SUR CE,
En application des dispositions de l'
article 455 du code de procédure civile🏛, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.
Il sera simplement rappelé que la société Thalès a déposé le 17 décembre 2010 sous le numéro FR 1 004 947 une demande de brevet intitulée « Procédé d'affichage temporel de la mission d'un aéronef ». La demande a été publiée le 22 juin 2012 sous le numéro FR 2 969 124.
Par notification du 6 septembre 2011, l'INPI a informé la société Thalès que la demande de brevet était susceptible d'être rejetée par application des dispositions de l'article L. 612-12.5° et 6° du code de la propriété intellectuelle, aux motifs :
d'une part, que l'objet de la demande de brevet ne pouvait être considéré comme une invention au sens de l'article L. 611-10 2° du code la propriété intellectuelle, s'agissant d'une méthode abstraite de représentation graphique, fournissant un support de liaison logique de plusieurs informations mais indépendant de toute technologie ;
d'autre part, que la description ou les revendications de la demande de brevet ne permettaient pas l'établissement du rapport de recherche sur les éléments de l'état de la technique, prévu aux dispositions de l'article L. 612-14 du code la propriété intellectuelle.
Le 4 novembre 2011, la société Thalès a répondu à la notification avant décision de rejet.
Le 12 juin 2014, l'INPI a notifié à la société Thalès un projet de décision de rejet.
Le 21 juillet 2014, la société Thalès a répondu au projet de décision de rejet annonçant modifier sa revendication 1 en y intégrant la revendication 2, afin de préciser le domaine technique considéré et d'ajouter une caractéristique technique supplémentaire concernant la longueur de la timeline (reprise de la revendication 2).
Par décision du 17 juillet 2018, l'INPI a notifié à la société Thalès la décision de rejet de sa demande de brevet car :
d'une part, l'objet de la demande de brevet, malgré l'intitulé des revendications, ne concerne qu'une présentation d'informations associée à une méthode mathématique, dépourvue de caractéristiques techniques au sens de l'article L. 611-10-2° du code de la propriété intellectuelle ;
d'autre part, faute de caractéristiques techniques suffisantes, l'objet de la demande ne pouvait faire l'objet d'une comparaison avec l'état de la technique et ne permet donc pas l'établissement du rapport de recherche prévu à l'article L. 612-12 -14° du code de la propriété intellectuelle.
La cour d'appel de Paris dans son arrêt du 21 mai 2019 a annulé la décision rendue le 17 juillet 2018 en considérant en substance que si la première caractéristique de la revendication 1 n'était pas brevetable, la seconde caractéristique de la revendication 1 modifiée, à savoir « en ce que si la longueur de la timeline est supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, la fenêtre graphique n'affiche alors qu'une partie de la timeline, partie imposée par l'utilisateur du dispositif de visualisation », propose un moyen technique distinct du contenu des informations elles-mêmes, étant précisé que ce moyen aidant le pilote à sélectionner parmi celles-ci les plus pertinentes, produit aussi un effet technique tel que défini ci-dessus.
La cour de cassation dans son arrêt du 11 janvier 2023 a cassé et annulé l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris et remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, en statuant en ces termes :
« Vu l'
article L. 611-10, 2 , d) du code de la propriété intellectuelle🏛 et l'
article L. 612-12, alinéa 1, 5 du même code🏛, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la
loi n 2019-486 du 22 mai 2019🏛 :
5. Il résulte du premier de ces textes que ne sont pas considérées comme des inventions les présentations d'informations. Selon le second, doit être rejetée, en tout ou partie, toute demande de brevet dont l'objet ne peut manifestement être considéré comme une invention au sens de l'article L. 611-10, deuxième paragraphe.
6. Pour considérer que la demande de brevet en cause porte sur une invention et, par conséquent, annuler la décision de rejet du directeur général de l'INPI, après avoir écarté la brevetabilité de la première caractéristique de la revendication 1, en retenant qu'elle n'a pour objet que la transmission et la présentation d'informations, l'arrêt retient que la seconde caractéristique de cette revendication, qui prévoit que la longueur de la « timeline » est supérieure à celle de la première fenêtre graphique et que l'utilisateur (le pilote) peut n'en afficher qu'une partie, est un moyen technique distinct du contenu des informations elles-mêmes, qui aide le pilote à sélectionner, parmi celles-ci, les plus pertinentes et produit ainsi un effet technique. Il en déduit que la revendication 1, prise dans son ensemble, n'est pas exclue de la brevetabilité, de même que les revendications 2 à 7, placées dans sa dépendance.
