Jurisprudence : CA Paris, 5, 2, 10-09-2021, n° 18/28516, Confirmation

CA Paris, 5, 2, 10-09-2021, n° 18/28516, Confirmation

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Référence

CA Paris, 5, 2, 10-09-2021, n° 18/28516, Confirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/72231566-ca-paris-5-2-10-09-2021-n-18-28516-confirmation
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 2

ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2021

(n°116, 20 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : n° RG 18/28516 - n° Portalis 35L7-V-B7C-B66XU

Jonction avec le dossier 19/6636

Décision déférée à la Cour : jugement du 09 novembre 2018 -Tribunal de grande instance de PARIS

- 3ème chambre 3ème section - RG n°16/16045


APPELANTES et INTIMEES

S.A.S. PAULE KA - société en liquidation judiciaire, représentée par son mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire, la S.E.L.A.R.L. AXYME, agissant en la personne de Me Jean-Charles Demortier - ayant son siège social situé

223-227, rue Saint-Honoré

75001 PARIS

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 302 077 987

Représentée par Me Matthieu BOCCON-GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477

Assistée de Me Alexandra LE CORRONCQ plaidant pour la SELARL OSMOSE AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, toque P 444

Société LIMONTA S.p.A, société de droit ialien, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

Via Cesare Battisti n°15

23845 COSTA MASNAGA

ITALIE

Représentée par Me Giulia CORTESI de l'AARPI KERN & WEYL, avocate au barreau de PARIS, toque P 291

INTERVENANTES VOLONTAIRES

S.C.P. ABITBOL & ROUSSELET, représentée par Me Joanna ROUSSELET, agissant en sa qualité d'administrateur judiciaire de la S.A.S. PAULE KA 38, avenue Hoche

75008 PARIS

S.E.L.A.R.L. AXYME, représentée par Me Jean-Charles DEMORTIER, agissant en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la S.A.S. PAULE KA

62, boulevard de Sébastopol

75003 PARIS

Représentées par Me Matthieu BOCCON-GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477

Assistée de Me Alexandra LE CORRONCQ plaidant pour la SELARL OSMOSE AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, toque P 444

INTIMEE

S.A.S. DENTELLE SOPHIE MALLETTE, prise en la personne de son président en exercice et de tous représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

2, rue Alfred Melayers

59540 CAUDRY

Immatriculée au rcs de Douai sous le numéro 672 029 725

Représentée par Me Eric ALLERIT de la SELARL TBA, avocat au barreau de PARIS, toque E 1210

Assistée de Me Joséphine WEIL plaidant pour la SELASU CORINNE CHAMPAGNER-KATZ, avocate au barreau de PARIS, toque C 1864


COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 mai 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Agnès MARCADE, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport

Mme Agnès MARCADE a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Brigitte CHOKRON, Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Brigitte CHOKRON, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.


Vu le jugement contradictoire rendu le 9 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Paris ainsi que le jugement de ce tribunal rendu le 18 janvier 2019 en rectification d'une erreur matérielle ;


Vu l'appel interjeté le 20 décembre 2018 par la société Paule Ka du jugement rendu le 09 novembre 2018 (RG 18/28516) ;

Vu l'appel interjeté le 25 mars 2019 par la société Limonta SPA du jugement rendu le 18 janvier 2019 (RG 19/6636) ;

Vu l'ordonnance de jonction du 6 juin 2019 des deux instances sous le numéro RG 18/28516 ;

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 13 avril 2021 par la société Paule Ka, appelante et intimée incidente, et en intervention volontaire de la SCP Abitbol & Rousselet prise en la personne de Mme Joanna Rousselet, ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société Paule ka, et de la Selarl Axyme prise en la personne de M. Jean-Charles Demortier, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Paule Ka, appelante ;

Vu les dernières conclusions remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 4 mai 2021 par la société Limonta SPA (la société Limonta), appelante ;

Vu les dernières conclusions remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 14 avril 2021 par la société Dentelle Sophie Hallette (la société DSH), intimée et appelante incidente ;


Vu l'ordonnance de clôture du 20 mai 2021.


SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure aux décisions entreprises et aux écritures précédemment visées des parties.

La société Paule Ka est une maison de couture française fondée en 1988 qui a pour activité la création et la vente de vêtements de prêt-à-porter de qualité. Elle distribue ses produits dans les boutiques à l'enseigne Paule Ka et dans divers points de vente à travers le monde.

La société Limonta est une société italienne fondée en 1893 qui crée, fabrique et commercialise des articles textiles.

La société DSH est une maison fondée en 1887 qui crée des tulles et des dentelles. Elle est une des filiales de la société Holesco SAS.

Elle se présente comme titulaire d'un dessin d'une dentelle référencé 970120 qu'elle dit exploiter seule depuis 2012.

La société DSH considère que la société Paule Ka a, à l'occasion de sa collection automne/hiver 2016, commercialisé sous sa marque des vêtements qui reproduiraient le dessin de ladite dentelle sur lequel elle estime être titulaire de droits d'auteur.

Les vêtements concernés sont les suivants:

- les robes portant les références 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/117, 16H163/R117L, 16H163/R47L et 16H180/R79L,

- une jupe référence 16H163/J18,

- un boléro référence 16H163/V253,

- un pull manches courtes référence 16H406/PU47,

- un cardigan référence 16H406/CAI9.

Sur autorisation du président du tribunal de grande instance de Paris, la société DSH a fait procéder à des opérations de saisie-contrefaçon au sein d'une boutique et du siège social de la société Paule Ka le 6 octobre 2016. A l'occasion de ces opérations de saisie-contrefaçon, des documents et vêtements ont été saisis et un procès verbal dressé par l'huissier de justice instrumentaire.

La société DSH a, par acte du 4 novembre 2016, fait assigner la société Paule Ka devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droit d'auteur et subsidiairement, en agissements parasitaires.

Les vêtements objets du litige ayant été confectionnés à partir de la dentelle achetée auprès de la société Limonta, la société Paule Ka a par acte du 27 mars 2017, fait assigner cette dernière en intervention forcée et en garantie.

Les instances ont été jointes par le juge de la mise en état.

Le jugement déféré du tribunal de grande instance de Paris du 9 novembre 2018 a :

- rejeté la 'n de non recevoir soulevée par les sociétés Paule Ka et Limonta ;

- dit que le dessin référence 970120 de la société DSH est original ;

- rejeté le moyen tiré de la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon ;

- dit que les sociétés Paule Ka et Limonta ont commis des actes de contrefaçon en faisant fabriquer, en important, en offrant à la vente et en commercialisent la dentelle composant les robes portant sur les références 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/R117, 16H163/RI17L, 16H163/R47L et 16H180/R79L, une jupe 16H163/J18, un boléro 16HI63fV25, un pull manches courtes 16H406/PU47 et un cardigan 16H406/CAI9 reproduisant les caractéristiques originales du dessin référence 970120 dont la société DSH est titulaire;

En conséquence :

- fait interdiction à la société Paule Ka et à la société Limonta de commercialiser lesdits vêtements reproduisant les caractéristiques du dessin 970120 de la société DSH, et ce sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée passé un délai de un mois à compter de la signification du jugement et ce, pendant un délai de 4 mois ;

- dit que le tribunal se réserve la liquidation de l'astreinte ;

- condamné in solidum la société Paule Ka et la société Limonta à payer à la société DSH la somme de 250 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon du dessin 970120 ;

- ordonné la destruction sous le contrôle d'un huissier de justice, de tous les produits contrefaisants restant en stock au sein de la société Paule Ka et au sein de la société Limonta, aux frais de ces dernières, à charge pour elles d'en justifier à la société DSH dans les 30 jours suivant la signification du jugement ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- condamné in solidum la société Paule Ka et la société Limonta à verser à la société DSH la somme globale 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum la société Paule Ka et la société Limonta aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Corinne Champagner Katz, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile, en ce compris les frais de saisie-contrefaçon ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision, sauf en ce qui concerne la destruction des produits issus de la contrefaçon.

