Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 4 - Chambre 8
ARRÊT DU 09 MARS 2017 (n° 156/17 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 16/00998
Décision déférée à la cour jugement du 14 décembre 2015 - juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris - RG n° 15/82589
APPELANTE
Sa Monabanq
N° SIRET 341 792 448 00084
Villeneuve d'Ascq
représentée et assistée de Me Serena Asseraf, avocat au barreau de Paris, toque B0489
INTIMÉE
Madame Kalidja Y
née le ..... à Tonla (Côte d'Ivoire)
Paris
représentée et assistée de Me Rebecca Soyeux, avocat au barreau de Paris, toque R054
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2016/008912 du 04/04/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Paris)
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 15 décembre 2016, en audience publique, devant la cour composée de
Mme Marie Hirigoyen, présidente de chambre,
Mme Anne Lacquemant, conseillère
M. Gilles Malfre, conseiller qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats Mme Camille Molina
ARRÊT
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Marie Hirigoyen, présidente, et par M. Sébastien Sabathé, greffier stagiaire en période de pré-affectation auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits, procédure et prétentions des parties
La société Monabanq, anciennement dénommée Covefi a obtenu du tribunal d'instance du 19ème arrondissement de Paris, une ordonnance d'injonction de payer à l'encontre de M. et Mme Y, tenus solidairement de payer la somme de 9 742,20 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 22 juin 2011.
La société Monabanq a fait procéder, par exploit de la Selarl Cherki Rigot, à la signification de cette ordonnance par acte du 12 octobre 2011, remis à tiers présent à domicile, à savoir Mme Mamba Y, qui s'est présentée comme étant la cousine des débiteurs, et qui a accepté de recevoir l'acte.
L'ordonnance a été revêtue de la formule exécutoire le 23 novembre 2011.
Par exploit du 13 décembre 2011, remis en l'étude de l'huissier instrumentaire, la société Monabanq a fait signification de l'ordonnance exécutoire et commandement de payer à M. et Mme .... Puis elle a fait signifier un procès-verbal de saisie-vente, par exploit du 22 février 2012, à M. et Mme Y, à l'adresse du 44, rue des Alouettes, bâtiment 2, étage 2, Paris 19ème. L'acte de saisie a été signifié à domicile, pour M. et Mme Y, remis à M. Abdoulaye Y, fils des débiteurs saisis, qui a accepté de le recevoir.
L'huissier a procédé à la saisie de divers biens mobiliers (un four micro-ondes, un meuble vitrines et bois d'angle, un canapé trois places avec 2 fauteuils cuir, une table basse, une télévision écran plat Samsung, un meuble living bois, une chaîne hi-fi Kenwood, un ordinateur PC écran plat, un bureau bois, une commode bois avec miroir, une chaîne hi-fi Sony).
Cette saisie a été faite en présence de deux témoins, et d'un serrurier.
Par déclaration en date du 2 avril 2012, Mme Y a formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer.
Suivant jugement du 2 décembre 2014, le tribunal d'instance du 19ème arrondissement a déclaré l'opposition irrecevable, car formée hors délai, en application de l'article 1416 du code de procédure civile et a confirmé l'ordonnance d'injonction de payer.
Mme Y a interjeté appel de ce jugement, l'affaire étant actuellement pendante devant cette cour.
Parallèlement, suivant exploit introductif d'instance du 15 août 2015, Mme Y a saisi le juge de l'exécution aux fins d'annulation du procès-verbal de saisie- vente en date du 22 février 2012.
Par jugement du 14 décembre 2015, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a prononcé la nullité du procès-verbal de saisie vente délivré par acte du 22 février 2012 à Mme Y et M. Y à la requête de la société Monabanq et de la procédure de saisie-vente subséquente, a condamné la société Monabanq aux dépens et débouté les parties du surplus de leurs demandes.
La société Monabanq a relevé appel selon déclaration du 23 décembre 2015.
