Jurisprudence : Cass. soc., 25-11-2015, n° 14-14.342, F-D, Cassation

Cass. soc., 25-11-2015, n° 14-14.342, F-D, Cassation

A0717NY9

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2015:SO02033

Identifiant Legifrance : JURITEXT000031544202

Référence

Cass. soc., 25-11-2015, n° 14-14.342, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/27434628-cass-soc-25112015-n-1414342-fd-cassation
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SOC. CF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 25 novembre 2015
Cassation
Mme LAMBREMON, conseiller le plus ancien faisant fonction de président
Arrêt n 2033 F D Pourvoi n D 14-14.342 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant

Statuant sur le pourvoi formé par la société Devoucoux Sellier, société par actions simplifiée, dont le siège est Bidart,
contre l'arrêt rendu le 23 janvier 2014 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme Y Y, domiciliée Anglet,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les six moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 28 octobre 2015, où étaient présents Mme Lambremon, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Salomon, conseiller référendaire rapporteur, Mme Farthouat-Danon, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Salomon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Devoucoux Sellier, de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de Mme Y, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Y, engagée par la société Devoucoux Sellier le premier mai 2001 en qualité d'employée administrative et facturation, est devenue en juin 2003 dessinatrice, puis a été nommée à compter du premier mars 2006 ingénieur designer, statut cadre, niveau IV échelon 3, de la convention collective nationale des industries de la maroquinerie, articles de voyage, chasse-sellerie, gainerie, bracelets en cuir ; qu'elle a été promue le 29 janvier 2010 à effet rétroactif au premier janvier au niveau V, échelon 1 ; qu'elle a été élue membre de la délégation unique du personnel le 30 mars 2010 ; que la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur le 21 juin 2010, puis a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen
Vu l'accord du 9 septembre 2005 relatif à la classification des salariés annexé à la convention collective nationale des industries de la maroquinerie, articles de voyage, chasse-sellerie, gainerie, bracelets en cuir ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'un rappel de salaire au titre de la classification conventionnelle, l'arrêt retient que cette classification ne comporte aucune mention relative à l'encadrement d'une équipe de travail, que l'employeur a considéré au mois d'août 2006 que la salariée remplissait les conditions de cette classification depuis le premier mars 2006 puisqu'il lui a proposé la signature d'un contrat de travail qui en son article premier prévoyait précisément cette classification, ledit contrat n'ayant pas été signé par la salariée pour différents motifs étrangers à cette question de la classification ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, en l'absence de volonté claire et non équivoque de l'employeur de surclasser la salariée, quelles étaient les fonctions réellement exercées par l'intéressée, la cour d'appel a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le deuxième moyen

Vu le principe d'égalité de traitement ;
Attendu que pour condamner l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour violation du principe d'égalité de traitement, l'arrêt retient que la salariée verse aux débats le tableau des rémunérations des intervenants (base DADS 2009) duquel il ressort que sa rémunération brute annuelle était de 34 032 euros alors que pour les deux salariés auxquels elle se compare elle était, pour M. ... de 36 658 euros et pour M. ... de 43 355 euros, qu'il ressort du contrat de travail de M. ..., qu'il a été engagé à compter du 22 novembre 2006, statut cadre, niveau IV, échelon 3, et que M. ... a été engagé en qualité de dessinateur-maquettiste en DAO à compter du 6 avril 1999, à temps partiel, puis à temps complet à compter du 6 août 1999, que l'employeur soutient que les différences de rémunération entre ces trois salariés sont justifiées par des fonctions différentes, M. ... agissant en qualité de supérieur hiérarchique direct de Mme Y, et M. ... justifiant d'une plus grande ancienneté et d'une plus grande expérience professionnelle avec des tâches différentes, mais qu'il convient de relever que l'employeur produit, pour justifier ces différences, des éléments non pertinents, et non probants, qu'en effet, pour justifier de la qualité de supérieur hiérarchique de M. ..., il produit une fiche de poste qui porte comme mention de son édition la date du 23 novembre 2010, soit une date postérieure de plusieurs mois à la rupture des relations contractuelles, que de même, l'organigramme