ARRÊT N°
N° RG 19/03387
N° Portalis DBVH-V-B7D-HO43
EG-DM
JUGE DE L'EXECUTION DE NIMES
02 août 2019
RG:19/03433
A
B
Grosse délivrée
le
a
COUR D'APPEL DE NÎMES
4ème CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU 03 SEPTEMBRE 2020
Monsieur Aa A
né le … … … à … (…)
… …
… … … … (…)
Représenté par Maître Jean-Michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Maître Juan-Fernando WIEBE, Plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG
INTIMÉ :
Monsieur Ab B
né le … … … à … … … … …
… …
Représenté par Maître Sylvie SERGENT de la SCP DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Maître Alice CANET, Plaidant, avocat au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre,
Monsieur Jean-Noël GAGNAUX, Conseiller,
Mme Elisabeth GRANIER, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Nathalie TAUVERON, Greffière, lors du prononcé de la décision,
PROCÉDURE SANS AUDIENCE :
Conformément aux dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic, et en l'absence d'opposition des parties avisées le 30 avril 2020, la procédure s'est déroulée sans audience.
Les avocats ont déposé leur dossier au greffe comme demandé dans l'avis comportant également l'indication de la composition de la cour et de la date à laquelle l'arrêt serait rendu.
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 03 Septembre 2020, par mise à disposition au greffe de la Cour
Vu l'appel interjeté le 19 août 2019 par M. Aa A à l'encontre du jugement rendu le 2 août 2019 par le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de Nîmes dans l'instance n° 19/03433,
Vu l'appel interjeté le 20 août 2019 par M. Aa A à l'encontre du jugement rendu le 2 août 2019 par le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de Nîmes dans l'instance n° 19/03433,
Vu la jonction des deux instances intervenues par mention au dossier sous le seul numéro 19/03387,
Vu les dernières conclusions déposées le 2 juin 2020 par M. Aa A l'appelant et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu les dernières conclusions déposées le 18 novembre 2019 par M. Ab B et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu l'avis de fixation à bref délai, conformément à l'article 905 du code de procédure civile, pour l'audience du 30 avril 2020 à 14h30,
Vu le renvoi tenant la crise sanitaire covid 19 au 18 juin 2020 à 14h30 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 30 avril 2020 à effet différé au 11 juin 2020,
Vu l'avis adressé aux conseils des parties le 30 avril 2020 indiquant qu'il serait fait application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020,
Vu l'absence d'opposition à cette procédure dans le délai de 15 jours,
EXPOSE :
Le tribunal Amtsgericht Baden-Baden,sur demande de M. Aa A, a condamné en paiement M. Ab B par décision du 18 février 2019.
Tenant le refus de notification de la décision avec demande de réexamen de M. Ab B, une condamnation est néanmoins intervenue par décision du Amtsgericht Baden-Baden le 13 août 2019.
Sur appel de M. Ab B, le 31 octobre 2019 la décision a été confirmée par le Amtsgericht Baden-Baden ;
Un commandement de payer aux fins de saisie vente en date du 22 mai 2019 a été délivré à M. Ab B qui s'est vu par ailleurs dénoncer, par procès-verbal du 24 juin 2019, une dénonciation d'indisponibilité du certificat d'immatriculation de son véhicule ;
Une saisie attribution a été réalisée le 3 juillet 2019 et dénoncée le 11 juillet 2019 à M. Ab B.
Par acte du 11 juillet 2019, M. Ab B a assigné M. Aa A devant le juge de l'exécution de Nîmes, aux fins de suspension des mesures d'exécution et d'annulation des effets, lequel a par jugement du 2 août 2019 :
- annulé la saisie-attribution en date du 3 juillet 2019 à l'encontre de M. Ab B et ordonné sa mainlevée
- annulé le commandement aux fins de saisie vente en date du 22 mai 2019 à l'encontre de M. Ab B et ordonné la mainlevée de la saisie vente
- ordonné l'annulation du procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation du véhicule de M. Ab B
- condamné M. Aa A à payer à M. Ab B la somme de 2.000 € de dommages et intérêts
- rejeté les autres demandes pour le surplus
- condamné M. Aa A à payer la somme de 2.000 € à M. Ab B sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné
M. Aa A aux dépens - rappelé l'exécution provisoire de droit ;
M. Aa A à interjeté appel pour voir :
Vu les articles L.213-6 et L311-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire
Vu les articles 13, 15,18, 19,20, 21,22 et 23 du règlement (CE) n° 861 /2007 du Parlement et du conseil du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges
Vu les articles 32-1, 122 et 542 et suivants du code de procédure civile
Vu les articles L.111-1, L.111-2, L.111-3, L.111-8, L.121-1 et L.121-3 du code des procédures civiles d'exécution
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
- déclarer recevable et bien fondé l'appel,
- infirmer le jugement du 2 août 2019 du juge de l'exécution
Statuant à nouveau