Par conclusions du 30 juillet 2016, elle demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que la procédure de saisie vente diligentée le 22 février 2012 n'avait pas été précédée d'un commandement de payer conforme aux dispositions des articles L.221-1 et R.221-1 du code des procédures civiles d'exécution, de le confirmer pour le surplus., en conséquence, de dire et juger que le procès-verbal de saisie vente du 22 février 2012, et la procédure de saisie vente subséquente sont parfaitement valables, de condamner Mme Y à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de son avocat sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du 2 septembre 2016, Mme Y demande à la cour, vu les articles 114, 651 et suivants du code de procédure civile, L. 221-1 et R. 221-18 code des procédures civiles d'exécution, in limine litis, d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les moyens de nullité portant sur le procès-verbal de saisie vente, de le confirmer en ce qu'il a jugé irrégulière la procédure de saisie -vente litigieuse, faute d'un commandement de payer préalable, en tout état de cause, de débouter la société Monabanq de toutes ses demandes et de la condamner à payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE
Le premier juge a écarté les moyens de nullité opposés par Mme Y pris de la signification irrégulière du procès-verbal de saisie-vente en date du 22 février 2012 mais a annulé ledit procès-verbal au motif que le commandement préalable, signifié le 13 décembre 2011 dans le même acte que l'ordonnance d'injonction de payer, n'était pas conforme aux prescriptions de l'article R. 221-1 du code des procédures civiles d'exécution en ce qu'il ne mentionnait pas que les débiteurs pouvaient être contraints à la vente forcée de leurs biens meubles, faute d'un règlement dans le délai de 8 jours.
- Sur la régularité du commandement de payer aux fins de saisie-vente
Cette question doit être examinée en premier lieu.
Il résulte de l'article L.221-1 du code des procédures civiles d'exécution que tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur qu'ils soient ou non détenus par ce dernier.
Selon l'article R.221-1, 2° du même code, en matière de saisie-vente, le commandement de payer prévu à l'article précité, contient à peine de nullité commandement d'avoir à payer la dette dans un délai de huit jours faute de quoi, il peut y être contraint par la vente forcée de ses meubles.
L'article R.221-1 précise que le commandement de payer peut être délivré dans l'acte de signification du jugement.
C'est ainsi qu'a procédé la société Monabanq qui a délivré un seul acte en date du 13 décembre 2011, intitulé signification d'une ordonnance d'injonction de payer exécutoire et commandement de payer comportant la mention suivante "Faute par vous de payer la somme de 10 044,87 euros, vous pourrez y être contraint par la saisie et la vente de vos biens meubles à l'expiration d'un délai de huit jours à compter de la date figurant en tête du présent acte" .
Le respect du formalisme est ainsi établi et c'est à tort que le premier juge a annulé le commandement aux fins de saisie-vente.
- Sur la régularité de la signification du procès-verbal de saisie-vente
Mme Y conclut à la nullité du procès-verbal de saisie vente, faute d'avoir été délivré à personne par l'huissier qui n'a pas accompli les diligences nécessaires à cet effet, en ce qu'il a été signifié à M. et Mme Y dans un seul et même acte et, enfin, remis à son fils mineur comme né en 1994, dépourvu du discernement nécessaire.
Le procès-verbal de saisie-vente a été signifié à Mme Kalidja Y et à M. Mamadou Y par acte du 22 février 2012 délivré à domicile, l'adresse du 44, rue des Alouettes, bâtiment 2, étage 2, Paris 19ème n'étant pas contestée, par remise à M. Abdoulaye Y, fils des saisis, qui a accepté de le recevoir.
L'huissier a noté qu'il se trouvait dans l'impossibilité de signifier l'acte aux intéressés sur leur lieu de travail, faute de précision suffisante à ce sujet, en cochant la mention pré-imprimée correspondant à cette situation, ce qui satisfait aux exigences de l'article 655 du code de procédure civile.
