COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78F
16e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 1er OCTOBRE
N° RG 18/04715 - N° Portalis DBV3-V-B7C-SPY2
AFFAIRE :
Aa, Ab A
C/
CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE NORMANDIE-SEINE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Juin 2018 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES
N° RG : 16/08426
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 01/10/2020
a
Me Claire RICARD, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE PREMIER OCTOBRE DEUX MILLE VINGT,
La cour d'appel de Versailles, a rendu après prorogation l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Aa, Ab A
né le … … … à … (…)
… … …
… … … … …
… … …
Représentant : Me Claire RICARD, Plaidant/Postulant, HK5K dk Ke dk Ke dk avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2018230
Représentant : Me Camille GARNIER de la B C, Plaidant, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANT
CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE HK5K dk Ke dk MUTUEL Ke dk DE NORMANDIE-SEINE
Société coopérative à capital et personnel variables
N° Siret : 433 786 738 (RCS Rouen)
Cité de l'Agriculture
Chemin de la Bretèque
76230 BOIS-GUILLAUME
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - N° du dossier 18/04715, substituée par Représentant : Me Adeline DASTE, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire ; 52 INTIMÉE
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Janvier 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Patricia GRASSO, Président,
Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,
Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte notarié en date du 17 mars 2009, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de
Normandie-Seine (ci-après la CRCAM Normandie Seine ) a consenti un crédit d'une durée de 180
mois à M. Ac A pour un montant principal de 194.000 € afin de financer l'achat en l'état
futur d'achèvement d'un appartement à usage locatif à Saint-Denis de la Réunion, dont la société
Ofim est le gestionnaire.
Le 4 juin 2014, M. Ac A est décédé et la compagnie Axa qui assurait le prêt souscrit a
refusé de le prendre en charge pour "fausses déclarations" de Ac A sur son état de santé de
sorte que le 17 août 2016, la CRCAM a fait signifier à M. Aa A, seul héritier du défunt, l'acte notarié du 17 mars 2009 sur le fondement de l'article 877 du code civil.
Suivant procès-verbal en date du 9 septembre 2016, la CRCAM a fait pratiquer une saisie-attribution
de créances à exécution successive entre les mains de la société Ofim pour obtenir paiement de la
somme de 155.343,11 € au préjudice de M. Aa A, débiteur saisi, fils du défunt et cette
saisie lui a été dénoncée le 13 septembre 2016.
Par exploit du 13 octobre 2016 , M. Aa A a saisi le juge de l'exécution du tribunal de
grande instance de Versailles d'une contestation et, par jugement rendu le 19 juin 2018 celui-ci a
* déclaré M. A recevable en sa contestation au titre de la saisie-attribution du 9 septembre 2016 ;
* débouté M. A de toutes ses demandes ;
* dit que la saisie-attribution à exécution successive pratiquée le 9 septembre 2016 entre les
mains de la société Ofim au préjudice de M. A, produira tous ses effets ;
* condamné M. A à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de
Normandie-Seine la somme de 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du
code de procédure civile ;
* condamné M. A aux dépens ;
* rappelé que la décision bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire.
Le 4 juillet 2018, M. A a interjeté appel de cette décision.
