Jurisprudence : CAA Paris, 03-04-2014, n° 13PA02769

CAA Paris, 03-04-2014, n° 13PA02769

A4064MID

Référence

CAA Paris, 03-04-2014, n° 13PA02769. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/15567635-caa-paris-03042014-n-13pa02769
Copier

Abstract

La cour administrative d'appel de Paris valide le recours au contrat de partenariat public-privé pour la réalisation du futur palais de justice de Paris sur le site des Batignolles dans un arrêt rendu le 3 avril 2014 (CAA Paris, Plèn., 3 avril 2014, n° 13PA02769).


COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL
DE PARIS
N°S 13PA02769, 13PA02766 et 13PA02770
ASSOCIATION « LA JUSTICE DANS LA
CITÉ» et M. BOURA YNE
M.Frydman
Président
MmeVrignon
Rapporteur
M. Rousset
Rapporteur public
Audience du 14 mars 2014
Lecture du 3 avril 2014
39-01-03-05
54-01-04-02-02
R
A-L.C
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
La Cour administrative d'appel de Paris
(Formation plénière)
Vu l, sous le n° 13PA02769, la requête, enregistrée le 16 juillet 2013, présentée pour
l'association « La Justice dans la Cité », dont le siège est 217, rue du Faubourg Saint-Honoré à
Paris (75008), représentée par son président, et pour M. Cyril Bourayne, demeurant 217, rue du
Faubourg Saint-Honoré à Paris (75008), par Me Benest y ; l'association « La Justice dans la
Cité» et M. Cyril Bourayne demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1206417/3-7 du 17 mai 2013 par lequel le Tribunal
administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à l'annulation des délibérations
nOs 2012-01 et 2012-02 du 3 février 2012 par lesquelles le conseil d'administration de
l'Établissement public du palais de justice de Paris (EPP JP) a, par la première, décidé
l'attribution au groupement dont la société Bouygues Bâtiment Ile-de-France était mandataire du
contrat de partenariat ayant pour objet la conception, la construction, le financement, l'entretien
et la maintenance du futur palais de justice de Paris dans la zone d'aménagement concerté de
Clichy-Batignolles et, par la seconde, approuvé le contenu de ce contrat et autorisé le directeur
général de cet établissement à le signer au nom et pour le compte de l'État, ainsi que de la
décision du 15 février 2012 du directeur général de l'EPPJP de procéder à la signature dudit
contrat avec la société Arelia, société de projet issue du groupement précité, et, d'autre part, à ce
qu'il soit enjoint à l'EPPJP soit d'obtenir de son partenaire la résolution du contrat, soit de saisir
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 2
le juge du contrat pour qu'il en constate la nullité, dans un délai de deux mois à compter de la
notification du jugement;
2°) d'aunuler, pour excès de pouvoir, ces délibérations et cette décision;
3°) d'enjoindre à l'EPPJP et à la société Arelia de résoudre leurs relations contractuelles
ou, à défaut d'entente sur cette résolution dans un délai de deux mois, de saisir le juge du contrat
afin que celui-ci règle les modalités d'une telle résolution s'il estime que celle-ci peut être une
solution appropriée;
4°) de mettre à la charge de l'EPPJP la somme de 3 000 euros, à verser à chacun des
requérants, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les
entiers dépens de l'instance;
Ils soutiennent que;
- en faisant droit aux fins de non-recevoir opposées par les défendeurs, le tribunal
administratif a commis une erreur de droit quant à l'appréciation de leur intérêt à agir et une
erreur d'appréciation quant à l'objet et à la portée des actes attaqués;
- les délibérations et la décision attaquées portent atteinte aux intérêts défendus par
l'association « La Justice dans la Cité », tels qu'ils ressortent de son objet social, dès lors
qu'elles emportent juridiquement et matériellement le transfert du Tribunal de grande instance de
Paris de l'Ile de la Cité vers la zone d'aménagement concerté (ZAC) de Clichy-Batignolles et
qu'elles préjudicient au bon fonctionnement et à l'efficacité du tribunal de grande instance;
- ces mêmes délibérations et décision modifient les conditions d'exercice de l'activité
professionnelle de M. Cyril Bourayne, avocat au barreau de Paris, en raison de l'éclatement de
ses lieux d'intervention, et entraîneront, par ailleurs, de nouvelles obligations et des surcoûts
pour l'Ordre des avocats de Paris, qui induiront une augmentation des cotisations ordinales
payées par M. Bourayne ;
- la décision du directeur de l'EPPJP de signer le contrat de partenariat a été prise alors
qu'aucune autorité compétente n'avait décidé le transfert du tribunal de grande instance, des
tribunaux d'instance et du tribunal de police de Paris sur le site des Batignolles;
- la délibération du conseil d'administration autorisant le directeur de l'EPPJP à signer
le contrat avec la société Arelia n'était pas devenue exécutoire à la date de cette signature dès
lors que le délai de 15 jours qui, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 9
du décret n° 2004-161 du 18 février 2004 portant création de l'Établissement public du palais de
justice de Paris, est laissé aux ministres de tutelle pour s'opposer à une telle délibération, n'était
pas écoulé;
- en toute hypothèse, d'une part, le secrétaire général du ministère de la justice, qui a
expressément approuvé cette délibération le jour même de son adoption, n'était pas compétent
pour ce faire, et, d'autre part, une telle approbation ne pouvait pas intervenir le jour même de
l'adoption des délibérations litigieuses;
- l'EPPJP a excédé ses compétences en incluant dans le partenariat la réalisation de
locaux pour le besoin des tribunaux d'instance et du tribunal de police sans avoir obtenu l'accord
du garde des sceaux, ministre de la justice, prévu par l'article 2 du décret nO 2004-161 du
18 février 2004 portant création de l'EPPJP, qui ne saurait être tacite au regard de l'importance
des conséquences qui en résultent sur l'organisation et le fonctionnement du service public de la
justice;
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 3
- en tout état de cause, le transfert des tribunaux d'instance n'a pu résulter d'une
décision régulière du garde des sceaux, ministre de la justice, une telle décision étant contraire
aux dispositions de l'article D. 311-1 du code de l'organisation judiciaire ;
- les délibérations et la décision attaquées ont été prises à l'issue d'une procédure
irrégulière dès lors, d'une part, que, contrairement à ce qu'exigent l'article 8 du décret du
18 février 2004 et la convention conclue le 15 février 2010 entre l'État et l'EPPJP en application
du 5° de l'article 3 de ce décret, le conseil d'administration n'a pas délibéré à nouveau sur le
choix de recourir à un contrat de partenariat après que la mission d'appui aux partenariats publicprivé
(MAPPP) eut rendu son avis sur l'évaluation préalable prévue par l'article 2 de
l'ordonnance du 17 juin 2004, et que, d'autre part, l'EPPJP n'a pas régulièrement recueilli l'avis
du garde des sceaux, ministre de la justice, sur le périmètre de la procédure à lancer avant la
publication de l'avis d'appel à la concurrence et sur le programme du bâtiment à construire avant
consultation des candidats sélectionnés, en méconnaissance de l'article 4 de la convention
précitée;
- le recours au contrat de partenariat n'était pas justifié, dès lors qu'aucune des
conditions prévues aux 1 ° (complexité du projet), 2° (caractère d'urgence du projet) et 3° (bilan
entre les avantages et les inconvénients de la procédure plus favorable que ceux d'autres contrats
de la commande publique) du II de l'article 2 de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur
les contrats de partenariat n'était remplie en l'espèce ;
- les règles gouvernant l'attribution du contrat de partenariat ont été méconnues,
l'EPPJP ne pouvant pas, en l'absence de complexité du projet, recourir à la procédure du
dialogue compétitif;
- les principes fondamentaux de la commande publique, et en particulier le principe de
transparence, n'ont pas été respectés, l'EPPJP n'ayant pas porté à la connaissance des candidats
l'ensemble des informations leur permettant d'élaborer une offre répondant au mieux aux
attentes de la personne publique;
- l'occultation de certaines mentions dans les documents dont les requérants ont
demandé la communication démontre l'absence de transparence de la procédure de passation du
contrat;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2013, présenté pour l'EPPJP,
représenté par son directeur général, par Me de Fenoyl et Me Treca; l'EPPJP conclut, à titre
principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, au rejet des seules conclusions à fin
d'injonction, et, en toute hypothèse, à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de
l'association « La Justice dans la Cité» et de M. Bourayne sur le fondement de l'article L. 761-1
du code de justice administrative;
Il soutient que:
- ni l'association « La Justice dans la Cité », ni M. Bourayne, en sa qualité d'avocat au
