Jurisprudence : TA Melun, du 13-07-2022, n° 1903060


Références

Tribunal Administratif de MELUN

N° 1903060

5ème chambre
lecture du 13 juillet 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 3 avril 2019, Mme E C demande au tribunal :

1°) d'annuler l'arrêté du 7 mars 2019 par lequel le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son accident survenu le 11 octobre 2018 ;

2°) d'enjoindre au département de Seine-et-Marne de reconnaître l'imputabilité au service de son accident et de la placer sous le régime des accidents de travail à compter du 11 octobre 2018, en prenant notamment en charge les frais médicaux en lien avec cet accident ainsi que sa rémunération.

Elle soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation, la seule existence d'un état antérieur étant insuffisante pour écarter tout lien son état de santé avec le service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 février 2022, le département de Seine-et-Marne, représenté par son président en exercice, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable, faute de mentionner les éléments de droit et de fait à l'appui des conclusions, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative🏛 ;

- le moyen soulevé par Mme E C n'est pas fondé.

Par ordonnance du 10 février 2022, la clôture d'instruction a été reportée au 10 mars 2022 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983🏛 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984🏛 ;

- l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017🏛 ;

- le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019🏛 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A,

- les conclusions de Mme Barruel, rapporteure publique,

- et les observations de M. D, chef de service au service études et contentieux à la Direction des Affaires juridiques et Patrimoniales, représentant le président du conseil départemental de Seine-et-Marne.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E C, titulaire du grade d'adjointe administrative de 2ème classe, a exercé les fonctions de secrétaire au sein de l'agence routière départementale de Coulommiers, relevant des services du conseil départemental de Seine-et-Marne. Ayant fait l'objet d'un malaise, puis d'une hospitalisation le 11 octobre 2018, Mme C a sollicité, le 5 décembre 2018, la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident survenu le 11 octobre 2018. A la suite de l'avis émis le 7 mars 2019 par la commission de réforme, le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a refusé, par un arrêté du 7 mars 2019🏛, dont Mme C demande l'annulation, de reconnaître l'imputabilité au service de son accident et l'a placée en congé de maladie ordinaire du 11 octobre 2018 au 15 mars 2019.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a institué un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " en insérant dans la loi du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires un article 21 bis aux termes duquel : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / II.- Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. () ". L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 a aussi, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983🏛, modifié des dispositions, notamment, de la loi du 26 janvier 1984🏛 portant dispositions statutaires relative à la fonction publique territoriale.

3. L'application des dispositions de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique instituant un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " par insertion dans la loi du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires d'un article 21 bis n'est pas possible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue sous forme de décret en Conseil d'Etat par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983🏛, résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. L'accident dont se prévaut Mme C est intervenu le 11 octobre 2018, soit antérieurement à l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de l'article 21 bis. Aussi, contrairement à ce qu'allègue le département, la situation de Mme C demeure régie par les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984🏛 portant dispositions statutaires relative à la fonction publique territoriale.

4. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984🏛 susvisée, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Le fonctionnaire en activité a droit : / () 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. () Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite🏛, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales () ".

5. Il résulte des termes mêmes de l'arrêté attaqué que, pour refuser de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident subi par Mme C le 11 octobre 2018, le président du conseil départemental de Seine-et-Marne s'est fondé, au vu notamment de l'avis défavorable émis en ce sens par la commission de réforme, le 7 mars 2019, sur l'existence d'une pathologie indépendante évoluant pour son propre compte, constitutive d'un état antérieur, révélé par l'accident en cause. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la déclaration d'accident de service effectuée par Mme C le 5 décembre 2018, qu'elle a subi un malaise sur son lieu de travail le 11 octobre 2018, entraînant son hospitalisation puis son placement en arrêt de travail jusqu'au 15 mars 2019 et ayant entraîné une lésion, en l'occurrence une dissection aortique de type B. Aux termes de l'expertise médicale qui a eu lieu le 15 février 2019, le docteur B, médecin cardiologue agréé, a certes conclu à l'imputabilité au service des lésions générées par l'accident du 11 octobre 2018, mais également à l'existence d'une pathologie indépendante évoluant pour son propre compte, constitutive d'un état antérieur, en l'occurrence une hypertension. Toutefois, en n'ayant pas levé le secret médical sur sa maladie constituant son état antérieur, notamment sur le suivi médical et les traitements qui lui sont ou non prodigués, Mme C n'apporte pas de précision suffisante à cet égard. Si elle fait valoir l'allongement de son temps de trajet les jours précédant son accident, ainsi que les douleurs aux genoux qui en ont résulté, elle n'établit pas avoir réalisé un effort particulier ou avoir subi une surcharge de travail, générant un état de stress, de sorte qu'elle n'établit pas avoir exercé ses fonctions dans des conditions susceptibles de favoriser la survenance de son accident. En outre, la circonstance alléguée, non contestée, qu'elle n'a jamais subi de lésion ou d'antécédent médical particulier avant l'accident du 11 octobre 2018 alors qu'il est constant qu'elle souffrait d'hypertension, constitutive d'un état antérieur de nature à détacher l'accident du service, n'est pas de nature à infirmer cette appréciation. Dans ces conditions, eu égard aux seuls éléments versés au dossier, Mme C n'établit pas le lien direct et certain entre ses conditions de travail et son accident survenu le 11 octobre 2018. Par conséquent, en estimant que son état antérieur était de nature à détacher l'accident subi du service, par l'arrêté attaqué, le président du conseil départemental de Seine-et-Marne n'a pas porté une appréciation erronée sur sa situation.

6. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquences, ses conclusions à fin d'injonction.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme E C et au département de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 5 juillet 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Lopa Dufrénot, présidente,

Mme Leconte, conseillère,

Mme Delon, conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2022.

La rapporteure,

E. A

La présidente,

M. FLa greffière,

C. TRÉMOUREUX

La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. TRÉMOUREUX

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