NA/CD
Numéro 22/01936
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 17/05/2022
Dossiers : N° RG 22/00011 -
N° Portalis DBVV-V-B7G-
ICQM
Dossiers : N° RG 22/00014
N° Portalis DBVV-V-B7G-
ICQR
Nature affaire :
Demande tendant à la suspension de la procédure de saisie immobilière, l'annulation ou la
péremption du commandement ou tendant à la vente amiable
Affaire :
L'UNION DEPARTEMENTALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES DES LANDES
C/
Aa Ab A, Ac A,
Ad Ae A, Af Ag A épouse B,
Ah C,
Ai Aj C
Grosse délivrée le :
a
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 17 Mai 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 08 Mars 2022, devant :
Madame DUCHAÇC, Présidente
Madame ROSA-SCHALL, Conseillère
Madame ASSELAIN, Conseillère, magistrate chargée du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile
assistées de Madame X, faisant fonction de Greffière, présente à l'appel des causes.
Les magistrates du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
L'UNION DEPARTEMENTALE DES ASSOCIATIONS FAMILIALES DES LANDES ès qualités de curateur de M. Ai C
… … … …
… …
… … … …
Représentée et assistée de Maître REMBLIERE de la SELARL LANDAVOCATS, avocat au barreau de DAX
INTIMES :
Monsieur Aa Ab A
… … …
… … …
Monsieur Ac A époux de Madame Ak Y Z
… … … …
… …
Monsieur Thomas Barthélémy A
72 Allée des Genêts
33140 CADAUJAC
Madame Af Ag A épouse B … … …
… … …
venant tous les quatre aux droits de Madame Y AG épouse A décédée à Biscarrosse (40600) le 15 novembre 2017
Représentés par Maître DE BRISIS du CABINET DE BRISIS & DEL ALAMO, avocat au barreau de DAX
Assistés de Maître PAREIL de la SELARL CABINET D'AVOCATS ALAIN PAREIL, avocat au barreau de BORDEAUX
Madame Ah C
née le … … … à La Réole (33)
de nationalité Française
13 B Avenue Maréchal de Lattre de Tassigny
40130 CAPBRETON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000436 du 25/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PAU)
Représentée et assistée de Maître DE GINESTET de la SELARL DE GINESTET DE PUIVERT, avocat au barreau de DAX
Monsieur Ai Aj C
… … … … … … …
… …
Assigné
sur appel de la décision
en date du 09 DECEMBRE 2021
rendue par le JUGE DE L'EXECUTION DE DAX
RG numéro : 19/00041
EXPOSE DU LITIGE
MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A ont fait délivrer à M. Ai C et à sa fille Mme Ah C commandement de payer valant saisie immobilière, par actes d'huissier du 31 juillet 2019, publiés le 23 septembre 2019, puis assignation à comparaître à l'audience d'orientation du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Dax du 12 décembre 2019, par actes d'huissier du 7 novembre 2019.
L'UDAF des Landes, en sa qualité de curateur de M. Ai C désigné par jugement du 17 février 2017, est intervenue volontairement à l'instance par conclusions du 23 mars 2021.
Le commandement de payer valant saisie signifié à M. Ai C le 31 juillet 2019 et l'assignation à l'audience d'orientation signifiée à M. Ai C le 7 novembre 2019 ont été signifiés par MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A à l'UDAF des Landes, en sa qualité de curateur de M. Ai C, par acte d'huissier du 30 août 2021.
Par jugement du 9 décembre 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Dax a :
- Débouté M. Ai C et Mme Ah C de l'intégralité de leurs prétentions,
- Constaté que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies,
- Mentionné que le montant de la créance des créanciers poursuivants s'élève aux sommes suivantes :
- à l'encontre de M. Ai C, à la somme provisoirement arrêtée au 18 janvier 2019 de 59 066,37 euros ;
- à l'encontre de Mme Ah C, à la somme provisoirement arrêtée au 18 janvier 2019 de 8 774,91 euros ;
- Ordonné la vente forcée des droits immobiliers désignés dans le cahier des conditions de vente,
- Fixé l'adjudication à l'audience du jeudi 10 mars 2022 à 10H30,
- Condamné Mme Ah C à verser à MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A la somme globale de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Dit que les dépens seront compris dans les frais privilégiés de vente.
L'UDAF des Landes a relevé appel de ce jugement par déclaration du 3 janvier 2022, et fait assigner MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A, Mme Ah C et M. Ai C, à jour fixe, devant la cour d'appel de Pau, par actes d'huissier des 25, 27, 28 et 31 janvier 2022, et 7 février 2022, dont copie a été remise au greffe avant la date fixée pour l'audience. Cette instance a été enrôlée sous le numéro 22/11.
