité des délits et des peines résultant de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ».

Le Conseil constitutionnel rappelle dans un premier temps certaines dispositions du Code pénal. Ainsi :

- aux termes de l'article 314-1 du Code pénal (N° Lexbase : L7136ALU), l'abus de confiance sanctionne le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé,

- la concussion est définie selon l’article 432-10 du même Code (N° Lexbase : L9472IYH) comme le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, de recevoir, exiger ou ordonner de percevoir à titre de droits ou contributions, impôts ou taxes publics, une somme qu'elle sait ne pas être due, ou excéder ce qui est dû,

- la corruption passive est quant à elle le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public, ou investie d'un mandat électif public, de solliciter ou d'agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour elle-même ou pour autrui … pour accomplir ou avoir accompli, pour s'abstenir ou s'être abstenue d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat (C. pén., art. 432-11 [LXB=]),

- le détournement de fonds publics est le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, un comptable public, un dépositaire public ou l'un de ses subordonnés, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission (C. pén., art. 432-15 N° Lexbase : L4114LS8),

- enfin, l'abus de biens sociaux réprime le fait, pour les gérants d'une société à responsabilité limitée ou pour le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d'une société anonyme, de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savent contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement (C. com., art. L. 241-3 N° Lexbase : L9516IY4 et art. L. 242-6 N° Lexbase : L9515IY3).

La seule circonstance que plusieurs incriminations soient susceptibles de réprimer un même comportement ne peut caractériser une identité de faits. Si les incriminations mentionnées précédemment sont susceptibles de réprimer des faits par lesquels une personne s'est rendue coupable de gestion de fait, elles ne se limitent pas, contrairement au délit d'immixion, à cette seule circonstance. Ces infractions ne tendent pas à réprimer de mêmes faits, qualifiés de manière identique. En autorisant de tels cumuls de poursuites, les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe de nécessité des délits et des peines.

Le Conseil constitutionnel émet cependant une réserve : « si les dispositions contestées rendent possibles d'autres cumuls, entre les poursuites pour gestion de fait et d'autres poursuites à des fins de sanction ayant le caractère de punition, ces cumuls éventuels doivent, en tout état de cause, respecter le principe de nécessité des délits et des peines, qui implique qu'une même personne ne puisse faire l'objet de plusieurs poursuites susceptibles de conduire à des sanctions de même nature pour les mêmes faits, en application de corps de règles protégeant les mêmes intérêts sociaux ».

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