CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 16452
M. SCHWETZOFF Wladimir
Lecture du 05 Novembre 1982
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Sur le rapport de la 3ème Sous-Section
Vu 1°) la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 février 1979 sous le N° 16.452, présentée par M. SCHWETZOFF Wladimir demeurant 35 rue Gazan, Paris (14ème) et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1°) annule le jugement avant-dire-droit du 10 janvier 1979 par lequel le tribunal administratif de Nice, a ordonné un supplément d'instruction et rejeté partiellement sa demande et celle de l'Union régionale Provence-Côte d'Azur Méditerranée pour la sauvegarde de la vie et de l'environnement et autres, tendant, toutes deux, à l'annulation de la décision du 26 mai 1977 du préfet du Var approuvant la concession à charge d'endigage accordée à la société foncière et maritime de Bormes-les-Mimosas et des décisions des 6 et 7 juin 1977 par lesquelles le préfet a constaté l'exécution des travaux et le transfert de propriété; 2°) annule pour excès de pouvoir ces décisions;
Vu 2°) la requête sommaire enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 mars 1981 sous le n° 32 074, présentée pour M. Schwetzoff Wladimir demeurant 35 rue Gazan à Paris (14ème) et tendant à ce que le Conseil d'Etat: 1°) annule le jugement du tribunal administratif de Nice du 23 décembre 1980 qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Var du 26 mai 1977 approuvant une concession à charge d'endigage accordée à la société foncière et maritime de Bormes-les-Mimosas et les décisions du préfet des 6 et 7 juin 1977 constatant l'exécution des travaux et le transfert de propriété; 2°) annule pour excès de pouvoir cette décision;
Vu le code des tribunaux administratifs;
Vu le code du domaine de l'Etat;
Vu la loi du 29 juillet 1881;
Vu la loi du 29 novembre 1952;
Vu le décret du 4 août 1955 modifié par le décret du 29 novembre 1968;
Vu le décret du 30 juillet 1963 modifié par le décret du 16 janvier 1981 et notamment son article 53-3;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953;
Vu la loi du 30 décembre 1977.
Considérant que les requêtes de M. Schwetzoff sont dirigées contre des jugements rendus sur une même demande; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision;
Sur les conclusions du ministre de la mer, de la société foncière et maritime de Bormes-les-Mimosas et de l'association des utilisateurs du complexe portuaire de Bormes-les-Mimosas tendant à ce que le Conseil d'Etat donne acte du désistement de M. Schwetzoff de sa requête enregistrée sous le n° 32 074:
Considérant qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article 53-3 du décret n° 63-766 du 30 juillet 1963, modifié par le décret n° 81-29 du 16 janvier 1981, "Lorsque la requête ou le recours mentionne l'intention du requérant ou du ministre de présenter un mémoire complémentaire, la production annoncée doit parvenir au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée. Si ce délai n'est pas respecté, le requérant ou le ministre est réputé s'être désisté à la date d'expiration de ce délai, même si le mémoire complémentaire a été ultérieurement produit. Le Conseil d'Etat donne acte de ce désistement";
Considérant que si, dans sa requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 mars 1981, M. Schwetzoff a mentionné son intention de produire un mémoire complémentaire, il ressort des pièces du dossier qu'avant l'expiration du délai de quatre mois prévu par l'article 53-3, le requérant a expressément renoncé à la production du mémoire annoncé; que, dans ces conditions, M. Schwetzoff ne peut être réputé s'être désisté de sa requête; que, dès lors, les conclusions susanalysées ne sauraient être accueillies;
Sur la régularité de la procédure suivie en première instance:
Considérant, d'une part, que le requérant n'était pas fondé à demander au tribunal administratif d'inviter l'administration a produire le rapport d'enquête publique au vu duquel, ont été pris l'arrêté attaqué du 26 mai 1977 et les actes subséquents des 6 et 7 juin 1977 par lesquels le préfet du Var a concédé, au nom de l'Etat, un droit d'endigage à la société foncière et maritime de Bormes-les-Mimosas, dès lors que le dossier soumis au tribunal et transmis au Conseil d'Etat contient tous les éléments utiles pour résoudre le litige soulevé par sa demande;
Considérant, d'autre part, que la demande de M. Schwetzoff, sur laquelle le tribunal administratif a statué par le jugement attaqué avait été inscrite au rôle et mise en délibéré en même temps qu'une autre demande de l'intéressé; que la circonstance que cette dernière demande a ensuite été rayée du rôle est sans influence sur la régularité du jugement attaqué;
Sur la légalité de l'arrêté et des décisions attaquées:
Considérant, en premier lieu, que si la loi du 29 novembre 1952, sur les travaux mixtes, soumet à une procédure d'instruction mixte les travaux publics et les travaux de constructions immobilières qui peuvent intéresser à la fois la défense nationale et un ou plusieurs services civils et si, en vertu de l'article 4 du décret du 4 août 1955, pris pour l'application de cette loi, modifié par le décret du 29 novembre 1968, selon la nature et l'importance des travaux, l'instruction mixte est faite à l'échelon central ou à l'échelon local, il ressort des termes mêmes de cet article 4 que sont soumis à la procédure d'instruction mixte à l'échelon central les projets de grands travaux, au nombre desquels figurent les endiguements, dont la réalisation est de nature à entraîner une dépense totale évaluée à vingt millions de francs au moins; que, pour la détermination du montant de la dépense, il n'y a pas lieu, lorsque la procédure est engagée à titre de régularisation, de procéder à la réévaluation du coût des travaux déjà réalisés; qu'il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des travaux concernant la création et l'aménagement du port de plaisance de Bormes-les-Mimosas, dont la réalisation était subordonnée à un endiguement devaient entraîner et a, effectivement, entraîné, à la date de leur exécution, une dépense d'un montant inférieur à vingt millions de francs; que M. Schwetzoff n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le projet aurait dû être soumis à la procédure d'instruction mixte à l'échelon central;
Considérant, en second lieu, que le requérant ne saurait invoquer utilement la méconnaissance de la circulaire interministérielle du 3 janvier 1973 qui est dépourvue de caractère règlementaire;
Considérant, en troisième lieu, que la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux en date du 30 mars 1973 confirmant l'annulation prononcée par le tribunal administratif de Nice des décisions des 29 juillet et 8 décembre 1970 du préfet du Var portant concession à Bormes-les-Mimosas d'un droit d'endigage sur le domaine public maritime, trouvait son fondement dans les dispositions du programme d'aménagement du quartier de la Favière approuvé par arrêté préfectoral du 21 septembre 1951 et auxquelles a été substitué le plan d'urbanisme de détail approuvé par arrêté du préfet du Var du 23 juin 1971; que l'arrêté attaqué, portant à nouveau concession d'un droit d'endigage, a été pris sur la base des dispositions applicables dudit plan d'urbanisme; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux méconnaitrait l'autorité de la chose jugée dont est revêtue la décision rendue par le Conseil d'Etat le 30 mars 1973;
Considérant, en quatrième lieu, que le principe d'inaliénabilité du domaine public ne fait pas obstacle à ce que l'administration accorde une nouvelle concession d'endigage pour régulariser la situation de terrains exondés en vertu d'une concession annulée par le juge administratif;
Considérant, enfin, qu'il ne ressort des pièces du dossier, ni que le préfet du Var ait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que l'endigage du terrain inclus dans le domaine public maritime en vue de l'aménagement de l'ensemble portuaire de Bormes-les-Mimosas prévu par le plan d'urbanisme de détail du quartier de la Favière, approuvé ainsi qu'il a été dit par arrêté du 23 juin 1971, pouvait donner lieu à une cession en pleine propriété, ni que l'arrêté et les actes attaqués soient entachés de détournement de pouvoir;
Considérant que, de tout ce qui précède, il résulte, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la mer à la demande présentée par M. Schwetzoff devant le tribunal administratif de Nice, que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, ledit tribunal a rejeté sa requête;
Sur les conclusions de M. Schwetzoff tendant à ce que ses droits à indemnité soient réservés:
Considérant qu'il n'appartient pas au Conseil d'Etat de "réserver les droits" de M. Schwetzoff introduire une demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel qu'il soutient avoir subi du fait du report de l'examen de sa requête;
Sur les conclusions dirigées contre la disposition du jugement du 10 janvier 1979 par laquelle le tribunal administratif de Nice a ordonné la suppression de certains passages du mémoire de M. Schwetzof en date du 12 septembre 1977:
Considérant que d'après les dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 et de l'article L. 7 du code des tribunaux administratifs, ceux-ci peuvent, dans les causes dont ils sont saisis prononcer, même d'office, la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires;
Considérant que les passages de la demande présentée devant le tribunal administratif commençant, d'une part, par les termes "les risques n'existant plus" et finissant par les termes "aucun risque à courir" et commençant, d'autre part, par "c'est pourtant cette politique" et finissant par "démocratie libérale avancée" présentent un caractère diffamatoire; que c'est, par suite, à bon droit que les premiers juges en ont ordonné la suppression;
Sur les conclusions du ministre des transports tendant à la suppression de certains passages du mémoire de M. Schwetzoff en date du 19 février 1979:
Considérant que les passages du mémoire susmentionné de M. Schwetzoff déclarant que le tribunal administratif de Nice "fait preuve d'une particulière mauvaise foi" et "s'est fait le complice en puissance des irrégularités que l'on est très fortement en droit de soupçonner" présentent un caractère outrageant; qu'il y a lieu d'en prononcer la suppression par application des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881.
DECIDE
Article 1er - Les requêtes de M. Schwetzoff sont rejetées.
Article 2 - Les passages du mémoire de M. Schwetzoff en date du 19 février 1979, commençant par les mots "Au surplus, le tribunal de Nice" et s'achevant par "administration au service de l'administration" sont supprimés.