Dans ses conclusions transmises le 2 décembre 2019, et auxquelles il convient de se reporter
pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. A, appelant, demande à la cour de :
* infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il l'a déclaré recevable en son action ;
À titre principal,
* dire et juger que la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine ne justifie pas de sa créance, faute de justifier de l'absence de remboursement par l'assurance ; * annuler en conséquence l'acte de signification du 17 août 2016 ;
* dire et juger que l'acte notarié qui apparaît obscur ne pouvait servir de titre exécutoire pour pratiquer la saisie contestée ;
* à titre subsidiaire, ordonner la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par la SCP Liauzu Magamootoo, huissier de justice à Saint Paul de la Réunion, à la requête de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine entre les mains de la SARL Ofim immobilier le 9 septembre 2016 ;
À titre subsidiaire,
* constater la prescription du titre, de la créance en principal et intérêts ;
À titre plus subsidiaire,
* condamner la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine à lui payer la somme de 150.000 € qui se compensera avec l'éventuelle créance de la banque ;
* ordonner un échelonnement des paiements sur 24 mois ;
* débouter la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine de sa
demande de majoration de 3 points du taux nominal ;
* dire et juger que la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine devra réduire le montant des indemnités à l'euro symbolique, sinon réduire le taux au taux d'intérêt légal ;
En tout état de cause,
* rejeter toutes prétentions adverses ;
* débouter la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine de
l'ensemble de ses demandes ;
* ordonner sa décharge de tout engagement à l'égard de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine au titre du prêt d'un montant de 194.000 €, au taux de 5,05 % remboursable en 180 mois hors anticipation, objet du litige ;
* condamner la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine à lui payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
* condamner la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, M. A fait valoir :
* que l'acte de signification du 17 août 2016 est atteint de nullité au motif qu'il ne relate pas toutes les diligences qui ont été faites par l'huissier de justice pour que l'acte puisse être
signifié à personne ; que cette irrégularité lui a causé un grief au motif qu'il n'a pas été en
mesure de prendre utilement connaissance du titre exécutoire qui lui était opposé afin de le contester ; que, de surcroît, la faculté d'exercer une voie de recours n'a pas été indiquée dans l'acte litigieux ;
* qu'il y a lieu d'annuler la saisie-attribution à exécution successive pratiquée au motif que
celle-ci est également affectée d'irrégularités ;
* que la créance de la CRCAM résultant de l'acte notarié a été remboursée en totalité par la compagnie d'assurance ; que la CRCAM a souscrit un contrat d'assurance collective à la suite de la signature de l'offre de prêt ; qu' il appartient à la CRCAM de rapporter la preuve de l'absence de remboursement opéré par la compagnie d'assurance et d'une déclaration régulière de sa créance au passif de la succession du défunt ;
* que l'acte notarié présente un caractère obscur faisant obstacle à son exécution ; qu'en
l'espèce, l'acte authentique de prêt dispose que la CRCAM a adhéré, " pour son compte et
celui de ses emprunteurs à un contrat d'assurance de groupe souscrit par l'intermédiaire de la SARL Adicam, société de courtage d'assurances du Crédit agricole auprès de compagnies d'assurances sur la vie ci-après dénommées l'assureur " ; qu'ainsi, les risques de décès et de perte totale et irréversible d'autonomie sont garantis en coassurance par la CNP assurances, apériteur et Predica, pour moitié chacune ; que dès lors, la CRCAM n'est pas un tiers au
contrat d'assurance conclu entre le défunt et les compagnies d'assurance et couvrant le risque de décès ;
* que le titre exécutoire est prescrit au motif que l'exigibilité de la dette devait être prononcée au jour du décès ; qu'il verse aux débats une lettre adressée à la CRCAM du 11 juin 2014 par laquelle il demande la clôture du compte et le prononcé de la déchéance du terme ;
* que la responsabilité de la CRCAM doit être retenue et entraîner sa décharge au motif qu'elle l'a privé d'exercer un recours à l'encontre des véritables assureurs ;
* qu'il conteste le décompte de la banque et qu'en tout état de cause, seule la créance à la date du décès du défunt peut être réclamée, le surplus étant directement imputable au
comportement fautif de la CRCAM ;
* que la majoration d'intérêts, telle que stipulée dans l'acte notarié qui prévoit une majoration de 3 points du taux d'intérêt, doit être réduite a un euro ou à défaut, se voir substituer le taux d'intérêt légal ; que le préjudice de la banque ne saurait être de l'ordre de 3 % d'intérêts alors qu'elle a commis une faute dans la gestion de son dossier ;
* qu'il sollicite des délais de paiement sur une période de 24 mois ; que s'agissant de sa
situation financière, le locataire de l'appartement est défaillant dans le paiement des loyers et la succession ne présente aucun actif liquide permettant d'apurer la dette résiduelle en l'état
mais uniquement des actifs immobiliers en vente.