7. En se déterminant ainsi, en se bornant à reproduire les termes de la revendication 1, sans établir l'existence d'une contribution technique apportée par la demande de brevet ni expliquer en quoi les moyens revendiqués dans cette demande avaient le caractère de moyens techniques distincts de la simple présentation d'informations, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. »
Présentation de la demande de brevet FR 10 04947
La société THALES a déposé le 17 décembre 2010 sous le numéro FR 1 004 947 une demande de brevet intitulée « Procédé d'affichage temporel de la mission d'un aéronef » qui a été publiée le 22 juin 2012 sous le numéro FR 2 969 124.
Elle comportait initialement 8 revendications qui ont été réduites à 7 le 21 juillet 2014, suite à la fusion des revendications 1 et 2.
L'abrégé s'énonce de la manière suivante : « Le domaine général de l'invention est celui des procédés d'affichage des étapes d'une mission ou d'un plan de vol d'un aéronef sur un écran d'un dispositif de visualisation. Les différentes étapes du procédé sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou « timeline » (TL), les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement. Cette fenêtre peut être associée à une vue cartographique du plan de vol. Elle peut comporter une fonction « loupe » (L) ».
Domaine de l'invention :
Le domaine de l'invention est celui des systèmes d'affichage de cockpit et en particulier des systèmes dédiés à la navigation et à l'accomplissement d'un vol ou d'une mission.
Etat de la technique
Le brevet précise qu'il est connu que « les cockpits des aéronefs modernes sont dotés de systèmes de visualisation comportant plusieurs écrans de grande dimension et de systèmes de fenêtrages complexes permettant de représenter sur un même écran plusieurs zones d'affichage simultanément.
Généralement, pour l'accomplissement de la mission, les systèmes de visualisation comportent entre autres deux types de fenêtres qui sont d'une part, une fenêtre appelée « Navigation Display » ou « ND », offrant une vue graphique et géographique de la situation de l'avion, et d'autre part, une fenêtre affichant sous une forme de tableau la liste des points de passage ou «waypoints » du plan de vol de l'aéronef ou « WL ».
Selon le type d'appareil, ces fenêtres peuvent se situer sur deux écrans de visualisation différents ou sur le même écran graphique.
Ainsi, sur des avions de ligne de type A320 ou A380 de la société Airbus, comme on le voit sur les figures 1 et 2, les fenêtres ND et WL sont sur des écrans différents. La figure 1 représente une vue générale de la planche de bord et la figure 2 une vue partielle de cette même planche. Chaque membre de l'équipage a ainsi son propre jeu d'écrans disposé devant lui et a la responsabilité de la manipulation de son écran par une interface homme-machine dédiée ou « IHM », avec une « alimentation » en données indépendantes sur chaque écran.
Sur des appareils de type « business jets » comme les Falcon de la société Dassault, les fenêtres peuvent être affichées sur un unique écran DS, par exemple, situé dans la partie centrale du cockpit et potentiellement commun aux deux pilotes, sachant que chacun d'eux dispose d'un instrument de navigation dit « HSI » sur les écrans externes situés en face d'eux pour les informations de court terme. Un tel cockpit est représenté sur la figure 3.
La figure 4 représente une vue agrandie de l'écran central DS de la figure 3. II comprend trois fenêtres, la fenêtre appelée Navigation Display ou ND, la fenêtre des « waypoints » du plan de vol de l'aéronef ou WL et une troisième fenêtre appelée « Vertical Display » ou VD, affichant le profil vertical du terrain sous le plan de vol de l'avion ou sous la trajectoire estimée de l'avion.
Le « Navigation Display » offre une vision géographique de la situation de l'aéronef, avec l'affichage d'un fond cartographique dont la nature exacte, l'apparence et le contenu peuvent varier avec parfois :
- le plan de vol de l'avion,
- les points caractéristiques de la mission comme les points dits équi-temps, l'indication de fin de montée, l'indication de début de descente, '
- le trafic environnant ;
- les informations météorologiques sous ses divers aspects tels que les vents, orages, les zones de conditions givrantes,'.
La liste des « waypoints » permet de représenter sous forme tabulaire la liste des points caractéristiques du plan de vol de l'avion tels que :
- les contraintes de vitesse ou d'altitude que doit respecter l'avion au passage des waypoints ;
- la distance entre les waypoints,
- le cap à prendre sur le segment entre les waypoints ;
- le temps de parcours de chacun des segments ;
Cette liste des waypoints W1 est toujours affichée de bas en haut, c'est-à-dire que les premiers waypoints rencontrés sont en haut, les suivants se trouvant en dessous. ('..)