sur lequel apparaissent les trois salariés, M. ... comme " gestion production ", M. ..., comme " bureau d'études " et Mme Y comme " planification-ordonnancement ", porte mention d'une édition en janvier 2010, par conséquent, insusceptible de justifier les différences de rémunération constatées pour l'année 2009, que seule l'ancienneté de M. ..., supérieure de deux années à celle de Mme Y, est susceptible de constituer une différence dans sa situation et justifier ainsi une différence de rémunération, puisqu'il n'est pas justifié que l'ancienneté de ce salarié était prise en compte par l'attribution d'une prime d'ancienneté distincte de la rémunération invoquée ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans se livrer à une analyse comparée de la situation, des fonctions et des responsabilités de l'intéressée avec celles des autres salariés et sans rechercher, comme il lui était demandé, si les fonctions respectivement exercées par les uns et les autres étaient de valeur égale, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le quatrième moyen
Vu les articles L. 1231-1, L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
Attendu que pour dire que la rupture du contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement nul et condamner en conséquence l'employeur au paiement de diverses sommes, l'arrêt retient qu'il ressort des bulletins de salaire produits aux débats que jusqu'au mois de mai 2006 la salariée était rémunérée sur la base de 151,67 heures pour un salaire brut mensuel de 2 600 euros et qu'à compter du mois de juin 2006 son horaire mensuel a été porté à 169 heures avec maintien d'un salaire brut de 2 600 euros, sans que soit justifiée l'existence d'un accord de la salariée, ni même que cet accord a été sollicité, que, de plus, ce changement de l'horaire mensuel de base avec maintien de la même rémunération mensuelle brute implique nécessairement que le taux horaire de la rémunération a été baissé, sans que soit justifiée l'existence d'un accord de la salariée, ni même que cet accord a été sollicité, que dans son courrier du 4 août 2006, l'employeur a fait état d'une erreur du bulletin du mois de mars et a indiqué qu'un contrat de cadre impliquait un travail mensuel de 169 heures, qu'il n'y avait donc plus de RTT acquis, sans le justifier dans la présente instance, alors qu'il résulte de l'accord du 9 septembre 2005 (étendu par arrêté du 23 mars 2006) que le salaire minimum brut mensuel de base d'un cadre au niveau V était, à cette date, de 2 516 euros, le texte de l'accord précisant qu'il s'agissait d'un montant fixé pour la durée légale mensuelle de travail en vigueur à ce jour, de sorte qu'en maintenant la rémunération =mensuelle brute tout en augmentant la durée mensuelle de travail l'employeur a procédé à une diminution du taux horaire, sans justification, que de telles modifications unilatérales constituent des modifications du contrat de travail qui justifient, à elles seules, la prise d'acte de la rupture du contrat par la salariée aux torts de l'employeur ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si cette modification était d'une gravité telle qu'elle empêchait la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les troisième, cinquième et sixième moyens
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne Mme Y aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Devoucoux Sellier.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR CONDAMNE la société Devoucoux Sellier à payer à Mme Y diverses sommes à titre de rappel de salaire et des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE sur le non-respect de la classification conventionnelle des emplois et des salaires minima conventionnels depuis le 1er mars 2006 Madame Y revendique sa classification, à compter du mois de mars 2006, au niveau V, échelon 1, statut cadre, de la Convention collective nationale des industries de la maroquinerie, articles de voyage, chasse-sellerie, gainerie, bracelets en cuir du 9 septembre 2005. Elle était classée niveau IV, échelon 3 depuis le 1er mars 2006, et a été classée au niveau V, échelon 1, le 29 janvier 2010 avec effet rétroactif au 1 janvier 2010. La société Devoucoux Sellier conteste la possibilité d'un classement de la salariée au niveau V, échelon 1, à compter du mois de mars 2006 aux motifs qu'elle ne disposait pas d'une "grande autonomie" puisqu'elle exerçait ses fonctions sous la responsabilité, dans un premier temps, de Monsieur ... ..., puis de Monsieur ... ... à compter de janvier 2007, et qu'elle n'a jamais encadré la moindre équipe de travail. Le niveau V, échelon 1, est ainsi défini par la convention collective, accord du 9 septembre 2005 (chapitre IV, structure et description des classifications; classification des cadres)
"NIVEAU V
DÉFINITION du niveau
Responsabilité du choix des moyens et de la réalisation des objectifs. AUTONOMIE
Grande autonomie.
