Jurisprudence : CA Rouen, 07-12-2011, n° 11/02781, Confirmation

CA Rouen, 07-12-2011, n° 11/02781, Confirmation

A3200H4B

Référence

CA Rouen, 07-12-2011, n° 11/02781, Confirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/5656393-ca-rouen-07122011-n-1102781-confirmation
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Abstract

Aux termes d'un arrêt rendu le 7 décembre 2011 la cour d'appel de Rouen (CA Rouen, 7 décembre 2011, n° 11/02781) confirme la décision du conseil de l'Ordre du barreau de Rouen qui a rejeté la demande d'inscription au tableau des avocats de M.



R.G 11/02781
COUR D'APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE RENVOI CASSATION ARRÊT DU 07 DÉCEMBRE 2011
DÉCISION DÉFÉRÉE
CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DE ROUEN du 19 Mai 2011

APPELANT
Monsieur Philippe Z

ST JEAN DE FOLLEVILLE
présent à l'audience
EN PRÉSENCE DE
L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE ROUEN


ROUEN
représenté par Me ..., Bâtonnier de l'ordre en exercice
du MINISTÈRE PUBLIC
représenté par Madame ..., Substitut de M. X X X

COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats et du délibéré
Madame LE BOURSICOT, Président de Chambre
Monsieur GALLAIS, Conseiller
Madame BOISSELET, Conseiller
Madame MARTIN, Conseiller, désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente de la Cour d'Appel en date du 17 octobre 2011
Madame AUBLIN, Conseiller, désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente de la Cour d'Appel en date du 17 octobre 2011
Madame le Président LE BOURSICOT a été entendue en son rapport oral de la procédure avant les plaidoiries
GREFFIER LORS DES DÉBATS
Monsieur HENNART, Greffier
DÉBATS
En chambre du conseil, le 18 Octobre 2011, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 Décembre 2011
ARRÊT
CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 07 Décembre 2011, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame LE BOURSICOT, Président de Chambre et par Monsieur HENNART, Greffier présent à cette audience.

Par lettre du 18 février 2011, reçue par l'Ordre des avocats le 21 février 2011, M. Philippe Z, né le ..... à Villers Semeuse (Ardennes), demeurant à Saint-Antoine la Forêt (76'170), 748 rue de Cormeville, a sollicité son inscription au barreau de Rouen sur le fondement des dispositions de l'article 98 du décret numéro 91 - 1197 du 27 novembre 1991, et plus particulièrement au visa des paragraphes 3°, 5° et 6° qui disposent que sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat
3° les juristes d'entreprises justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein du service juridique d'une ou plusieurs entreprises,
5° les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale,
6° les juristes salariés... d'une association... justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle en cette qualité postérieurement à l'obtention du titre ou diplôme mentionnés au 2° de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971,
étant par ailleurs observé que selon les dispositions de ce texte, " les personnes mentionnées au 3°, 4°, 5° et 6° peuvent avoir exercé leur activité dans plusieurs des fonctions visées dans ces dispositions dès lors que la durée totale de ces activités est au moins égale à huit ans ".

Par décision en date du 10 mai 2011, le Conseil de l'Ordre des avocats au Barreau de Rouen, a rejeté la demande d'inscription au tableau de l'ordre des avocats de Philippe Z.
Le Conseil de l'Ordre a considéré que Philippe Z ne parvenait pas à justifier d'avoir, pendant huit ans au moins, soit en tant que juriste d'entreprise soit en tant que juriste attaché à une organisation syndicale ou à une association, eu une pratique professionnelle en cette qualité ou une activité juridique réelle et continue. Par ailleurs et au surplus, le Conseil de l'Ordre a estimé que d'une part, Philippe Z avait fait un usage indu du titre d'avocat et que d'autre part, en raison de l'instance pénale en cours le concernant, il n'est pas possible de considérer qu'il répond pleinement aux conditions de moralité et de probité imposées par la loi.

