Jurisprudence : TA Nantes, du 08-07-2022, n° 1902352

TA Nantes, du 08-07-2022, n° 1902352

A42818AS

Référence

TA Nantes, du 08-07-2022, n° 1902352. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/86513101-ta-nantes-du-08072022-n-1902352
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Références

Tribunal Administratif de Nantes

N° 1902352

5ème Chambre
lecture du 08 juillet 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2019, l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) TDA, représentée par Mes Bagault et Humeau, demande au tribunal :

1°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie à hauteur de 6 989 euros au titre de l'exercice clos en 2014, 6 989 euros au titre de l'exercice clos en 2015 et 6 979 euros au titre de l'exercice clos 2016 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- l'administration fiscale a fait une interprétation erronée des dispositions du b du 1 de l'article 219 du code général des impôts🏛 ; elle est fondée à bénéficier du taux réduit d'impôt sur les sociétés ;

- ces dispositions et la jurisprudence de la cour administrative d'appel de Nantes appliqués par l'administration fiscale sont contraires tant à la Constitution du 4 octobre 1958 et notamment aux principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques garantis par les dispositions des articles 6 et 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen🏛 qu'au principe de non-discrimination garanti par les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le droit au respect des biens prévu par les celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2019, le directeur de la direction spécialisée du contrôle fiscal Centre Ouest conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'EURL TDA ne sont pas fondés.

Par un mémoire distinct, enregistré le 1er septembre 2021, l'EURL TDA demande au tribunal de transmettre au Conseil d'État, sur le fondement de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du b du I de l'article 219 du code général des impôts🏛.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 octobre 2021, le directeur de la direction spécialisée du contrôle fiscal Centre Ouest conclut qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société requérante.

Par une ordonnance du 11 février 2022, le président de la 5ème chambre a décidé de ne pas transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'EURL TDA.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales🏛 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A,

- les conclusions de M. Vauterin, rapporteur public,

- et les observations de Me Humeau, avocat de l'EURL TDA.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme (SA) Itec, société mère d'un groupe fiscal au sens des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts🏛 comprenant pour seule filiale intégrée la société TDC, détient l'intégralité du capital de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) TDA, société spécialisée dans la conception, l'intégration et la fabrication de tableaux électriques. A la suite d'un contrôle sur pièce, l'administration fiscale a remis en cause l'application du taux réduit de l'impôt sur les sociétés au bénéfice réalisé par l'EURL TDA au titre des exercices clos les 30 avril 2014, 30 avril 2015 et 30 avril 2016. Par des propositions de rectification des 18 décembre 2017 et 25 janvier 2018, le service lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices en cause à hauteur de 6 989 euros au titre des trois exercices clos précités. L'EURL TDA a présenté ses observations le 12 février 2018. Par une réponse aux observations du contribuable du 26 février 2018, l'administration fiscale a maintenu ses propositions de rectification. Les impositions supplémentaires ont été mises en recouvrement par rôle du 30 avril 2018. Une réclamation contentieuse présentée par l'EURL TDA le 12 octobre 2018 en vue d'obtenir la décharge de ces impositions supplémentaires a été rejetée par des décisions de l'administration fiscale du 9 janvier 2019. Par la présente requête, l'EURL TDA demande au tribunal de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie à hauteur de 6 989 euros au titre de l'exercice clos en 2014, 6 989 euros au titre de l'exercice clos en 2015 et 6 979 euros au titre de l'exercice clos 2016.

Sur les conclusions aux fin de décharge des impositions :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 219 du code général des impôts🏛, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " I () / Le taux normal de l'impôt est fixé à 33,1/3 %. () b. Par exception au deuxième alinéa du présent I et au premier alinéa du a, pour les redevables ayant réalisé un chiffre d'affaires de moins de 7 630 000 au cours de l'exercice ou de la période d'imposition, ramené s'il y a lieu à douze mois, le taux de l'impôt applicable au bénéfice imposable est fixé, dans la limite de 38 120 de bénéfice imposable par période de douze mois, à 25 % pour les exercices ouverts en 2001 et à 15 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2002. / Pour la société mère d'un groupe mentionné à l'article 223 A ou à l'article 223 A bis, le chiffre d'affaires est apprécié en faisant la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe. / Le capital des sociétés mentionnées au premier alinéa du présent b doit être entièrement libéré et détenu de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions dont le capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques. () ". Il résulte de ces dispositions que, lorsque la société qui demande à bénéficier du taux réduit d'imposition qu'elles prévoient est détenue pour 75 % au moins par une société mère d'un groupe fiscalement intégré au sens de l'article 223 A du code général des impôts🏛, cette dernière doit elle-même répondre à la condition d'un chiffre d'affaires inférieur au seuil de 7 630 000 euros. Dans cette hypothèse, la limite de 7 630 000 euros s'apprécie par référence à la somme des chiffres d'affaires réalisés par chacune des sociétés membres de ce groupe au titre de l'exercice considéré alors même que la société redevable de l'impôt ne serait pas intégrée fiscalement dans ledit groupe.

3. Il est constant que le chiffre d'affaire de l'EURL TDA était inférieur à la somme de 7 630 000 euros au titre des exercices clos les 30 avril 2014, 30 avril 2015 et 30 avril 2016. Toutefois, cette société est détenue à 100 % par la SA Itec société mère d'un groupe fiscalement intégré, dont le chiffre d'affaires devait être apprécié, par application du b du I de l'article 219 du code général des impôts🏛, en faisant la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe. Or il est constant que le chiffre d'affaires du groupe fiscalement intégré dont la SA Itec est la tête s'élevait, au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016 aux sommes respectives de 11 401 748 euros, 11 841 663 euros et 10 605 666 euros dépassait donc le seuil prévu par les dispositions précitées du code général des impôts. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a refusé le bénéfice du taux réduit d'impôt sur les sociétés à l'EURL TDA pour l'exercice en cause.

4. En second lieu, si la société requérante soutient que les dispositions précitées du b du I de l'article 219 du code général des impôts🏛 sont contraires au principe de non-discrimination garanti par les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le droit au respect des biens prévu par les celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, un tel moyen n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. En tout état de cause, contrairement à ce qu'elle affirme, eu égard à la différence de situation entre sociétés, toutes deux soumises au même impôt, tenant à leur appartenance ou non à un groupe fiscal au sens de l'article 223 A du code général des impôts🏛, le législateur pouvait opérer un traitement différent en se fondant sur un critère objectif notamment tiré de ce que le taux réduit a été créé pour favoriser les petites et moyennes entreprises.

5. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par l'EURL TDA doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à l'EURL TDA la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'EURL TDA est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à l'EURL TDA et à la direction spécialisée du contrôle fiscal Centre Ouest.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. Livenais, président,

Mme Rosemberg, première conseillère,

M. Huin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2022.

Le rapporteur,

F. A

Le président,

Y. LIVENAIS

Le greffier,

Y. LECLERC

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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