Aptitude à la prise de nombreuses initiatives pour l'amélioration des résultats. RESPONSABILITÉ
Par délégation du niveau hiérarchique supérieur (ou directement du chef d'entreprise) partage ou assume la responsabilité complète de la gestion de son service ou domaine d'activité.
FORMATION de base
Ingénieur ou cadre diplômé ou niveau équivalent acquis par la pratique professionnelle.
ECHELON 1
NATURE ET DESCRIPTION
Ingénieur ou cadre mettant en oeuvre une compétence technique, commerciale, administrative, économique, financière, juridique ou sociale. Apporte une contribution importante à la gestion d'un service ou d'un secteur d'activité de l'entreprise, ainsi qu'à la définition et à la réalisation des objectifs. "
Il convient de remarquer, en premier lieu, que cette définition conventionnelle ne comporte aucune mention relative à l'encadrement d'une équipe de travail et en deuxième lieu, et surtout, que l'employeur a considéré au mois d'août 2006 que la salariée remplissait les conditions de cette classification depuis le 1er mars 2006, puisqu'il lui a proposé la signature d'un contrat de travail qui en son article 1 prévoyait précisément cette classification, ledit contrat n'ayant pas été signé par la salariée pour différents motifs étrangers à cette question de la classification. L'employeur fait également valoir qu'en tout état de cause la salariée ne pourrait prétendre à cette classification qu'à compter du mois de mars 2007 au motif notamment que, ainsi qu'elle l'a elle-même écrit dans son courrier du 28 avril 2010, la convention collective prévoit que le classement au niveau IV, échelon 3, ne peut être appliqué que pendant une période allant de six mois à un an. Mais, l'accord du 9 septembre 2005 stipule notamment que le classement d'un salarié au niveau IV, échelon 3, correspond à une " fonction permettant à un ingénieur ou un cadre débutant d'acquérir une connaissance de l'entreprise, de son organisation, de ses méthodes, de ses techniques (durée de 6 mois à 1 an) ", signifiant ainsi que cette durée a pour finalité de permettre au salarié débutant de connaître l'entreprise, connaissance que Madame Y avait déjà acquise puisqu'elle était engagée par l'entreprise et au sein de celle-ci depuis le 1er mai 2001, connaissance dont l'employeur a pris acte et a reconnu en lui proposant, ainsi qu'il a été dit précédemment, son classement au niveau V, échelon 1, à compter du 1er mars 2006. En ne lui appliquant la classification qui devait être la sienne que plusieurs années plus tard, soit à compter du 1er janvier 2010, l'employeur a manqué à ses obligations conventionnelles, motif qui justifie à lui seul que la rupture lui soit imputée. La société Devoucoux sera donc condamnée à payer à Madame Y un rappel de salaire pour la période du 1er mars 2006 au 25 juin 2010 en application du minima conventionnel pour le niveau V, échelon 1, ainsi que l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents ;
1 ) ALORS QUE ce sont les fonctions effectivement exercées par le salarié qui déterminent sa classification conventionnelle ; que la proposition d'un contrat de travail par l'employeur à un salarié embauché sans contrat écrit, attribuant une classification conventionnelle supérieure à celle jusque-là appliquée, n'emporte pas reconnaissance par l'employeur de ce que le salarié répond aux critères conventionnels de cette classification, de sorte qu'en cas de refus de cette proposition par le salarié, seule la constatation de l'exercice effectif des fonctions correspondant à la classification qui y est visée, entraine l'obligation pour l'employeur de verser le salaire minimum correspondant ; qu'en se bornant à relever, pour dire que Mme Y à compter du 1er mars 2006, relevait du niveau V, échelon 1 de la Convention collective nationale des industries de la maroquinerie, articles de voyage, chasse-sellerie, gainerie, bracelets en cuir du 9 septembre 2005, que l'employeur lui avait proposé un contrat de travail prévoyant cette classification, sans constater que Mme Y qui avait refusé cette proposition, avait effectivement exercé les fonctions correspondant à cette classification, la cour d'appel a violé le texte conventionnel précité, ensemble les articles 2261-2 et L.2254-1 du code du travail ;