barreau de Paris, n'ont intérêt à agir contre les délibérations et la décision attaquées;
- le président de l'association « La Justice dans la Cité» n'avait pas qualité pour agir
devant le tribunal administratif, en raison de l'irrégularité de la délibération du conseil
d'administration de l'association du 28 mars 2012 ;
- l'avocat de l'association, qui est membre de son conseil d'administration, ne pouvait
valablement représenter celle-ci devant le tribunal administratif;
- les moyens soulevés par les requérants, s'agissant tant de la légalité externe que de la
légalité interne des délibérations et de la décision attaquées, ne sont pas fondés;
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 4
- la résiliation du contrat de partenariat porterait une atteinte excessive à l'intérêt
général au regard tant du calendrier d'exécution du projet que de l'importance des études
engagées;
Vu le mémoire, enregistré le 12 octobre 2013, présenté pour la société Arelia, dont le
siège est 1, avenue Eugène Freyssinet à Guyancourt (78280), représentée par son président, par
Me Paillard; la société Arelia conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire,
au rejet des seules conclusions à fin d'i~onction, et, en toute hypothèse, à ce que la somme de
5 000 euros soit mise à la charge de l'association « La Justice dans la Cité» et de M. Bourayne
sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
Elle soutient que:
- ni l'association « La Justice dans la Cité », ni M. Bourayne, en sa qualité d'avocat au
barreau de Paris, n'ont intérêt à agir contre les délibérations et la décision attaquées;
- les moyens soulevés par les requérants, s'agissant tant de la légalité externe que de la
légalité interne des délibérations et de la décision attaquées, ne sont pas fondés;
- compte tenu de l'urgence qui s'attache à la mise aux normes de sécurité et
d'accessibilité du palais de justice, d'une part, et aux coûts engagés pour la réalisation du projet
par l'État depuis 2009 et par la société Arelia depuis 2010, d'autre part, l'annulation, la
résolution ou la résiliation du contrat de partenariat seraient contraires à l'intérêt général ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 6 janvier 2014, présenté, par Me Benest y, pour
l'association « La Justice dans la Cité» et pour M. Bourayne, qui concluent aux mêmes fins que
la requête par les mêmes moyens;
Ils soutiennent en outre que:
- l'intérêt à agir de M. Bourayne résulte aussi de la suppression des tribunaux d'instance
et de la création d'un seul tribunal de ce type sur le ressort des vingt arrondissements de Paris,
qui méconnaissent les dispositions en vigueur concernant le siège des tribunaux d'instance;
- les délibérations et la décision attaquées, qui sont insusceptibles de se rattacher à un
pouvoir de l'EPPJP et portent une atteinte grave aux attributions de l'État en le privant de sa
compétence et en mettant à sa charge des obligations financières, sont nulles et non avenues et
doivent, dès lors, être déclarées juridiquement inexistantes;
- en tant qu'elles emportent des conséquences significatives sur l'organisation et le
fonctionnement des services de la justice et sur la gestion prévisionnelle des effectifs s'y
rapportant, les délibérations et la décision attaquées auraient dû être précédées de la consultation
du comité technique paritaire du ministère de la justice;
Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2014, présenté, par Me de
Fenoyl et Me Treca, pour l'EPPJP, qui conclut aux mêmes fins que dans son précédent mémoire
par les mêmes moyens; il soutient en outre que, même si la Cour devait écarter la complexité
techuique du projet, il ne saurait en résulter que la complexité fondant le recours au dialogue
compétitif devrait être écartée, dès lors que le montage juridique et financier du contrat est
intrinsèquement complexe au sens de la directive 2004/48/CE du 18 mars 2004 ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 11 février 2014, présenté, par Me Benest y, pour
l'association « La Justice dans la Cité» et pour M. Bourayne, qui concluent aux mêmes fins que
WS 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 5
la requête par les mêmes moyens; ils soutiennent en outre que les délibérations attaquées sont
entachées d'illégalité en ce qu'elles ont été rendues exécutoires sans exercice réel du pouvoir de
tutelle, dès lors que c'est l'ancien président du conseil d'administration de l'EPPJP ayant
participé au processus d'élaboration de ces actes qui a approuvé ceux-ci, en sa nouvelle qualité
de secrétaire général du ministère de la justice, ce qui le plaçait ainsi en situation de conflit
d'intérêts ;
Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le II février 2014, présenté, par Me de
Fenoyl et Me Treca, pour l'EPPJP, qui conclut aux mêmes fins que dans ses précédents
mémoires par les mêmes moyens; il soutient en outre que les consultations du comité technique
paritaire éventuellement requises seront sollicitées en temps utile;
Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 14 février 2014, présenté, par Me de
Fenoyl et Me Treca, pour l'EPPJP, qui conclut aux mêmes fins que dans ses précédents
mémoires par les mêmes moyens; il soutient en outre que la décision d'implanter le nouveau
palais de justice sur le site des Batignolles a été prise préalablement aux délibérations et à la
décision attaquées et annoncée par le Président de la République et le garde des sceaux, ministre
de la justice; que le secrétaire général du ministère de la justice est réglementairement membre
du conseil d'administration de l'EPPJP et que l'allégation d'nn hypothétique conflit d'intérêts
doit être écartée;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 17 février 2014, présenté, par Me Benest y, pour
l'association<< La Justice dans la Cité» et pour M, Bourayne, qui concluent aux mêmes fins que
la requête par les mêmes moyens;
Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 20 février 2014, présenté, par Me de
Fenoyl et Me Treca, pour l'EPPJP, qui conclut aux mêmes fins que dans ses précédents
mémoires par les mêmes moyens;
Vu II, sous le nO 13PA0276617, la requête, enregistrée le 16 juillet 2013, présentée pour
l'association « La Justice dans la Cité », dont le siège est 217, rue du Faubourg Saint-Honoré à
Paris (75008), représentée par son président, et pour M, Cyril Bourayne, demeurant 217, rue du
Faubourg Saint-Honoré à Paris (75008), par Me Benest y ; l'association «La Justice dans la
Cité» et M. Cyril Bourayne demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nO 1208605/3-3-7 du 17 mai 2013 par lequel le Tribunal
administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 15 février
2012 par laquelle le secrétaire général du ministère de la justice a accepté, au nom de l'État, la
cession de créance irrévocable consentie le même jour par la société Arelia au profit de divers
établissements de crédit, en application de l'article 8.6 du contrat de partenariat relatif au palais
de justice de Paris conclu par cette société avec l'Établissement public du palais de justice de
Paris (EPP JP) ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision;
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 6
3°) de mettre à la charge de l'État et de l'EPPJP, pris solidairement, le versement de la
somme de 3000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
Ils soutiennent que:
- la décision attaquée porte atteinte aux intérêts défendus par l'association « La Justice
dans la Cité », tels qu'ils ressortent de son objet social, dès lors qu'elle permet la réalisation
effective du nouveau palais de justice de Paris et, partant, le transfert du Tribunal de grande
instance de Paris de l'Ile de la Cité vers la zone d'aménagement concerté (ZAC) de ClichyBatignolles;
- cette même décision modifie les conditions d'exercice de l'activité professionnelle de
M. Cyril Bourayne, avocat au barreau de Paris, en raison de l'éclatement de ses lieux
d'intervention, et entraînera, par ailleurs, de nouvelles obligations et des surcoûts pour l'Ordre
des avocats de Paris, qui induiront une augmentation des cotisations ordinales payées par
M. Bourayne ;
- la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente et est dépourvue de visa
du contrôleur financier, en méconnaissance des dispositions de l'article 5 de l'arrêté du
29 décembre 2005 relatif au contrôle financier des programmes et services du ministère de la
justice;
- la décision attaquée méconnaît les dispositions des articles L. 313-29-1, premier
alinéa, et L. 313-26-2 du code monétaire et financier, s'agissant tant de l'assiette des créances
dont la cession est acceptée que de l'engagement global de l'Etat;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2013, présenté par la garde des
sceaux, ministre de la justice, qui conclut au rejet de la requête;
Elle soutient que:
- ni l'association « La Justice dans la Cité », ni M. Bourayne, en sa qualité d'avocat au
