COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78F
16e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 21 AVRIL 2022
N° RG 21/06645 - N° Portalis DBV3-V-B7F-U2H7
Jonction avec RG 21/06740 par ordonnance du magistrat délégué par le Président en date du 07 décembre 2021
AFFAIRE :
Aa A
Ab B
C/
C X épouse Y
Ac Y
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Octobre 2021 par le Juge de l'exécution de
VERSAILLES
N° RG : 21/2029
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 21.04.2022
a
Me Ondine CARRO avocat au barreau de VERSAILLES
Me Julien GIBIER de la SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN, avocat au barreau de CHARTRES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT ET UN AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre
Madame Aa A
Née le … … … à … (…)
… … …
… … … … …
… … … … …
Né le … … … à … … (…)
… … …
… … … … …
… … … … …
Représentant : Me Ondine CARRO, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C212
APPELANTS
Madame C X épouse Y
Née le … … … au Portugal
de nationalité portugaise
14 rue du Château
78125 ORPHIN
Monsieur Ac Y
né le … … … à …
… … …
… … … …
… …
Représentant : Me Julien GIBIER de la SELARL GIBIER FESTIVI RIVIERRE GUEPIN,
Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000021 - N° du dossier 190084
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 23 Mars 2022 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Fabienne PAGES, Président,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,
Madame Florence MICHON, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,
EXPOSÉ DU LITIGE
Se prévalant d'un arrêt contradictoire rendu le 3 novembre 2020 par la cour d'appel de Versailles, ayant condamné in solidum Mme A et M.Bonnemain au paiement d'indemnités d'occupations au titre de la location d'un appartement meublé à Mme A, par M. et Mme Y, ces derniers ont fait pratiquer le 15 janvier 2021 une saisie-attribution entre les mains de la CRCAM de l'Anjou et du Maine au préjudice de Mme A pour obtenir le paiement de la somme de 34 987,95 euros en principal, intérêts et frais.
La saisie-attribution, fructueuse à hauteur de 22 427,62 € a été dénoncée à Mme A le 19 janvier 2021.
Statuant sur la contestation de cette mesure par Mme A et M. B élevée par assignation du 26 mars 2021, le juge de l'exécution de Versailles par jugement contradictoire du 27 octobre 2021 a :
* déclaré irrecevables les demandes formées par Mme A et M. B ;
* débouté M. et Mme Y de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ; * condamné solidairement Mme A et M. B à payer à M. et Mme Y la
somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
* condamné solidairement Mme A et M. B aux dépens.
Par déclaration au greffe du 4 novembre 2021, régularisée en la forme le 10 novembre 2021, pour compléter leurs éléments d'identité, et préciser les chefs du jugement critiqués, M. B et Mme A ont interjeté appel du jugement. Les deux déclarations d'appel ont été jointes par ordonnance du 7 décembre 2021.
Aux termes de leurs dernières conclusions transmises au greffe le 31 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les appelants demandent à la cour de :
* les déclarer recevables et bien fondés en leur appel ;
* infirmer le jugement rendu le 27 octobre 2021 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a
débouté M. et Mme Y de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ; * débouter M. et Mme Y de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions.
Y faisant droit et statuant à nouveau :
* déclarer Mme A et M. B recevables et bien fondés en leurs demandes;
* prononcer la nullité du procès-verbal de saisie-attribution délivré le 15 janvier 2021 à Mme
A et M. B et en conséquence condamner M. et Mme Y à procéder au remboursement de la somme de 22 427,62 euros au profit de Mme A et M.
B ;
* condamner M. et Mme Y à verser à Mme A et M. B la somme de
1000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi ;
* condamner M. et Mme Y à verser à Mme A et M. B la somme de
2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
* condamner M. et Mme Y aux dépens.
Par dernières conclusions transmises au greffe le 19 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les intimés demandent à la cour de :
* déclarer Mme A et M. B irrecevables et en tout état de cause mal-fondés en leur appel, et en conséquence ;
* confirmer la décision du juge de l'exécution de Versailles du 27 octobre 2021 (RG 21/02029).
Y ajoutant,
* condamner in solidum Mme A et M. B à payer à M. et Mme Y la
somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et dilatoire ;
* condamner in solidum Mme A et M. B à payer à M. et Mme Y la
somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause
d'appel ;
* condamner in solidum Mme A et M. B aux entiers dépens d'appel en
application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 mars 2022. L'audience de plaidoirie a été fixée au 23 mars 2022 et le prononcé de l'arrêt au 21 avril 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la contestation de la saisie-attribution
Pour faire droit à l'exception d'irrecevabilité des contestations élevées devant le juge de l'exécution soulevée par les créanciers saisissants, alors que les débiteurs avaient conclu à la caducité de la saisie-attribution pour défaut de dénonciation de la mesure dans le délai imparti, en soutenant qu'ils n'avaient eu connaissance de la saisie que par courriel de la banque, le premier juge n'a pu que constater que la dénonciation de la saisie avait valablement été faite le 19 janvier 2021, de sorte que l'assignation devant le juge de l'exécution du 26 mars 2021 était nécessairement tardive.
Devant la cour, Mme A et M B font valoir que dans le délai imparti, ils ont bien élevé une contestation dès le 25 janvier 2021 devant le tribunal de proximité de Rambouillet par lettre recommandée avec accusé de réception, à laquelle le tribunal a répondu par un post it apposé sur leur courrier en retour, posté le 12 février 2021 reçu 19 février 2021 qu'il convenait de saisir le tribunal judiciaire de Versailles, ce qu'ils prétendent avoir fait le jour même également par lettre recommandée avec accusé de réception, à laquelle il leur a été répondu par courrier réceptionné le 27 février 2021, qu'il fallait procéder par voie d'assignation ; qu'en application de l'article 2241 du code de procédure civile la demande en justice portée devant une juridiction incompétente interrompt le délai de forclusion, de sorte qu'ils étaient parfaitement recevables à saisir le juge de l'exécution par assignation du 26 mars 2021.
Les intimés répondent que leur prétendue saisine par lettre recommandée avec accusé de réception n'a pas saisi une juridiction incompétente mais n'a tout simplement pas valablement et régulièrement saisi le juge de l'exécution.
Sur quoi il convient d'observer qu'à aucun moment devant la cour, les appelants ne contestent l'existence ni la validité de la dénonciation faite à Mme A le 19 janvier 2021. Or, le procès-verbal de dénonciation indique en caractères gras juste sous un bandeau estampillé « TRES IMPORTANT » et en termes parfaitement dénués d'ambiguïté que :
« La contestation de cette saisie-attribution doit être soulevée, à peine d'irrecevabilité, dans le délai D'UN MOIS à compter de la date figurant en tête du présent acte, par assignation devant :
JUGE DE L'EXECUTION
Avenue de l'Europe
78011 VERSAILLES CEDEX
Sous la même sanction, elle est dénoncée le même jour ou, au plus tard le premier jour suivant, par lettre recommandée avec accusé de réception à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
LE DELAI DE CONTESTATION EXPIRERA LE 19 FEVRIER 2021 ».
L'acte expliquait donc clairement à Mme A le délai et les modalités imposées pour élever une contestation ainsi que la juridiction compétente.
Elle a en outre été destinataire d'une copie de cet acte par courrier adressé dans les conditions prévues par l'article 658 du code de procédure civile, de sorte que même si elle a négligé de prendre contact avec l'huissier instrumentaire pour récupérer le second original qui lui était destiné, elle a bien disposé de toutes les informations nécessaires pour exercer un recours efficace contre la mesure de saisie.
Si l'article 2241 du code civil reconnaît un effet interruptif de forclusion à la demande en justice même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente, en l'espèce le tribunal de proximité de Rambouillet, encore faut-il que la juridiction incompétente ait été saisie régulièrement d'une demande en justice.
Or, une contestation de saisie-attribution par lettre recommandée avec accusé de réception ne permettait de saisir le tribunal de Rambouillet d'aucune demande en justice au sens de cette disposition. En admettant pour le raisonnement que cette juridiction ait été valablement saisie par voie de déclaration au greffe faite par lettre recommandée avec accusé de réception , et ait décliné sa compétence par courrier prétendument reçu par Mme A le 19 février 2021, la saisine le même jour du juge de l'exécution compétent par lettre recommandée avec accusé de réception alors que seule une assignation est susceptible de produire effet était parfaitement irrecevable. Au demeurant en pareil cas, la contestation encourait également l'irrecevabilité pour n'avoir été dénoncée à l'huissier instrumentaire que le 29 mars 2021, et non pas le 19 février 2021 ou le premier jour ouvrable suivant. La dénonciation à l'huissier saisissant le premier jour ouvrable suivant l'assignation du 26 mars 2021 elle-même irrecevable comme tardive, est sans intérêt à la solution du litige.
La décision d'irrecevabilité ne peut donc qu'être confirmée. Il n'y a pas lieu de statuer sur le bien-fondé des contestations et le rejet de la demande de délais de paiement par le premier juge.
Tout au plus sera-t'il rappelé les dispositions de l'article L211-4 alinéa 3 du code des procédures civiles d'exécution, selon lesquelles le débiteur saisi qui n'aurait pas élevé la contestation dans le délai prescrit peut agir à ses frais en répétition de l'indu devant le juge du fond compétent.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive et dilatoire
M et Mme Y ont été déboutés de cette demande alors chiffrée à 3000 € faute de démontrer en quoi la procédure aurait dégénéré en abus. Aux termes du dispositif de leurs conclusions qui seul saisit la cour, ils ont demandé la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.
C'est par demande additionnelle qu'ils sollicitent l'allocation d'une somme cette fois chiffrée à 5 000 € à titre de dommages et intérêts motivés par le fait que la procédure ne reposait sur aucun moyen sérieux, qu'ils auraient fait appel par deux fois alors que le premier juge a été particulièrement clément à leur égard, qu'ils avaient déjà entrepris une procédure hasardeuse dont ils s'étaient désistés, et qu'en conséquence l'appel présenterait un caractère purement dilatoire.
Compte tenu de l'absence d'appel incident sur le rejet de la demande de dommages et intérêts, la cour n'a pas à statuer à nouveau sur le caractère abusif de la contestation de saisie par les débiteurs. Seule une demande fondée sur le caractère abusif et dilatoire de l'appel est recevable à ce stade de la procédure, à titre additionnel. Or, en dehors de la régularisation de la déclaration d'appel pour y mentionner les chefs du jugement dévolus à la cour, et n'ayant pu occasionner aucun préjudice aux intimés dès lors que la jonction a été prononcée dans un délai très court, il n'est pas justifié par les intimés d'autres procédures d'appel au regard desquelles la présente procédure pourrait présenter un caractère abusif. En outre, la saisie attribution largement fructueuse, a été payée aux créanciers de sorte que l'appel du jugement d'irrecevabilité ne pouvait entrainer aucun effet dilatoire. Cette demande ne peut donc qu'être rejetée.
Les appelants supporteront les dépens d'appel et l'équité commande d'allouer à M et Mme Y la somme de 800 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort,
CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute M Ac Y et Mme C X épouse Y de leur demande de dommages et intérêts pour procédure dite abusive ou dilatoire ;
Condamne Mme Aa A et M. Ab B à payer à M Ac Y et Mme C X épouse Y la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme Aa A et M. Ab B aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions posées par l'article 699 alinéa 2 du code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,