CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 154905
M. CARLI
Lecture du 08 Septembre 1997
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 6ème et 2ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 6ème sous-section, de la Section du Contentieux,
Vu la requête, enregistrée le 31 décembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Pierre CARLI, demeurant 16, rue du Moulin à Vent, à Poitiers (86000) ; M. CARLI demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 10 novembre 1993 du garde des sceaux, ministre de la justice, rejetant sa candidature à une intégration directe dans la magistrature ; 2°) d'ordonner sa nomination à compter du 10 avril 1989 et de procéder à la reconstitution de sa carrière à compter de cette même date ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, modifiée ;
Vu la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980, modifiée ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. de la Verpillière, Conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article 25-2 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, portant loi organique relative au statut de la magistrature, dans sa rédaction issue de la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992, la faculté de nommer directement aux fonctions des premier et second grades de la hiérarchie judiciaire des fonctionnaires et agents publics justifiant de certaines conditions, est subordonnée à l'avis conforme de la commission d'avancement instituée par l'article 34 de cette ordonnance ; que ces dispositions entraînent, pour l'autorité investie du pouvoir de nomination, l'exercice d'une compétence liée, dont elle ne peut s'affranchir, en cas d'avis défavorable de la commission, sous peine d'illégalité ; qu'ainsi, M. CARLI n'est pas fondé à soutenir que le garde des sceaux, ministre de la justice aurait méconnu l'étendue de sa propre compétence en estimant qu'il était tenu de rejeter sa candidature, en conséquence de l'avis défavorable émis le 26 octobre 1993 par la commission d'avancement ; Considérant, en deuxième lieu, que, lorsqu'elle a été amenée à délibérer une première fois sur la demande de M. CARLI, les 8 et 9 mars 1989, la commission d'avancement n'a pas émis d'avis favorable à son intégration ; qu'ainsi, et en tout état de cause, cette délibération n'a créé au profit de M. CARLI aucun droit acquis que la décision attaquée aurait méconnu ; Considérant, en troisième lieu, que le fait que M. CARLI aurait participé aux délibérés d'une juridiction pénale dans le cadre d'un stage n'obligeait pas la commission d'avancement à proposer son intégration ; Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en écartant la candidature de M. CARLI, la commission d'avancement ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation qu'elle a faite des aptitudes de l'intéressé ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. CARLI n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, du 10 novembre 1993 ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6-1 de la loi du 16 juillet 1980, modifiée : "Lorsqu'il règle un litige au fond par une décision qui implique nécessairement une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le Conseil d'Etat, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure et peut assortir sa décision d'une astreinte à compter d'une date qu'il détermine" ; que la présente décision, qui rejette les conclusions de M. CARLI tendant à l'annulation de la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, du 10 novembre 1993, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de M. CARLI tendant à ce que le Conseil d'Etat prononce son intégration dans la magistrature à compter du 10 avril 1989 et procède à la reconstitution de sa carrière sont irrecevables ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. CARLI est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre CARLI et au garde des sceaux, ministre de la justice.