- constater que le jugement du Amtsgericht Baden-Baden du 18 février 2019 est exécutoire en France
- ordonner la poursuite de l'exécution
- condamner M. Ab B à payer à M. Aa A le montant de 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive
- condamner M. Ab B à payer à M. Aa A le montant de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en première instance
- condamner M. Ab B à payer à M. Aa A le montant de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en instance d'appel
- condamner M. Ab B à payer à M. Aa A le montant de 3.000 € au titre de l'indemnisation pour action en justice abusive
- condamner M. Ab B aux entiers frais et dépens
- rappeler l'exécution provisoire de la décision ;
M. Ab B a conclu à l'appel incident pour voir :
Vu l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire
Vu l'article L.111-3 du code de procédure civile d'exécution, ensemble l'article 503 du code de procédure civile et les articles 5 et 8 du règlement (CE) n° 1393/2007 du Parlement européen et du conseil du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les états membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale
Vu les articles 21, 18 et 23 du règlement (CE) n° 861/2007 du Parlement européen et du conseil du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges
Vu les articles L.111-8 et L.121-2 du code des procédures civiles d'exécution
Vu l'article 559 du code de procédure civile
Vu les articles 698 et suivants du code de procédure civile
Vu les articles 905 et suivants du code de procédure civile
- déclarer recevable mais mal fondé l'appel principal interjeté par M. Aa A
- débouter M. Aa A de l'intégralité de ses demandes
- déclarer recevable et bien fondé l'appel incident 4 en conséquence :
- confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution de Nîmes le 2 août 2019 en ce qu'il a annulé le commandement aux fins de saisie vente du 22 mai 2019, le procès-verbal du 24 juin 2019 d'indisponibilité du certificat d'immatriculation de son véhicule et la saisie-attribution du 3 juillet 2019, ordonné la mainlevée de ces saisies, condamner M. Aa A aux dépens et rappelés l'exécution provisoire de droit ;
Statuant à nouveau
- condamner M. Aa A à lui verser 3.000 € de dommages et intérêts au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait des mesures abusives d'exécution
- condamner M. Aa A à lui verser 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance
Y ajoutant
- condamner M. Aa A à lui verser 3.000 € de dommages et intérêts au titre de l'indemnisation de l'abus dans l'exercice du droit d'appel
- condamner M. Aa A à lui verser 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais d'appel
- condamner M. Aa A aux entiers dépens tant de première instance que d'appel ;
SUR CE :
Le juge de l'exécution de Nîmes, appliquant le règlement CE du 11 juillet 2007, retient que M. Aa A ne rapporte pas la preuve de la signification de la décision du tribunal de Baden-Baden, et que tant le commandement aux fins de saisie vente que la saisie attribution ne mentionnent aucune date de signification alors que les règles applicables en matière d'exécution des jugements, y compris les jugements étrangers, sont celles du juge de l'exécution français de sorte qu'il est nécessaire que le titre exécutoire soit signifié pour pouvoir être exécuté ;
M. Aa A objecte que le jugement du tribunal de Baden-Baden a été correctement notifié par lettre recommandée avec accusée réception du 19 février 2019 mais que M. Ab B en a refusé la réception et que l'état d'exécution ne peut refuser l'exécution que si la décision est contraire à une décision antérieure rendue dans un autre État ce qui n'est pas le cas de l'espèce, que l'huissier n'était pas chargé de remettre une traduction du jugement, que si toutefois la cour n'était pas convaincue de l'impossibilité d'annulation des actes d'exécution il conviendrait de demander à la cour de justice de l'union européenne, sur le fondement de l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'union européenne, de statuer sur deux questions expressément mentionnées dans les motifs des conclusions ;
M. Ab B fait valoir l'impossible exécution forcée en France d'un jugement allemand jamais valablement signifié et l'absence de traduction en français ou de formulaire en français l'informant de son droit de demander une traduction de l'acte introductif d'instance et du jugement qu'il n'a toujours pas pu contester.
1/ le titre exécutoire et son exécution :
La procédure d'exécution en cause repose sur l'exécution forcée d'un jugement de condamnation de M. Ab B au profit de M. Aa A rendu par le tribunal du Landgericht de Baden-Baden le 13 août 2019 qui, sur appel de M. Ab B, a été confirmé par décision du tribunal du Landgericht de Baden-Baden le 31 mars 2020.
L'article L111-1 du code des procédures civiles d'exécution invoqué par M. Aa A est relatif à l'immunité d'exécution, non invoquée au débat, et donc totalement inopérant à l'espèce.
Constituent des titres exécutoires notamment les jugement étrangers déclarés exécutoires par une décision non susceptible d'un recours suspensif d'exécution 'sans préjudice des dispositions du droit de l'union européenne applicables' selon l'article L.111-3, 2° du code des procédures civiles d'exécution ;
La nullité et main levée de la saisie attribution du 3 juillet 2019, celles du commandement aux fins de saisie vente en date du 22 mai 2019 et celles du procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation du véhicule ont été prononcées par le juge de l'exécution sur le fondement du règlement CE n° 861/2007 du Parlement et du conseil du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges ;
Or, le règlement précité ayant été modifié par le règlement UE n° 1215-2012 du 12 décembre 2012, entré en vigueur le 10 janvier 2015, relatif à la compétence judiciaire,
En l'espèce, le jugement de condamnation fait suite à une procédure européenne de règlement des petits litiges (CE) n°861/2007 du parlement et du conseil du 11 juillet 2007 initiée par M. Aa A. Un premier jugement du 18 février 2019 est devenu non avenu en l'état d'un réexamen sollicité par M. Ab B sur le fondement de l'article 18 du règlement 861/2007. Un jugement de condamnation est alors intervenu le 13 août 2019 (celui qui sert de base aux poursuites) et sur recours de M. Ab B est intervenu une décision de confirmation le 31 mars 2020 ;
L'article 39 du règlement UE n°1215/2012 consacre l'exécution de plein droit des décisions européennes et le titre exécutoire, provenant d'un état membre, est destiné à être exécuté sans formalité supplémentaire dans n'importe quel autre état membre, appliquant sur l'exécution la loi du for. Toutefois en cas de contestation, toute partie intéressée peut demander, conformément à la procédure prévue aux articles 45 à 58, que la décision soit reconnue.
Tenant la contestation de la créance par M. Ab B, M. Aa A sollicite de constater que le jugement du Amtsgericht Baden-Baden du 18 février 2019 est exécutoire en France et la poursuite de l'exécution.
Or la décision, dont M. Aa A sollicite la reconnaissance est nulle et non avenue conformément à l'article 18 3. 2ème alinéa du règlement du 11 juillet 2007, en l'état du réexamen ayant conduit à une autre décision ;
Ainsi, cette décision du 18 février 2019 n'est pas un titre européen exécutoire et tenant la contestation de la créance par M. Ab B, M. Aa A ne peut être dispensé d'une procédure de reconnaissance de la décision exécutoire, support des procédures d'exécution entreprises ;
En conséquence, M. Aa A est débouté de sa demande de constat que le jugement du Amtsgericht Baden-Baden est exécutoire en france et de poursuite de la procédure d'exécution. La nullité et la main levée de la saisie attribution du 3 juillet 2019, celle du commandement aux fins de saisie vente en date du 22 mai 2019 et celle du procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation du véhicule sont confirmées ;
2/ sur la demande de dommages et intérêts :
* pour un comportement abusif :
- sollicitée par M. Aa A :
Le juge de l'exécution a le pouvoir de condamner le débiteur à des dommages et intérêts en cas de résistance abusive conformément à l'article L.121-3 du code des procédures civiles d'exécution.
Compte tenu de la solution apportée au litige, il est prématuré d'apprécier cette demande dans la mesure ou la créancier n'a pas mis en oeuvre correctement la procédure lui permettant d'exécuter, en l'état de la contestation opposée par M. Ab B.
Dés lors, M. Aa A est débouté de sa demande de dommages et intérêts.
- sollicité par M. Ab B :
Le juge de l'exécution connaît des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires conformément à l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire.
M. Ab B démontre que les saisies pratiquées lui ont causé un véritable préjudice se retrouvant dans une situation financière délicate tandis que M. Ab B a déposé une plainte pour usurpation d'identité, ce dont il a par ailleurs informé le créancier.
Ce préjudice, justement évalué par le juge de l'exécution à la somme de 2.000 euros, sera intégralement confirmé ;
* pour procédure abusive:
- sollicitée par M. Aa A
M. Aa A invoque l'article 32 du code de procédure civile énonce que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés ;
Certes, M. Ab B a pris l'initiative de la saisine du juge de l'exécution mais M. Aa A succombe en son appel de sorte qu'il ne peut être considéré que l'action initiale était dlatoire ou abusive. M. Aa A ne peut qu'être débouté de cette demande ;
- sollicitée par M. Ab B
M. Ab B invoque l'article 559 du code de procédure civile qui prévoit qu'en cas d'appel dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros sans préjudice des dommages et intérêts qui lui seraient réclamés.
Un appel constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts qu'en cas de faute excédant une appréciation inexacte de ses droits.
M. Ab B soutient que l'abus de M. Aa A consiste au refus d'exécuter le jugement de première instance au motif d'un refus de réception de sa signification. D'une part, ce refus n'empèche pas la signification et d'autre part la décision de mainlevée des mesures emporte suspension des poursuites dés le prononcé et suppression de tout effet d'indisponibilité dés sa signification ou notification.
Dés lors, ce moyen ne démontre pas un appel abusif ou dilatoire.
M. Ab B est en conséquence débouté de cette demande.
3/ les frais et dépens
M. Aa A qui succombe en son appel sera condamné aux entiers dépens d'appel et à payer à M. Ab B la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute M. Aa A de sa demande de constat du caractère exécutoire en France du jugement du Amtsgericht Baden-Baden en date du 18 février 2019 et de poursuite de la procédure d'exécution ainsi que des demandes tant de dommages et intérêts que fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute M. Ab B de ses demandes de dommages et intérêts pour appel abusif,
Condamne M. Aa A à payer à M. Ab B la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens d'appel.
La minute du présent arrêt a été signée par Madame Christine CODOL Présidente et par Madame Nathalie TAUVERON, greffière présente lors de son prononcé.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,