Dans ses conclusions transmises le 5 juillet 2019, et auxquelles il convient de se reporter pour
l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine, intimée, demande à la cour de :
* confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
* débouter M. A de l'ensemble de ses demandes ;
* condamner M. A à lui verser la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
* condamner M. A aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Courtaigne
Avocats selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Normandie-Seine fait valoir :
* que d'une part, la signification étant régulière, le moyen tiré de la nullité du titre exécutoire
doit être rejeté aux motifs que l'huissier de justice a mentionné, dans le procès-verbal de
signification, les diligences qu'il a effectuées ; que d'autre part, l'acte de saisie-attribution est valide ; que le père du débiteur saisi n'a pas souscrit une assurance auprès de la compagnie
d'assurance CNP Assurances, dépendante de la banque ; que la compagnie d'assurance Axa auprès de laquelle le défunt avait souscrit une assurance couvrant le risque de décès n'a pas
effectué de règlement eu égard à l'attestation de ladite compagnie d'assurance du
19 janvier 2018 qui indique que l'adhésion a été annulée pour fausse déclaration ; que son
action n'est pas prescrite car le délai de prescription a commencé à courir à compter du jour où elle a prononcé la déchéance du terme, soit le 22 mars 2016 ; qu'au surplus, des
versements lui sont parvenus en remboursement partiel des échéances de prêt par le biais de la société Ofim immobilier, avec laquelle le défunt avait conclu un mandat de gestion,
lesquelles sommes correspondaient aux loyers versés par les locataires de l'appartement dont le défunt était propriétaire ; que, par conséquent, ces paiements équivalent à une
reconnaissance de l'obligation de remboursement et ont pour effet d'interrompre le délai de
prescription ;
* que le juge de l'exécution n'est pas compétent pour statuer sur sa responsabilité pour
manquement à son devoir de conseil lié à la souscription du contrat ;
* que le débiteur saisi ne démontre pas le caractère manifestement excessif de la clause pénale ; qu'en l'espèce, elle a agi avec diligence pour obtenir le recouvrement de sa créance après le
décès du père du débiteur saisi ;
* qu'elle s'oppose à la demande de délais de paiement formée par le débiteur saisi aux motifs
que celui-ci n'a effectué aucune démarche auprès de la compagnie d'assurance ayant conclu
un contrat d'assurance avec son père pour garantir le remboursement du prêt en cas de décès
de l'emprunteur ; que le débiteur saisi ne verse aux débats aucune pièce permettant de
connaître la composition du patrimoine immobilier composant la succession de son père, ni
même les contrats de mandat allégués.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 14 janvier 2020 et l'audience de plaidoiries fixée au 16
janvier 2020.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la nullité de la signification du titre exécutoire et de la saisie-attribution subséquente
M. A soutient que la signification du titre exécutoire qui lui a été délivré le 17 août 2016 par
acte de Me Bariani Blanchet, huissiers, le 17 août 2016, est entachée de nullité au motif qu'il n'a pas
été délivré à sa personne même, et que l'huissier n'a pas décrit les diligences effectuées pour la
réalisation d'une signification à personne.
Il ressort toutefois du procès-verbal de signification concerné que l'huissier a en réalité bien relaté les
diligences entreprises, et qu'il a à la fois vérifié la réalité du domicile de M. A en mentionnant
dans l'acte que 'le nom est inscrit sur la boîte aux lettres’, et justifié des circonstances rendant
impossible la signification à personne, en précisant que ‘personne n'est présent ou ne répond à mes
Il ne pouvait dès lors que signifier cet acte à domicile par le biais d'un dépôt de l'acte à l'étude,
conformément aux articles 655 à 658 du code de procédure civile.
