Jurisprudence : TA Lyon, du 27-09-2022, n° 2101124


Références

Tribunal Administratif de Lyon

N° 2101124

JU 4ème chambre
lecture du 27 septembre 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 février, 22 avril 2021, 6 juillet 2021 et 21 avril 2022, M. et Mme B, représentés par Me Romeuf, demandent au tribunal :

1°) à titre principal de prononcer la décharge des cotisations de taxe communale sur la cession à titre onéreux de terrains devenus constructibles, pour un montant de 75 812 euros en principal et intérêts de retard, et la restitution des sommes payées majorée des intérêts moratoires ;

2°) à titre subsidiaire de prononcer la décharge de cette taxe à hauteur de 4 385 euros en principal et 79 euros en intérêts de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme qui sera fixée à l'issue de l'instruction à leur verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Ils soutiennent que :

- le droit de reprise était prescrit pour 5 ventes à la date de la réception de la proposition de rectification ;

- la proposition de rectification n'était pas motivée en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- les parcelles cédées étaient continuellement constructibles depuis plus de 18 ans.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2021, le directeur régional des finances publiques de la région Auvergne - Rhône-Alpes et du département du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 15 juillet 2022 la clôture de l'instruction a été fixée au 12 août 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000🏛 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné Mme Wolf, présidente honoraire, pour statuer sur les litiges relevant de l'article R. 222-13 du code de justice administrative🏛.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A a été entendu au cours de l'audience publique,

- et les conclusions de Mme Lacroix, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Du 19 juin 2017 au 8 juin 2018, M. et Mme B ont cédé 15 parcelles, situées dans un lotissement dénommé " Le Puits ", à Saint-Priest (Ardèche). Lors du dépôt des actes de vente, ils ont bénéficié de l'exonération de la taxe sur les terrains classés en zone constructible depuis plus de dix-huit ans, prévue à l'article 1529 du code général des impôts🏛. Toutefois, à la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a remis en cause cette exonération et leur a notifié, par propositions de rectification des 16 août 2018 et 3 avril 2019, un rehaussement de 73 535 euros au titre de cette taxe. M. et Mme B qui se sont acquittés de cette somme en demandent la décharge et la restitution.

Sur la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1529 du code général des impôts🏛 : " I. - Les communes peuvent, sur délibération du conseil municipal, instituer une taxe forfaitaire sur la cession à titre onéreux de terrains nus qui ont été rendus constructibles du fait de leur classement par un plan local d'urbanisme ou par un document d'urbanisme en tenant lieu dans une zone urbaine ou dans une zone à urbaniser ouverte à l'urbanisation ou par une carte communale dans une zone constructible. / II. - La taxe s'applique aux cessions réalisées par les personnes physiques et les sociétés et groupements, soumis à l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value dans les conditions prévues à l'article 150 U, et par les contribuables qui ne sont pas fiscalement domiciliés en France assujettis à l'impôt sur le revenu, soumis au prélèvement, dans les conditions prévues à l'article 244 bis A. / Elle ne s'applique pas : a. aux cessions mentionnées aux 3° à 8° du II de l'article 150 U ; b. aux cessions portant sur des terrains qui sont classés en terrains constructibles depuis plus de dix-huit ans ; c. lorsque le prix de cession du terrain, défini à l'article 150 VA, est inférieur au prix d'acquisition, effectivement acquitté par le cédant et tel qu'il a été stipulé dans l'acte de cession, majoré d'un montant égal à 200 % de ce prix. / III. - La taxe est assise sur un montant égal au prix de cession du terrain défini à l'article 150 VA diminué du prix d'acquisition stipulé dans les actes, actualisé en fonction du dernier indice des prix à la consommation hors tabac publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques. En l'absence d'éléments de référence, la taxe est assise sur les deux tiers du prix de cession défini au même article. / La taxe est égale à 10 % de ce montant. Elle est exigible lors de la première cession à titre onéreux du terrain intervenue après son classement en terrain constructible. Elle est due par le cédant. / IV. - Une déclaration, conforme à un modèle établi par l'administration, retrace les éléments servant à la liquidation de la taxe. Elle est déposée dans les conditions prévues aux 1° et 4° du I et au II de l'article 150 VG. / Lorsque la cession est exonérée en application du a ou du b du II, aucune déclaration ne doit être déposée. L'acte de cession soumis à la formalité fusionnée ou présenté à l'enregistrement précise, sous peine de refus de dépôt ou de la formalité d'enregistrement, la nature et le fondement de cette exonération ou de cette absence de taxation. Les dispositions des deuxième et troisième alinéas du III de l'article 150 VG sont applicables. / V. - La taxe est versée lors du dépôt de la déclaration prévue au IV. Les dispositions des I et II de l'article 150 VF, du second alinéa du I et des II et III de l'article 150 VH et du IV de l'article 244 bis A sont applicables ".

3. Il résulte de ces dispositions que cette taxe s'applique aux cessions réalisées par les personnes physiques et les sociétés et groupements soumis à l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value de cession dans les conditions prévues à l'article 150 U du CGI. Elle est assise sur la plus-value dégagée lors de cette cession. Enfin, il résulte des IV et V du même article que la taxe est déclarée et versée selon les mêmes modalités que l'impôt sur le revenu afférent à la plus-value résultant de la même cession.

4. Dans ces conditions, et quand bien même cette taxe constitue un impôt direct communal, le délai de reprise de l'administration pour cette taxe peut être exercé par l'administration jusqu'à la fin de la 3ème année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales.

5. En l'espèce, M. et Mme B ont reçu le 5 avril 2019 la proposition de rectification datée du 3 avril 2019, portant sur les cessions des parcelles 972, 973, 977, 979 et 985, intervenues entre le 12 octobre et le 8 novembre 2017. Ils ne sont donc pas fondés à soutenir que l'imposition était prescrite.

6. En second lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.

7. Dans les propositions de rectification, le service mentionne la législation applicable, les règlementations d'urbanisme, successivement applicables aux parcelles vendues au cours de la période de 18 ans précédant les cessions, les bases du rappel de la taxe forfaitaire de 10 % sur les cessions de terrains nus devenus constructibles. Si l'une des propositions de rectification comporte des erreurs sur les parcelles concernées, ces erreurs ont été corrigées dans le même document. Les requérants ont été mis à même de présenter leurs observations, ce qu'ils ont d'ailleurs fait. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

8. Il résulte de l'instruction que les 15 parcelles vendues par M. et Mme B sont issues de la parcelle D. 883, elle-même issue de la parcelle D 856 et plus anciennement de la parcelle D. 356. Par deux arrêtés du maire de Saint-Priest, des 2 avril 2007 et 6 juin 2008, deux lotissements ont déjà été créés par prélèvement sur cette parcelle D. 356. Le maire de Saint-Priest a autorisé le 3ème lotissement d'une superficie de 14 110 m², en 15 parcelles, objet du litige, par arrêté du 9 juin 2017🏛.

9. Les 15 parcelles vendues étaient classées en zone constructible par les modalités d'application du règlement national d'urbanisme adoptées en 1984 dans la commune et maintenues en 1991. Toutefois l'article 202 de la loi du 13 décembre 2000🏛 dite " solidarité et renouvellement urbains " a rendu ces dispositions caduques, de telle sorte que les parcelles cédées ne pouvaient plus, à compter de la promulgation de la loi, être regardées comme constructibles. En 2014 la commune de Saint-Priest s'est dotée d'un plan local d'urbanisme et les parcelles concernées ont été classées en zone AUF, c'est-à-dire en zone destinée à accueillir une urbanisation future. Le règlement du PLU disposait que l'ouverture à l'urbanisation de cette zone dépendrait d'une modification ou d'une révision du plan local d'urbanisme. C'est seulement en juin 2016 que des orientations d'aménagement du PLU ont rendu les parcelles constructibles. Ainsi il résulte de l'historique des documents d'urbanisme de la commune de Saint-Priest que les parcelles en cause n'ont pas été continuellement constructibles dans la période de 18 ans précédant leur cession. Il suit de là que, dès lors que ces cessions sont les premières intervenues depuis le classement en terrain constructible, elles entraient dans le champ d'application de l'article 1529 du code général des impôts🏛.

10. Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme B, la réponse ministérielle publiée au Journal Officiel du 19 juin 2008, à la question de M. C E n°02219, ne prévoit pas, en tout état de cause, que " le bénéfice de l'exonération est acquis alors même que le terrain, constructible 18 ans auparavant, a pu être classé dans une zone non constructible avant d'être à nouveau classé dans une zone constructible ".

11. Il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins de décharge de l'imposition, présentées par M. et Mme B ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque, au demeurant non chiffrée, au titre des frais exposés par M. et Mme B.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme B et au directeur régional des finances publiques de la région Auvergne - Rhône-Alpes et du département du Rhône.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2022.

La magistrate désignée,

A. A

Le greffier,

J-P. Duret

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Un greffier,

N°2101124

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