2 ) ALORS QUE la Convention collective nationale des industries de la maroquinerie, articles de voyage, chasse-sellerie, gainerie, bracelets en cuir du 9 septembre 2005, énonce à l'article 2 (niveaux des classifications) du chapitre II (présentation des classifications) que les salariés sont classés par rapport au poste occupé dans l'entreprise, non à un métier, et prévoit en son chapitre IV, structure et description des classifications, classification des cadres, s'agissant du niveau V, échelon 1, que l'intéressé " Par délégation du niveau hiérarchique supérieur (ou directement du chef d'entreprise) partage ou assume la responsabilité complète de la gestion de son service ou domaine d'activité " et " apporte une contribution importante à la gestion d'un service ou d'un secteur d'activité de l'entreprise, ainsi qu'à la définition et à la réalisation des objectifs " ; que ces dispositions impliquent, lorsque le service compte plusieurs salariés, une mission d'encadrement et/ou d'animation de tout ou partie de ces salariés ; qu'en relevant de manière purement formelle que la définition conventionnelle du niveau V, échelon 1, ne comportait aucune mention relative à l'encadrement, la cour d'appel a violé le texte conventionnel précité, ensemble les articles 2261-2 et L.2254-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR CONDAMNE la société Devoucoux Sellier à payer à Mme Y une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison d'une discrimination ;
AUX MOTIFS QU'en application du principe général "à travail égal, salaire égal", énoncé notamment dans les articles L.2261-22 10 et L.2271-1 8 (anciens L.133-5 4 et L136-2 8 ) du code du travail, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés de l'entreprise, pour autant que les salariés en cause sont placés dans une situation identique. En vertu de l'article L.3221-3 du même code, constitue une rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au salarié en raison de l'emploi de ce dernier. En vertu de l'article L.3221-4 du même code, sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse. En application des articles 1315 du Code civil et L.1144-1 du code du travail, il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe de l'égalité des salaires, "à travail égal, salaire égal", de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence. Madame Y verse aux débats le tableau des rémunérations des intervenants (base DADS 2009) duquel il ressort que sa rémunération brute annuelle était de 34.032 euros alors que pour les deux salariés auxquels elle se compare elle était, pour Monsieur ... ... de 36.658 euros et pour Monsieur ... de 43.355 euros. Il ressort du contrat de travail de Monsieur ... qu'il a été engagé à compter du 22 novembre 2006, statut cadre, niveau IV, échelon 3, et que Monsieur ... a été engagé en qualité de dessinateur-maquettiste en DAO à compter du 6 avril 1999, à temps partiel, puis à temps complet à compter du 6 août 1999. La société Devoucoux Seller soutient que les différences de rémunération entre ces trois salariés sont justifiées par des fonctions différentes, Monsieur ... agissant en qualité de supérieur hiérarchique direct de Madame Y, et Monsieur ... justifiant d'une plus grande