Outre le fait qu'aucune disposition légale n'impose à l'huissier de se présenter à nouveau au domicile
de l'intéressé pour parvenir à une signification à personne, M. A ne saurait dénier avoir reçu la
signification de l'acte notarié dès lors qu'il l'a lui-même versée aux débats avec la signification de son assignation du 13 octobre 2016.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a jugé régulière ladite signification.
Par ailleurs, M. A soulève en cause d'appel la nullité du procès-verbal de saisie-attribution en
raison de plusieurs irrégularités venant affecter sa validité, à savoir : le défaut de précision de la forme sociale et du nom du représentant du CRCA, le défaut d'indication du nom de l'huissier
associé de la SCP qui a dressé le procès-verbal de saisie, empêchant le contrôle de sa signature et
encore l'absence de mention de l'heure à laquelle a été dressé l'acte de saisie.
Il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 114 du code de procédure civile, la nullité d'un acte
pour vice de forme ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire de prouver le grief que lui
cause l'irrégularité.
En premier lieu, l'omission de la qualité du représentant légal du créancier constitue une omission de forme qui n'entraîne pas l'annulation de l'acte en l'absence de démonstration d'un grief résultant d'une
méprise sur l'identité du créancier. En l'espèce, M. A, qui avait parfaitement les moyens
d'identifier son créancier à la lecture de cet acte , n'établit l'existence d'aucun grief.
En deuxième lieu, le défaut d'apposition par l'huissier significateur de sa signature sur le
procès-verbal de saisie attribution est avéré en l'espèce, la seule signature supportée par cet acte étant celle de l'employé de la société Ofim qui a signé sa déclaration de tiers saisi. Cependant le
procès-verbal de saisie mentionne clairement l'identité et les coordonnées de la SCP d'huissiers
intervenante, et M . A n'établit pas davantage le grief qu'a pu lui causer l'omission incriminée.
Enfin, la mention de l'heure ne fait pas partie des mentions imposées à peine de nullité par l'article R.
211-1 du code des procédures civiles d'exécution. De plus, le saisi n'a, en l'espèce, aucun intérêt à l'invoquer dès lors qu'aucune autre saisie n'est venue en concours le 9 septembre 2016, date de la
saisie litigieuse, au profit d'un créancier différent, entre les mains du même tiers saisi.
Il convient par conséquent de rejeter ces moyens de nullité soulevés pour la première fois en cause
d'appel.
Sur le remboursement de la banque par la société d'assurances Axa
Il ressort de l'ensemble des éléments de la cause que M. Ac A n'a à aucun moment souscrit
un contrat d'assurance auprès de la société CNP Assurances, et que la proposition-type de contrat
d'assurance-groupe figurant dans l'offre de crédit adressée par la CRCAM à M. Ac A sous
forme de conditions générales retracées dans une notice d'information n'a pas été suivie d'effet par l'emprunteur, les mensualités du prêt n'incluant aucune somme au titre de l'assurance-décès-invalidité.
Il en résulte que l'emprunteur n'a jamais fourni le questionnaire de santé préalable à la souscription,
et que le contrat de prêt consenti à Ac A, contrairement aux allégations de l'appelant, était
tout à fait clair sur ce point.
Par ailleurs, est certes versé aux débats le certificat d'adhésion de Ac A daté du 16 juin
2009 auprès de la société d'assurance externe SPB Premium Emprunteur, affilié à la société AXA,
envoyé en son temps par Ac A à la CRCAM, ainsi que les relevés de compte de l'intéressé établissant que celui-ci réglait bien encore, quelques mois avant son décès, les cotisations
d'assurance auprès de 'SPB Premium.' et M. Aa A prétend que la banque a reçu un
remboursement conséquent, de l'ordre de 146.000 €, en remboursement du solde débiteur du prêt litigieux.