Le jugement déféré du tribunal de grande instance de Paris du 18 janvier 2019 a rectifié le premier jugement en :

-ordonnant la rectification de l'erreur matérielle contenue dans le jugement de répertoire général 16/16045 rendu le 9 novembre 2018,

- disant que la mention suivante doit être ajoutée au dispositif 'Condamne la société Limonta à garantir la société Paule Ka de toutes condamnations à son encontre’.

La société Paule Ka a interjeté appel du jugement du 09 novembre 2018 tandis que la société Limonta a interjeté appel le 25 mars 2019 du jugement du 18 janvier 2019.

Par décision du 27 octobre 2020, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Paule Ka et désigné Mme Joanna Rousselet en qualité d'administrateur judiciaire avec pour mission d'assister la société Paule KA et M. Jean-Charles Demortier en qualité de mandataire judiciaire.

La société DSH a régulièrement déclaré sa créance au passif de la procédure collective le 16 novembre 2020.

Par jugement du 12 mars 2021, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Paule Ka. Il a désigné la Selarl Axyme représentée par M. Jean-Charles Demortier en qualité de liquidateur judiciaire et maintenu la Scp Abitbol & Rousselet, représentée par Mme Joanna Rousselet, en qualité d'administrateur judiciaire.

Ces derniers sont intervenus volontairement à l'instance par conclusions en date du 13 avril 2021.

Par ordonnance du 4 février 2021 le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de la société DSH de communication de pièces visant les sociétés Paule Ka et Limonta au titre de son droit à l'information.

Par leurs dernières conclusions, la société Paule Ka, la Scp Abitbol & Rousselet prise en la personne de Mme Joanna Rousselet et Selarl Axyme prise en la personne de M. Jean-Charles Demortier demandent à la cour de :

- dire et juger recevable l'intervention volontaire de Mme Joanna Rousselet, ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société Paule Ka ;

- dire et juger recevable l'intervention volontaire de M. Jean-Charles Demortier, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Paule Ka ;

- donner acte à Mme Joanna Rousselet et M. Jean-Charles Demortier de ce qu'ils entendent appuyer toutes les prétentions de la société Paule Ka au soutien de laquelle ils interviennent volontairement dans la cause ;

- dire et juger la société Paule Ka recevable et bien fondée en son appel,

Y faisant droit :

- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 9 novembre 2018 en toutes ses dispositions, sauf en ce que les premiers juges ont débouté la société DSH du surplus de ses demandes et notamment de son action en parasitisme,

- confirmer le jugement rectificatif du tribunal de grande instance de Paris le 18 janvier 2019 ordonnant la rectification d'une erreur matérielle entachant le jugement du 9 novembre 2018,

En conséquence, statuant à nouveau :

A titre principal

- juger que les demandes formulées par la société DSH au titre de la contrefaçon sont irrecevables pour défaut de qualité à agir,

- annuler le procès-verbal de saisie-contrefaçon en date du 6 octobre 2016,

A titre subsidiaire,

- juger que le dessin 970120 de la société DSH est dépourvu d'originalité et insusceptible de bénéficier de la protection du droit d'auteur au regard des dispositions des livres I et III du code de la propriété intellectuelle,

- juger que la société Paule Ka n'a pas commis d'acte de contrefaçon de droits d'auteur,

- débouter la société DSH de ses demandes indemnitaires et réparatrices au titre de la contrefaçon de droits d'auteur,

À titre infiniment subsidiaire,

- si, par extraordinaire, le ‘tribunal’ (sic) devait reconnaître la responsabilité de la société Paule Ka, rapporter les condamnations indemnitaires et autres sanctions à de plus justes proportions,

En tout état de cause :

- débouter la société DSH de ses autres demandes, fins et prétentions, notamment au titre du parasitisme,

- juger que la société Limonta devra garantir la société Paule Ka à l'encontre de toutes les sommes, quelle qu'en soit la qualification, auxquelles elle pourrait être condamnée par extraordinaire, de manière provisoire ou définitive, à titre personnel ou in solidum,

- condamner la société DSH à verser à la société Paule Ka la somme de 30.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles et à rembourser les frais engagés au titre des saisies-attributions ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions la société Limonta demande à la cour de :

A titre principal :

Confirmer le jugement en ce qu'il a :

- rejeté les demandes indemnitaires cumulatives de la société DSH au titre des bénéfices réalisés par les sociétés Paule Ka et Limonta, de l'avilissement et de la banalisation du dessin 970120 et de l'atteinte aux investissements ;

- rejeté les demandes de la société DSH au titre de la publication de la décision à intervenir ;

Réformer le jugement du 9 novembre 2018 en ce qu'il a :

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par les sociétés Paule Ka et Limonta ;

- dit que le dessin référence 970120 de la société DSH est original ;

- dit que les sociétés Paule Ka et Limonta ont commis des actes de contrefaçon en faisant fabriquer, en important, en offrant à la vente et en commercialisant les robes portant sur les références 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/R117, 16H163/R117L, 16H163/R47L et 16H180/R79L, une jupe 16H163/J18, un boléro 16H163/V25, un pull manches courtes 16H406/PU47, un cardigan 16H406/CA19 reproduisant les caractéristiques originales du dessin référence 970120 dont la société DSH est titulaire ;

Réformer le jugement du 18 janvier 2019 en ce qu'il a :

- dit que la mention suivante doit être ajoutée au dispositif : « Condamne la société Limonta à garantir la société Paule Ka de toutes les condamnations à son encontre »,

Et en conséquence,

- fait interdiction à la société Paule Ka et à la société Limonta de commercialiser lesdits vêtements reproduisant les caractéristiques du dessin 970120 de la société DSH, et ce sous astreinte provisoire de 500 euros par infraction constatée passé un délai de un mois à compter de la signification du jugement et ce pendant un délai de 4 mois,

- dit que le tribunal se réserve la liquidation de l'astreinte,

- condamné in solidum la société Paule Ka et la société Limonta à payer à la société DSH la somme de 250.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon du dessin 970120,

- ordonné la destruction sous le contrôle d'un huissier de justice, de tous les produits contrefaisants restant en stock au sein de la société Paule Ka et au sein de la société Limonta, aux frais de ces dernières, à charge pour elles d'en justifier à la société DSH dans les 30 jours suivant la signification du jugement,

- condamné in solidum la société Paule Ka et la société Limonta à verser à la société DSH la somme globale 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la société Paule Ka et la société Limonta aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Corinne Champagner Katz, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile, en ce compris les frais de saisie-contrefaçon,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

Et statuant à nouveau sur ces points :

- la recevoir en l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- dire et juger que la société Paule Ka représentée par la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, ne peut bénéficier de la garantie prévue à l'article 42 de la Convention des Nations Unies,

- dire et juger que la société DSH est irrecevable à agir sur le fondement du droit d'auteur ;

- dire et juger que le dessin 970120 n'est pas protégeable par le droit d'auteur,

Et en conséquence :

- débouter la société Paule Ka représentée la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, de sa demande en garantie à son encontre,

- débouter la société DSH de toutes ses demandes, fins et conclusions au titre de la contrefaçon de droits d'auteur,

A titre subsidiaire :

- limiter la garantie due par elle à la société Paule Ka représentée par la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance aux seules conséquences prévisibles à savoir la perte de chance portant sur le gain manqué de la société DSH évaluée à 2 298,60 euros,

- débouter la société DSH de toutes ses demandes, fins et conclusions au titre de la concurrence déloyale ;

En tout état de cause :

- condamner la société Paule Ka, représentée par la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, et la société DSH à lui payer la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société DSH aux entiers dépens de la présente instance, dont distraction conformément aux disposition de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions la société DSH demande à la cour de :

- déclarer la société Paule Ka, la Scp Abitbtol & Rousselet en la personne de Me Joanna Rousselet, en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Paule Ka, ainsi que la Selarl Axyme en la personne de Me Jean-Charles Demortier en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Paule Ka, mal fondées en leur appel et en toutes leurs prétentions, fins et demandes, les en débouter purement et simplement,

- déclarer la société Limonta mal fondée en son appel et en toutes ses prétentions, fins et demandes, l'en débouter purement et simplement, y compris en celles formulées en qualité d'intimée,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 18 janvier 2019 en ce qu'il a :

" ordonné la rectification d'erreur matérielle contenue dans le jugement de répertoire général 16/16045 rendu le 9 novembre 2018,

! dit que la mention suivante devait être ajouté au dispositif : « condamne la société Limonta à garantir la Société Paule Ka de toutes condamnations à son encontre »,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 9 novembre 2018 en ce qu'il a :

"rejeté la fin de non-recevoir soulevée par les sociétés Paule Ka et Limonta et a dit et jugé qu'elle était recevable à agir sur le fondement du droit d'auteur en tant que titulaire de droits d'auteur sur le dessin 970120,

" dit que le dessin référencé 970120 était original,

"rejeté le moyen tiré de la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon en date du 6 octobre 2016,

" dit que les sociétés Paule Ka et Limonta ont commis des actes de contrefaçon en faisant fabriquer, en important, en offrant à la vente et en commercialisant la dentelle composant les robes portant sur les références 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/R117, 16H163/R117L, 16H163/R47L et 16H180/R79L, une jupe 16H163/J18, un boléro 16H163/V25, un pull manches courtes 16H406/PU47, un cardigan 16H406/CA19 reproduisant les caractéristiques originales du dessin référencé 970120 dont elle est titulaire,

* condamné in solidum les sociétés Paule Ka et Limonta à lui payer la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au remboursement des frais de constat et de saisie-contrefaçon, outre les dépens,

- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 9 novembre 2018 pour le surplus, et statuant à nouveau :

À titre principal :

- juger que la société Paule Ka a commis des actes de contrefaçon en diffusant sur son compte Pinterest et sur son compte Instagram « paulekaofficiel » des photographies reproduisant en totalité ou en partie les caractéristiques originales du dessin référencé 970120,

- fixer sa créance au passif de la procédure collective de la société Paule Ka entre les mains de Me Jean-Charles Demortier à la somme de 1.626.415, 62 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages-intérêts et en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon du dessin 970120 ;

- condamner la société Limonta, fournisseur de la dentelle litigieuse, à garantir la société Paule Ka de toutes condamnations,

- condamner in solidum la Selar] Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier, ès qualités, qui poursuit l'instance, et la société Limonta à lui verser la somme de 41.990, 80 euros HT en réparation de son manque à gagner subi du fait des actes de contrefaçon,

- condamner in solidum la Selar] Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier, ès qualités, qui poursuit l'instance, et la société Limonta à lui verser la somme de 200.000 euros, en réparation de l'avilissement du dessin 970120 subi du fait des actes de contrefaçon,

- condamner in solidum la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, et la société Limonta à lui verser la somme de 170.400 euros, en réparation du préjudice subi du fait de l'atteinte aux investissements,

- condamner in solidum la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, et la société Limonta à lui verser la somme de 200.000 euros, en réparation du préjudice moral subi du fait de la contrefaçon du dessin 970120,

- condamner la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, à lui verser la somme de 1.014.024, 82 euros, au titre des bénéfices indûment réalisés par Aa A,

- condamner la société Limonta à lui verser la somme de 85.000 euros au titre des bénéfices indûment réalisés,

A titre subsidiaire :

- dire et juger que les sociétés Paule Ka et Limonta se sont rendues coupables d'agissements parasitaires à son préjudice,

En conséquence :

- fixer sa créance au passif de la procédure collective de la société Paule Ka entre les mains de Me Jean-Charles Demortier à la somme provisionnelle, sauf à parfaire de 1.184.424,82 euros, au titre de dommages et intérêts causés par ses agissements parasitaires, calculés en tenant compte des bénéfices et d'investissements indûment réalisés par la société Paule Ka,

- condamner la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, à lui verser la somme de 1 184 424,82 euros, au titre de dommages et intérêts causés par les agissements parasitaires de Paule Ka

- condamner la société Limonta à lui verser la somme provisionnelle, sauf à parfaire, de 255.400 euros au titre de dommages et intérêts causés par ses agissements parasitaires, calculés en tenant compte des bénéfices et économies d'investissements indûment réalisés par la société Limonta,

En tout état de cause,

- déclarer valable le procès-verbal de saisie contrefaçon en date du 6 octobre 2016,

- ordonner à la société Paule Ka de faire établir à ses frais et de communiquer l'inventaire précis et détaillé, établi sous contrôle d'huissier de justice pouvant être désigné par la cour, de l'ensemble des produits argués de contrefaçon restant en stock dans tous les lieux des locaux de la société Paule Ka, ou de prestataires et clients, qu'ils soient boutiques physiques de détail, grossistes, plate-forme internet, logisticien, transitaires, transporteurs et plus généralement tous prestataires détenant les produits référencés 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/R117, 16H163/R117L, 16H163/R47L et 16H180/R79L, une jupe 16H163/J18, un boléro 16H163/V25, un pull manches courtes 16H406/PU47, un cardigan 16H406/CA19, revêtus en tout ou partie des caractéristiques du dessin 970120, à la date de la signification de décision à intervenir,

- ordonner de rappeler des circuits commerciaux internet et boutiques physiques, des produits référencés 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/R117, 16H163/R117L, 16H163/R47L et 16H180/R79L, une jupe 16H163/J18, un boléro 16H163/V25, un pull manches courtes 16H406/PU47, un cardigan 16H406/CA19 reproduisant tout ou partie des caractéristiques du dessin 970120,

- faire interdiction aux sociétés Paule Ka et Limonta de faire fabriquer directement ou indirectement, d'importer, d'offrir directement ou indirectement à la vente internet et boutiques physiques, la commercialisation, par tous canaux de distribution, de tout produit qui reproduirait tout ou partie des caractéristiques du dessin 970120, et ce sous astreinte définitive de 1.000 euros par infraction constatée et par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir et ce pendant une durée de 24 mois tenant compte de la saisonnalité des produits litigieux, la Cour se réservant le droit de liquider l'astreinte directement,

- faire interdiction aux sociétés Paule Ka et Limonta de représenter, publier directement ou indirectement, sur tous supports physiques et numériques, et ce, par tous médias, réseaux sociaux et opérateurs, tout produit qui reproduirait tout ou partie des caractéristiques du dessin référencé 970120, et ce sous astreinte définitive de 1 000 euros par infraction constatée et par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l'astreinte directement,

- ordonner la destruction, sous contrôle d'un huissier de justice aux frais des sociétés Paule Ka et Limonta, de tous les produits référencés 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/R117, 16H163/R117L, 16H163/R47L et 16H180/R79L, une jupe 16H163/J18, un boléro 16H163/V25, un pull manches courtes 16H406/PU47, un cardigan 16H406/CA19, JODY, JODY MELANGE fabriqués dans le dessin contrefaisant et restant en stock au sein des sociétés Paule Ka et Limonta, chez tous les détaillants, grossistes, logisticiens plate-forme de stockage, transitaires et transporteurs, et qu'il lui en soit justifié dans les 30 jours suivant la signification de la décision à intervenir,

- ordonner la publication du jugement à intervenir, en intégralité ou par extraits, selon son choix :

- dans 10 journaux ou publications professionnels (y compris électroniques), de son choix, et aux frais avancés in solidum des sociétés Paule Ka et Limonta, sur simple présentation des devis, dans la limite de 8.000 euros H.T. par insertion,

- sur les sites internet www.pauleka.com de la société Paule Ka et www.Limonta.com de la société Limonta pendant soixante jours, en police de taille minimum 12, sur un espace qui ne pourra être inférieur à 15 centimètres de longueur et 20 centimètres de largeur, et ce, sous astreinte définitive de 1.000 euros par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l'astreinte directement,

- sur les comptes Pinterest et Instagram, paulekaofficiel, de la société Paule Ka, pendant soixante jours, et ce, sous astreinte définitive de 1.000 euros par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l'astreinte directement,

- condamner in solidum la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, et la société Limonta à lui verser la somme de 40.000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, et la société Limonta au remboursement de constats, de frais de saisie-contrefaçon, et de l'achat des produits argués de contrefaçon, frais exposés par elle pour les sommes de 2.900,59 euros au titre des frais de saisie-contrefaçon et de constats et de 3.080,00 euros en remboursements des produits argués de contrefaçon,

- condamner in solidum la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles Demortier ès qualités, qui poursuit l'instance, et la société Limonta aux entiers dépens, dont le recouvrement sera poursuivi en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- Sur la recevabilité à agir de la société DSH L'exploitation non équivoque d'une œuvre par une personne physique ou morale sous son nom et en l'absence de revendication du ou des auteurs, fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l'œuvre du droit de propriété incorporelle de l'auteur.

Les sociétés Paule Ka et Limonta sollicitent l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a considéré la société DSH comme recevable à agir sur le fondement du droit d'auteur. Elles considèrent que celle-ci ne peut invoquer la présomption prétorienne de titularité ci-avant rappelée faute de démontrer une exploitation non équivoque en France du dessin de dentelle 970120 invoqué, le dessin argué de contrefaçon n'étant en outre pas clairement déterminé, plusieurs références apparaissant sur les preuves d'exploitation fournies par la société DSH notamment la référence 78184 exploitée par la société Riechers Marescot dont il n'est pas établi que cette référence et la référence 970120 correspondent au même dessin de dentelle. Elles considèrent que les pièces fournies au débat témoignent d'une exploitation simultanée et confuse par les deux sociétés Riechers Marescot et DSH. Elles ajoutent qu'une ancienne référence 39814 figure sur les factures versées au débat pour en déduire que la date de la première divulgation n'étant pas déterminée, il ne peut être exclu que le dessin en cause provienne d'une ancienne collection et ne soit plus protégé par le droit d'auteur. La société Paule Ka invoque en outre l'existence d'un dessin et modèle communautaire déposé le 9 décembre 2014 par la société Changzou Shenda Warp Knitting portant sur le dessin de dentelle en cause et considère que ce dernier ne peut être attribué de manière non équivoque à un seul titulaire.

La société DSH demande la confirmation du jugement en ce qu'il a fait application de la présomption prétorienne de titularité des droits patrimoniaux d'auteurs à son profit du fait de l'exploitation non équivoque qu'elle a fait de l'œuvre à compter de 2012.

Il ressort en effet des éléments fournis au débat et des explications des parties que la société DSH n'est pas à l'origine de la création du modèle de dentelle portant la référence 970120 et n'a pas été la première à commercialiser ce modèle, celle-ci faisant valoir que la dentelle en cause était, avant 2012, commercialisée par la société Riechers Marescot sous la référence 78184. Il apparaît également que les sociétés DSH et Riechers Marescot sont toutes deux des filiales de la société Holesco ce qui n'est pas discuté.

Les faits de contrefaçon reprochés à la société Paule Ka ont été constatés le 6 octobre 2016 et l'assignation de la société DSH a été délivrée à la société Paule Ka le 4 novembre suivant. Il convient donc d'apprécier à cette période la commercialisation non équivoque par la société DSH du dessin de dentelle référencé 970120.

Selon le reçu d'horodatage Fidéalis en date du 24 janvier 2014 établi au nom de la société ‘Sophie Hallette' (pièce 36 de la société DSH) et l'échantillon sous robrack portant le nom de la même société (pièce 7 de la société DSH), le dessin de dentelle argué de contrefaçon est clairement identifié par la référence 970120 en association avec la référence 78184.

Les factures fournies montrent que cette référence 78184 a été commercialisée par la société Riechers Marescot entre 2008 et 2011 (pièce 10-1 de la société DSH) puis à compter de février 2012 et particulièrement à l'époque de faits reprochés soit l'automne 2016, par la société DSH sous la référence 970120, l'ancienne référence 78184 apparaissant également sur ces factures (pièces 10-2 et 10-3 de la société DSH). La circonstance que les ventes du dessin de dentelle en cause sont principalement destinées à des clients étrangers et donc que les factures soient pour la plupart établies au nom de clients situés dans des Etats autres que la France est indifférente, les appelantes ne pouvant valablement soutenir que la société DSH ne démontre pas une exploitation non équivoque du modèle en France alors que les factures sont bien établies par une société dont le siège est situé sur le territoire français.

Cette exploitation en France par la société Riechers Marescot jusqu'en 2011 puis par la société DSH à compter de 2012 est corroborée par le catalogue 'Sophie Hallette' automne/hiver 2011 qui montre un modèle du créateur Carven comportant ledit dessin de dentelle avec pour mention 'Riechers Marescot pour Carven 78184.1/ 90 pétrole' (pièce 11 de la société DSH). Ce même catalogue de septembre 2012 présente une création du couturier Valentino confectionnée avec le dessin de dentelle en cause accompagnée de la mention 'Sophie Hallette pour Valentino 78184.1/ 90 vert' (pièce 12 de la société DSH) et celui du printemps/été 2013 présente une robe Valentino sous la mention "Collection Riechers Marescot pour Valentino 78184.1/ 90 écru' (pièce 14 de la société DSH), étant relevé avec la société DSH que la mention 'collection Riechers Marescot' ne renvoie pas à la société éponyme mais à la marque dont la société DSH est titulaire, ce qui est confirmé par la première page de ce catalogue, comme celle du catalogue de 2011, qui précisent que 'Sophie Hallette' et 'Riechers Marescot' sont des marques de la société Sophie Hallette. La titularité de la marque RIECHERS MARESCOT par la société DSH est par ailleurs confirmée par les enregistrements de marque fournis au débat, l'une française déposée le 15 octobre 2012 et l'autre internationale désignant notamment l'Union européenne déposée le 25 mars 2013.

Cette exploitation du modèle de dentelle référencé 78184 sous la nouvelle référence 970120 par la société DSH est également corroborée par les attestations du commissaire aux comptes de la société Riechers Marescot devenue la société Calaisienne de production leavers en 2017 (pièces 46 et 46-1 de la société DSH) qui montrent que cette dernière n'a réalisé aucun chiffre d'affaires sur la référence 78184 sur les exercices 2014/2015 à 2016/2017, soit sur la période au cours de laquelle les faits de contrefaçon sont reprochés. La société Limonta ne peut à cet égard critiquer l'attestation du commissaire aux comptes qui ne vise que la référence 78184, aucun élément ne venant prouver que la société Riechers Marescot a utilisé la référence 970120 pour commercialiser le dessin en cause. De même, les attestations de l'expert comptable de la société DSH établies le 18 novembre 2015 et le 27 janvier 2021 (pièces 31 et 32 de la société DSH) montrent la réalisation par cette dernière d'un chiffre d'affaires de plus de quatre millions d'euros sur la référence 970120 pour la période du 11 janvier 2012 au 11 septembre 2015 et de plus de trois millions d'euros pour la période 2016 à 2020.

L'attestation de M. Romain Lescroart, président de la société Holesco, établie le 18 novembre 2015 (pièce 9 de la société DSH) précise par ailleurs que depuis 2006 la société Holesco est propriétaire des sociétés Riechers Marescot et DSH, que la société Riechers Marescot a divulgué et commercialisé le dessin de dentelle litigieux à compter du 19 septembre 2008 sous la référence 78184 et a continué à l'exploiter jusqu'en 2011, la propriété du dessin ayant été ensuite transférée dans le cadre de la réorganisation du groupe à la société DSH qui l'a exploité sous une nouvelle référence 970120 pour permettre la mise en production sur ses propres machines. Il joint à son attestation une reproduction du dessin en cause.

La valeur probante de cette attestation n'est pas utilement contestée par les appelantes au seul motif que le témoin dirige la société Holesco elle-même présidente des sociétés Riechers Marescot et DSH, dès lors que le témoignage qu'elle comporte est corroboré par les autres éléments produits au débat ci-avant rappelés.

Enfin, le fait qu'une société Changzou Shenda Warp Knitting soit titulaire d'un dessin ou modèle communautaire déposé le 9 décembre 2014 portant sur le dessin de dentelle en cause est inopérant à démontrer que la société DSH ne peut invoquer la titularité des droits sur celui-ci, aucune revendication de la titularité des droits par ce tiers n'étant portée à la connaissance de la cour, et ce dépôt n'entraînant pas comme le soutiennent à tort les appelantes une équivocité dans l'exploitation du dessin de dentelle par la société DSH, étant relevé avec cette dernière que ce dépôt de dessin ou modèle communautaire n'a pas fait l'objet d'un renouvellement en 2019 rendant vaine toute demande de nullité dudit dessin ou modèle par la société DSH.

L'ensemble de ces éléments concordants témoigne de la réalité d'une commercialisation dépourvue d'équivoque en France par la seule société DSH de la dentelle en cause à compter de l'année 2012 et particulièrement en 2016 antérieurement aux faits de contrefaçon reprochés, ce quand bien même elle a pu utiliser la marque RIECHERS MARESCOT et mentionner un temps l'ancienne référence 78184.

Aussi, la société DSH justifie exploiter de manière non équivoque le dessin litigieux sous son nom ou sous celui de sa marque RIECHERS MARESCOT, et en l'absence de revendication de la titularité par un tiers et notamment par la société Riechers Marescot, elle est présumée, à l'égard des sociétés Paule Ka et Limonta recherchées pour contrefaçon en 2016, être titulaire sur ce dessin du droit de propriété incorporelle d'auteur allégué, sans qu'elle soit tenue de fournir le contrat de cession des droits patrimoniaux d'auteur sur le dessin invoqué.

Les sociétés Paule Ka et Limonta ne contestent pas plus utilement la titularité des droits de la société DSH en raison de l'absence de justification par cette dernière de la date de création de la dentelle opposée, les appelantes considérant que la durée de protection du droit patrimonial de l'auteur a expiré.

En effet, l'attestation de M. Ab corroborée par les factures fournies au débat fixe la date de divulgation du modèle de dentelle litigieux au 19 septembre 2008 par la société Riechers Marescot, et aucun élément ne vient remettre en cause cette date, la société DSH n'étant pas utilement contredite lorsqu'elle affirme que la référence 39814 qui apparaît sur les factures de la société Riechers Marescot de 2008 est le numéro souche' du dessin.

La fin de non-recevoir opposée par les sociétés Paule Ka et Limonta doit en conséquence être rejetée et le jugement du 9 novembre 2018 confirmé de ce chef.

- Sur l'originalité du modèle de dentelle

Il appartient à la société DSH qui revendique une protection au titre du droit d'auteur sur le dessin de dentelle qu'elle oppose et dont l'originalité est contestée par les sociétés Paule Ka et Limonta de préciser en quoi l'oeuvre revendiquée porte l'empreinte de la personnalité de son auteur. Les appelantes considèrent que la société DSH se borne à une description détaillée exclusivement objective et technique sans expliquer la démarche intellectuelle de l'auteur et que le dessin en cause consiste en la banale reprise d'un fonds commun non appropriable n'étant que la reproduction de combinaisons déjà connues.

L'originalité d'une œuvre doit s'apprécier de manière globale de sorte que la combinaison des éléments qui la caractérise du fait de leur agencement particulier lui confère une physionomie particulière qui démontre l'effort créatif et le parti pris esthétique portant l'empreinte de la personnalité de l'auteur.

La société Sophie Hallette revendique des droits d'auteur sur un motif particulier de dentelle d'inspiration florale qu'elle décrit comme suit :

'Le dessin présente l'association de deux compositions florales différentes (motif A et motif B), chacune composée d'une fleur et d'un feuillage spécifique, répétées en lignes verticales (ligne 1 et ligne 2). Les lignes 1 et 2 sont disposées en alternance horizontale sur toute la longueur du lé (largeur de l'étoffe entre ses deux lisières).

La première composition (motif A) est constituée :

De part et d'autre d'une petite branche :

- vers le bas, une fleur présentant :

- un c'ur en forme d'anémone éclose, dont l'intérieur est ajouré, afin de mettre en valeur la luminosité du motif ;

- puis d'une rangée de sept pétales irréguliers et non-similaires, dont la densité participe à l'aspect florissant de la composition et contraste avec les traits larges qui bordent la fleur ;

- vers le haut, un feuillage sur tige présentant trois éléments distincts qui participent à l'impression de suspension et laissent chacun transparaître la lumière, éclaircissant ainsi la composition globale du motif, conformément à la recherche de l'auteur :

- sur le premier niveau de la tige, deux moyennes feuilles, de type feuille de chêne, placées face à face et qui paraissent en suspension :

- l'une à plat composée de six folioles dont les nervures sont ajourées,

- l'autre légèrement courbe et laissant apparaître une nervure ajourée,

- sur le second niveau de la tige, un ensemble composé de deux feuilles, l'une en forme de c'ur et l'autre présentant quatre folioles, dont les nervures sont ajourées.

La seconde composition (motif B) est constituée :

- d'une fleur présentant les caractéristiques ci-après :

- le c'ur de la fleur est arrondi, il est entouré d'une première rangée de cinq petits pétales irréguliers et denses, participant à l'impression d'abondance,

- puis d'une deuxième rangée de pétales ajourées et agrémentés de plusieurs petits pois, qui participent à la légèreté et à la luminosité du dessin ;

- et enfin d'une troisième rangée de dix grands pétales irréguliers, de formes et de tailles différentes, dont deux sont eux-mêmes jonchés de petites pousses, l'une à trois petits pétales et l'autre, recroquevillée, à deux petits pétales ;

- en dessous de la fleur, d'un feuillage sur tige présentant six éléments distincts :

- une feuille plate de forme plus large composée de trois folioles et d'un centre ajouré semblant en mouvement vers le bas du dessin ;

- lui faisant face, une feuille plate de forme allongée composée de folioles irrégulières et d'un centre ajouré, paraissant également en suspension par son léger repli vers le haut ;

- en dessous à droite, un bouton jonché de trois petites feuilles pleines, qui contrastent avec les traits et fils qui le bordent, créant un effet de clair-obscur ;

- face au bourgeon vers la gauche, une grande feuille laissant apparaître un centre ajouré, et présentant trois folioles à droite, trois folioles à gauche, une foliole en haut en pointe et une triple foliole en bas également pleines et qui participent à ce même contraste ;

- en dessous de cette grande feuille, une forme s'apparentant à un bourgeon agrémenté de trois pétales, légèrement ajourés et qui laissent transparaître une fine lumière telle que recherchée par l'auteur ;

- vers la gauche, une feuille de forme irrégulière présentant :

- une première partie au centre plein et à quatre folioles irrégulières,

- puis dans un mouvement de repli et de suspension vers la droite, deux feuilles de trois folioles chacune et dont les centres sont ajourés et agrémentés de deux points chacun renforçant le contraste et participant à la création d'un clair-obscur.

La première branche composée de trois éléments de feuillage, type de feuille de chêne et d'une fleur en forme d'anémone éclose.

La seconde branche et la fleur caractéristique du dessin 970120 composée de deux rangées de pétales entre lesquelles se trouvent un fond en armure."

Ainsi que le font valoir les sociétés Paule Ka et Limonta, cette description objective détaillée ne saurait à elle-seule démontrer une originalité. Néanmoins, la société DSH précise que l'auteur a fait le choix de la disposition des deux motifs A et B, de concevoir une composition florissante et fastueuse créant une impression de profusion et de densité de motifs floraux et pris le parti d'exploiter les contrastes et la transparence que permet la dentelle en espaçant nettement les traits séparant chaque motif afin de conserver une luminosité dans la composition du dessin, tout en créant un effet de clair-obscur. L'ensemble produit ainsi l'impression d'une retombée florale continue et de végétaux en suspension.

C'est à juste titre que les premiers juges ont retenu le caractère original de cette composition qui témoigne de choix créatifs de leur auteur, ce modèle qui reprend certes comme d'autres dentelles un motif floral n'en apparaît pas moins revisité et présente une combinaison de deux compositions différentes, l'une constituée d'une anémone éclose et l'autre d'une fleur arrondie entourée de plusieurs rangées de pétales, chacune des compositions comprenant un feuillage spécifique, ces choix arbitraires et esthétiques faisant que l'aspect global de la dentelle prise dans la combinaison de chacun de ses éléments, fussent-ils connus, en font un modèle de dentelle présentant un effet de contraste renforcé qui porte l'empreinte de la personnalité de son auteur.

Les caractéristiques originales du dessin litigieux telles que ci-dessus énoncées ne sont reprises à l'identique par aucun des dessins de dentelle invoqués par les sociétés Paule Ka et Limonta, lesquels, s'ils sont composés de "composition florissante et fastueuse créant une impression de profusion', ne reproduisent pas une composition comprenant les mêmes motifs disposés selon un même agencement issue de choix arbitraires de l'auteur.

Le jugement du 9 novembre 2018 sera en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu l'originalité du modèle référencé 970120.

- Sur la contrefaçon de droit d'auteur

Il résulte de ce qui précède que la demande de nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 6 octobre 2016 formée par la société Paule Ka aux motifs que la société DSH ne justifiait pas de sa qualité pour requérir une telle mesure doit être rejetée et le jugement du 9 novembre 2018 confirmé de ce chef.

La matérialité de la contrefaçon n'est pas discutée par les sociétés Paule Ka et Limonta.

Il résulte en effet des éléments fournis au débat par la société DSH tels le procès-verbal de constat dressé par huissier de justice le 2 septembre 2016 sur le site internet pauleka.com et le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 6 octobre 2016 au siège social de la société Paule Ka et dans la boutique sise 223 rue Saint Honoré à Paris que cette société a proposé à la vente dix modèles de vêtements, soit les robes portant sur les références 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/R117, 16H163/R117L, 16H163/R47L et 16H180/R79L, une jupe 16H163/J18, un boléro 16H163/V25, un pull manches courtes 16H406/PU47, un cardigan 16H406/CA19, confectionnés en tout ou partie avec une dentelle reproduisant le dessin de dentelle dont la société DSH est titulaire des droits patrimoniaux d'aut16r,

ce tissu de dentelle étant fourni à la société Paule Ka par la société Limonta sous le nom de Jody ou Jody mélange selon les modèles.

La contrefaçon du dessin de dentelle retenue par les premiers juges dans le jugement du 9 novembre 2018 mérite confirmation.

La société DSH verse au débat devant la cour deux procès-verbaux de constat en date du 9 décembre 2020 dressés par huissier de justice sur les comptes Pinterest et Instagram de la société Paule Ka montrant des photographies de personnes connues arborant une robe Aa A confectionnée dans le tissu de dentelle argué de contrefaçon. Elle sollicite de la cour de juger que la société Paule Ka a continué à commettre des actes de contrefaçon en méconnaissance du jugement déféré en diffusant sur son compte Pinterest et sur son compte Instagram « paulekaofficiel » des photographies reproduisant en totalité ou en partie les caractéristiques originales du dessin référencé 970120.

Néanmoins, contrairement à ce que soutient la société DSH, ces publications sur les réseaux sociaux n'apparaissent pas être postérieures au jugement de 2018 mais contemporaines des faits de contrefaçon reprochés devant le tribunal. En effet, outre que ces publications sont datées de 2016 et ont déjà été constatées dans le cadre du procès-verbal de constat du 2 septembre 2016, la requête très ciblée à laquelle a procédé l'huissier instrumentaire le 9 décembre 2020 en saisissant directement l'adresse URL de la page à laquelle il souhaitait accéder, ne permet pas à la cour d'apprécier si ces publications sont encore visibles par l'internaute en 2020, sans avoir à procéder à une recherche longue et techniquement complexe.

La société DSH sera en conséquence déboutée de sa demande à ce titre.

- Sur la réparation des préjudices

Les sociétés Paule Ka et Limonta sollicitent comme la société DSH l'infirmation du jugement en ce qu'il a fixé à la somme de 250.000 euros son préjudice subi du fait des actes de contrefaçon.

La société DSH demande à la cour :

- la fixation de sa créance à la procédure collective de la société Paule Ka à la somme de 1.626.415,62 euros,

- la condamnation in solidum de la Selarl Axyme ès qualités de liquidateur de la société Paule Ka et la société Limonta à lui payer les sommes de :

- 41.990,80 euros au titre du manque à gagner,

- 200.000 euros pour l'avilissement du dessin,

- 170.400 euros au titre d'une atteinte à ses investissements,

- 200.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- la condamnation de la Selarl Axyme ès qualités de liquidateur de la société Paule Ka à lui payer la somme de 1.014.024,82 euros au titre des bénéfices indûment réalisés,

- la condamnation de la société Limonta à lui payer la somme de 85.000 euros au titre des bénéfices indûment réalisés.

L'article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle prévoit que :

'Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l'atteinte aux

Ces dispositions impliquent que le juge procède à l'examen de chacun de ces postes, sans pour autant qu'il en soit nécessairement réalisé un cumul, comme le soutient la société DSH.

La société DSH évalue la masse contrefaisante à 2.287 produits et estime avoir été privée d'une commande de dentelle d'environ 4.520 mètres en se fondant sur une estimation du métrage nécessaire à la société Paule Ka pour confectionner chacun des 10 vêtements composé de la dentelle litigieuse. Se basant sur un prix moyen de 30,94 euros HT par mètre et une marge de 30% soit 9,29 euros HT, elle en déduit un manque à gagner de 41.990,80 euros HT.

