La lettre juridique n°122 du 27 mai 2004 : Fiscalité des entreprises

[Textes] Nouvelles règles comptables relatives aux fusions et opérations assimilées

Réf. : CNC, avis n° 2004-01 du 25 mars 2004

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N1728ABM

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par Valérie Le Quintrec, Université de Bourgogne

le 07 Octobre 2010

Dans un avis du 25 mars 2004, l'Assemblée plénière du Conseil National de la Comptabilité (CNC) est venu préciser les nouvelles règles comptables relatives aux fusions et opérations assimilées dans les comptes individuels telles que la fusion simplifiée, les apports partiels d'actif, les scissions ou encore les opérations de dissolution confusion de patrimoine référencées obligatoirement dans un traité d'apport (C. com., art L. 236-6 N° Lexbase : L6356AIA).


Plusieurs points sont traités. Parmi eux, on retiendra essentiellement la nouvelle méthode d'évaluation des apports et la comptabilisation du mali de fusion non représentatif d'une dépréciation de titres dans un compte d'immobilisations incorporelles.

Rappelons qu'actuellement, les sociétés qui fusionnent ont le choix entre plusieurs méthodes de valorisation des apports.

Pour des raisons essentiellement fiscales, elles retiennent soit la valeur réelle des biens apportés soit la valeur comptable. En principe, la valeur réelle ou valeur vénale est la valeur la plus souvent utilisée en cas d'évaluation des sociétés qui fusionnent. Cependant, il est admis que la valeur comptable, si elle est suffisamment proche de la situation réelle de la société, puisse être considérée, dans le cadre du régime de faveur, comme valeur d'apport. Le choix de la valeur comptable est purement fiscal dans la mesure où la plus-value d'annulation des titres est exonérée si et seulement si elle est réalisée dans le cadre du régime de faveur.

Ce régime, en cas de fusion par exemple, a pour but principal de minimiser les charges fiscales de la société absorbée et de les transférer sur la société absorbante .

Le CNC est venu modifier quelque peu ces méthodes d'évaluation des apports. En effet, les personnes morales qui fusionnent n'auront plus le choix. Désormais, la valeur retenue leur sera imposée en fonction de la situation de contrôle au moment de l'opération de fusion (1).

Outre cette nouvelle méthode d'évaluation des apports, l'avis vient également préciser le traitement comptable du "mali de fusion". Il est à comptabiliser, lorsqu'il n'est pas représentatif d'une dépréciation de titres, dans un compte d'immobilisations incorporelles (2).

1. La méthode d'évaluation des apports est liée à la situation des entreprises qui fusionnent

Les sociétés ont désormais l'obligation d'évaluer leurs apports soit à la valeur réelle soit à la valeur comptable. Le choix n'est plus possible en fonction des intérêts fiscaux. Ainsi, il faudra distinguer entre les fusions à l'endroit ou à l'envers impliquant des entités sous contrôle commun ou sous contrôle distinct au sens de l'article L. 233-16 du Code de commerce (C. com., art L 233-16 N° Lexbase : L6319AIU). L'avis définit successivement la société absorbante, la société absorbée, la société initiatrice et la société cible ainsi que les notions de fusions à l'endroit, à l'envers et de contrôle avant d'évoquer la nouvelle méthode d'évaluation.

1.1. Evaluation à la valeur réelle

L'évaluation des actifs et passifs se fait à leur valeur réelle, lorsque l'opération de restructuration est à l'endroit, et lorsqu'elle est réalisée entre entités non contrôlées ou entre entités sous contrôle distinct. L'avis rapporté définit les opérations impliquant des sociétés sous contrôle distinct comme des opérations dans lesquelles "aucune des sociétés ne contrôle préalablement l'autre ou lorsque ces sociétés ne sont pas préalablement sous le contrôle d'une même société-mère".

Cette valeur réelle est logiquement celle qu'il convient de retenir pour la valorisation des biens apportés dans la mesure où la situation de contrôle entre la société initiatrice (société absorbante dans le cadre de fusion) et la société cible (société absorbée en cas de fusion) n'est pas établie. Il s'agit, comme le rappelle le CNC, de traiter cette opération comme une acquisition à la valeur réelle.

Le Conseil souligne aussi que cette valeur est exceptionnellement utilisée pour les opérations de filialisation suivies d'une cession à une société sous contrôle distinct.

De manière générale, les apports sont évalués à leur valeur réelle lorsqu'une réévaluation est à effectuer. Le CNC rappelle que les valeurs réelles individuelles des actifs et passifs apportés s'apprécient en fonction du marché et de l'utilité du bien pour la société.