L'affichage vertical VD permet de représenter sur une coupe verticale longitudinale :
- les aspects verticaux du plan de vol comme les altitudes, les changements d'altitude, les taux de montée et de descente,'
- l'altitude du terrain sous la trajectoire ou sous le plan de vol de l'avion. Il permet de représenter très intuitivement les moments clés, tels que la fin de montée ou le début de la descente de l'appareil.
Ces différents affichages permettent ainsi aux opérateurs de prendre connaissance de tous les aspects ayant trait à la gestion de la navigation de l'aéronef, que ce soit sur un plan tactique ou stratégique :
- tactique ; pour une vision complète et précise du contexte proche de l'aéronef, la distance et le temps au prochain waypoint, la déviation verticale au plan de descente, le relief environnant lors du décollage ou de l'approche, les vents et perturbations météo, les moyens de navigation,'
- stratégique : pour appréhender et anticiper les situations à venir, les choix stratégiques en terme de plan de vol, de météo, de consommation, de niveaux de vol,'»
Problème technique
Selon la description, « l'inconvénient majeur de ces représentations, y compris sur les systèmes les plus aboutis, est leur manque d'intégration et d'intercorrélation ne permettant pas de les mettre aisément en relation logique. Seule, l'échelle de représentation entre les fenêtres Ab Ac et Navigation Display présente une gestion commune et cohérente, la modification de l'échelle du ND se répercutant automatiquement sur l'affichage vertical VD. Les différentes fenêtres affichent des informations complémentaires dont les opérateurs doivent vérifier la cohérence et l'adéquation avec les capacités de l'aéronef en fonction des conditions environnementales et contextuelles rencontrées.
II est clair que le point commun entre toutes les informations affichées sur les fenêtres des systèmes de l'art antérieur est le temps. Ce point est également partagé avec l'équipage et la mission. Or, l'axe de temps est une représentation aujourd'hui totalement absente des cockpits, en dehors de l'heure de passage indiquée en face de chacun des points caractéristiques du plan de vol dans la représentation en tableau des waypoints. Dans les représentations existantes, l'heure n'est qu'une information qui n'a pas plus de valeur ou d'autre rôle que les autres informations fournies.
Or, l'aspect temporel est fondamental et indissociable de la gestion de la mission des opérateurs. Cependant, il apparaît très peu dans ces affichages. La vision des informations dans l'espace temporel demande aujourd'hui aux opérateurs des calculs mentaux, fonction des distances et de la vitesse courante ou future de l'aéronef.
Solution technique
Selon la description, « Le procédé selon l'invention est basé sur une échelle des temps. II permet d'obtenir une représentation cohérente et intégrée de la mission de l'aéronef. En d'autres termes, il offre aux équipages techniques des vues concises et efficaces de leur mission, leur permettant entre autres de comprendre, d'anticiper et de prendre les décisions en toute connaissance de l'état de l'avion et de son environnement. On améliore ainsi la perception de la situation de l'aéronef pendant la mission de l'équipage.
Plus précisément, l'invention a pour objet un procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef sur un écran d'un dispositif de visualisation, caractérisé en ce que les différentes étapes sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou « timeline », les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement.
1: Mise en gras ajoutée par la cour.
Avantageusement, la longueur de la « timeline » étant supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, la fenêtre graphique n'affiche alors qu'une partie de la «timeline », partie imposée par l'utilisateur du dispositif de visualisation. Avantageusement, la première fenêtre comporte un premier symbole représentatif de l'aéronef, ledit premier symbole étant situé, dans un mode de fonctionnement standard, sur l'échelle graduée à l'heure courante (') ».
La Figure 6 représente la fenêtre graphique graduée en temps ou timeline (TL) selon l'invention.
Le brevet tel que modifié comporte les 7 revendications suivantes :
Revendication 1
Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef sur un écran d'un dispositif de visualisation, la mission étant un plan de vol, chaque étape correspondant à un point de passage du plan de vol ou « waypoint », caractérisé en ce que les différentes étapes sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou «timeline » (TL), les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement, la longueur de la « timeline » étant supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, la fenêtre graphique n'affichant alors qu'une partie de la « timeline », partie imposée par l'utilisateur du dispositif de visualisation.