ancienneté et d'une plus grande expérience professionnelle avec des tâches différentes. Mais, il convient de relever que la société Devoucoux Sellier produit, pour justifier ces différences, des éléments non pertinents, et non probants. En effet, pour justifier de la qualité de supérieur hiérarchique de Monsieur ..., elle produit une fiche de poste qui porte comme mention de son édition la date du 23 novembre 2010, soit une date postérieure de plusieurs mois à la rupture des relations contractuelles. De même, l'organigramme sur lequel apparaissent les trois salariés, Monsieur ... ... comme "gestion production", Monsieur ... ..., comme "bureau d'études" et Madame Y Y comme "planification-ordonnancement", porte mention d'une édition en janvier 2010, par conséquent, insusceptible de justifier les différences de rémunération constatées pour l'année 2009. Seule l'ancienneté de Monsieur ..., supérieure de deux années à celle de Madame Y, est susceptible de constituer une différence dans sa situation et justifier ainsi une différence de rémunération, puisqu'il n'est pas justifié que l'ancienneté de ce salarié était prise en compte par l'attribution d'une prime d'ancienneté distincte de la rémunération invoquée. Par conséquent, il y a lieu de dire que l'employeur n'apporte pas la preuve des éléments objectifs justifiant la différence de rémunération invoquée et constatée entre la situation de Monsieur ... et Madame Y. Par voie de conséquence, la société Devoucoux Sellier sera condamnée à lui payer la somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
1 ) ALORS QUE lorsqu'il invoque une inégalité de traitement salarial, le salarié doit établir une différence de rémunération avec des salariés exerçant les mêmes fonctions ou accomplissant un travail de même valeur, à charge pour l'employeur de démontrer que cette différence est objectivement justifiée, par un ou des motifs étrangers à toute discrimination ; que la seule différence de rémunération entre des salariés d'une même entreprise, sans considération des fonctions effectivement exercées par chacun d'eux, ne laisse pas présumer l'existence d'une discrimination ; que la cour d'appel pour faire droit à la demande, a relevé que Madame Y versait aux débats le tableau des rémunérations des " intervenants " (base DADS 2009) duquel il ressortait que sa rémunération brute annuelle était de 34.032 euros alors que pour les deux salariés auxquels elle se comparait elle était, pour Monsieur ... ... engagé en qualité de dessinateur-maquettiste en
DAO à compter du 6 avril 1999, à temps partiel, puis à temps complet à compter du 6 août 1999, de 36.658 euros, et pour Monsieur ... engagé à compter du 22 novembre 2006, statut cadre, niveau IV, échelon 3, de 43.355 euros ; qu'il ne ressort nullement de ces constatations que les deux salariés auxquels Mme Y se comparait occupaient les mêmes fonctions qu'elle, ou accomplissaient un travail de même valeur que le sien ; que la cour d'appel a violé l'article L.1334-1 du code du travail, ensemble le principe " à travail égal, salaire égal ";
2 ) ALORS QUE des pièces ne peuvent être écartées en raison seulement de leur date d'édition informatique, postérieure aux faits débattus, dès lors que cette date n'est pas celle de leur conception ; qu'en écartant la fiche de poste et l'organigramme versés aux débats par l'employeur, de nature à établir que les salariés auxquels se comparait Mme Y exerçaient des fonctions différentes, et disposaient de prérogatives distinctes des siennes, au seul motif que ces pièces avaient été éditées postérieurement à la date des faits en débat, la cour d'appel a privé son arrêt de base au regard de l'article L.1334-1 du code du travail et du principe " à travail égal, salaire égal ".
