Jurisprudence : CAA Bordeaux, 6e, 05-03-2013, n° 12BX01239

CAA Bordeaux, 6e, 05-03-2013, n° 12BX01239

A9189KAL

Référence

CAA Bordeaux, 6e, 05-03-2013, n° 12BX01239. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8045874-caa-bordeaux-6e-05032013-n-12bx01239
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Abstract

Le refus d'un maire d'user de ses pouvoirs de police n'est entaché d'illégalité que dans le cas où il est susceptible de mettre en péril la sécurité ou la salubrité publiques, rappelle la cour administrative d'appel de Bordeaux dans un arrêt rendu le 5 mars 2013 (CAA Bordeaux, 6ème ch., 5 mars 2013, n° 12BX01239, inédit au recueil Lebon).



N° 12BX01239

M. Jean-Paul DESPAGNE

M. Bernard Chemin, Président
M. Jean-Emmanuel Richard, Rapporteur
M. Pierre Bentolila, Rapporteur public

Audience du 5 février 2013

Lecture du 5 mars 2013

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

La Cour administrative d'appel de Bordeaux


(6ème chambre)


Vu la requête enregistrée le 14 mai 2012 par télécopie, et régularisée le 15 mai 2012, présentée pour M. Jean-Paul Despagne demeurant 19 rue du Stade à Avensan (33480), par Me Missiaen ;

M. Despagne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900850 du 8 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 26 décembre 2008 par laquelle le maire d'Avensan a refusé de faire usage de ses pouvoirs de police pour interdire la circulation des poids lourds dans la rue du Stade de cette commune ;

2°) d'annuler la décision du 26 décembre 2008 ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Avensan la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

M. Despagne soutient que :

- la décision litigieuse, qui constitue une mesure de police, aurait dû être motivée ;

- la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que les dégradations affectant sa toiture sont importantes, que la gravité est accentuée par le caractère répétitif des désordres subis, que les contraintes liées à la circulation de la rue du stade n'ont pas été suffisamment prises en compte dans le plan local d'urbanisme, même si une réserve a été créée à l'angle de la rue du Stade ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 11 juin 2912, présenté pour la commune d'Avensan, représentée par son maire en exercice, par la Selarl d'avocat Gauthier-Delmas, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. Despagne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune d'Avensan soutient que :

- la décision litigieuse ne saurait être soumise à l'obligation de motivation ;

- la réserve sur l'angle de la rue du stade et de la rue du Carelot a pour but de remédier aux nuisances créées par la difficulté de tourner vers la gauche pour les poids lourds ;

- la commune a recherché des solutions pour pallier aux difficultés de circulation des poids lourds ;

- la commune a acquis en octobre 2010 m2de terrain afin de procéder à l'aménagement de l'angle des voies, et depuis l'aménagement de l'intersection, aucun dommage n'a été causé à la propriété du requérant ;

- l'immeuble du requérant dépasse sur le domaine public et à ce titre, la commune d'Avensan ne saurait être reconnue comme responsable des dégradations occasionnées par les poids lourds ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 12 mars 2012 admettant M. Despagne à l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 modifiée :

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2013 :

- le rapport de M. Jean-Emmanuel Richard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

- les observations de Me Missiaen, avocat de M. Despagne ;

Vu, enregistrée le 1er mars 2013, la note en délibéré présentée par M. Despagne ;

1. Considérant que M. Despagne fait appel du jugement du 8 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 26 décembre 2008 par laquelle le maire d'Avensan a refusé de faire usage de ses pouvoirs de police pour interdire la circulation des poids lourds dans la rue du Stade de cette commune ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : -restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; -infligent une sanction ; -subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; -retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; -opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; -refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; -refusent une autorisation (...) ; -rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire. " ;

3. Considérant que la décision résultant d'un refus de prendre une mesure de police n'est pas au nombre des actes devant être motivés en vertu des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée doit être écarté comme étant inopérant ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...). " ;

5. Considérant que le refus opposé par un maire à une demande tendant à ce qu'il fasse usage les pouvoirs de police que lui confèrent les dispositions précitées de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales n'est entaché d'illégalité que dans le cas où, en raison de la gravité du péril résultant d'une situation particulièrement dangereuse pour le bon ordre, la sécurité ou la salubrité publiques, cette autorité, en n'ordonnant pas les mesures indispensables pour faire cesser ce péril grave, méconnaît ses obligations légales ;

6. Considérant que s'il est constant qu'à plusieurs reprises quelques dégâts ont été occasionnés à la toiture et à la gouttière de l'immeuble de M. Despagne par des poids lourds qui s'engageaient dans la rue du Stade, il ne ressort pas des pièces du dossier que les contraintes de configuration des lieux sur la circulation des poids lourds aient, à la date de la décision attaquée, fait peser sur la sécurité publique un risque tel que le maire aurait dû immédiatement faire usage de ses pouvoirs de police pour interdire la circulation de poids lourds, alors que des solutions pour améliorer le passage des camions étaient envisagées et ont d'ailleurs effectivement été mises en œuvre par la commune qui a fait procéder à des travaux d'aménagement de la voie publique à cet endroit ; qu'ainsi, en ne faisant pas usage de ses pouvoirs de police pour interdire la circulation des poids lourds dans la rue du Stade, le maire de la commune d'Avensan n'a pas entaché sa décision d'illégalité ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Despagne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Avensan, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme dont M. Despagne demande le versement à son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du requérant la somme que la commune demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. Despagne est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Avensan tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Paul Despagne et à la commune d'Avensan.

Délibéré après l'audience du 5 février 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bernard Chemin, président,

M. Jean-Emmanuel Richard, premier conseiller,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 5 mars 2013.

Le rapporteur,

Jean-Emmanuel Richard

Le président,

Bernard Chemin

Le greffier,

André Gauchon

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur (D.G.C.L.), en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

André Gauchon

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