Le 27 mai 2011 Philippe Z a relevé appel de cette décision.
A l'audience du 18 octobre 2011, Philippe Z a été entendu en ses explications et a déposé des conclusions. Il a notamment fait valoir qu'il a obtenu sa maîtrise de droit en 2000, qu'il est juriste en droit social, mandataire à titre exclusif du syndicat CGT depuis 42 mois, qu'à ce titre, il plaide devant trois conseils des prud'hommes et devant la Cour d'appel; qu'auparavant, au sein du groupe La Poste, il avait des fonctions de directeur juridique à Mediapost, après avoir assuré des fonctions de juriste auprès d'une association de consommateurs. Philippe Z revendique 16 années d'expérience professionnelle.
Invité à s'expliquer par le Président de la chambre sur les deux points relatifs à sa moralité et à sa probité, soulevés par le Conseil de l'Ordre dans sa décision, Philippe Z a expliqué qu'il avait effectivement refusé un renvoi à une avocate devant le conseil des prud'hommes et que dans un courrier il s'était présenté comme avocat en demande d'inscription et que cette avocate avait saisi ensuite le Conseil de l'Ordre pour se plaindre de son attitude.
Il a également reconnu avoir été condamné par le tribunal correctionnel du Havre à 400 euros d'amende, pour chantage et extorsion de fonds suite au litige l'opposant à son ancien employeur, jugement confirmé par la cour d'appel de Rouen. Philippe Z a précisé avoir formé un pourvoi contre cet arrêt confirmant sa condamnation.
Maître ..., bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Rouen a déclaré s'en rapporter à justice.
Madame ... représentant le ministère public, a déclaré qu'elle n'avait pas été destinataire des pièces de Philippe Z dans le respect du contradictoire. Elle a fait observer que si les diplômes de l'appelant ne sont pas mis en doute, il ne justifie cependant pas d'une pratique professionnelle d'au moins huit années, ainsi que le requiert l'article 98 du décret du 27 novembre 1991. Par ailleurs, elle a fait valoir que Philippe Z avait transgressé les règles de la profession d'avocat avant même d'être inscrit, soulignant qu'on est avocat ou que qu'on ne l'est pas et qu'exciper de cette qualité avant l'inscription au barreau constituait un manquement à l'honneur et à la probité. Elle a rappelé la condamnation de Philippe Z par arrêt confirmatif de la cour d'appel de Rouen du 30 mars 2011 pour délit de tentative de chantage au préjudice du directeur général de la société Mediapost et de cette dernière, son ancien employeur.
Le ministère public s'est donc déclaré opposé à la demande d'inscription de Philippe Z au Barreau des avocats de Rouen.
Philippe Z, invité à s'exprimer en dernier lieu, a déclaré n'avoir rien à ajouter à ses précédentes explications.