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, considérant qu'il y avait eu modification unilatérale du contrat de travail D'AVOIR DIT que la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement nul et par conséquent, D'AVOIR CONDAMNE la société Devoucoux Sellier à payer à Mme Y diverses sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages et intérêts en raison de la nullité de la rupture du contrat de travail, de l'indemnité découlant de la méconnaissance du statut protecteur et à titre de dommages-intérêts du chef de la perte de chance d'utiliser les heures acquises au titre du droit individuel à la formation, et D'AVOIR DÉBOUTE la Devoucoux Sellier de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice au titre du préavis non effectué ;
AUX MOTIFS QUE sur la modification de la durée du travail à compter du 1er juin 2006 il ressort des bulletins de salaire produits aux débats que jusqu'au mois de mai 2006 la salariée était rémunérée sur la base de 151,67 heures pour un salaire brut mensuel de 2.600 euros et qu'à compter du mois de juin 2006 son horaire mensuel a été porté à 169 heures avec maintien d'un salaire brut de 2600 euros, sans que soit justifiée l'existence d'un accord de la salariée, ni même que cet accord a été sollicité. De plus, ce changement de l'horaire mensuel de base avec maintien de la même rémunération mensuelle brute implique nécessairement que le taux horaire de rémunération a été baissé, sans que soit justifiée l'existence d'un accord de la salariée, ni même que cet accord a été sollicité. Dans son courrier du 4 août 2006, l'employeur a fait état d'une erreur du bulletin du mois de mars et a indiqué qu'un contrat de cadre impliquait un travail mensuel de 169 heures,
qu'il n'y avait donc plus de RTT acquis, sans le justifier dans la présente instance, alors qu'il résulte de l'accord du 9 septembre 2005 (étendu par arrêté du 23 mars 2006) que le salaire minimum brut mensuel de base d'un cadre au niveau V était, à cette date, de 2.516 euros, le texte de l'accord précisant qu'il s'agissait d'un montant fixé pour la durée légale mensuelle de travail en vigueur à ce jour, de sorte qu'en maintenant la même rémunération mensuelle brute tout en augmentant la durée mensuelle de travail l'employeur a procédé à une diminution du taux horaire, sans justification. De telles modifications unilatérales constituent des modifications du contrat de travail qui justifient, à elles seules, la prise d'acte de la rupture du contrat par la salariée aux torts de l'employeur ;
1 ) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'il ressort des bulletins de salaire versés aux débats que jusqu'au 1er mars 2006, Melle Y percevait un salaire brut mensuel de 1539,73 euros pour 151,67 heures et qu'à compter du mois de mars 2006, un salaire brut mensuel de 2.600 euros lui a été versé pour un horaire de 169 heures, le maintien de la mention d'un horaire de 151, 67 heures sur les bulletins de mars, avril et mai 2006 ayant résulté d'une erreur rectifiée au mois de juin 2006 (bulletins de salaire de janvier à juin 2006 production); qu'en disant qu'il ressortait des bulletins de salaire produits aux débats que jusqu'au mois de mai 2006 la salariée était rémunérée sur la base de 151,67 heures pour un salaire brut mensuel de 2.600 euros et qu'à compter du mois de juin 2006 son horaire mensuel avait été porté à 169 heures avec maintien d'un salaire brut de 2600 euros, la cour d'appel a dénaturé ces documents en violation de l'article 1134 du Code civil;
2 ) ALORS QU'en déduisant des bulletins de salaire ainsi dénaturés qu'il y avait eu une modification unilatérale de l'horaire de travail et une diminution du taux horaire de la salariée, la cour d'appel n'a pas légalement justifié son arrêt au regard des articles 1134 du code civil et L.1221-1 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR DIT que la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement nul et par conséquent, D'AVOIR CONDAMNE la société Devoucoux Sellier à payer à Mme Y divers sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages et intérêts en raison de la nullité de la rupture du contrat de travail, de l'indemnité découlant de la méconnaissance du statut protecteur et à titre de dommages-intérêts du chef de la perte de chance d'utiliser les heures acquises au titre du droit individuel à la formation, et D'AVOIR DÉBOUTE la Devoucoux Sellier de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice au titre du préavis non effectué ;
AUX MOTIFS QUE Madame Y Y a été élue titulaire de la délégation unique du personnel le 30 mars 2010. Le 31 mars 2010, elle a été désignée secrétaire du comité d'entreprise. La société Devoucoux Sellier prétend que les réclamations de la salariée sont excessives, sans fondement et n'ont que pour seul but de lui nuire afin de permettre le développement commercial de la société concurrente VOLTAIRE DESIGN créée par un ancien salarié de la société au sein de laquelle elle a été engagée, et que ses manoeuvres ont également consisté à ce qu'elle s'aménage une protection particulière liée ses fonctions de représentante du personnel. La salariée conteste ces allégations et fait valoir que ses premières réclamations datent de l'année 2006, qu'elle n'a été embauchée par la société VOLTAIRE DESIGN qu'au mois de