A l'opposé, lorsque l'ensemble des actifs et passifs ne nécessitent pas de réévaluation, c'est la valeur comptable qui servira alors de valeur d'apport. Le CNC précise que la valeur comptable des actifs et passifs apportés est celle qui figure dans les comptes de l'absorbée ou de la société apporteuse à la date d'effet de l'opération.

1.2. Evaluation à la valeur comptable

L'évaluation des actifs et passifs se fait à leur valeur comptable lorsque l'opération de restructuration est réalisée entre entités contrôlées ou entre entités sous contrôle commun.

Le CNC rappelle la définition du contrôle exclusif dans l'avis : il s'agit du "pouvoir de diriger les politiques financière et opérationnelle d'une entreprise afin de tirer avantage de ses activités".

Les apports sont évalués à la valeur comptable lorsque les opérations, peu importe le sens de l'opération, impliquent des sociétés sous contrôle commun. En effet, la situation de contrôle entre les entités concernées a préalablement été établie. L'évaluation des actifs et passifs a par conséquent déjà été effectuée ce qui ne nécessite pas de réévaluation : la valeur comptable est donc logiquement la valeur d'apport à retenir.

En outre, il convient de soumettre les apports à la valeur comptable lorsque l'opération est à l'envers et implique des sociétés sous contrôle distinct. Ceci s'explique notamment par le sens de la fusion. En effet, dans ce cas de figure, c'est la société qui aurait du être la société initiatrice qui devient la cible. Les biens de la cible ne figurant pas dans le traité d'apport ne peuvent pas être évalués à leur valeur réelle : la valeur comptable est encore une fois la valeur de référence.

L'avis, s'il détaille les nouvelles modalités d'évaluation des apports, vient également affiner la notion et le régime du mali de fusion.

2. Le mali de fusion non représentatif d'une dépréciation de titres est comptabilisé dans un compte d'immobilisations incorporelles

L'avis confirme les règles applicables au boni de fusion, mais vient surtout préciser le traitement comptable du mali de fusion. Défini par le CNC, le mali de fusion représente "l'écart négatif entre l'actif net reçu par la société absorbante à hauteur de sa participation détenue dans la société absorbée et la valeur comptable de cette participation". Plus simplement, le mali correspond, contrairement au boni de fusion, à un écart d'acquisition, le prix d'acquisition dépassant l'actif net apporté.

Le CNC distingue le mali dit technique et le mali de surprix. Le premier correspond à la différence entre la valeur des titres acquis pour leur valeur de marché et l'actif net comptable apporté.

Le second correspond au "surpaiement" par la société initiatrice de la participation prise dans la société cible. L'avis parle de "complément de dépréciation de la participation détenue dans la société absorbée".

Comptablement, la société initiatrice inscrit la totalité du mali dans un compte d'immobilisations incorporelles. Il convient de rappeler que le mali n'est en principe pas un élément amortissable. Toutefois, il peut perdre de sa valeur lorsque "la valeur actuelle [valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d'usage] d'un ou plusieurs actifs sous-jacents auxquels une quote-part de mali a été affectée devient inférieure à la valeur comptable du ou des actifs précités, majorée de la quote-part de mali affectée".

Le CNC précise que "les entreprises procèdent à la date de l'opération de manière extra-comptable à l'affectation de ce mali aux différents actifs apportés par la société apporteuse dans la mesure où la plus-value latente constatée par actif est significative, cela afin de suivre dans le temps la valeur du mali".

Soulignons qu'en retenant la valeur comptable en cas de fusion ou d'opérations assimilées entre sociétés sous contrôle commun, la neutralité des opérations pour la société initiatrice est pleinement assurée. La comptabilisation du mali de fusion dans un compte d'immobilisations incorporelles le confirme parfaitement.

Après lecture de l'avis, force est de constater que ce dernier axe principalement ses développements sur les méthodes d'évaluation des apports. La valeur comptable, dorénavant plus largement utilisée comme valeur d'apport, témoigne encore une fois du lien étroit entre la comptabilité et la fiscalité. A compter du 1er janvier 2005, les opérations de fusion et assimilées seront soumises à ce nouveau traitement. Il est cependant possible pour les sociétés commerciales qui figurent dans le champ d'application de l'avis de bénéficier des nouvelles règles comptables pour les fusions et opérations assimilées à compter du 1er janvier 2004.

Notons que le 4 mai dernier, l'avis du CNC a été transformé en règlement par le Comité de la réglementation comptable. Mais il faudra encore attendre un arrêté ministériel qui homologuera ces nouvelles règles afin que ces dernières soient pleinement applicables et une instruction fiscale pour que cet avis emporte toutes ses conséquences en la matière.

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