barreau de Paris, n'ont intérêt à agir contre la décision attaquée;
- le président de l'association « La Justice dans la Cité» n'avait pas qualité pour agir
devant le tribunal administratif, en raison de l'irrégularité de la délibération du conseil
d'administration de l'association du 28 mars 2012, qui, en tout état de cause, ne l'autorisait pas à
ester en justice contre la décision attaquée;
- l'avocat de l'association, qui est membre de son conseil d'administration, ne pouvait
valablement représenter celle-ci devant le tribunal administratif;
- les moyens soulevés par les requérants, s'agissant tant de la légalité externe que de la
légalité interne de la décision attaquée, ne sont pas fondés;
Vu le mémoire, enregistré le 12 octobre 2013, présenté pour la société Arelia, dont le
siège est 1, avenue Eugène Freyssinet à Guyancourt (78280), représentée par son président, par
Me Paillard; la société Arelia conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme
de 5 000 euros soit mis à la charge de l'association « La Justice dans la Cité» et de M. Bourayne
sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
Elle soutient que:
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 7
- ni l'association « La Justice dans la Cité », ni M. Bourayne, en sa qualité d'avocat au
barreau de Paris, n'ont intérêt à agir contre la décision attaquée;
- les moyens soulevés par les requérants, s'agissant tant de la légalité externe que de la
légalité interne de la décision attaquée, ne sont pas fondés;
Vu III, sous le n° 13PA02770, la requête, enregistrée le 16 juillet 2013, présentée pour
l'association « La Justice dans la Cité », dont le siège est 217, rue du Faubourg Saint-Honoré à
Paris (75008), représentée par son président, et pour M. Cyril Bourayne, demeurant 217, rue du
Faubourg Saint-Honoré à Paris (75008), par Me Benest y ; l'association « La Justice dans la
Cité » et M. Cyril Bourayne demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nO 1209054/3-7 du 17 mai 2013 par lequel le Tribunal
administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du
secrétaire général du ministère de la justice du 15 février 2012 de signer l'accord autonome
conclu entre l'État, la société Arelia et un groupement d'établissements de crédit afin de définir
les modalités d'indemnisation de la société Arelia en cas d'annulation du contrat de partenariat
conclu avec l'Établissement public du palais de justice de Paris (EPPJP) ou de l'un de ses actes
détachables, ou de résolution, de déclaration de nullité ou de résiliation de ce contrat et, d'autre
part, à ce qu'il soit enjoint à l'EPPJP soit d'obtenir de son partenaire la résolution du contrat de
partenariat, soit de saisir le juge du contrat pour qu'il en constate la nullité, dans un délai de deux
mois à compter de la notification du jugement;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision;
3°) d'enjoindre aux cocontractants de résoudre leurs relations contractuelles ou, à
défaut d'entente sur cette résolution dans un délai de deux mois, de saisir le juge du contrat afin
que celui-ci règle les modalités d'une telle résolution s'il estime que celle-ci peut être une
solution appropriée;
4°) de mettre à la charge de l'État et de l'EPPJP, pris solidairement, le versement de la
somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 1. 761-1 du code de justice administrative;
Ils soutiennent que:
- la décision attaquée porte atteinte aux intérêts défendus par l'association « La Justice
dans la Cité », tels qu'ils ressortent de son objet social, dès lors qu'elle permet la réalisation
effective du nouveau palais de justice de Paris et, partant, le transfert du Tribunal de grande
instance de Paris de l'Ile de la Cité vers la zone d'aménagement concerté (ZAC) de ClichyBatignolles;
- cette même décision modifie les conditions d'exercice de l'activité professionnelle de
M. Cyril Bourayne, avocat au barreau de Paris, en raison de l'éclatement de ses lieux
d'intervention, et entraînera, par ailleurs, de nouvelles obligations et des surcoûts pour l'Ordre
des avocats de Paris, qui induiront une augmentation des cotisations ordinales payées par
M. Bourayne ;
- la décision attaquée a été prise par une autorité incompétente;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004
modifiée sur les contrats de partenariat et le principe du bon usage des deniers publics, en ce
qu'elle fait produire les mêmes effets juridiques à des situations juridiques pourtant distinctes,
qu'elle prévoit le versement d'une indemnité disproportionnée en cas d'annulation du contrat de
partenariat motivée par la faute du partenaire de l'établissement public et qu'elle prévoit le
versement d'une « indemnité minimale» sans lien avec la réalité du préjudice subi par ce
partenaire et par les prêteurs;
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 8
- en s'engageant à verser l'indemnité prévue en cas d'annulation du contrat par le juge
administratif nonobstant l'éventuelle mise en oeuvre des voies de recours ouvertes à l'encontre
d'un jugement prononcé en ce sens, l'Etat se livre à une libéralité en violation du principe selon
lequel le partenaire d'une collectivité publique ne peut pas s'enrichir sans cause;
- les mentions qui figurent sur l'avis d'information publié au Journal officiel de la
République française du 18 mars 2012 sont insuffisantes puisqu'elles se bornent à indiquer
l'objet de l'acte en cause, sans en préciser le contenu, en méconnaissance du principe de
transparence de la procédure de passation du contrat;
- l'accord est entaché d'une irrégularité grave qui implique sa disparition rétroactive,
sachant qu'une telle mesure ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2013, présenté par la garde des
sceaux, ministre de la justice, qui conclut au rejet de la requête;
Elle soutient que:
- ni l'association «La Justice dans la Cité », ni M. Bourayne, en sa qualité d'avocat au
barreau de Paris, n'ont intérêt à agir contre la décision attaquée;
- le président de l'association «La Justice dans la Cité» n'avait pas qualité pour agir
devant le tribunal administratif, en raison de l'irrégularité de la délibération du conseil
d'administration de l'association du 28 mars 2012, qui, en tout état de cause, ne l'autorisait pas à
ester en justice contre la décision attaquée;
- l'avocat de l'association, qui est membre de son conseil d'administration, ne pouvait
valablement représenter celle-ci devant le tribunal administratif;
- les moyens soulevés par les requérants, s'agissant tant de la légalité externe que de la
légalité interne de la décision attaquée, ne sont pas fondés;
Vu le mémoire, enregistré le 12 octobre 2013, présenté pour la société Arelia, dont le
siège est l, avenue Eugène Freyssinet à Guyancourt (78280), représentée par son président, par
Me Paillard; la société Arelia conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme
de 5 000 euros soit mis à la charge de l'association « La Justice dans la Cité» et de M. Bourayne
sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
Elle soutient que:
- ni l'association « La Justice dans la Cité », ni M. Bourayne, en sa qualité d'avocat au
barreau de Paris, n'ont intérêt à agir contre la décision attaquée;
- les moyens soulevés par les requérants, s'agissant tant de la légalité externe que de la
légalité interne de la décision attaquée, ne sont pas fondés;
Vu les autres pièces des dossiers;
Vu la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004
relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de
fournitures et de services;
Vu le code des marchés publics;
Vu le code de l'organisation judiciaire ;
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 9
Vu l'ordonnance nO 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des
relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et
fiscal;
Vu le décret n° 82-452 du 28 mai 1982 relatif aux comités teclmiques paritaires;
Vu le décret nO 2004-161 du 18 février 2004 portant création de l'Établissement public
du palais de justice de Paris, modifié notamment par le décret nO 2010-43 du 12 janvier 2010
relatif à l'Établissement public du palais de justice de Paris;
Vu le décret n° 2004-1119 du 19 octobre 2004 portant création de la mission d'appui à
la réalisation des contrats de partenariat, modifié notamment par le décret n° 2009-244 du 2 mars
2009 ;
Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des
membres du Gouvernement;
Vu le décret nO 2008-689 du 9 juillet 2008 relatif à l'organisation du ministère de la
justice;
Vu l'arrêté du 9 juillet 2008 fixant l'organisation en sous-directions et bureaux du
service de la synthèse, de la stratégie et de la performance du secrétariat général du ministère de
la justice ;
Vu le code de justice administrative;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2014 :
- le rapport de Mme Vrignon, premier conseiller,
- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,
- et les observations de Me Benest y, avocat de l'association « La Justice dans la Cité»