Toutefois, la CRCAM établit sans équivoque le refus qui lui a été opposé par la société SPB
Premium lorsqu'elle s'est rapprochée de celle-ci pour obtenir le règlement des sommes restant dues
au titre du prêt. Par courrier du 19 janvier 2018, la société SPB Premium-Axa lui a en effet rappelé
que le refus opposé à la demande d'indemnisation résulte de la nullité de l'adhésion de Ac A, qui, ayant omis de déclarer ses antécédents médicaux lors de sa souscription du contrat
Premium Emprunteur du 3 juin 2009, a fait l'objet d'un refus de prise en charge par le service
médical de la compagnie.
La banque verse aux débats pour établir le refus de l'assureur externe, la lettre à elle adressée le 19
janvier 2018 par la société SPB relative au contrat Premium Emprunteur souscrit pr M. A, qui annule ladite adhésion pour omission de déclaration d'antécédents médicaux
Conformément aux dispositions de l'article L 113-8 du code des assurances, la sanction des fausses déclarations intentionnelles de l'assuré est, en effet, la nullité du contrat d'assurance.
Le courrier adressé par la banque au notaire en charge de la succession de Ac A le 23 juin 2015, contenant le décompte du prêt, porte, il est vrai, au crédit une rubrique 'ADI défunt externe -
sous réserve de prise en charge' mais la garantie a été ultérieurement refusée compte tenu des fausses déclarations de l'assuré.
Il y a donc lieu de juger que M. Aa A n'est pas fondé à prétendre que la CRCAM a perçu un
remboursement d'assurance à hauteur de 146.480,52 euros si bien que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il rejette le moyen de l'héritier tiré de l'indemnisation de l'établissement prêteur par
l'assureur externe de M. A père.
Sur la prescription du titre exécutoire
Le premier juge a considéré qu'au 9 septembre 2016, date de la saisie-attribution en cause, aucune prescription ne pouvait être opposée à l'action en paiement de la banque.
Le contrat de prêt litigieux stipule, au chapitre "déchéance du terme" de ses conditions générales,
qu'en cas de décès de l'emprunteur, le prêteur pourra se prévaloir de l'exigibilité immédiate du crédit
'à tout moment sous réserve de respecter un délai d'un mois', sauf paiement par l'assureur des
prestations après survenance de l'événement couvert par l'assurance souscrite par l'emprunteur.
Sur ce point, par trois arrêts rendu le 11 février 2016, la Cour de cassation a rappelé qu''à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et
court à compter de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives,
l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme qui
emporte son exigibilité.
En l'espèce et en application des stipulations contractuelles ci-dessus rappelées, c'est par le courrier
du 22 mars 2016 qu'elle a adressé au notaire chargé de la succession ('attestation de créancier' portant
sur l'intégralité de sa créance ‘après déduction de la prise en charge par l'assurance-décès', soit, au cas
présent, après absence totale de déduction du fait du refus de prise en charge) que la CRCAM s'est
prévalue de l'exigibilité immédiate du crédit consécutivement au décès de Ac A.
En conséquence, elle ne peut aucunement être considérée comme prescrite en son action pour avoir
mis en oeuvre une procédure d'exécution le 9 septembre 2016.
Au surplus, en vertu de l'article 2240 du code civil, les paiements effectués par le débiteur auprès de
son créancier équivalent à une reconnaissance de son obligation, et interrompent la prescription. Les remboursements réguliers effectués depuis le décès de Ac A par la société Ofim
Immobilier avec laquelle M. A avait passé un mandat de gestion et qui percevait des loyers de
son appartement de La Réunion, ont constitué des remboursements partiels des échéances du prêt,
échelonnés de juillet 2014 à mai 2016, permettant de régler les échéances du prêt jusqu'à l'échéance
d'août 2014, et partiellement l'échéance du 10 septembre 2014.
