CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 74364
Fédération nationale de la presse française
Lecture du 23 Novembre 1987
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Vu °1) sous le °n 74 364, la requête présentée pour la FEDERATION NATIONALE DE LA PRESSE FRANCAISE, syndicat dont le siège est à Paris (75484 cedex 10) représentée par son président en exercice, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule pour excès de pouvoir une décision du secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé des techniques de la communication, en date du 25 octobre 1985, rejetant sa demande tendant à obtenir le bénéfice pour la presse télématique du régime fiscal de la presse écrite ; Vu, °2) sous le °n 74 365, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 24 décembre 1985, présentée par la FEDERATION NATIONALE DE LA PRESSE FRANCAISE, syndicat dont le siège est 6 bis rue Gabriel-Laumain, à Paris (75484 cedex 10), représentée par son président en exercice, domicilié audit siège, et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre de l'économie, des finances et du budget sur sa demande tendant au retrait de l'instruction, publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts du 5 juillet 1985, rappelant que les recettes provenant de l'édition de journaux télématiques, sont soumises au taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée ; Vu, °3) sous le °n 74 366, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 24 décembre 1985, présentée pour la FEDERATION NATIONALE DE LA PRESSE FRANCAISE dont le siège est 6 bis rue Gabriel Laumain à Paris (75484 cedex 10), représentée par son président en exercice, domicilié audit siège, et tendant à l'annulation de la décision implicite résultant du silence gardé par le Premier ministre sur une demande de ladite fédération tendant à ce que le régime fiscal de la presse imprimée soit étendue à la presse télématique ; Vu, °4) le °n 74 368, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 24 décembre 1985, présentée pour le SYNDICAT NATIONAL DE LA PRESSE QUOTIDIENNE dont le siège est 17, place des Etats-Unis, à Paris (75016), représentée par son président en exercice domicilié audit siège, et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande tendant à obtenir le retrait de l'instruction publiée le 5 juillet 1985 qui rappelle que les recettes provenant de l'édition de journaux télématiques relèvent du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée ; Vu, °5) sous le °n 74 928, la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 20 janvier 1986, présentée pour le SYNDICAT DE LA PRESSE PARISIENNE, dont le siège est 6 bis, rue Gabriel Laumain, à Paris (75484 cedex 10), représenté par son président en exercice, domicilié audit siège, et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 26 décembre 1985par laquelle le ministre de l'économie, des finances et du budget a rejeté sa demande tendant au retrait de l'instruction publiée le 6 juillet 1985 et assujettissant au taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée les recettes provenant de l'édition de journaux télématiques ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu : - le rapport de Mme Hagelsteen, Maître des requêtes, - les observations de la S.C.P. de Chaisemartin, avocat de la fédération nationale de la presse française, du syndicat national de la presse quotidienne régionale et du syndicat de la presse parisienne, - les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les cinq requêtes susvisées, qui émanent de la fédération nationale de la presse française, du syndicat des quotidiens régionaux, du syndicat national de la presse quotidienne régionale et du syndicat de la presse parisienne présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article 278 du code général des impôts : "Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 18,60 %" ; qu'aux termes de l'article 298 septies du même code, dans sa rédaction résultant de la loi du 29 décembre 1976 modifiée : "Les ventes, commissions et courtages portant sur les publications qui remplissent les conditions prévues par les articles 72 et 73 de l'annexe III au présent code pris en application de l'article 52 de la loi du 28 février 1934, sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : °1 Pour les quotidiens et pour les publications qui leur sont assimilées au sens de l'article 39 bis, au taux réduit, assorti toutefois d'un abattement tel que le taux réel perçu dans les départements de la France métropolitaine soit de 2,1 % ... ; °2 Pour les autres publications, sous réserve des dispositions de l'article 298 terdecies A, au taux réduit..." ; qu'aux termes de l'article 72, susmentionné, de l'annexe III au même code : "Pour bénéficier des avantages fiscaux prévus à l'article 298 septies du code général des impôts, les journaux et périodiques doivent remplir les conditions suivantes : ... °2 Satisfaire aux obligations de la loi sur la presse, notamment : a) Porter l'indication du nom et du domicile de l'imprimeur (ces indications doivent se rapporter à l'imprimeur qui imprime réellement la publication) ; b) Avoir un gérant dont le nom est imprimé sur tous les exemplaires ; c) Avoir fait l'objet du dépôt prévu aux articles 7 et 10 de la loi du 29 juillet 1881 ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que le régime fiscal instauré par les dispositions de l'article 298 septies précité ne concerne que les publications imprimées et diffusées à l'aide d'un support d'une nature telle que puissent être satisfaites les obligations énoncées au °2 de l'article 72 précité ;
Considérant que la circonstance que la loi du 1er août 1986, portant réforme juridique de la presse, aurait élargi la définition de celle-ci pour y comprendre des publications éditées par d'autres moyens que l'imprimerie est sans influence sur le champ d'application de l'article 298 septies du code général des impôts, ci-dessus rappelé ; qu'il en est de même de la circonstance que, dans le passé, l'administration avait admis au bénéfice du régime fiscal particulier de la presse les "magazines sonores", entendus comme des publications périodiques comportant, intercalés entre les pages imprimées, des disques souples qui constituent l'illustration suivie du texte et font partie intégrante du magazine ; que la circonstance que l'administration fiscale a admis, dans une instruction du 25 novembre 1986, que la provision que les entreprises de presse sont autorisées à constituer sur le fondement de l'article 39 bis du code général des impôts pourrait être utilisée à financer les équipements nécessaires à la réalisation de journaux télématiques n'a pas davantage modifié le champ d'application des dispositions précitées de l'article 298 septies du code ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en indiquant, dans son instruction 3C-8-85 du 5 juillet 1985, que le taux normal de 18,6 % de la taxe sur la valeur ajoutée est applicable aux prestations de services télématiques, quelles que soient la nature des informations fournies ou des services rendus et la qualité ou l'activité des prestations, et que cette disposition concerne également les éditeurs de publications de presse pour les services d'informations télématiques qu'ils proposent en complément de leurs publications, le ministre de l'économie, des finances et du budget s'est borné à expliciter, sans rien y ajouter, les dispositions précitées du code général des impôts ; que cette instruction est, dès lors, dépourvue de caractère réglementaire et ne peut être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir ; qu'il en est de même, par voie de conséquence de la décision en date du 21 octobre 1985 par laquelle le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé des techniques de la communication, a indiqué que le régime prévu à l'article 298 septies du code général des impôts n'est pas applicable aux services télématiques, de la décision du 26 décembre 1985 par laquelle le ministre de l'économie, des finances et du budget a refusé de retirer l'instruction du 5 juillet 1985 et, enfin, de la décision implicite de rejet opposée à la même demande par le Premier ministre ; que, par suite, les requêtes de la fédération et des syndicats requérants ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : Les requêtes susvisées de la fédération nationale de la presse française, du syndicat de la presse parisienneet du syndicat national de la presse quotidienne régionale sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la fédération nationale de la presse française, au syndicat de la presse parisienneet au syndicat national de la presse quotidienne régionale, au Premier ministre, au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de la privatisation et au ministre de la culture et de lacommunication.