et de M. Bourayne, de Me de Fenoyl, avocat de l'EPPJP, et de Me Paillard, avocat de la société
Arelia, ainsi que de M. Michel, chef du bureau du contentieux administratif au secrétariat général
du ministère de la justice, pour la garde des sceaux, ministre de la justice;
1. Considérant que, par deux délibérations en date du 3 février 2012, le conseil
d'administration de l'Établissement public du palais de justice de Paris (EPPJP) a, d'une part,
décidé l'attribution au groupement dont la société Bouygues Bâtiment Ile-de-France était
mandataire du contrat de partenariat ayant pour objet la conception, la construction, le
financement, l'entretien et la maintenance du futur palais de justice de Paris dans la zone
d'aménagement concerté (ZAC) de Clichy-Batignolles et, d'autre part, approuvé le contenu de
ce contrat et autorisé le directeur général de l'EPPJP à le signer au nom et pour le compte de
l'Etat; que le contrat de partenariat a été signé le 15 février 2012 par le directeur général de
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 10
l'établissement public avec la société Arelia, société de projet issue du groupement précité; que,
le même jour, le secrétaire général du ministère de la justice a, d'une part, accepté, au nom de
l'État, la cession de créance consentie par la société Arelia au profit de divers établissements de
crédit, conformément aux stipulations de l'article 8.6 du contrat de partenariat et, d'autre part,
signé avec la société Arelia et ces établissements de crédit un accord dit « autonome» fixant les
modalités d'indemnisation par l'État de son partenaire en cas d'annulation, de résolution, de
déclaration de nullité ou de résiliation du contrat ou en cas d'annulation de l'un de ses actes
détachables; que, sous le nO l3PA02769, l'association « La Justice dans la Cité» et
M. Bourayne relèvent appel du jugement du 17 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de
Paris a rejeté comme irrecevable, pour défaut d'intérêt à agir, leur demande tendant à
l'annulation des délibérations du conseil d'administration de l'EPPJP du 3 février 2012 et de la
décision du directeur général de l'établissement public du 15 février 2012 de signer le contrat de
partenariat; que, sous les nOs 13PA02766 et 13PA02770, les mêmes requérants relèvent appel
des jugements du Tribunal administratif de Paris du 17 mai 2013 ayant respectivement rejeté
comme irrecevables, pour le même motif, leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du
secrétaire général du ministère de la justice du 15 février 2012 d'accepter la cession de créance
consentie par la société Arelia et de signer l'accord dit « autonome» ;
2. Considérant que les requêtes nOs 13PA02769, 13PA02766 et 13PA02770 de
l'association « La Justice dans la Cité» et de M. Cyril Bourayne sont relatives à une même
opération et ont fait l'objet d'une instruction commune; qu'il y a lieu de les joindre pour y
statuer par un seul arrêt ;
Sur l'appréciation de l'intérêt à agir des requérants portée par les premiers juges:
En ce qui concerne l'intérêt à agir de l'association « La Justice dans la Cité» :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de ses statuts, l'association « La Justice dans
la Cité» a pour objet social de: « 1" Assurer la défense du maintien du tribunal de Grande
Instance de Paris dans l'Ile de la Cité, lieu symbolique de l'Histoire de France. / 2" Assurer une
meilleure organisation du tribunal dans l'intérêt des citoyens de Paris. / 3° Prendre toutes
dispositions juridiques utiles et nécessaires pour contrôler, faire contrôler, annuler ou faire
annuler toutes décisions administratives, budgétaires ou autres concernant le transfert du
Tribunal de Grande Instance en dehors de l'Ile de la Cité. / 4° Promouvoir toutes mesures
propres à augmenter l'efficacité du Tribunal de Grande Instance de Paris pour les citoyens» ;
4. Considérant que la circonstance que l'association requérante se soit reconnue, aux
termes du 3° de l'article 2 précité de ses statuts, la possibilité de contester toute décision
administrative ou budgétaire concernant le transfert du Tribunal de grande instance de Paris en
dehors de l'Ile de la Cité ne saurait lui conférer un intérêt à agir à l'encontre de décisions autres
que celles qui, compte tenu de leur objet ou de leur portée, lèsent, de façon suffisamment directe
et certaine, les intérêts dont elle entend assurer la défense, tels qu'ils sont énoncés aux 1 0, 2° et
4° de ce même article;
5. Considérant que le contrat de partenariat signé par l'EPPJP avec la société Arelia en
vue de la conception, de la construction, du financement, de l'entretien et de la maintenance, sur
le site de la ZAC de Clichy-Batignolles, du nouveau palais de justice destiné à abriter notamment
le Tribunal de grande instance de Paris, engage juridiquement et financièrement les parties à
procéder à la réalisation de cet ouvrage, qui doit être mis à la disposition de l'État dans un délai
de 57 mois à compter de la date d'entrée en vigueur du contrat; qu'il emporte donc à terme le
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 Il
transfert du tribunal de grande instance et son installation au sein du bâtiment dont la
construction est prévue dans le cadre de ce contrat et dont les caractéristiques fonctionnelles et
architecturales auront nécessairement un impact sur l'organisation et le fonctionnement de cette
juridiction; que, dès lors, compte tenu de leur objet et de leur portée, la délibération n° 2012-02
du 3 février 2012 par laquelle le conseil d'administration de l'EPPJP a approuvé le contenu de ce
contrat et autorisé le directeur général de l'établissement public à signer celui-ci, au nom et pour
le compte de l'État, et la décision du 15 février 2012 dudit directeur général de procéder à cette
signature lèsent de façon directe et certaine les intérêts défendus par l'association tels qu'ils sont
définis par ses statuts; que, dès lors, l'association « La Justice dans la Cité» justifie d'un intérêt,
qui, contrairement à ce qui est soutenu en défense, ne se confond pas avec l'intérêt individuel de
ses membres, lui donnant qualité pour agir contre cette délibération et cette décision;
6. Considérant, en revanche, que ni la délibération nO 2012-01 du 3 février 2012 du
conseil d'administration de l'EPPJP désignant le groupement ayant pour mandataire la société
Bouygues Bâtiment Ile-de-France comme attributaire du contrat, ni la décision du 15 février
2012 par laquelle le secrétaire général du ministère de la justice a accepté, au nom de l'État, la
cession de créance irrévocable consentie par la société Arelia au profit de divers établissements
de crédit, ni enfin la décision du même jour dudit secrétaire général de signer un accord
définissant les modalités d'indemnisation de cette société en cas d'annulation, de résiliation, ou
de déclaration ou de constat de nullité par le juge du contrat de partenariat ou en cas d'annulation
de l'un de ses actes détachables, n'ont d'incidence sur les intérêts que l'association s'est donné
pour mission de défendre; que, dès lors, celle-ci ne justifie pas d'un intérêt de nature à lui
donner qualité pour demander l'annulation de cette délibération et de ces décisions;
En ce qui concerne l'intérêt à agir de M Bourayne :
7. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 5 ci-dessus, le contrat de partenariat signé
par l'EPPJP avec la société Arelia en vue notamment de la construction du nouveau palais de
justice emporte à terme le transfert du Tribunal de grande instance de Paris vers le site de la ZAC
de Clichy-Batignolles; que M. Bourayne, avocat au barreau de Paris, fait valoir que
l'éloignement qui en résultera entre le Tribunal de grande instance et la Cour d'appel de Paris,
qui restera, pour sa part, située sur l'Ile de la Cité, aura une incidence sur les conditions dans
lesquelles il sera amené à exercer son ministère devant ces juridictions, s'agissant notamment de
l'accomplissement d'actes de procédure qu'il lui revient d'effectuer ou de l'assistance à des
audiences se tenant simultanément ou à des horaires rapprochés; que les difficultés susceptibles
de se poser à ce titre, qui ne sont pas contestées par l'EPPJP, confèrent à M. Bourayne un intérêt
lui donnant qualité pour demander l'annulation de la délibération du conseil d'administration de
l'EPPJP nO 2012-02 du 3 février 2012 approuvant le contenu du contrat de partenariat litigieux et
autorisant le directeur général de l'établissement public à signer celui-ci et de la décision du
15 février 2012 dudit directeur général de procéder à cette signature; qu'en revanche,
M. Bourayne n'a pas intérêt à agir contre la délibération nO 2012-01 du 3 février 2012 du conseil
d'administration de l'EPPJP désignant l'attributaire du contrat, ni contre les décisions du
15 février 2012 du secrétaire général du ministère de la justice d'accepter, au nom de l'État, la
cession de créance irrévocable consentie par la société Arelia et de signer l'accord dit
« autonome », dès lors que ces différents actes n'ont aucune incidence sur les conditions dans
lesquelles il sera amené à exercer la profession d'avocat;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le Tribunal
administratif de Paris a rejeté comme irrecevables, pour défaut d'intérêt à agir, les conclusions
de l'association « La Justice dans la Cité» et de M. Bourayne tendant à l'annulation de la
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 12
délibération du conseil d'administration de l'EPPJP n° 2012-01 du 3 février 2012 ainsi que leurs
demandes dirigées contre les décisions du secrétaire général du ministère de la justice du
15 février 2012 d'accepter, au nom de l'État, la cession de créance irrévocable consentie par la
société Arelia et de signer l'accord dit «autonome» ; qu'en revanche, c'est à tort que les
premiers juges ont rejeté, pour le même motif, les conclusions de l'association « La Justice dans
la Cité» et de M. Bourayne tendant à l'annulation de la délibération du conseil d'administration
de l'EPPJP nO 2012-02 du 3 février 2012 et de la décision du directeur général de l'établissement
public du 15 février 2012 de signer le contrat de partenariat en litige; que, par suite, il y a lieu
d'annuler, dans cette mesure, le jugement n° 1206417/3-7 et de statuer immédiatement, par la
voie de l'évocation, sur lesdites conclusions;
Sur les conclusions dirigées contre la délibération du conseil d'administration de
l'EPPJP nO 2012-02 du 3 février 2012 et contre la décision du directeur général de cet
établissement public du 15 février 2012 de signer le contrat de partenariat:
En ce qui concerne la légalité externe:
9. Considérant, en premier lieu, que l'article 5 du règlement intérieur du conseil
d'administration de l'EPPJP dispose, en son alinéa 5, que «les propositions de délibération
deviennent exécutoires dans les conditions prévues à l'article 9 du décret modifié du 18 février
2004 (. . .) »; qu'aux termes de l'article 9 du décret du 18 février 2004 susvisé, auquel il est ainsi
fait référence, dans sa rédaction issue du décret du 12 janvier 2010: «Les délibérations
mentionnées aux JO, 2°, 7° et ]00 de l'article 8 deviennent exécutoires de plein droit si le garde
des sceaux, ministre de la justice, ou le ministre chargé du budget n y font pas opposition dans
les quinze jours qui suivent la réception du procès-verbal de séance» ; que, selon l'article 8 de
ce même décret : « Le conseil d'administration règle par ses délibérations les affaires de
l'établissement. Il délibère notamment sur: 1 (. . .) r Dans les conditions qu'il détermine, les
contrats de partenariat (. . .) » ; qu'il résulte de ces dispositions que les délibérations du conseil
d'administration de l 'EPP JP sont tacitement approuvées par le garde des sceaux, ministre de la
justice, et par le ministre chargé du budget à l'issue d'un délai de quinze jours suivant la
réception par leurs services du procès-verbal de séance; qu'alors même qu'elles ne prévoient pas
explicitement une telle possibilité, lesdites dispositions ne font cependant pas obstacle à ce que le
garde des sceaux, ministre de la justice, et le ministre chargé du budget puissent donner leur
accord exprès avant l'expiration du délai ainsi prévu, ni à ce qu'une telle approbation intervienne
le jour même de l'adoption de la délibération en cause;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la délibération n° 2012-02 du
3 février 2012 par laquelle le conseil d'administration de l'EPPJP a autorisé son directeur
général à signer le contrat de partenariat litigieux a été expressément approuvée le jour même,
pour le ministre chargé du budget, par M. Gaubert, administrateur civil hors classe, chef de
service, adjoint au directeur du budget, qui bénéficiait pour ce faire d'une délégation accordée
par ce ministre par arrêté du 5 janvier 2011, publié au Journal officiel de la République française
le 7 janvier 20 Il et, pour le garde des sceaux, ministre de la justice, par M. Gariazzo, secrétaire
général du ministère de la justice, compétent à cet effet en vertu des dispositions combinées du
1 ° de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005, de l'article 2 du décret du 9 juillet 2008 et de
l'article 8 de l'arrêté du 9 juillet 2008 susvisés ; qu'aucune disposition législative ou
réglementaire alors en vigueur ne s'opposait à ce que M. Gariazzo procédât à une telle
approbation, alors même que, conformément aux dispositions du 1 ° de l'article 4 du décret du
18 février 2004 précité, il était membre de droit du conseil d'administration de l'EPPJP et qu'il
en avait, conformément à l'article 5 de ce même décret, exercé la présidence jusqu'à la date de sa
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 13
nomination en qualité de secrétaire général du ministère de la justice à compter du 5 janvier
2012 ; que, par suite, l'association « La Justice dans la Cité» et M. Bourayne ne sont pas fondés
à soutenir que le directeur général de l'EPPJP ne pouvait régulièrement signer le contrat de
partenariat litigieux au motif que la délibération du conseil d'administration l'y autorisant
n'aurait pas été exécutoire à la date du 15 février 2012;
Il. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 18 février
2004 susvisé, dans sa rédaction issue du décret du 12 janvier 2010 : « L'établissement public a
pour mission de concevoir et réaliser le projet de construction du nouveau tribunal de grande
instance de Paris. Cette mission comporte également, le cas échéant, avec l'accord du garde des
sceaux, la réalisation de locaux pour les besoins des juridictions parisiennes ou d'institutions
travaillant en liaison directe avec elles» ; que, contrairement à ce que soutiennent l'association
« La Justice dans la Cité» et M. Bourayne, ni ces dispositions, qui ne prévoient aucune fonnalité
particulière en la matière, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, ne faisaient
obstacle à ce que l'accord du garde des sceaux, ministre de la justice, sur la réalisation de locaux
pour les besoins de juridictions parisiennes autres que le tribunal de grande instance puisse, le
cas échéant, être donné de façon tacite, dans les conditions prévues à l'article 4 de la convention
du 15 février 2010 conclue entre l'EPPJP et le ministère de la justice en application du 5° de
l'article 3 du décret du 18 février 2004, selon lequel: « (. . .) L'EP P JP esttenu de recueillir l'avis
du ministère de la Justice sur (. . .) / le programme du bâtiment à construire, avant consultation
des candidats sélectionnés. / Cet avis est réputé favorable si le ministère de la Justice n'émet pas
d'observations dans le délai de quinze jours après la transmission des documents objets de l'avis
(. . .) » ;
12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le progranune fonctionnel du
projet a fait l'objet d'une demande d'avis au garde des sceaux, ministre de la justice, le 28 juin
2010; que ce programme, qui incluait la réalisation de locaux pour les tribunaux d'instance et le
tribunal de police, a été tacitement approuvé quinze jours plus tard, soit avant le début de la
consultation des candidats sélectionnés; qu'au surplus, le garde des sceaux, ministre de la
justice, a, par lettre en date du 3 février 2012, expressément donné son accord sur le progranune
fonctionnel et sur le projet définitif de contrat avant que ce dernier ne soit soumis au vote du
conseil d'administration de l'EPPJP ; que, dès lors, l'association « La Justice dans la Cité» et
M. Bourayne ne sont pas fondés à soutenir que l'accord du garde des sceaux, ministre de la
justice, sur la réalisation des locaux destinés à abriter les tribunaux d'instance et le tribunal de
police n'a pas été régulièrement recueilli ;
13. Considérant, en troisième lieu, qu'aux tennes de l'article 4 précité de la convention
du 15 février 2010 conclue entre le ministère de la justice et l'EPPJP : « L'EPPJP est tenu de
recueillir l'avis du ministère de la Justice sur le périmètre de la procédure à lancer, avant l'envoi
à la publication de l'avis d'appel public à concurrence, et sur le programme du bâtiment à
construire, avant consultation des candidats sélectionnés. Cet avis est réputé favorable si le
ministère de la Justice n'émet pas d'observations dans le délai de quinze jours après la
transmission des documents objets de l'avis» ; que les stipulations de cette convention, qui fixe
les conditions dans lesquelles le ministère de la justice exerce, sur l'EPPJP, son pouvoir de
tutelle, présentent un caractère réglementaire et sont, dès lors, susceptibles d'être invoquées par
des tiers à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir; qu'ainsi, l'association « La Justice dans
la Cité» et M. Bourayne peuvent utilement s'en prévaloir;
14. Considérant que, comme il a été dit au point 12 ci-dessus, le progranune
fonctionnel du projet a fait l'objet d'une demande d'avis au garde de sceaux, ministre de la
justice, le 28 juin 2010 et a été tacitement approuvé quinze jours plus tard, soit avant le début de
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 14
la consultation des candidats sélectionnés; qu'en revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier
que le garde des sceaux, ministre de la justice, aurait donné son avis sur le «périmètre de la
procédure à lancer» avant le 3 juin 2010, date de la publication de l'avis d'appel à la
concurrence au Journal officiel de l'Union européenne; qu'en effet, l'EPPJP ne peut se
prévaloir, à ce titre, de l'approbation expresse ou tacite par le garde des sceaux, ministre de la
justice, de la délibération du conseil d'administration de l'EPPJP en date du 21 janvier 2010
approuvant l'évaluation préalable, dès lors que cette dernière laissait ouvert, à ce stade, le choix
dudit périmètre, qui n'a ainsi pu être définitivement arrêté par l'effet de cette approbation; qu'il
n'est pas davantage fondé à se prévaloir de l'envoi d'une demande d'avis sur ce choix qui aurait
été adressée au garde des sceaux, ministre de la justice, par lettre du 9 février 2010, dès lors qu'il
n'établit pas la réalité de l'envoi de ce document, qui n'a pas même été produit au dossier;
15. Considérant, toutefois, que si les actes administratifs doivent être pris selon les
formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le
déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la
décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce,
une influence sur le sens de cette décision ou s'il a privé les intéressés d'une garantie;
16. Considérant que la méconnaissance par l'EPPJP des stipulations de l'article 4 de la
convention du 15 février 2010, s'agissant de l'avis du garde des sceaux, ministre de la justice,
sur le périmètre de la procédure à engager, n'a pas été susceptible d'exercer, en l'espèce, une
influence sur le choix qui a été arrêté, en février 2012, dès lors qu'il est manifeste que la
procédure s'est déroulée jusqu'à son terme avec l'accord tacite puis exprès du garde des sceaux,
ministre de la justice, comme cela ressort notamment des termes de la lettre du 3 février 2012
mentionnée au point 12 ci-dessus; que cette irrégularité n'a pas davantage privé les personnes
intéressées d'une garantie; que, par suite, ce vice n'est pas de nature à entacher la légalité de la
délibération et de la décision attaquées;
17. Considérant, en quatrième lieu, qu'en vertu des dispositions combinées du 5° de
l'article 3 et de l'article 8 précités du décret du 18 février 2004 susvisé, le conseil
d'administration délibère, dans les conditions qu'il détermine, sur les contrats de partenariat
négociés, conclus et gérés par l'EPPJP; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 19 octobre
2004 susvisé portant création de la mission d'appui à la réalisation des contrats de partenariat,
dans sa rédaction, issue du décret modificatif du 2 mars 2009, applicable en l'espèce: «Il est
créé un organisme expert chargé de procéder en liaison avec toute personne intéressée à
l'évaluation prévue à l'article 2 de l'ordonnance susvisée (. . .). Il est rattaché au ministre chargé
de l'économie et des finances »; que l'article 3-1 de ce même décret du 19 octobre 2004 dispose
que « L'organisme expert est saisi pour avis sur l'évaluation préalable des projets prévue au 1 de
l'article 2 de l'ordonnance du 17 juin 2004 susvisée (. . .) » ;
18. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil d'administration de
l'EPPJP a délibéré sur le choix de principe de recourir à un contrat de partenariat le 21 janvier
2010 ; que, le 5 février 2010, la mission d'appui à la réalisation des contrats de partenariat a
rendu un avis favorable sur l'évaluation préalable prévue par l'article 2 de l'ordonnance du
17 juin 2004, qui lui avait été soumise par l'EPPJP ; que, contrairement à ce que soutiennent
l'association « La Justice dans la Cité» et M. Bourayne, ni les dispositions précitées des articles
3 et 8 du décret du 18 février 2004, ni les stipulations du préambule de la convention du
15 février 2010 conclue entre le ministère de la justice et l'EPPJP, aux termes desquelles «la
confirmation de ce choix est subordonnée à l'obtention d'un avis positif de la mission d'appui à
la réalisation des contrats de partenariat» sur l'évaluation préalable effectuée, n'imposaient que
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 15
le conseil d'administration de l'EPPJP délibérât à nouveau, après que cet avis favorable eut été
rendu, sur le choix de recourir à un contrat de partenariat;
19. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 12 du décret du 28 mai 1982
SUSVise, dans sa rédaction applicable en l'espèce : «Les comités techniques paritaires
connaissent dans les conditions et les limites précisées pour chaque catégorie de comité par les
articles 13 et 14 du présent décret des questions et des projets de textes relatifs: / ]0 Aux
problèmes généraux d'organisation des administrations, établissements ou services; / 2° Aux
conditions générales de fonctionnement des administrations et services » ; que selon l'article 13
de ce même décret: «La compétence respective des différents comités prévus au titre ]" du
présent décret est déterminée par l'arrêté visé à l'article 2 en application des règles suivantes: /
] ° Le comité technique ministériel examine les questions intéressant l'ensemble des services
centraux et déconcentrés du département ministériel considéré (. . .) » ;
20. Considérant que la création, dans le ressort de la Cour d'appel de Paris, d'un
nouveau palais de justice destiné à abriter le tribunal de grande instance, les tribunaux d'instance
et le tribunal de police de Paris ne constitue pas une question générale d'organisation ou de
fonctionnement intéressant l'ensemble des services centraux et déconcentrés de la direction des
services judiciaires du ministère de la justice; qu'ainsi, contrairement à ce que soutiennent
l'association « La Justice dans la Cité» et M. Bourayne, celle-ci n'avait pas à être soumise à la
consultation du comité technique paritaire du ministère de la justice;
En ce qui concerne la légalité interne:
2
1. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du
communiqué de presse du garde des sceaux, ministre de la justice, du 23 novembre 2009, que le
choix de la ZAC de Clichy-Batignolles pour y implanter le nouveau palais de justice que
l'EPPJP avait notamment pour mission, selon les dispositions de l'article 2 du décret du
18 février 2004 susvisé, dans sa rédaction initiale, de concevoir et de faire construire, a été opéré
par les autorités compétentes de l'État préalablement à l'intervention de la délibération et de la
décision attaquées; que, par ailleurs, le garde des sceaux, ministre de la justice, était compétent,
en vertu des dispositions de l'article 2 de ce même décret, dans sa rédaction issue du décret du
12 janvier 2010, pour autoriser, le cas échéant, la réalisation de locaux pour les besoins des
juridictions parisiennes autres que le tribunal de grande instance; qu'ainsi qu'il a été dit au point
12 ci-dessus, le garde des sceaux, ministre de la justice, a régulièrement donné son accord sur la
réalisation des locaux destinés à abriter les tribunaux d'instance et le tribunal de police; que si la
décision qui a ainsi été prise implique, à terme, une modification du siège des tribunaux
d'instance de Paris, elle n'avait pas à être précédée, à ce stade, d'une modification de l'annexe
IV au code de l'organisation judiciaire; qu'enfin, et en tout état de cause, les dispositions de
l'article D.311-1 de ce code ne font pas obstacle, contrairement à ce que soutiennent les
requérants, à ce que le siège de dix-neuf des vingt tribunaux d'instance de Paris soit fixé en
dehors de leur ressort; que, par suite, l'association « La Justice dans la Cité» et M. Bourayne ne
sont pas fondés à soutenir que la délibération et la décision attaquées sont entachées d'illégalité
comme dépourvues de toute base juridique ou, a fortiori, qu'elles constituent des actes
juridiquement inexistants;
22. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du
17 juin 2004 susvisée: « 1. - Le contrat de partenariat est un contrat administratif par lequel
l'Etat ou un établissement public de l'Etat confie à un tiers, pour une période déterminée en
fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 16
retenues, une mission globale ayant pour objet la construction ou la transformation, l'entretien,
la maintenance, l'exploitation ou la gestion d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels
nécessaires au service public, ainsi que tout ou partie de leur financement à l'exception de toute
participation au capital. Il peut également avoir pour objet tout ou partie de la conception de ces
ouvrages, équipements ou biens immatériels ainsi que des prestations de services concourant à
l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée. / II -
Les contrats de partenariat ne peuvent être conclus que si, au regard de l'évaluation, il s'avère,'
/ JO Que, compte tenu de la complexité du projet, la personne publique n'est pas objectivement
en mesure de définir seule et à l'avance les moyens techniques répondant à ses besoins ou
d'établir le montage financier ou juridique du projet,' / r Ou bien que le projet présente un
caractère d'urgence, lorsqu'il s'agit de rattraper un retard préjudiciable à l'intérêt général
affectant la réalisation d'équipements collectift ou l'exercice d'une mission de service public,
quelles que soient les causes de ce retard, ou de faire face à une situation imprévisible,' /3° Ou
bien encore que, compte tenu soit des caractéristiques du projet, soit des exigences du service
public dont la personne publique est chargée, soit des insuffisances et difficultés observées dans
la réalisation de projets comparables, le recours à un tel contrat présente un bilan entre les
avantages et les inconvénients plus favorable que ceux d'autres contrats de la commande
publique. Le critère du paiement différé ne saurait à lui seul constituer un avantage» ;
23. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le recours au contrat de partenariat
constitue une dérogation au droit commun de la commande publique, réservée aux seules
situations répondant aux motifs d'intérêt général qui y sont définis; que l'urgence, objectivement
constatée, s'attachant à la réalisation d'un projet envisagé par l'État ou un établissement public
est au nombre des motifs d'intérêt général de nature à justifier qu'il soit procédé à la conclusion
d'un contrat de ce type; qu'une telle urgence peut notamment résulter de la nécessité de rattraper
un retard, quelles qu'en soient les causes, affectant de façon préjudiciable à l'intérêt général la
réalisation d'équipements collectifs ou l'exercice d'une mission de service public dans un
secteur ou une zone géographique déterminés ; que constitue également un motif d'intérêt
général justifiant le recours au contrat de partenariat la complexité du projet envisagé, lorsque
celle-ci met objectivement la personne publique dans l'impossibilité de définir, seule et à
l'avance, les moyens techniques répondant à ses besoins ou d'établir le montage financier ou
juridique propre à permettre la réalisation de ce projet;
24. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'évaluation
préalable réalisée par l'EPPJP en application des dispositions précitées du 1 de l'article 2 de
l'ordonnance du 17 juin 2004 susvisée, que la dispersion géographique des services du Tribunal
de grande instance de Paris sur neuf sites différents, ainsi que la configuration et la vétusté du
Palais de justice de l'Ile de la Cité, ne permettent pas un fonctionnement normal de cette
juridiction, s'agissant tant des conditions matérielles dans lesquelles les magistrats, les agents du
greffe et les avocats sont amenés à y exercer leurs fonctions que des exigences d'accessibilité, de
sûreté et de sécurité des personnes et des biens requises dans les locaux qui lui sont affectés;
que, dès lors, le recours au contrat de partenariat pour la conception et la construction du
nouveau palais de justice se trouve justifié par l'urgence qui s'attache à la nécessité de mettre fin
à une situation particulièrement grave et préjudiciable à l'intérêt général affectant le bon
fonctionnement du service public de la justice à Paris, sans que soient de nature à infirmer cette
appréciation, d'une part, l'existence de travaux effectués ces dernières années en vue d'atténuer
les difficultés ainsi constatées, ni, d'autre part, la circonstance que d'autres solutions que celle
retenue auraient été envisageables pour tenter d'y remédier;
25. Considérant, en outre, qu'il ressort des pièces du dossier que les dimensions
exceptionnelles de l'ouvrage à réaliser, qui aura une surface de plus de 60 000 m2 et abritera 90
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 17
salles d'audience, le nombre et la nature des juridictions qui y seront hébergées, impliquant
notamment la présence du pôle anti-terroriste et la tenue de procès à forte résonance médiatique,
et l'importante fréquentation du bâtiment, évaluée à près de 9 000 personnes par jour, incluant à
la fois des magistrats, personnels de greffe, auxiliaires de justice et fonctionnaires de police, mais
aussi de nombreux détenus, des journalistes et un large public, confèrent au projet envisagé une
particulière complexité; que celle-ci est encore accrue par les contraintes techniques et
fonctionnelles induites par le choix, retenu par les pouvoirs publics, de la construction à Paris,
dans une zone en cours d'aménagement sur d'anciennes emprises ferroviaires non viabilisées,
d'un immeuble de très grande hauteur, dont il a notamment été décidé, de surcroît, qu'il devrait
être exemplaire en matière de performance énergétique et de développement durable ; que, du
fait de ces différentes caractéristiques, la réalisation de ce projet pose, en matière de sécurité et
de sûreté, de performance acoustique et thermique, d'insertion de l'édifice dans son
environnement, de maintenance et d'entretien des équipements, ainsi que de maîtrise des risques
liés à un chantier d'une aussi grande ampleur, des difficultés telles que l'EPPJP a pu, sans
commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation, estimer qu'il était nécessaire de recourir à
un contrat global pour assurer la parfaite cohérence des solutions architecturales et techniques
proposées par la maîtrise d'oeuvre, les entreprises de construction et les entreprises d'exploitation
et de maintenance; que l 'EPP JP soutient, sans être contredit, que certaines des réponses à ces
difficultés, en ce qui concerne la sécurité incendie, l'évacuation des eaux, ainsi que le choix des
matériaux de façade et des matériaux permettant l'isolation acoustique de la salle des pas perdus
et de certaines salles d'audience, n'ont pu être apportées qu'après discussions, au cours de la
procédure, entre les services de l'État, l'architecte et les entreprises chargées de la construction
et de la maintenance de l'immeuble; qu'il est ainsi établi que l'EPPJP était dans l'impossibilité
de définir seul et à l'avance, y compris en recourant aux moyens mis à sa disposition par
l'Agence publique pour l'immobilier de la justice (APU), qui n'a jamais conduit une opération
d'une telle ampleur, les moyens techniques permettant la réalisation du projet envisagé;
26. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 5 de l'ordonnance du
17 juin 2004 susvisée: « Les contrats de partenariat peuvent être passés selon les procédures du
dialogue compétitif, de l'appel d'offres ou selon une procédure négociée selon les conditions
définies à l'article 7. / Si, compte tenu de la complexité du projet et quel que soit le critère
d'éligibilité retenu en application de l'article 2 pour fonder le recours au contrat de partenariat,
la personne publique est objectivement dans l'impossibilité de définir seule et à l'avance les
moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d'établir le montage financier ou
juridique du projet, elle peut recourir au dialogue compétitif dans les conditions prévues au 1 de
l'article 7 de la présente ordonnance. Elle indique le choix de la procédure dans l'avis de
publicité (. . .) » ; que selon l'article 7 de cette même ordonnance: « I-Sur la base du programme
fonctionnel qu'elle a établi afin de déterminer ses besoins et ses objectifS, la personne publique
engage un dialogue avec chacun des candidats, dont l'objet est de définir les moyens techniques
et le montage juridique et financier les mieux à même de répondre à ses besoins. / La personne
publique peut discuter avec les candidats de tous les aspects du contrat (. . .) / La personne
publique poursuit les discussions avec les candidats jusqu 'à ce qu'elle soit en mesure d'identifier
la ou les solutions, au besoin après les avoir comparées, qui sont susceptibles de répondre à ses
besoins (. . .) » ;
27. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 25 ci-dessus et pour les motifs qui y
sont exposés, l'EPPJP était dans l'impossibilité d'établir à l'avance les moyens techniques
permettant la réalisation du projet envisagé; que, dès lors, il a pu légalement recourir, en vue de
conclure le contrat de partenariat en litige, à la procédure du dialogue compétitif;
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 18
28. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du
17 juin 2004 susvisée: « La passation d'un contrat de partenariat est soumise aux principes de
liberté d'accès, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. Ces
principes permettent d'assurer l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des
deniers publics. / Elle est précédée d'une publicité permettant la présentation de plusieurs offres
concurrentes dans des conditions prévues par décret»; que selon l'article 8 de cette même
ordonnance: « Le contrat est attribué au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus
avantageuse, par application des critères définis, en prenant en compte les conclusions de
l'étude d'évaluation (. .. ), dans l'avis d'appel public à la concurrence ou le règlement de la
consultation et le cas échéant précisés (. . .). / Les critères d'attribution sont pondérés. Si la
personne publique démontre qu'une telle pondération est objectivement impossible, ils sont
hiérarchisés. / Parmi les critères d'attribution, figurent nécessairement le coût global de l'offre,
des objectift de performance définis en fonction de l'objet du contrat, en particulier en matière
de développement durable, et la part d'exécution du contrat que le candidat s'engage à confier à
des petites et moyennes entreprises et à des artisans. On entend par coût global de l'offre la
somme des coûts actualisés générés par la conception, le financement, la construction ou la
transformation, l'entretien, la maintenance, l'exploitation ou la gestion d'ouvrages,
d'équipements ou de biens immatériels, les prestations de services prévus pour la durée du
contrat (. . .) » ;
29. Considérant, d'une part, que le règlement de la consultation, et notanunent son
article 1.3, mentionne les critères de sélection et leur pondération, à savoir le coût global de
l'offre, à hauteur de 40 %, la performance de l'ouvrage, à hauteur de 30 %, la qualité globale
architecturale et urbaine de l'ouvrage, à hauteur de 25 %, et la part d'exécution des prestations
que le candidat s'engage à confier à des petites et moyennes entreprises, à hauteur de 5 % ; que
ces critères sont précisés dans le règlement de consultation lui-même et dans des documents
annexes, notanunent dans le règlement d'élaboration des propositions; qu'ainsi, les documents
de la consultation énonçaient précisément quelles étaient les attentes de l 'EPP JP et les
obligations des candidats; que, dans ces conditions, l'association « La Justice dans la Cité» et
M. Bourayne ne sont pas fondés à soutenir que l'EPPJP a manqué à son obligation de fournir aux
candidats, dès l'engagement de la procédure, une information sur l'objet, les caractéristiques et
le montant du contrat en cause assurant le respect des principes de liberté d'accès à la commande
publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures;
30. Considérant, d'autre part, que si l'EPPJP a, sur le fondement des dispositions de
l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 susvisée, occulté certaines informations contenues dans des
documents dont l'association « La Justice dans la Cité» et M. Bourayne avaient demandé la
communication, au motif qu'une telle communication aurait porté atteinte au secret en matière
industrielle et commerciale, cette circonstance n'est, en tout état de cause, pas de nature à établir
l'existence d'une méconnaissance du principe de transparence des procédures lors de la
passation du contrat;
3
1. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer
sur les fins de non-recevoir opposées devant le Tribunal administratif de Paris par l'EPPJP et le
garde des sceaux, ministre de la justice, tirées du défaut de qualité du président de l'association
pour la représenter en justice et de l'irrégularité du mandat de son conseil, que l'association « La
Justice dans la Cité» et M. Bourayne ne sont pas fondés à demander l'annulation de la
délibération du conseil d'administration de l'EPPIP nO 2012-02 du 3 février 2012 et de la
décision du directeur général de cet établissement public du 15 février 2012 de signer le contrat
de partenariat en litige ;
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770 19
Sur les conclusions à fin d'injonction:
32. Considérant que le présent arrêt, par lequel la Cour rejette les conclusions de
l'association «La Justice dans la Cité» et de M. Bourayne tendant à l'annulation des
délibérations et décisions attaquées, n'appelle aucune mesure d'exécution; qu'ainsi, les
conclusions à fin d'injonction présentées par les requérants ne peuvent qu'être également
rejetées;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative:
33. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État
et de l'EPPJP, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement
d'une quelconque somme au titre des frais exposés par l'association « La Justice dans la Cité» et
par M. Bourayne et non compris dans les dépens; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y
a pas lieu de mettre à la charge de l'association « La Justice dans la Cité» et de M. Bourayne le
versement des sommes que l'EPPJP et la société Arelia demandent sur le fondement des mêmes
dispositions;
DECIDE:
Article 1 er : Le jugement nO 1206417/3-7 du 17 mai 2013 est annulé en tant que, par ce jugement,
le Tribunal administratif de Paris a rejeté, comme irrecevables, les conclusions de la demande
présentée par l'association « La Justice dans la Cité» et par M. Bourayne tendant à l'annulation
de la délibération du conseil d'administration de l'EPPJP n° 2012-02 du 3 février 2012 et de la
décision du directeur général de cet établissement public du 15 février 2012 de signer le contrat
de partenariat ayant pour objet la conception, la construction, le financement, l'entretien et la
maintenance du futur palais de justice de Paris dans la zone d'aménagement concerté de ClichyBatignolles.
Article 2: Les conclusions de la demande de l'association «La Justice dans la Cité» et de
M. Bourayne présentées devant le Tribunal administratif de Paris tendant à l'annulation des actes
visés à l'article 1 er, ainsi que le surplus de leurs conclusions d'appel, sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions présentées par l'EPPJP et par la société Arelia sur le fondement de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4: Le présent arrêt sera notifié à l'association «La Justice dans la Cité », à
M. Cyril Bourayne, à la garde des sceaux, ministre de la justice, à l'Établissement public du
palais de justice de Paris et à la société Arelia.
N°S 13PA02769, 13PA02766, 13PA02770
Délibéré après l'audience du 14 mars 2014, à laquelle siégeaient:
M. Frydman, président de la Cour,
M. Moreau, premier vice-président,
Mme Vettraino, président de chambre,
Mme Mille, président de chambre,
Mme Tandonnet-Turot, président de chambre,
Mme Coënt-Bochard, président de chambre,
Mme Driencourt, président de chambre,
Mme Monchambert, président de chambre,
M. Krulic, président de chambre,
Mme Herbelin, président de chambre,
Mme Adda, président de chambre,
Mme Terrasse, président assesseur,
Mme Vrignon, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 avril 2014.
Le apporteur,

··C. VRIGNON
Le greffier,
20
P.FRYDMAN
La République mande et ordonne à la garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui la
concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun
contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Article, L761-1, CJA Loi, 78-753, 17-07-1978 Article, D311-1, COJ Décret, 2005-850, 27-07-2005 Ordonnance, 2004-559, 17-06-2004 Décret, 82-452, 28-05-1982 Décret, 2004-161, 18-02-2004 Décret, 2008-689, 09-07-2008, organisation Décret, 2004-1119, 19-10-2004 Palais de justice Mandataire Dépens de l'instance Zone d'aménagement concerté Décision de signer Contrats de partenariat Principe fondamental Résiliation d'un contrat Exécution du projet Normes de sécurité Nouveau mémoire Suppression Ancien président Contrôle financier Établissement de crédit Modalités d'indemnisation Déclaration de nullité Relation contractuelle Meilleur usage Deniers publics Prévision du versement Indemnité Procédures de passation de certains contrats Atteinte excessive à l'intérêt général Passation des marchés de travaux Travaux publics Sous-direction Chef de bureau Cession de créance Défaut d'intérêt Directeurs généraux d'un établissement public Entretien Réalisation d'ouvrages Actes détachables Actes de procédures Expiration du délai Administrateurs civils Signature des contrats Prévision de disposition Projet de contrat Approbation tacite Acte administratif Procédure administrative préalable Exercice d'une influence Accord tacite Accord exprès Avis favorable Projet de texte Comité technique ministériel Service central Services déconcentrés Autorité compétente de l'etat Établissement public de l'etat Durée d'amortissement Gestion des équipements Prestation de service Exercice d'une mission de service public Intérêt général Équipement collectif Service public de la justice Salle d'audience Fonctionnaire Contraintes techniques Pouvoirs publics Société de constructions Services de l'etat Dialogue compétitif Égalité de traitement des candidats Bonne utilisation Présentation d'une offre Critères définis Avis d'appel public à la concurrence Critères pondérés Coût global Exécution du contrat Critères de sélection Petites et moyennes entreprises Engagement d'une procédure administrative Caractéristique d'un contrat Principe de liberté d'accès Défaut de qualité Mesure d'exécution

Ouvrages (1) Revues (5)

Agir sur cette sélection :

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus