COMM.
JB
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 10 septembre 2025
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 419 F-B
Pourvoi n° N 24-15.885
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 SEPTEMBRE 2025
Le fonds commun de titrisation Cash, dont le siège est [Adresse 1], représenté par la société GTI Asset Management, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 24-15.885 contre l'arrêt rendu le 20 mars 2024 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société SCEA [Adresse 2], société civile d'exploitation agricole, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chazalette, conseiller, les observations de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel, avocat du fonds commun de titrisation Cash, représenté par la société GTI Asset Management de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société SCEA [Adresse 2], après débats en l'audience publique du 11 juin 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Chazalette,
conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseillère doyenne, et Mme Sezer, greffière de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 20 mars 2024), par un acte du 26 octobre 2015, le fonds commun de titrisation Cash (le FCT), représenté par la société GTI Asset Management (GTI AM), et la société BGD conseils ont défini les conditions de diverses cessions de créances. Par actes des 17 mai, 31 mai, 6 juin, 17 juin, 13 juillet et 25 juillet 2016, la société BGD conseils a cédé au FCT diverses créances contre la société [Adresse 2].
2. Le 7 janvier 2019, le FCT, représenté par la société GTI AM, a assigné la société [Adresse 2] en paiement des créances qui lui avaient été cédées.
Examen du moyen
Sur le second moyen, pris en sa cinquième branche
Enoncé du moyen
3. Le FCT, représenté par la société GTI AM, fait grief à l'arrêt de le déclarer irrecevable à agir à l'encontre de la société [Adresse 2], alors « que la loi ne dispose que pour l'avenir et qu'elle n'a point d'effet rétroactif ; qu'en énonçant qu'il apparaît nécessaire de préciser que malgré les évolutions postérieures de la rédaction de l'
article L. 214-172 du code monétaire et financier🏛, il reste constant que lorsque le recouvrement des créances cédées est confié à une autre entité, le débiteur doit être informé de cette modification par lettre simple tandis que l'article L. 214-172 du code monétaire et financier prévoit, en sa rédaction issue de loi Pacte du 22 mai 2019 applicable au litige que l'information au débiteur cédé peut intervenir par tout moyen, y compris par acte judiciaire ou extrajudiciaire" de telle sorte que l'acte introductif d'instance aurait régularisé toute difficulté portant sur l'identité de l'entité chargée du recouvrement des créances litigieuses, la cour d'appel a méconnu ensemble, l'
article 2 du code civil🏛 et l'article L. 214-172 du code monétaire et financier. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 2 du code civil et L. 214-172 du code monétaire et financier dans sa rédaction issue de la
loi n° 2019-486 du 22 mai 2019🏛 :
4. Il résulte du premier de ces textes que la loi nouvelle régit les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées.
5. Il résulte du second que le recouvrement des créances transférées peut être assuré directement par la société de gestion en tant que représentant légal de l'organisme et que le débiteur en est informé par tout moyen, y compris par acte judiciaire ou extrajudiciaire.
6. Pour dire irrecevable l'action en paiement de la société GTI AM du 7 janvier 2019, l'arrêt, après avoir énoncé que, malgré les évolutions postérieures de la rédaction de l'article L. 214-172 précité, il reste constant que, lorsque le recouvrement des créances cédées est confié à une autre entité, le débiteur doit être informé de cette modification par lettre simple, retient que ni le contrat-cadre du 26 octobre 2015 et ni les actes de cession de créance des 17 mai, 31 mai, 6 juin, 17 juin, 13 juillet et 25 juillet 2016 ne révèlent une volonté non équivoque de transférer à la société GTI AM la charge du recouvrement des créances détenues à l'encontre de la société [Adresse 2] et que les lettres des 4, 30 août 2016 et 28 novembre 2018 n'étaient pas suffisamment claires pour valoir information du débiteur.
7. En statuant ainsi, alors que l'acte introductif d'instance du 7 janvier 2019 informait la société [Adresse 2] que le recouvrement de ces créances était assuré par la société de gestion représentant le FCT, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 mars 2024, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;
Condamne la société [Adresse 2] aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par la société [Adresse 2] et la condamne à payer au fonds commun de titrisation Cash, représenté par la société GTI Asset Management, la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé publiquement le dix septembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'
article 450 du code de procédure civile🏛 et signé par M. Vigneau, président, Mme Schmidt, conseillère doyenne, qui en a délibéré, en remplacement de M. Chazalette, conseiller rapporteur, empêché, et Mme Sezer, greffière de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt, conformément aux dispositions des
articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile🏛🏛🏛.