Le donneur d'ordre quant à cette opération de remboursement par la société Ofim Immobilier est
nécessairement M. Aa A, aussi quand bien même considérerait-on que le point de départ du
délai biennal de prescription est la date de la première échéance impayée, soit l'échéance du 10
septembre 2014, l'action de la CRCAM engagée le 9 septembre 2016 ne peut être déclarée prescrite.
Le jugement doit encore être confirmé en ce qu'il a rejeté cette fin de non-recevoir..
Sur la responsabilité de la banque et la demande de décharge de M. Aa A
M. Aa A reprend en cause d'appel sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 150.000
€ à l'encontre de la CRCAM pour manquement à son devoir de conseil quant au choix et à
l'adéquation de l'assurance de Ac A à sa situation personnelle qui a conduit l'emprunteur à choisir une assurance externe à celle proposée par la banque.
Cependant si, aux termes des dispositions de l'article L 213-6 du code de l'organisation judiciaire, sur
la compétence matérielle du juge de l'exécution, ce magistrat connaît de manière exclusive, des
difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution
forcée, même si elles portent sur le fond du droit, ce juge, lorsqu'il est saisi d'une demande de mainlevée d'une mesure d'exécution, n'est pas compétent pour se prononcer sur une action en
responsabilité qui n'est pas fondée sur l'exécution ou l'inexécution dommageable de cette mesure,
cette action serait-elle présentée au soutien d'une demande de compensation.
En l'espèce, l'action en responsabilité de l'établissement prêteur est fondée sur le manquement au
devoir de conseil, obligation précontractuelle de la banque en tant que souscripteur originaire de
l'assurance-groupe, qui l'oblige à éclairer son client sur l'adéquation de ce contrat à sa situation.
Le devoir de conseil de la banque incriminé porte ainsi sur celui dont elle est débitrice lors de la
souscription du contrat et non lors de l'exécution de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il
rejette la demande indemnitaire de Monsieur A.
Sur la contestation de la majoration du taux d'intérêt
Il est constant que la clause de majoration contractuelle de 3% des intérêts de retard est constitutive
d'une clause pénale, qui est susceptible de modération ou d'aggravation lorsqu'elle est manifestement
excessive ou dérisoire, ainsi que le prévoit l'article 1231-5 du code civil.
Cependant M. Aa A ne démontre aucunement en quoi, par elle-même ou par son cumul éventuel avec une autre clause contractuelle, la majoration contractuelle de 3% des intérêts de retard
pourrait être qualifiée de "manifestement excessive' au vu de la faute du débiteur comme du préjudice
effectivement subi par le créancier.
Par confirmation du jugement sur ce point, la prétention de M. A est donc rejetée.
Sur les délais de paiement
Pas davantage qu'en première instance, M. A ne justifie de sa situation économique actuelle, ni
ne détaille le patrimoine immobilier dont il assure avoir hérité et qu'il aurait mis en vente, sans plus
de précisions, plus de six ans après l'ouverture de la succession.
Il a déjà bénéficié dans les faits de larges délais, et force est de constater qu'en tant qu'unique héritier
de son père, il n'a effectué aucune démarche auprès de la société ayant fourni l'assurance souscrite
par son père pour garantir le remboursement du prêt en cas de décès, laissant la banque s'adresser seule à l'assureur SPB de son co-contractant.
Dans ces conditions, le rejet de la demande de délais de paiement s'impose.
Sur les demandes accessoires
L'équité commande d'allouer à la SA CRCAM Normandie-Seine une somme, ainsi qu'il sera dit au
dispositif, au titre des frais irrépétibles de procédure qu'elle a été contrainte d'exposer en défense à un
appel injustifié.
Succombant en son recours, M. Aa A supportera les dépens d'appel comme de première instance.
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Déboute M. Aa A de l'ensemble de ses demandes ;
Condamne M. Aa A à verser à la SAC Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Normandie-Seine une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. Aa A aux entiers dépens, qui pourront être directement recouvrés
conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement
avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
signé par Madame Marie-Christine MASSUET, pour le Président empêché et par Madame Mélanie
RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,