Néanmoins, il ressort des éléments fournis au débat et particulièrement de l'attestation du commissaire aux comptes de la société Paule Ka en date du 8 mars 2017 corroborée par les factures d'achat jointes au procès-verbal de saisie contrefaçon en date du 6 octobre 2016, que la société Paule Ka a utilisé pour la période du 1er septembre 2015 au 30 septembre 2016 2.554 mètres de dentelles Ac et Jody mélange pour fabriquer les vêtements référencés 16H162/R49, 16H163/R48, 16H163/R117, 16H163/R117L, 16H163/R47L, 16H180/R79L, 16H163/J18, 16H163/V25, 16H406/PU47 et 16H406/CA19. Aucun élément ne vient étayer l'estimation de la société DSH d'une commande de 4.520 mètres de dentelles par la société Paule Ka, qui a à tort été retenue par le tribunal, les factures de vente de la dentelle en cause par la société Limonta à la société Paule Ka saisie lors des opérations de saisie contrefaçon montrant une acquisition de 1.125,42 mètres de dentelles soit bien inférieure à celle reconnue par la société Paule Ka.

Aussi, en retenant le chiffre de 2.554 mètres de dentelles acquis par la société Paule Ka auprès de la société Limonta, le manque à gagner de la société DSH doit être estimé à 2.554 x 9,29 euros HT soit 23.726,66 euros, la marge brute de 30% réalisée par la société DSH attestée par son expert-comptable n'étant pas pertinemment critiquée par la société Paule Ka, comme celle-ci ne soutient pas utilement que le préjudice lié au manque à gagner de la société DSH en raison de la contrefaçon dont elle est victime est un préjudice de perte de chance.

Outre le manque à gagner de la société DSH, le tribunal doit être approuvé en ce qu'il a également retenu les bénéfices réalisés par les sociétés Paule Ka et Limonta, le calcul du montant des dommages et intérêts devant viser à garantir au titulaire du droit de propriété intellectuelle la réparation intégrale du préjudice qu'il a subi. La société DSH réclame à ce titre la condamnation distincte de la société Paule Ka à lui verser la somme de 1.014.024, 82 euros, et de la société Limonta à lui verser la somme de 85.000 euros.

S'agissant de la société Paule Ka, il ressort des opérations effectuées dans le cadre de la saisie-contrefaçon susvisée que neuf modèles ont été vendus par le réseau 'wholesale' pour un total de 157 pièces et un chiffre d'affaires de 38.383 euros et dix modèles par le réseau 'retail' pour un total de 214 pièces et un chiffre d'affaires de 151.919 euros, soit un chiffre d'affaires total de 190.302 euros.

Ainsi que le fait à juste titre valoir la société Paule Ka, celle-ci ne revend pas directement la dentelle mais commercialise des vêtements confectionnés et son bénéfice est dû en partie à la création 18s vêtements et à sa marque. Néanmoins, si la dentelle qui compose les vêtements commercialisés par la société Paule Ka n'est pas le seul critère d'achat de ces produits par la clientèle ainsi que l'invoque la société Paule Ka, elle y participe pour beaucoup étant relevé que la plupart des produits en cause sont majoritairement composés de cette dentelle.

Au vu de ce qui précède, comme l'a relevé le tribunal à juste titre, un taux de marge brute minoré par rapport à celui sollicitée par la société DSH doit être appliqué et sera fixé par la cour à 40 %. Il convient donc de considérer que les bénéfices réalisés par la société Paule Ka grâce à la contrefaçon doivent être fixés à la somme de 76.120 euros.

S'agissant des bénéfices réalisés par la société Limonta, il doit être retenu la vente de 2.554 mètres de dentelles, aucun élément ne venant démontrer que la société italienne a vendu un métrage plus important de ce matériau. Selon l'attestation du commissaire aux compte de la société Limonta, celle-ci a réalisé une marge brute sur la vente de cette dentelle de 12.666, 75 euros qui sera retenue pas la cour en l'absence d'élément pertinent apporté au débat par la société DSH pour contester cette attestation.

Il sera également retenu que le dessin de dentelle en cause de la société DSH qui a connu un certain succès auprès de maisons de haute couture telles Valentino ou Chanel et qui a généré à l'époque des faits un chiffre d'affaires de plus de 1 millions d'euros pour cette société, a été utilisé par la société Paule Ka pour la confection de dix vêtements vendus sur internet ou en boutiques de prêt-à-porter dans un matériau de moindre qualité ce qui participe de l'avilissement et de la banalisation du dessin de dentelle en cause dans la mesure où la clientèle composée de grandes maisons de luxe sera conduite à se détourner d'un dessin avili par la reproduction servile qui en a été faite. Néanmoins, il convient de considérer avec le tribunal que cette atteinte se confond avec le préjudice moral invoqué également par la société DSH en ce que l'avilissement de ce modèle caractérise une atteinte à l'image et à la réputation de la société DSH. A ce titre, à supposer établi que l'héroïne du film 'Brillantissime' diffusé en janvier 2018 porte une des robes Paule Ka en cause, cette circonstance ne peut suffire à démontrer que la société Paule Ka a continué à commercialiser les produits litigieux et ne peut être pris en compte dans l'évaluation du préjudice de la société DSH au titre de l'avilissement de son droit de propriété intellectuelle. Le tribunal sera approuvé en ce qu'il a alloué la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice moral.

Sur l'atteinte aux investissements, la société DSH fournit une attestation de son expert-comptable datée du 26 novembre 2015 dont il ressort que celle-ci a investi au cours de l'exercice 2014/2015 la somme totale de 568.000 euros pour sa communication se décomposant comme suit : 455.000 euros de masse salariale, 19.000 euros de participation à des salons, 63.000 euros en frais de communication et 31.000 euros en édition de catalogues. Néanmoins ces chiffres globaux ne concernent pas spécifiquement la dentelle en cause et il n'est pas justifié que la société a exposé des frais de création et de promotion spécifiques pour cette dentelle qui a été

commercialisée en premier lieu en 2008 par la société Riechers Marescot. Le tribunal doit être approuvé en ce qu'il n'a pas retenu ce chef de préjudice.

Au vu de ce qui précède, et pour une réparation intégrale du préjudice subi par la société DSH, il convient de fixer la créance de la société DSH au passif de la société Paule Ka à la somme de 128.110,80 euros, de condamner in solidum la société Limonta à payer cette somme à hauteur de 51.990,80 euros, et de condamner cette dernière à payer la somme de 12.666,75 euros au titre des bénéfices réalisés.

Le jugement est dès lors infirmé sur le montant des dommages-intérêts.

Les mesures d'interdiction et de destruction des stocks qui ont été prononcées avec exécution provisoire par le tribunal méritent quant à elles confirmation.

Le rejet de la demande de publication judiciaire sera également confirmé, l'ancienneté des faits qui n'ont pas été réitérés ne justifiant pas d'une telle mesure qui apparaît disproportionnée sachant que la société Paule Ka est désormais en liquidation judiciaire.

De même, le rejet par le tribunal de la demande d'inventaire des produits formée par la société DSH est confirmée, cette demande n'apparaissant nullement justifiée comme la demande de rappel des produits en cause des circuits commerciaux formée en cause d'appel.

- Sur la demande en garantie de la société Paule Ka

La société Paule Ka sollicite sur le fondement de l'article 42 de la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises signée à Vienne le 11 avril 1980, la garantie de la société Limonta de toutes condamnations qui seraient prononcées contre elle.