Il n'est établi d'aucune façon que M. Abdoulaye Y, qui est né le 30 juillet 1994, ne disposait pas lors de la délivrance du procès-verbal, le 22 février 2012, du discernement nécessaire pour recevoir la copie de l'acte.
Par ailleurs, il est noté qu'un avis de passage a été laissé le jour même et que la lettre prévue à l'article 658 comportant les mêmes mentions que l'avis de passage a été adressée avec copie de l'acte au plus tard le premier jour ouvrable suivant conformément aux règles régissant les significations à domicile.
Quant au moyen pris du vice tiré de l'absence de signification par acte séparé, il est fondé sur l'article 677 du code de procédure civile selon lequel les jugements sont notifiés aux parties elles-mêmes et d'où il suit que lorsque la décision concerne plusieurs personnes, la signification doit être faite séparément à chacune d'elles.
Il ressort des pièces de la procédure que l'acte en date du 13 décembre 2011 valant signification de l'ordonnance d'injonction de payer exécutoire et commandement de payer, a été signifié à M. et Mme Y selon acte comportant deux feuilles séparées de signification, pour chacun des destinataires.
En revanche, le procès-verbal libellé au nom des deux saisis comporte sur la même feuille la signification à M. et Mme ... sans mention distincte à laquelle ne peut suppléer l'indication en marge à la main "Pour M. et Mme".
Pour démontrer le grief que lui cause cette irrégularité, Mme Y souligne que si elle avait eu connaissance de la saisie-vente, elle aurait été en mesure de former opposition à l'ordonnance d'injonction de payer dans le délai d'un mois à compter de l'acte du 22 février 2012 alors qu'elle n' a été informée de cette décision qu'à l'occasion d'une saisie-attribution en date du 8 mars 2012.
L'opposition formée par Mme Y le 2 avril 2012 à l'ordonnance d'injonction de payer a, en effet, été déclarée irrecevable car formée plus d'un mois après le procès-verbal du 22 février 2012 considéré comme la première mesure d'exécution ayant eu pour effet de rendre les biens du débiteur indisponibles, par jugement du 2 décembre 2014.
Pour autant, l'acte régulièrement remis à son fils lequel indiquait à l'huissier qu'il le remettrait à sa mère qui, par ailleurs, était destinataire de la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile, mettait en mesure Mme Y de ne pas se méprendre sur sa qualité de destinataire au même titre que M. Y et de contester en temps utile le titre exécutoire de sorte qu'il n'est pas démontré de grief résultant de l'irrégularité de la signification.
Il sera observé que si Mme Y entendait, dans le cadre de l'opposition à l'injonction de payer, contester avoir signé les contrats de crédit ayant fondé sa condamnation et si, ayant porté cette même contestation dans un procès en responsabilité contre un autre prêteur, la Socram, elle a obtenu gain de cause, par jugement du tribunal d'instance de Paris 19ème du 15 septembre 2015, le procès aux mêmes fins diligenté contre Monabanq a conduit à un jugement de débouté de la même juridiction en date du 19 février 2016 au motif que Mme Y était bien la signataire du dernier avenant contractuel conclu avec Monabanq en dépit de ses dénégations.
C'est donc par une juste appréciation que les moyens de nullité ont été rejetés.
Il s'ensuit que la procédure est régulière et que le premier juge a, à tort, prononcé la nullité du procès-verbal de saisie-vente signifié par acte du 22 février 2012 et de la procédure subséquente au constat de la nullité du commandement de payer.
Le jugement sera, en conséquence, infirmé et Mme Y déboutée de ses demandes.
- Sur l'article 700 du code de procédure civile
L'équité ne commande pas de faire application de ces dispositions.
Partie perdante, Mme Y supportera les dépens.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du procès-verbal de saisie-vente signifié par acte du 22 février 2012 à la requête de la société Monabanq et de la procédure subséquente de saisie-vente,
Statuant à nouveau
Dit la procédure de saisie-vente régulière,
Déboute Mme Y de ses demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme Y aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés selon les dispositions de l'article l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE