CIV. 2 C.M.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 14 octobre 2004
Rejet
M. DINTILHAC, président
Arrêt n° 1618 FS P+B
Pourvoi n° B 02-18.708
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par la société civile agricole Aquigem, dont le siège est Parentis-en-Born, en liquidation amiable, représentée par son liquidateur amiable M. Jean-Marc Z,
en cassation d'un arrêt rendu le 16 juillet 2002 par la cour d'appel de Pau (1ère chambre civile), concernant M. François Y, président de la Chambre sociale de la cour d'appel de Pau, domicilié Pau,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 16 septembre 2004, où étaient présents M. Dintilhac, président, Mme Karsenty, conseiller référendaire rapporteur, M. ..., Mme ..., M. ..., Moussa, Boval, Lacabarats, conseillers, Mme Guilguet-Pauthe, MM. Trassoudaine, Vigneau, Sommer, Mme Leroy-Gissinger, conseillers référendaires, Mlle Laumône, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Karsenty, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la société civile agricole Aquigem, les conclusions de M. Domingo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 16 juillet 2002), qu'un litige étant pendant devant la Chambre sociale de ladite cour d'appel, la société Aquigem, partie à la procédure, a formé une demande de récusation visant son président ;
Attendu que la société Aquigem fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa requête, alors, selon le moyen, que la règle d'ordre public de la publicité des débats est applicable en matière de récusation d'un juge même si l'affaire a été examinée sans que la partie ait été appelée ; que, dans ce cas, cette partie ne peut se voir opposer les dispositions de l'article 446 du nouveau Code de procédure civile selon lesquelles l'irrégularité tenant au défaut de publicité des débats doit être invoquée avant la clôture de ceux-ci ; qu'en statuant sur la demande en récusation de M. Y en chambre du Conseil, la cour d'appel a violé les articles 22, 351, alinéa 1er, 433 et 341 du nouveau Code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, d'une part, que la procédure de récusation, qui ne porte pas sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale et ne concerne pas une contestation sur un droit ou une obligation de caractère civil, n'entre pas dans le champ d'application de l'article 6 de la Convention européenne de sauvergarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Que le demandeur ne saurait dès lors critiquer, sur le fondement de ce texte, l'absence de publicité des débats ;
Et attendu, d'autre part, que l'article 351 du nouveau Code de procédure civile prévoit que l'affaire est examinée sans qu'il soit nécessaire d'appeler les parties ;
Que les dispositions des articles 22 et 433 dudit Code ne sont dès lors pas applicables ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et sur le second moyen
Attendu que la société Aquigem fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa requête, alors, selon le moyen, que la récusation d'un juge peut être demandée s'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ; que la cour d'appel qui a décidé que le fait "que M. Y, président de la Chambre sociale de la cour d'appel de Pau a déjà connu de l'affaire en tant que juge lorsqu'il présidait la Chambre qui a rendu l'arrêt du 4 mai 2000" ne constitue pas une cause de récusation, a méconnu le principe d'impartialité en violation des articles 341 du nouveau Code de procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que la cour d'appel retient exactement que la circonstance que la même chambre soit appelée à statuer sur des contentieux répétitifs entre les mêmes parties, ne saurait faire peser sur cette juridiction un doute légitime relatif à son impartialité ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z, ès qualités, aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille quatre.