Jurisprudence : Cass. soc., 11-06-2025, n° 23-21.819, F-D, Cassation

Cass. soc., 11-06-2025, n° 23-21.819, F-D, Cassation

B5276AKM

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2025:SO00644

Identifiant Legifrance : JURITEXT000051823121

Référence

Cass. soc., 11-06-2025, n° 23-21.819, F-D, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/120478407-cass-soc-11062025-n-2321819-fd-cassation
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Abstract

► La Cour de cassation apporte une nouvelle clarification à la question du licenciement verbal, cette fois sur fond d'arrêt maladie.


SOC.

JL10


COUR DE CASSATION
______________________


Arrêt du 11 juin 2025


Cassation partielle partiellement sans renvoi


Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président


Arrêt n° 644 F-D

Pourvoi n° S 23-21.819

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 JUIN 2025


M. [Y] [D], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 23-21.819 contre l'arrêt rendu le 25 août 2023 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Dimane plus, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Lacquemant, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 25 août 2023) et les productions, M. [Aa] a travaillé en qualité de directeur d'exploitation pour la société Dimane plus.

2. Le salarié a été placé en arrêt de travail le 9 août 2019, lequel a été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie au titre d'un accident du travail intervenu le 8 août 2019, décision déclarée inopposable à l'employeur par jugement du pôle social d'un tribunal judiciaire du 22 décembre 2022.

3. Le 14 août 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

4. Déclaré inapte à son poste, avec dispense de reclassement par un avis médical du 15 septembre 2020, le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 12 octobre 2020.


Examen des moyens

Sur le premier moyen

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes au titre du licenciement verbal dont il soutenait avoir fait l'objet et de la demande afférente au titre des dommages-intérêts et de le condamner à verser à l'employeur une somme représentant la partie de l'indemnité spéciale de licenciement qu'il a perçue excédant l'indemnité légale de licenciement et une somme correspondant à l'indemnité de préavis, alors « que constitue un licenciement verbal le fait, pour l'employeur de retirer à son salarié toute activité et tout moyen d'accès à l'entreprise ; qu'en jugeant que le fait que le salarié ait remis à l'employeur son véhicule de fonction, les clés et badges de l'entreprise et que les dossiers lui aient été repris ne saurait manifester la volonté par l'employeur de licencier oralement le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail🏛. »


Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1232-6 du code du travail :

7. Il résulte de ce texte que lorsque l'employeur manifeste la décision irrévocable de rompre le contrat de travail d'un salarié avant l'envoi de la lettre de licenciement, le licenciement est nécessairement sans cause réelle et sérieuse.

8. Pour rejeter les demandes du salarié au titre d'un licenciement verbal intervenu le 9 août 2019, l'arrêt retient que le salarié ne démontre pas que ses accès informatiques et à la messagerie ont été interrompus, qu'il produit un courriel envoyé de sa messagerie professionnelle le 12 août 2019 et qu'il a envoyé des courriels entre les 10 et 12 août dans lesquels il se présentait comme « directeur d'exploitation encore à ce jour ».

9. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le salarié avait remis à la demande de l'employeur son véhicule de fonction, les clefs et badges de l'entreprise et que les dossiers lui avaient été repris, ce dont elle aurait dû déduire que l'employeur avait manifesté sa décision irrévocable de rompre le contrat de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. Le salarié fait grief à l'arrêt d'infirmer le chef du jugement qui condamnait l'employeur à lui verser un reliquat de solde de tout compte et de le condamner à restituer une somme représentant la partie de l'indemnité spéciale de licenciement qu'il a perçue excédant l'indemnité légale de licenciement et une somme correspondant à l'indemnité compensatrice de préavis, alors « qu'il résulte de l'article 562 du code de procédure civile🏛, dans sa rédaction applicable, que l'effet dévolutif de l'appel est limité par la critique expresse des chefs de jugement qui est faite dans la déclaration d'appel et ne peut être étendu par des conclusions postérieures ; qu'en infirmant le chef du jugement qui condamnait l'employeur à verser au salarié un reliquat de solde de tout compte de 10 611,43 euros nets, incluant notamment l'indemnité spéciale de licenciement et l'indemnité de préavis dues en application de l'article L. 1226-14 du même code🏛, quand l'employeur avait limité son appel à certains chefs du jugement sans viser celui portant condamnation au titre du reliquat de solde de tout compte, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017🏛 :

11. Selon ce texte, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

12. Pour infirmer le jugement en ce qu'il avait condamné l'employeur à verser le reliquat du solde de tout compte et condamner le salarié à restituer les sommes perçues au titre des indemnités prévues par l'article L. 1226-14 du code du travail, l'arrêt retient qu'il n'est pas démontré que l'inaptitude du salarié trouvait son origine dans un accident ou une maladie professionnelle, à savoir en l'espèce un harcèlement dans le cadre de son travail.

13. En statuant ainsi, alors qu'il résultait des conclusions de l'employeur qu'il avait acquiescé au jugement le condamnant au paiement du reliquat du solde de tout compte, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

14. La cassation des chefs de dispositif déboutant le salarié de ses demandes au titre du licenciement verbal, des dommages-intérêts afférents et le condamnant à rembourser les sommes versées au titre de l'indemnité spéciale de licenciement et de l'indemnité de préavis n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci.

15. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile🏛, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire🏛 et 627 du code de procédure civile.

16. La cassation prononcée sur le troisième moyen n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le reliquat du solde de tout compte et le remboursement par le salarié d'une somme représentant la partie de l'indemnité spéciale de licenciement qu'il a perçue excédant l'indemnité légale de licenciement et une somme correspondant à l'indemnité compensatrice de préavis dès lors que l'employeur a acquiescé à la condamnation prononcée par le conseil de prud'hommes.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [D] de ses demandes au titre du licenciement verbal et des dommages-intérêts afférents et, par voie de retranchement, en ce qu'il le déboute de sa demande au titre du reliquat du solde de tout compte et le condamne à verser à la société Dimane plus les sommes de 1 626,88 euros net représentant la partie de l'indemnité spéciale de licenciement qu'il a perçue excédant l'indemnité légale de licenciement et 6 028 euros net correspondant à l'indemnité de préavis, l'arrêt rendu le 25 août 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;

Remet, sur les demandes au titre du licenciement verbal et des dommages-intérêts afférents, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne la société Dimane plus aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure, condamne la société Dimane plus à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le onze juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.

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