Mme Ah C a également relevé appel de ce jugement par déclaration du 3 janvier 2022, et a fait assigner MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A, M. Ai C et l'UDAF des Landes, à jour fixe, devant la cour d'appel de Pau, par actes d'huissier du 1er mars 2022, dont copie a été remise au greffe avant la date fixée pour l'audience. Cette instance a été enrôlée sous le numéro 22/14.
Les deux instances ont été appelées à l'audience du 8 mars 2022.
L'UDAF des Landes demande à la cour d'appel, par assignations signifiées les 25, 27, 28 et 31 janvier 2022, et 7 février 2022, de :
- Infirmer le jugement du juge de l'exécution de Dax du 9 décembre 2021 en ce qu'il a débouté l'UDAF des Landes ès qualités de l'intégralité de ses demandes ;
* Statuant à nouveau,
- Prononcer la nullité, voire la caducité, du commandement de payer valant saisie immobilière et de l'assignation délivrés à M. Ai C les 31 juillet 2019 et 7 novembre 2019, en application des dispositions de l'article 467 du code civil et des articles 117 du code de procédure civile, et R. 311-11, R. 321-6 et R. 322-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
- Condamner les consorts A à payer à l'UDAF des Landes, ès qualités de curateur de M. Ai C, une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.
L'UDAF des Landes soulève la nullité du commandement aux fins de saisie et de l'assignation délivrés à M. Ai C, à défaut de signification de ces actes délivrée au curateur, en soutenant que la nullité de ces actes ne peut pas être couverte, spécialement par l'intervention volontaire du curateur, et qu'en toutes hypothèses aucune régularisation n'est intervenue dans les quatre mois du commandement de payer du 31 juillet 2019.
Mme Ah C demande à la cour d'appel, par conclusions notifiées le 7 janvier 2022, de :
- Déclarer l'appel de Mme C recevable et bien fondé ;
- Réformer la décision du 9 décembre 2021 ;
- Constater que Madame Ah C n'est pas solidairement tenue au paiement des dettes de Monsieur Ai C ;
- Constater que le créancier poursuit la saisie immobilière de ses biens pour une créance dont elle n'est pas débitrice ;
- Dire que le créancier ne réunit pas les conditions prévues aux article L311-2 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;
- Prononcer la radiation du commandement de saisie ;
- Prononcer la nullité de la saisie immobilière ;
- Condamner M. Aa A, Mme Af A, M. Ac A, M. Ad A aux paiement d'une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner M. Aa A aux entiers dépens de la saisie et d'appel.
Mme Ah C soutient que l'inscription d'hypothèque judiciaire du 23 juillet 2018 n'est pas régulière, alors que le créancier avait l'obligation de publier son hypothèque sur les droits usufruitiers de M. Ai C pour le montant de sa dette, et sur les droits de nue-propriété de Mme Ah C pour le seul montant de sa dette, et que l'hypothèque a été inscrite du chef de Mme Ah C pour une somme de plus de 65.000 euros, alors qu'elle doit moins de 9.000 euros; elle fait valoir qu'une ventilation du prix est nécessaire, et soutient que cela exclut la possibilité de procéder à une saisie immobilière.
MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A demandent à la cour d'appel, par conclusions notifiées le 4 mars 2022, au visa des articles 2440 du code civil, L. 311-12-1 du code de l'organisation judiciaire, et 74 et suivants, 117 à 121 du code de procédure civile, de :
- Confirmer en son intégralité le jugement du 9 décembre 2021 ;
- Débouter l'UDAF des Landes de l'intégralité de ses demandes ;
- Condamner l'UDAF des Landes au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouter Mme Ah C de l'intégralité de ses demandes ;
- Condamner Mme Ah C au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner l'UDAF des Landes et Mme Ah C aux entiers dépens.
MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A soutiennent que la nullité pour irrégularité de fond des actes signifiés à M. Ai C a été régularisée avant que le juge de l'exécution ne statue. Concernant Mme Ah C, ils indiquent que seul le tribunal judicaire de Dax serait compétent, à l'exclusion du juge de l'exécution, pour statuer sur la validité de l'insription d'hypothèque judiciaire, et qu'en toute hypothèse l'inscription d'hypothèque n'est pas nulle. Ils soutiennent que le démembrement de propriété ne peut faire obstacle à la saisie poursuivie, et que ce n'est que dans la phase de distribution qu'il conviendra de ventiler le prix de vente en fonction de la valeur de l'usufruit.