Selon les dispositions de l'article 42 de cette Convention, '1) Le vendeur doit livrer les marchandises libres de tout droit ou prétention d'un tiers fondé sur la propriété industrielle ou autre propriété intellectuelle, qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer au moment de la conclusion du contrat, à condition que ce droit ou cette prétention soit fondé sur la propriété industrielle ou autre propriété intellectuelle:

a) En vertu de la loi de l'État où les marchandises doivent être revendues ou utilisées, si les parties ont envisagé au moment de la conclusion du contrat que les marchandises seraient revendues ou utilisées dans cet État; ou

b) Dans tous les autres cas, en vertu de la loi de l'État où l'acheteur a son établissement.

2) Dans les cas suivants, le vendeur n'est pas tenu de l'obligation prévue au paragraphe précédent : a) Au moment de la conclusion du contrat, l'acheteur connaissait ou ne pouvait ignorer l'existence du droit ou de la prétention . Ou

b) Le droit ou la prétention résulte de ce que le vendeur s'est conformé aux plans techniques, dessins, formules ou autres spécifications analogues fournis par l'acheteur."

La société Limonta ne conteste pas l'application de cette convention internationale mais dénie sa garantie en invoquant la qualité de professionnelle du secteur de la société Paule Ka qui ne pouvait ignorer les droits de la société DSH sur la dentelle en cause.

Néanmoins, outre que si la société Paule Ka, qui se présente comme une professionnelle du secteur du prêt à porter féminin haut de gamme, connaît les tendances de la mode et notamment les formes de vêtements qui sont créées par ses concurrents y compris les maisons de haute couture, celle-ci ne peut être au fait des créations s'agissant des matières premières qui composent les vêtements qu'elle crée ce d'autant que la société Limonta conteste que le modèle en cause soit un modèle phare de la société DSH. En outre, la société Paule Ka a fait le choix de se fournir auprès d'une société connue pour la qualité des matériaux qu'elle propose et il n'est pas établi qu'elle ai donné une quelconque indication quant à la forme du dessin de dentelle qu'elle souhaitait acquérir. La mauvaise foi de la société Paule Ka ne saurait pas plus être déduite du fait de la localisation en France de son siège social, tout comme la société DSH, ni de la promotion du modèle de dentelle par cette dernière qui est contestée par la société Limonta elle-même.

La société Limonta ne peut être suivie lorsqu'elle affirme ne pouvoir être condamnée à réparer les dommages subis par la société DSH, ces dommages n'étant pas prévisibles au moment de la conclusion du contrat ou quand elle sollicite la limitation de sa garantie aux seules conséquences prévisibles lors de la conclusion du contrat de commande à savoir le gain manqué de la société DSH. Les dispositions de l'article 74 de la Convention de Vienne selon lesquelles 'Les dommages-intérêts pour une contravention au contrat commise par une partie sont égaux à la perte subie et au gain manqué par l'autre partie par suite de la contravention. Ces dommages-intérêts ne peuvent être supérieurs à la perte subie et au gain manqué que la partie en défaut avait prévus ou aurait dû prévoir au moment de la conclusion du contrat, en considérant les faits dont elle avait connaissance ou aurait dû avoir connaissance, comme entant des conséquences possibles de la contravention au contrat', concernent la réparation du dommage que peut réclamer l'acheteur ou le vendeur en cas d'inexécution du contrat, ne sont pas exclusives de la garantie du vendeur que peut solliciter l'acheteur en cas de non conformité de la marchandise en raison de droits de propriété intellectuelle détenus par un tiers et ne sont pas limitatives de cette garantie.

Le jugement rectificatif en date du 18 janvier 2019 condamnant la société Limonta à garantir la société Paule Ka de l'ensemble des condamnations prononcées contre elle, sera également confirmé.

- Sur les autres demandes

Les demandes au titre de la contrefaçon ayant été accueillies, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande subsidiaire de la société DSH au titre des agissements parasitaires.

Les dispositions du jugement du 9 novembre 2018 concernant les dépens et les frais irrépétibles sont confirmées sauf en ce que les frais de saisie contrefaçon ont été inclus dans les dépens.

Parties perdantes pour l'essentiel, les sociétés Limonta et Paule Ka sont condamnées aux dépens d'appel et à payer à la société DSH, en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité complémentaire qui sera, en équité, fixée à la somme de 15.000 euros, en ce compris les frais de constat, de saisie-contrefaçon et d'achat des produits argués de contrefaçon.

PAR CES MOTIFS

Constate l'intervention volontaire de Mme Joanna Rousselet, ès qualités d'administrateur judiciaire, et de M. Jean-Charles Demortier, ès qualités de liquidateur judiciaire, de la société Paule Ka,

Confirme le jugement du 9 novembre 2018 sauf en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés Paule Ka et Limonta à payer à la société Dentelle Sophie Hallette la somme de 250.000 euros au titre de son préjudice résultant de la contrefaçon du dessin 970120 et en ce qu'il a inclus les frais de saisie-contrefaçon dans les dépens de première instance,

Y substituant et y ajoutant,

Fixe la créance de la société Dentelle Sophie Hallette au passif de la procédure collective de la société Paule Ka à la somme de 128.110,80 euros,

Condamne in solidum la société Limonta avec la société Paule Ka à payer cette somme à la société Dentelle Sophie Hallette à hauteur de 51.990,80 euros,

Condamne la société Limonta à payer à la société Dentelle Sophie Hallette la somme de 12.666,75 euros,

Confirme le jugement rectificatif du 18 janvier 2019 en toutes ses dispositions,

Rejette toutes autres demandes des parties,

Condamne in solidum la société Paule Ka, prise en la personne de M. Jean-Charles Demortier, ès qualités de liquidateur judiciaire, et la société Limonta à payer à la société Dentelle Sophie Hallette une somme complémentaire de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en ce compris les frais de constat, de saisie-contrefaçon et d'achat des produits argués de contrefaçon,

Condamne in solidum la société Paule Ka, prise en la personne de M. Jean-Charles Demortier, ès qualités de liquidateur judiciaire, et la société Limonta aux dépens d'appel dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente

Article, L331-1-3, C. prop. intell. Reproduction d'un dessin Président d'un tribunal Huissier Agissement parasitaire Intervention forcée Nullité du procès-verbal Acte de contrefaçon Liquidation de l'astreinte Contrefaçon Contrefaisant Rectification d'erreur Redressement judiciaire Administrateur Aide de la société Mandataire judiciaire Procédure collective Liquidation judiciaire Société d'exercice libéral à responsabilité limitée (selarl) Mise en état Liquidateur d'une société Qualité à agir Frais répétibles Remboursement de frais Limitation de garantie Perte de chance Concurrence déloyale Titulaire d'un droit Inscription d'une créance Fournisseur Préjudice moral Saisie contrefaçon Retard Logisticien Publication du jugement Avance des frais Personne physique Personne morale Droits d'auteurs Modèle déposé Manière équivoque Présomption Assignation délivrée une société Territoire français Couturier Enregistrement d'une marque Commissaire Société de production Chiffre d'affaires Expert-comptable Réorganisation d'un groupe Valeur probante Marque Cession de droits Protection du droit des auteurs Caractère original Photographie Manque à gagner Droits de propriété intellectuelle Réparation intégrale Commercialisation de produits Masse salariale Dommages-intérêts Interdiction Exécution provisoire Contrat de vente Livraison d'une marchandise Marchandise vendue Convention internationale Qualité d'un produit Mauvaise foi du débiteur Réparation d'un préjudice Convention de vienne Vendeur

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