R.G N° 18/02130
COUR D'APPEL DE ROUEN CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2018
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du JUGE DE L'EXÉCUTION D'EVREUX du 22 Décembre 2017
APPELANTS
Monsieur Médéric Marie Gérard Etienne Z
NEUILLY SUR SEINE
Représenté et assisté par Me Benoît PEUGNIEZ de la SELARL DE BEZENAC & ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN, postulant et plaidant
Assisté de Me BOISSEAU Jérôme, avocat au barreau de PARIS, plaidant
Madame Margerie ZY épouse ZY
NEUILLY SUR SEINE
Représentée et assistée par Me Benoît PEUGNIEZ de la SELARL DE BEZENAC & ASSOCIÉS, avocat au barreau de ROUEN, postulant et plaidant
Assistée de Me BOISSEAU Jérôme, avocat au barreau de PARIS, plaidant
INTIMÉS
Monsieur Stéphane Claude Roger Michel X
né le ..... à MARSEILLE
The Knightsbridge 199 Knightsbridge LONDRES SW7 1 RH
Représenté par Me Christine LEBEL de la SCP PICARD LEBEL QUEFFRINEC, avocat au barreau de l'EURE, postulant
Assisté de Me NORMAND-BODARD, avocat au barreau de PARIS, plaidant
Monsieur Jean-Yves W
né le 24 Juin 1956 à pau BOUGIVAL
Représenté et assistée par Me Caroline SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de ROUEN, postulant de Me ..., avocat au barreau de PARIS,
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 786 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 18 Juin 2018 sans opposition des avocats devant Madame LEPELTIER-DUREL, Présidente, rapporteur. Mesdames ..., ... et ..., Conseiller
GREFFIER LORS DES DÉBATS
Madame DUPONT, Greffier
DÉBATS
A l'audience publique du 18 Juin 2018, où l'affaire a été mise en délibéré au 20 Septembre 2018
ARRÊT :
Contradictoire
Prononcé publiquement le 20 Septembre 2018, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
Signé par Madame LEPELTIER-DUREL, Présidente et par Madame DUPONT, Greffier. FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES
Le 20 novembre 2015, sur requête de M. Stéphane X, un commandement de payer valant saisie immobilière a été délivré à M. Médéric Z et à Mme Margerie Y épouse Petit, en vertu d'une copie exécutoire d'un acte notarié des 30 décembre 2014 et 5 janvier 2015 ayant pour objet une reconnaissance de dette d'un montant de 163 500 euros, aux sûreté et garantie de laquelle était affecté l'immeuble situé à Vaux sur Eure, 1 rue de Cocherez.
Le 8 janvier 2016, ce commandement de payer a été publié au service chargé de la publicité foncière d'Evreux, volume 2015 S n°2.
Par acte du 4 mars 2016, M. X a fait assigner les époux Z devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Evreux avec sommation de prendre connaissance du cahier des charges.
Le cahier des conditions de vente a été déposé au greffe du tribunal de grande instance d'Evreux le 9 mars 2016.
Par acte du 9 mars 2016, M. X a dénoncé le commandement de payer valant saisie à M. Jean-Yves W, créancier inscrit au jour de la publication du commandement et l'a assigné à comparaître à l'audience du juge de l'exécution.
Par ordonnance du 24 août 2016, le juge de l'exécution a autorisé M. W à déclarer sa créance postérieurement au délai imparti par l'article R.322-12 du code des procédures civiles d'exécution et, par déclaration reçue au greffe le 26 septembre 2016, M. W a déclaré être titulaire d'une créance à l'encontre des époux Z.
Par jugement du 22 décembre 2017, le juge de l'exécution a :
- rétracté l'ordonnance du 26 août 2016,
- déclaré irrecevables les demandes de M. Jean-Yves W,
- constaté que M. X était muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible,
- constaté que la saisie immobilière portait sur des droits saisissables,
- mentionné que la créance de M. X s'établissait en principal, frais, intérêts et autres accessoires à la somme de 163 500 euros outre intérêts,
- ordonné la vente forcée du bien saisi,
- dit qu'il y serait procédé à l'audience du 9 avril 2018 à 9 heures,
- autorisé M. X à faire procéder à la visite de l'immeuble par l'huissier de justice de son choix qui pourrait pénétrer dans les lieux avec l'assistance si nécessaire d'un serrurier, de la force publique ou de deux témoins,
- dit que la publicité paraîtrait dans une édition périodique de journal à diffusion locale ou régionale et sous la forme d'une annonce internet,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens seraient compris dans les frais de poursuite soumis à taxe.