M. Ai C, régulièrement assigné à personne dans les deux instances, n'a pas constitué avocat.
MOTIFS
Il existe entre les deux recours enrôlés sous les numéros 22/11 et 22/14 un lien tel qu'il est de l'intérêt d'une bonne justice de les juger ensemble.
La jonction des deux instances est donc ordonnée.
L'UDAF des Landes, en sa qualité de curateur de M. Ai C, soulève la nullité du commandement et de l'assignation respectivement délivrés à celui-ci les 31 juillet et 7 novembre 2019, sans signification au curateur.
L'article 467 du code civil prévoit que toute signification faite à la personne en curatelle doit l'être également au curateur.
L'omission de la signification de l'assignation au curateur constitue une irrégularité de fond que ne peut couvrir l'intervention volontaire du curateur destinée à faire sanctionner cette irrégularité, comme l'a jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 23 février 2011 : la régularisation permise par l'article 121 du code de procédure civile suppose en effet une volonté de confirmer l'acte nul.
En l'espèce, l'intervention du curateur, qui avait pour seul objet de contester la validité des actes délivrés à M. Ai C, ne peut couvrir leur nullité.
Par ailleurs, l'article R 321-6 du code des procédures civiles d'exécution dispose que le commandement de payer valant saisie est publié au fichier immobilier dans un délai de deux mois à compter de sa signification, et l'article R 322-4 prévoit que dans les deux mois qui suivent la publication au fichier immobilier du commandement de payer valant saisie, le créancier poursuivant assigne le débiteur saisi à comparaître devant le juge de l'exécution à une audience d'orientation.
Le commandement de payer valant saisie signifié à M. Ai C le 31 juillet 2019 et l'assignation à l'audience d'orientation signifiée à M. Ai C le 7 novembre 2019 ont été signifiés par MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A à l'UDAF des Landes, en sa qualité de curateur de M. Ai C, par acte d'huissier du 30 août 2021, soit après expiration des deux délais de mois prévus par les textes ci-dessus rappelés.
Aucune régularisation des actes nuls n'est donc intervenue dans les délais impartis, de sorte que la nullité du commandement de payer valant saisie signifié à M. Ai C le 31 juillet 2019 et de l'assignation à l'audience d'orientation signifiée à M. Ai C le 7 novembre 2019 doit être constatée.
L'hypothèque judiciaire a été inscrite de façon indivisible sur l'immeuble appartenant en nue-propriété à Mme Ah C et pour l'usufruit à M. Ai C, et les commandements de payer valant saisie délivrés à M. Ai C et Mme Ah C le 31 juillet 2019 visent de façon indivisible la saisie de l'immeuble, et non les droits immobiliers de chacun.
Dès lors que le commandement de payer et l'assignation délivrés à M. Ai C sont nuls, seuls les droits en nue-propriété de Mme Ah C peuvent être saisis, de sorte que la nullité du commandement délivré à M. Ai C emporte en toutes hypothèses l'inefficacité du commandement valant saisie délivré à Mme Ah C, visant la totalité de l'immeuble.
La procédure d'exécution engagée à l'égard de Mme Ah C est donc également irrégulière.
Le jugement est ainsi infirmé dans toutes ses dispositions. La radiation des commandements de payer valant saisie délivrés à M. Ai C et Mme Ah C est ordonnée, et la demande de MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A tendant à la vente forcée des droits immobiliers de M. Ai C et Mme Ah C est rejetée.
Il n'y pas lieu en équité de faire droit aux demandes des parties fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens de première instance et d'appel sont à la charge de MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt réputé contradictoire et en dernier
Ordonne la jonction des procédures entôlées sous les numéros 22/11 et 22/14 ;
Infirme le jugement rendu le 9 décembre 2021 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Constate la nullité du commandement de payer valant saisie signifié à M. Ai C le 31 juillet 2019 et de l'assignation à l'audience d'orientation signifiée à M. Ai C le 7 novembre 2019 ;
Constate l'inefficacité du commandement de payer valant saisie signifié à Mme Ah C le 31 juillet 2019 et l'irrégularité de la procédure de saisie immobilière à l'égard de Mme Ah C ;
Rejette en conséquence la demande de MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A tendant à la vente forcée des droits immobiliers de M. Ai C et Mme Ah C ;
Ordonne la radiation des commandements de payer valant saisie signifiés à M. Ai C et Mme Ah C le 31 juillet 2019, publiés au service chargé de la publicité foncière de Dax le 23 septembre 2019, Volume 2019 S n° 57 et 58 ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que MM. Guy, Sébastien et Ad A, et Mme Af A sont tenus in solidum de supporter les dépens de première instance et d'appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Présidente, et par Mme X, faisant fonction de Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Carole DEBON Caroline DUCHAC