septembre 2010 et que les élections professionnelles n'ont fait l'objet d'aucune contestation de la société. Il ressort des pièces versées aux débats que - les réclamations de la salariée ont été formulées au moins depuis le 14 mai 2006, s'agissant du courrier par lequel elle a refusé de signer le contrat qui lui a été proposé à la signature par l'employeur en mars 2006, la classant niveau IV, échelon 3, au motif qu'elle considérait relever du niveau V, échelon1, ce dont l'employeur est finalement convenu puisqu'il a retenu cette classification dans une nouvelle proposition de contrat de travail présentée en août 2006 avec effet rétroactif au 1er mars 2006, ainsi qu'il a été dit précédemment. Dans ce courrier, la salariée formulait d'autres griefs; - Dans un courrier du 20 octobre 2006, Madame Y contestait le maintien de sa rémunération mensuelle forfaitaire brute de 2.600 euros pour 169 heures, alors que la convention collective attribuait à ce niveau un salaire minimum brut de 2.516 euros pour 150 heures 67 ; - Madame Y a été élue titulaire de la délégation unique du personnel le 30 mars 2010; - Par courrier du 28 avril 2010, la salariée sollicitait la modification de sa qualification et un rappel de salaire, se plaignant dans le même temps d'être victime de discrimination au sein de l'entreprise; - La prise d'acte est en date du 21 juin 2010 ; - la création de la société GROUPE VOLTAIRE a été immatriculée le 11 mai 2010. Il résulte de ces éléments que le contentieux entre les parties a été noué quatre ans avant la création de la société GROUPE VOLTAIRE, et que la salariée a été élue déléguée du personnel avant la création de cette société, dans le cadre d'une élection qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, de sorte que l'allégation de la société Devoucoux Sellier de la mise en oeuvre par la salariée de manoeuvres pour nuire à la société en s'aménageant une protection particulière et pour permettre le développement commercial d'une société concurrente n'est aucunement étayée, ni a fortiori démontrée. Il résulte de l'ensemble de ces éléments, que plusieurs des griefs formulés par la salariée à l'encontre de l'employeur sont établis et justifient que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail soit prononcée aux torts de l'employeur et produise les effets d'un licenciement nul, compte tenu de son statut protecteur ;
1 ) ALORS QUE par application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation qui interviendra sur les trois premiers moyens de cassation, et qui remettra en débat l'existence de manquements de l'employeur du chef de la classification conventionnelle, d'une discrimination salariale et d'une modification unilatérale du contrat de travail, entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif attaqué;
2 ) ALORS QUE seul un manquement suffisamment grave de l'employeur, empêchant la poursuite du contrat de travail, permet au salarié de prendre acte de la rupture de son contrat de travail; que tel n'est pas le cas de manquements anciens - leur ancienneté démontrant qu'ils n'empêchent pas la poursuite du contrat de travail, a fortiori lorsqu'ils ont cessé au moment de la prise d'acte; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que sur les trois griefs retenus, ceux tirés de l'application d'une classification conventionnelle erronée, et de la fixation d'un salaire de 2.600 euros pour un horaire de 169 heures dans le courant de l'année 2006 - analysée comme une modification du contrat de travail, avaient fait l'objet de réclamations quatre ans avant la prise d'acte et qu'à cette dernière date, le litige sur la classification conventionnelle avait disparu puisque Mme Y depuis le 1 janvier 2010, était positionnée au niveau réclamé - niveau V, échelon 1; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations, dont il ressortait que la plupart des griefs formulés par la salariée étaient anciens et pour l'un d'eux, n'avait plus cours à la date de la prise d'acte, de sorte qu'ils n'empêchaient pas la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L.1231-1, L.1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
3 ) ALORS en toute hypothèse QUE si la cour d'appel a énoncé que certains des griefs formulés par la salariée étaient établis, elle n'a pas dit qu'ils caractérisaient des manquements d'une gravité telle qu'ils empêchaient la poursuite du contrat de travail; que son arrêt s'en trouve privé de base légale au regard des articles L.1231-1 et L.1221-1 du code du travail, et 1134 du code civil.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR CONDAMNE la société Devoucoux Sellier à payer à Mme Y une indemnité de 171.884,91 euros au titre de la méconnaissance du statut protecteur;
AUX MOTIFS QUE sur les conséquences financières découlant de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement nul les faits allégués par la salariée étant justifiés, la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement nul prononcé en violation de son statut protecteur, ce dont il résulte que l'indemnité due à ce titre est une indemnité forfaitaire égale au salaire qu'elle aurait perçu jusqu'à la fin de la période de protection en cours, outre les indemnités liées à la rupture de son contrat et une indemnité dont le montant est au moins égal à six mois de salaire.