M. et Mme Z ont formé appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe le 15 février 2018 (procédure enregistrée sous le n°RG 18/ 00679).
Ils ont interjeté appel de la même décision par déclaration reçue au greffe le 17 mai 2018 et, sur leur requête du 23 mai 2018, ont été autorisés à assigner MM. X et Celton à l'audience de cette cour du 18 juin 2018.
Aux termes de leur assignation par actes du 29 mai 2018, réitérée dans leurs conclusions notifiées le 14 juin 2018, à laquelle il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, ils demandent à la cour de :
- ordonner la jonction de la présente procédure d'appel avec les procédures enregistrées sous les n°18/00679 et 18/00921,
- prononcer la nullité de la signification du 15 février 2018, - infirmer le jugement d'orientation,
- constater que le protocole d'accord du 22 avril 2014 et l'avenant du 23 octobre 2014 sont nuls et de nul effet,
- constater que les actes authentiques des 30 décembre 2014 et 5 janvier 2015 ayant réitéré les engagements d'affectation hypothécaire consentis à l'avenant du 23 octobre 2014 sont nuls et de nul effet,
- dire M. X mal fondé en sa demande d'ordonner la vente forcée de l'immeuble,
- le débouter de ses demandes,
- dire M. W irrecevable en son appel incident,
- le débouter de ses demandes,
- le condamner à leur payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
M. X, par dernières écritures notifiées le 12 juin 2018, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour de :
- déclarer irrecevable l'appel des époux Z,
- subsidiairement, les débouter de leurs demandes,
- en tout état de cause, les condamner au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens que la SCP Picard, Lebel, Queffrinec, avocats associés, sera autorisée à recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions notifiées le 13 juin 2018, M. W, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour de :
- déclarer irrecevable l'appel des époux Z,
- subsidiairement, de le recevoir en son appel incident,
- débouter les époux Z de leur demande de jonction des procédures susvisées,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rétracté l'ordonnance du 24 août 2016 et en ce qu'il a déclaré ses demandes irrecevables,
- confirmer l'ordonnance du 24 août 2016 l'ayant autorisé à déclarer sa créance,
- constater la validité des pactes d'actionnaire des 15 avril et 31 décembre 2008, des protocoles transactionnels des 15 mai et de l'avenant du 17 novembre 2014 et des actes authentiques des 30 décembre 2014 et 5 janvier 2015,
- fixer sa créance à la somme de 74 000 euros en principal,
- condamner solidairement M. et Mme Z à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens que la SELARL gray et Scolan, avocats associés, sera autorisée à recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS de la DÉCISION
Le jugement d'orientation rendu le 22 décembre 2017 a donné lieu à des appels différents enregistrés au RG sous les n° 18/00679, 18/00921 et 18/02130.
Compte tenu des conditions de forme auxquelles les appels des jugements d'orientation sont soumis, l'analyse de la recevabilité des dits appels conduit à ne pas ordonner la jonction des trois procédures.
L'article R.311-7 du code des procédures civiles d'exécution, ayant pour objet la procédure d'appel en matière de saisie immobilière, dispose que l'appel des jugements est formé dans un délai de quinze jours à compter de la notification qui en est faite, par voie de signification.
En l'espèce, le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Evreux le 22 décembre 2017 a été signifié par acte d'huissier à chacun des époux Z le 15 février 2018 de sorte que leur délai d'appel expirait le 2 mars 2018.
Mrs X et Celton soulèvent la fin de non-recevoir de l'appel formé par les époux Z le 17 mai 2018 comme étant tardif.
Les époux Z font valoir que l'acte de signification du jugement entrepris serait nul comme étant entaché de plusieurs irrégularités et ayant été remis à leur fils mineur. Ils en déduisent que le délai d'appel n'aurait pas commencé à courir et que leur appel est recevable.
L'acte de signification du jugement d'orientation (pièce n°27 de M. X) a été remis le 15 février 2018 à 12 heures 20 à tiers présent au domicile des époux Z, en l'espèce à leur fils Théophile Z, âgé de plus de quatorze ans.
