SOC. PRUD'HOMMES MF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 12 juin 2013
Rejet
M. LACABARATS, président
Arrêt no 1114 FP-P+B
Pourvoi no T 11-14.458
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. Z.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 16 décembre 2010.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par M. Noël Z, domicilié Grigny,
contre l'arrêt rendu le 13 avril 2010 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l'opposant
1o/ à la société Manpower France, société par actions simplifiée, dont le siège est Nanterre,
2o/ à la société Kodak, société anonyme, dont le siège est Paris, venant aux droits de la société Kodak graphic communications,
défenderesses à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 15 mai 2013, où étaient présents M. Lacabarats, président, M. Flores, conseiller référendaire rapporteur, M. Bailly, conseiller doyen, MM. Blatman, Chollet, Béraud, Gosselin, Linden, Mme Geerssen, conseillers, Mmes Pécaut-Rivolier, Mariette, Sommé, conseillers référendaires, Mme Taffaleau, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Flores, conseiller référendaire, les observations de la SCP Laugier et Caston, avocat de M. Z, de la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat de la société Kodak, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Manpower France, l'avis de Mme Taffaleau, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 avril 2010), que M. Z a été engagé par la société Manpower pour être mis à disposition de la société Kodak polychrome graphics (Kodak) en qualité d'agent de recouvrement par des contrats de mission du 6 septembre 2006 au 30 juin 2007 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le second moyen
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le premier moyen
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en rappels de salaire formée conjointement contre les sociétés Manpower et Kodak, alors, selon le moyen,que la rémunération perçue par le salarié temporaire dans le cadre d'un contrat de mission ne peut être inférieure à celle à laquelle aurait eu droit dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification professionnelle équivalente occupant le même poste de travail ; qu'en outre, lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire ; que M. Z ayant produit le double de la demande d'interrogation adressée par lui à la société Kodak graphic communications, la Cour d'appel, qui a débouté celui-ci de sa demande en relevant qu'il lui appartenait de fournir un commencement de preuve permettant d'étayer sa réclamation quand il appartenait dans un tel contentieux d'établir le salaire versé pour la même période aux salariés de qualification professionnelle équivalent occupant le même poste de travail, l'arrêt attaqué a violé l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu qu'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe "à travail égal, salaire égal" de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; que lorsque le salarié soutient que la preuve de tels faits se trouve entre les mains d'une autre partie, il lui appartient de demander au juge d'en ordonner la production ; que ce dernier peut ensuite tirer toute conséquence de droit en cas d'abstention ou de refus de l'autre partie de déférer à une décision ordonnant la production de ces pièces ;
Et attendu que le salarié s'étant borné dans ses conclusions à alléguer que la société Kodak avait procédé à une augmentation générale des salaires au premier semestre, sans saisir le juge d'une demande de production des justificatifs détenus par une autre partie, la cour d'appel a, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette également la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils, pour M. Z.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Z de sa demande en rappels de salaires formée conjointement contre les sociétés MANPOWER et KODAK ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur Z procède par voie de simple allégation en affirmant que la société KODAK a procédé à une augmentation générale des salaires au premier semestre 2005 alors qu'il lui appartenait de fournir un commencement de preuve permettant d'étayer sa réclamation ; qu'il y aura donc lieu de rejeter sa demande et de confirmer le jugement entrepris de chef ;
ALORS QUE la rémunération perçue par le salarié temporaire dans le cadre d'un contrat de mission ne peut être inférieure à celle à laquelle aurait eu droit dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification professionnelle équivalente occupant le même poste de travail ; qu'en outre, lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire ; que Monsieur Z ayant produit le double de la demande d'interrogation adressée par lui à la société KODAK GRAPHIC COMMUNICATIONS, la Cour d'appel, qui a débouté celui-ci de sa demande en relevant qu'il lui appartenait de fournir un commencement de preuve permettant d'étayer sa réclamation quand il appartenait dans un tel contentieux d'établir le salaire versé pour la même période aux salariés de qualification professionnelle équivalent occupant le même poste de travail, l'arrêt attaqué a violé l'article 1315 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Z de ses demandes formées contre la société KODAK ;
AUX MOTIFS QUE le premier contrat, renouvelé, précisait qu'il était motivé par un " accroissement temporaire d'activité lié à la récupération de nouvelles factures " et que le second contrat, renouvelé, évoquait " accroissement temporaire d'activité lié à l'activité de fin d'année et au retard important des paiements " ; que la société KODAK justifie suffisamment de l'accroissement temporaire d'activité qu'elle a connue dans le recouvrement d'impayés en établissant avoir reçu le passif de la société CREO, dont elle détenait entièrement le capital, après la dissolution de celle-ci et en justifiant le niveau des encours d'impayés à plus de 5,7 millions d'euros en novembre 2006 revenu à 2,3 millions d'euros en juin 2007, mois au cours duquel le contrat de mission de M. Z est venu à son terme ; qu'il y aura dès lors lieu de rejeter la demande de M. Z et de confirmer le jugement entrepris sur ce chef ;
ET, AUX MOTIFS ADOPTES,QUE l'encours de la société CREO ayant considérablement diminué, le service de recouvrement a ainsi retrouvé un rythme normal de travail, mettant fin à la mission de Monsieur Z au terme contractuellement fixé le 30 juin 2007 ; que la société n'a aucunement recruté par la suite un agent de recouvrement, ni fait appel de nouveau à un travailleur temporaire ; que le service Crédit Clients, composé de trois collaborateurs permanents en 2006 comprend toujours en 2007 ces trois mêmes salariés ;
ALORS QUE Monsieur Z ayant spécialement fait valoir le remplacement dans son poste par un autre salarié, la Cour d'appel, qui, faute d'indiquer à partir de quels éléments de preuve, elle avait été conduite à adopter les motifs du jugement entrepris selon lesquels la société KODAK n'avait aucunement recruté par la suite un agent de recouvrement, ni fait appel de nouveau à un travailleur temporaire, a entaché son arrêt d'un défaut de motif en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.