SUR CE, LA COUR
Attendu que Philippe Z justifie remplir les conditions de diplômes requises par le décret du 27 novembre 1991;
Attendu que Philippe Z invoque les fonctions et activités juridiques qu'il a exercées au sein du syndicat CGT, du groupe MEDIAPOST, de l'association FEDEM (Foyer en détresse Enfants malheureux) et au sein de la société CRIT INTERIM;
Attendu que le Conseil de l'Ordre a fait une analyse exacte des documents justificatifs produits par Philippe Z;
Qu'en effet, s'agissant de ses fonctions et activités au sein du syndicat CGT, en dehors de deux attestations établies par des membres de l'Union locale (Messieurs ... et ...) qui situent le début de son activité au mois d'avril 2008, les seules pièces justificatives témoignant de l'activité réelle de Philippe Z correspondent à la période ayant débuté le 25 mai 2010; que l'appelant explique lui-même qu'à la suite de son licenciement par MEDIAPOST, il a pris contact avec le secrétaire général de l'Union locale CGT qui a montré au début un certain scepticisme à son égard; qu'il a d'abord exercé son activité de manière bénévole et que ce n'est que depuis août 2010 qu'il assure seul le montage des dossiers ainsi que la défense prud'homale des salariés; que les mandats délivrés par la commission exécutive de l'Union locale pour représenter et assister les salariés devant les conseils des prud'hommes de Rouen, du Havre et de Dieppe sont datés du 3 janvier 2011; que les formations qu'il prétend avoir réalisées antérieurement ne sont que des programmes non nominatifs et non étayés par la signature des participants; que dans ces conditions, c'est à juste titre que lors de l'examen de sa demande d'inscription, le Conseil de l'Ordre a considéré que pouvait être retenue seulement une période de 11 mois d'activité juridique au sein d'une organisation syndicale, étant observé qu'à la date de l'audience devant la Cour, cette période est désormais de 16 mois;
Que s'agissant des fonctions et activités au sein du Groupe LA POSTE, Philippe Z justifie avoir été embauché par la société MEDIA POSTE SERVICES en qualité de responsable juridique du 15 mars 2004 au 31 août 2007 avec une reprise d'ancienneté au 12 janvier 2004, soit une période de 44 mois, puis en tant que juriste plaideur en droit social entre le 1er septembre 2007 et le 21 février 2008, soit 5 mois environ ; que Philippe Z justifie avoir exercé réellement des fonctions de juriste d'entreprise pendant une période de 4 ans et 1 mois;
Attendu que cependant, s'agissant des fonctions et actions juridiques dont l'appelant se prévaut au sein de l'association FEDEM, force est de constater, comme l'a fait le Conseil de l'Ordre, que Philippe Z ne produit que des captures d'écran du site internet de cette association permettant d'en connaître l'activité, - mais où n'apparaît pas son nom et sa qualité-, une brochure de l'association et enfin une attestation établie le 12 juin 2003 par sa présidente, Liliette ...; que certes, cette dernière atteste que Philippe Z, agissant en qualité de 'juriste bénévole en droit privé' a assuré des missions de consultations juridiques, d'études des dossiers après entretien avec les adhérents, d'élaborations d'assignations, de conception et réduction (sic) de conclusions et de veille juridique de juin 2000 à juin 2003; que cependant, Philippe Z ne verse aux débats aucune pièce - notamment projets de textes rédigés, exposé de cas, agendas-, justifiant de la nature précise, de l'effectivité et de la périodicité de ses activités bénévoles au sein de cette association;
Que dans la décision dont appel, le Conseil de l'Ordre fait pertinemment remarquer que ce manque de pièces justificatives laisse dans l'ignorance du nombre d'adhérents conseillés, de celui de dossiers examinés, de la durée mensuelle, hebdomadaire ou même quotidienne consacrée à cette activité bénévole par Philippe Z, de juin 2000 à juin 2003; que dans ces conditions ces trois années ne peuvent être retenues comme une période de pratique professionnelle en qualité de juriste salarié d'une association (article 6° de l'article 98 précité);
Attendu qu'enfin, Philippe Z justifie avoir été embauché par le groupe de travail temporaire CRIT INTERIM de septembre 1993 à avril 1995, en qualité de manager d'agence adjoint; qu'il ressort de son contrat de travail du 29 septembre 1993, article 7, que Philippe Z 'a notamment en charge la coordination du personnel dépendant de son secteur, la responsabilité des conditions de recrutement et de détachement des salariés intérimaires chez ses clients ainsi que des matériels de l'agence dont il doit assurer le bon fonctionnement et le développement commercial'; qu'il est également précisé que cette délégation de pouvoirs 'n'emporte pas pouvoir de recruter du personnel permanent de l'agence' ni 'd'engager la société à l'égard des tiers si ce n'est pour les actes nécessaires à la conclusion des contrats de mission temporaire ou de mise à disposition'; que ces fonctions ne peuvent s'analyser en l'exercice d'activités principalement juridiques et ne permettent pas d'y attacher la qualification de juriste d'entreprise;
Attendu que par conséquent, Philippe Z ne justifie que de 5 années et quelques mois d'activité dans les fonctions visées aux 3°, 5° et 6° de l'article 98 du décret du 27 novembre 1991; qu'il ne remplit donc pas les conditions afférentes à la durée de l'activité de juriste prévues par ce texte;
Attendu qu'au surplus, même si la condamnation pénale prononcée à son encontre par l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Rouen du 30 mars 2011 pour délit de tentative de chantage est frappé d'un pourvoi en cassation, il n'en demeure pas moins que Philippe Z a reconnu s'être présenté comme avocat en cours d'inscription, notamment auprès d'un avocat régulièrement inscrit; que l'ambiguïté de cette formule fait supposer que son inscription n'était qu'une pure formalité; que c'est donc à juste titre que le Conseil de l'Ordre a considéré qu'il avait fait un usage indu du titre d'avocat, ce qui constitue un manquement à l'honneur et à la probité;
Attendu que la décision entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de Philippe Z d'inscription au tableau de l'Ordre des avocats de barreau de Rouen;

Par ces motifs
Confirme la décision en date du 10 mai 2011 du Conseil de l'Ordre des avocats au Barreau de Rouen qui a rejeté la demande d'inscription au tableau de l'ordre des avocats de Philippe Z,
Laisse les dépens éventuels à la charge de Philippe Z. Le Greffier Le Président

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