Contrairement à ce que soutiennent les époux Z, il est expressément noté que l'acte a été remis par Me Joël ..., huissier de justice d'une SCP de Nanterre, selon la modalité de la remise à tiers présent à domicile. S'agissant des raisons de cette remise à tiers, l'acte précise que les destinataires (chacun des époux Z) étant absents de leur domicile ce 15 février 2018 à 12 heures 20, l'acte est remis à leur fils, M. Théophile Z, qui a certifié le domicile et accepté de recevoir l'enveloppe contenant copie de l'acte. Les autres formalités relatives à l'avis de passage et à la lettre prévue par l'article 658 du code de procédure civile ont été accomplies.
La remise d'un acte peut être faite à un mineur pourvu qu'il ait un discernement suffisant, ce qui est le cas d'un mineur âgé de plus de quatorze ans, les époux Z ne faisant valoir aucun trouble de discernement de leur fils. Le discernement exigé ne doit pas porter sur la connaissance exacte de la procédure de saisie immobilière et l'importance de ses conséquences, dont le garçon était en effet probablement dépourvu comme l'indiquent ses parents, mais seulement sur la nécessité de remettre à ses parents un courrier déposé à domicile par un huissier.
C'est d'ailleurs ce que leur fils a correctement fait puisque M. et Mme Z ont bien été informés de la signification du jugement entrepris dont ils ont formé un premier appel dès le 15 février 2018 (procédure enregistrée sous le n° RG 18/00679), premier appel dont l'irrecevabilité est soulevée, faute d'avoir été formé selon la procédure à jour fixe.
S'agissant du délai d'appel, l'acte contient les indications suivantes avec les lettre en majuscules et les caractères gras ci-dessous reproduits :
' TRÈS IMPORTANT'
'Vous pouvez faire APPEL de ce jugement dans le délai de QUINZE JOURS à compter de la date indiquée en tête du présent acte, devant la Cour d'Appel de ROUEN.'
'TRÈS IMPORTANT'
' En application de l'article R.311-7 du code des procédures civiles d'exécution, je vous indique que vous pouvez relever appel du jugement qui vous est présentement signifié dans le délai de quinze jours à compter de la date indiquée en tête du présent acte'
Suivent des précisions sur la computation des délais (article 641 du code de procédure civile), le lieu de remise de la déclaration d'appel et l'obligation de constituer avocat.
Enfin, il est ajouté :
' En vertu des articles R.311-7 et R.322-19 du code des procédures civiles d'exécution, l'appel est jugé selon la procédure à jour fixe prévue par l'article 905 du code de procédure civile.'
Les indications susvisées sont d'une précision et d'une clarté sans équivoque en ce qui concerne le délai d'appel et les modalités de l'appel.
La précision sur la nécessité de le former selon la procédure à jour fixe est donnée ainsi que le fondement juridique de cette obligation, l'article R.322-19 du code des procédures civiles d'exécution.
La seule mention erronée contenue dans la dernière phrase susvisée selon laquelle la procédure à jour fixe est prévue par l'article 905 du code de procédure civile qui, en réalité, prévoit le mode de fixation de l'examen d'une affaire urgente par le président de la chambre, mode qui doit être retenu pour les procédures à jour fixe ainsi que prévu par l'article R.311-7 du code des procédures civiles d'exécution, ne peut conduire à annuler l'acte de signification, d'une part, parce que la nécessité de former l'appel selon la procédure à jour fixe est bien mentionnée ainsi que son fondement juridique, d'autre part, parce qu'aucun grief n'a pu être causé aux époux Z par cette seule impropriété de langage, étant encore précisé que l'article 905 du code de procédure civile est bien le fondement juridique du calendrier de la procédure qui est ensuite mise en oeuvre.
En conséquence, l'acte de signification du jugement en cause est régulier et l'appel formé par les époux Z irrecevable comme tardif.
M. et Mme Z succombent en leur appel et auront la charge des dépens d'appel. En outre, ils devront payer une indemnité de 2 000 euros à chacun des intimés au titre des frais irrépétibles que ceux-ci ont dû exposer.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement et contradictoirement,
Déclare irrecevable l'appel interjeté le 17 mai 2018 par M. Médéric Z et Mme Margerie Y épouse Petit à l'encontre du jugement d'orientation rendu le 22 décembre 2017 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Evreux ;
Condamne in solidum M. Médéric Z et Mme Margerie Y épouse Petit à payer la somme de 2 000 euros à M. Stéphane X et celle de 2 000 euros à M. Jean-Yves W sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne in solidum M. Médéric Z et Mme Margerie Y épouse Petit aux dépens d'appel et accorde droit de recouvrement direct à la SCP Picard, Lebel, Queffrinec, avocats et à la SELARL Gray Scolan, avocats, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier La Présidente
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