La SAS Decouvoux Sellier sera donc condamnée à lui payer
- 10.680,08 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 1.068, 11 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
- 6.467,99 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 25.000 euros à titre de dommages-intérêts pour nullité de la rupture du
contrat de travail,
- 171.884,91 euros au titre de l'indemnité découlant de méconnaissance du statut protecteur,
-. 1.098 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil du fait de la perte de chance d'utiliser les heures acquises au titre du droit individuel à la formation;
1 ) ALORS QUE le salarié protégé qui déclare prendre acte de la rupture de son contrat de travail - pour des faits au demeurant étrangers à l'exercice de son mandat - et qui prétend faire qualifier cette prise d'acte de licenciement aux torts de l'employeur n'a droit dans cette hypothèse qu'à l'indemnisation due en cas de licenciement aux salariés non protégés ; que la Cour d'appel a violé les articles L.2411-5 et L.2421-3 du code du travail ;
2 ) ALORS en toute hypothèse QUE l'indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur allouée au représentant du personnel dont la prise d'acte de rupture du contrat de travail est considérée comme justifiée, est limitée à la rémunération qu'il aurait dû percevoir depuis la date de la rupture jusqu'à l'expiration de la période légale de protection, soit 6 mois s'il est délégué du personnel ou 12 mois s'il est délégué syndical ; qu'en condamnant la société Devoucoux Sellier à payer à Mme Y une indemnité forfaitaire égale à un peu plus de 51 mois de salaire, soit une somme de 171.884,91 euros, représentant la rémunération qu'elle aurait perçue jusqu'au terme du mandat dont elle venait d'être investie à la date de la rupture, majorée de la rémunération qu'elle aurait perçue pendant la période de protection postérieure à la rupture du contrat, la Cour d'appel a violé les articles L.2411-1, L.2411-3, L.2411-5, L.2421-1 et L.2421-3 du Code du travail.
SIXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR CONDAMNE la société Devoucoux Sellier à payer à Mme Y divers sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages et intérêts en raison de la nullité de la rupture du contrat de travail, et de l'indemnité découlant de la méconnaissance du statut protecteur;
ALORS QUE le juge doit répondre aux moyens de nature à déterminer la solution du litige; que dans ses conclusions soutenues à l'audience (arrêt p.6 §3), la société Decouvoux Sellier a contesté le montant du salaire mensuel sur lequel la salariée fondait ses demandes salariales et indemnitaires, lequel de 3.560,36 euros, ne correspondait pas au salaire perçu en fin de contrat, de 3.215,52 euros (conclusions p. 21, in fine); que la salariée incluait en effet dans le salaire servant de base à la détermination du montant de ses demandes, la prime d'ancienneté que l'employeur ne versait pas, et n'avait
pas à verser selon les propres motifs de l'arrêt (cf conclusions de la salariée p. 27 al.6 et p.28; arrêt p. 9); qu'en ne répondant pas au chef de conclusions contestant le montant du salaire retenu pour établir le quantum des demandes salariales et indemnitaires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

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