Revendication 2
Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon la revendication 1, caractérisé en ce que la première fenêtre comporte un premier symbole (A) représentatif de l'aéronef, ledit premier symbole étant situé, dans un mode de fonctionnement standard, sur l'échelle graduée à l'heure courante.
Revendication 3
Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon l'une des revendications 1 ou 2, caractérisé en ce que, lorsque l'heure courante est située hors de la fenêtre graphique, le premier symbole est affiché en haut ou en bas de la fenêtre, une action prédéterminée de l'utilisateur sur ledit symbole centrant automatiquement la « timeline » sur l'heure courante.
Revendication 4
Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que la première fenêtre graphique comporte une fonction « loupe » (L) permettant de dilater l'échelle des temps d'un facteur prédéterminé dans une plage horaire prédéterminée centrée sur un instant imposé par l'utilisateur du dispositif de visualisation.
Revendication 5
Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon l'une des revendication précédentes, caractérisé en ce que l'affichage comprend une seconde fenêtre graphique (ND) représentant une vue cartographique dudit plan de vol, ladite seconde fenêtre comportant également un second symbole (A') représentatif de l'aéronef, ledit second symbole étant situé, dans un mode de fonctionnement standard, sur la vue cartographique à l'heure courante.
Revendication 6
Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon la revendication 5, caractérisé en ce que la première fenêtre et la seconde fenêtre sont disposées sur le même écran de visualisation (DS), juxtaposées l'une à l'autre, ou sur des écrans différents.
Revendication 7
Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon l'une des revendications 2 à 6, caractérisé en ce que le déplacement de la loupe entraîne le déplacement du second symbole sur la vue cartographique de façon que la position de ce second symbole soit représentative de la position que l'aéronef occuperait effectivement à l'instant indiqué par la loupe.
Sur le bien-fondé de la décision du directeur général de l'INPI
Sur le caractère brevetable de la demande de brevet FR 10 04947
Revendication 1
La société Thalès conteste la décision du directeur général de l'INPI notamment en ce que, selon elle, il a confondu le critère de brevetabilité d'une invention et celui de l'activité inventive ou, à tout le moins, de la nouveauté ou de la suffisance de description, points étrangers au débat. Elle conteste ainsi que l'objet des revendications porte sur une présentation d'informations en tant que telle, sans intégrer aucun moyen technique dans sa mise en œuvre, comme le soutient l'INPI. Elle expose ainsi que le problème que la demande de brevet se propose de résoudre n'est nullement un problème d'ordre intellectuel mais, au contraire, un problème d'ordre technique, à savoir obtenir une représentation cohérente et intégrée de la mission de l'aéronef afin d'éviter aux pilotes d'avoir recours à leurs capacités cognitives ou à d'autres facteurs subjectifs.
Elle considère que le directeur de l'INPI a retenu à tort que la solution de la demande brevet se réduisait à la seule « liaison logique entre les étapes de la mission affichée et une échelle des temps » sans évoquer les étapes du procédé qui, selon elle, font usage de moyens techniques contribuant ainsi à l'invention revendiquée, qui se distingue ainsi de la simple présentation d'information.
Elle rappelle que les directives d'examen de l'INPI et de l'OEB ains que la jurisprudence n'excluent nullement la brevetabilité de présentations d'information, de sorte qu'une revendication qui a pour objet l'utilisation de moyens techniques pour présenter des informations ou qui définit une telle utilisation revêt, dans son ensemble, un caractère technique, soulignant que si le mode de représentation aide de façon crédible l'utilisateur à effectuer une tâche technique au moyen d'un processus d'interaction homme-machine continu et/ou guidé, il produit un effet technique.
Elle estime que, dans son arrêt, la cour de cassation a uniquement reproché à la cour d'appel de s'être bornée à reproduire les termes de la revendication 1, en s'abstenant de caractériser l'existence de moyens techniques et, ainsi, un défaut de motivation et non pas, comme le suggère l'INPI, en exigeant la caractérisation de moyens techniques distincts, ou autrement dit que le breveté justifie de moyens techniques présents dans les revendications qui apportent un concours technique à l'art antérieur, ce qui relève de l'activité inventive.
S'agissant plus précisément de la revendication 1, la société Thalès rappelle qu'elle vise un procédé d'affichage des étapes d'un plan de vol d'un aéronef sur un écran d'un dispositif de visualisation, de sorte que son objet implique nécessairement l'utilisation de moyens techniques en vue d'afficher des données techniques. Ainsi, la caractéristique « les différentes étapes sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou « timeline » (TL), les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement » implique, selon elle, l'utilisation d'un écran d'un dispositif de visualisation, de sorte qu'il n'a pas pour objet une simple présentation d'informations en tant que telle mais un moyen technique d'affichage.
Elle ajoute que la revendication 1 implique également une interaction entre l'utilisateur et le dispositif de visualisation car ce dernier effectue une tâche technique de sélection de la longueur et donc de l'affichage de la timeline, au moyen d'un processus d'interaction homme-machine afin de mieux séparer les tâches à accomplir grâce à un effet de zoom. Elle considère que l'affichage d'une partie, seulement, de la timeline sélectionnée par le pilote est un mode de présentation qui assiste de façon crédible le pilote à effectuer une tâche technique puisqu'il va pouvoir interagir avec la timeline, de sorte que toutes les étapes de la méthode objet de la revendication 1 nécessitent l'utilisation de moyens techniques qui sont, a minima, un écran de visualisation et un moyen d'interaction entre l'utilisateur et l'écran.
Elle en déduit que les moyens de la revendication 1 ont le caractère de moyens techniques qui apportent une contribution technique en produisant un effet technique et ce, pour répondre au problème technique se posant, soit « comment appréhender au mieux les informations nécessaires à l'accomplissement d'une mission de vol ' »
Le directeur général de l'INPI maintient le bien-fondé de sa décision. Il rappelle qu'afin de déterminer si une demande de brevet porte sur une invention relevant du champ des brevets ou, au contraire, sur une présentation d'informations non brevetable, il convient de s'interroger sur la nature du problème que la demande se propose de résoudre et de la solution qu'elle prétend y apporter. Il ajoute que lorsque la demande apporte une solution technique à un problème technique, elle porte sur une invention au sens du droit des brevets alors que si elle se contente d'exposer des informations ou de fournir un support caractérisé uniquement par le contenu de cette information, il s'agit d'une présentation d'informations exclue du champ de la brevetabilité.
Il soutient que, dans son arrêt, la Cour de cassation pose l'exigence d'une contribution technique du brevet, confirmant une jurisprudence établie, et que la demande explique, en quoi, les moyens techniques revendiqués, sont distincts de la simple présentation d'informations, de sorte que la seule allégation de l'existence de moyens techniques n'est pas suffisante pour caractériser une invention.
Il précise également que l'examen de la contribution technique est distinct de celui de l'activité inventive ou de la nouveauté et de la suffisance de description ; qu'en examinant la contribution technique, il est seulement recherché, selon lui, si le brevet énonce, d'une part, un problème technique et si, d'autre part, celui-ci est bien résolu par la solution technique exposée et revendiquée par le brevet.
Il estime également que les directives de l'INPI sont conformes à la jurisprudence de la Cour de cassation, et que la présence d'un écran, qu'il soit ou non utile, ne peut en tant que telle caractériser une contribution technique du brevet.
Au cas présent, il considère que l'objectif de la demande de brevet est d'améliorer l'affichage d'informations dans les cockpits afin de faciliter, pour les opérateurs, la lecture et la corrélation des données relatives aux étapes d'une mission d'aéronef, que l'inconvénient majeur des représentations de l'art antérieur est leur manque d'intégration et d'intercorrélation, imposant aux opérateurs des calculs mentaux, fonction des distances et de la vitesse courante ou future de l'aéronef, de sorte que le brevet se propose de faciliter la lecture et la corrélation des données relatives aux étapes d'une mission d'aéronef grâce à une échelle de temps et, plus précisément, en remplaçant la représentation sous forme de tableau, selon l'art antérieur, par un affichage au regard de l'horaire appelé la timeline, les informations présentées restant les mêmes.
Analysant chaque revendication, il considère qu'aucune ne fait état d'une contribution technique.
Le directeur de l'INPI en conclut que la demande de brevet cherche seulement à résoudre un problème d'affichage d'informations en organisant ces informations mais n'enseigne aucune contribution technique et n'apporte aucune solution technique à un problème technique.
Plus précisément, concernant la revendication 1, le directeur de l'INPI retient comme la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 21 mai 2019 que sa première caractéristique à savoir le procédé d'affichage des étapes du vol au regard de l'horaire correspondant à l'accomplissement du plan de vol n'est pas brevetable, rappelant que l'utilisation de moyens génériques tels un ordinateur ou un écran de visualisation utilisés de façon courante n'est pas de nature à caractériser une contribution technique.
S'agissant de la seconde caractéristique, à savoir l'affichage partiel de la timeline, l'INPI considère que la demande de brevet ne caractérise pas sur le plan technique la propriété se rapportant à cet effet zoom et qu'ainsi la contribution technique apportée par le brevet n'est pas avérée, la simple utilisation d'un dispositif d'affichage étant insuffisante à apporter la preuve d'une contribution technique, aucun moyen technique n'étant décrit pour parvenir à cet affichage partiel, la demande de brevet ne mettant pas en exergue techniquement les moyens d'interaction entre l'utilisateur et le dispositif d'affichage ou encore ceux lui permettant de zoomer et dézoomer, la société Thalès ne pouvant se contenter de soutenir que la revendication nécessite nécessairement des moyens techniques.
En vertu de l'article L.611-10 du code de la propriété intellectuelle :
« 1. Sont brevetables, dans tous les domaines technologiques, les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptibles d'application industrielle.
2. Ne sont pas considérées comme des inventions au sens du premier alinéa du présent article notamment :
a) Les découvertes ainsi que les théories scientifiques et les méthodes mathématiques ;
b) Les créations esthétiques ;
c) Les plans, principes et méthodes dans l'exercice d'activités intellectuelles, en matière de jeu ou dans le domaine des activités économiques, ainsi que les programmes d'ordinateurs;
d) Les présentations d'informations.
3. Les dispositions du 2 du présent article n'excluent la brevetabilité des éléments énumérés auxdites dispositions que dans la mesure où la demande de brevet ou le brevet ne concerne que l'un de ces éléments considéré en tant que tel. (') »
Puis, selon l'article L.612-12 du même code dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2019-486 du 22 mai 2019 :
« Est rejetée, en tout ou partie, toute demande de brevet : (')
5° Dont l'objet ne peut manifestement être considéré comme une invention au sens du 2 de l'article L. 611-10 ;
6° Dont la description ou les revendications ne permettent pas d'appliquer les dispositions de l'article L. 612-14 » (').
Ces dispositions posent comme condition de brevetabilité l'existence d'une invention, sans toutefois la définir, et listent certains domaines qui ne peuvent en tant que tels être considérés comme des inventions brevetables et notamment « les présentations d'informations ».
Il est par ailleurs constant qu'une invention se définit comme une solution technique apportée à un problème technique.
Ainsi, afin d'apprécier la brevetabilité d'une demande de brevet, il convient d'examiner si les moyens exposés dans les revendications apportent une solution technique à un problème technique, distinct de la simple présentation d'informations, permettant de répondre au problème technique posé par l'invention, établissant ainsi l'existence d'une contribution technique.
La cour rappelle, par ailleurs, que la demande de brevet, ayant une date de dépôt antérieure au 22 mai 2020, les dispositions applicables sont celle antérieures à la loi PACTE n°2019-486 du 22 mai 2019 ne permettant pas, à cette date, à l'INPI de rejeter une demande de brevet pour défaut d'activité inventive, comme devant l'OEB, mais d'examiner l'existence ou non d'une invention.
Il ressort de la demande de brevet telle que déposée, dont l'étendue de la protection est déterminée par les revendications, la description et les dessins servant à interpréter les revendications, qu'elle porte sur un procédé d'affichage temporel de la mission d'un aéronef sur un écran.
Décrivant l'état de la technique, la demande de brevet rappelle qu'il existe, dans les cockpits des aéronefs, des systèmes de visualisation offrant une vue graphique et géographique de la situation de l'avion (Navigation Display ND), la liste des points de passage ou « waypoints » (WL) du plan de vol de l'aéronef, ainsi que l'affichage vertical (VD) affichant le profil vertical du terrain sous le plan de vol de l'avion ou sous sa trajectoire estimée. La demande de brevet expose que l'inconvénient majeur de ces représentations est leur manque d'intégration et d'intercorrélation ne permettant pas de les mettre aisément en logique. Il rappelle que le point commun entre toutes ces informations données à l'équipage est le temps et propose ainsi une « invention basée sur l'échelle du temps ».
Ainsi, l'invention revendiquée a pour objet un procédé d'affichage temporel des étapes d'une mission d'un aéronef sur un écran d'un dispositif de visualisation, caractérisé en ce que les différentes étapes sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou Timeline, les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement. Il permet d'améliorer l'affichage en remplaçant la représentation sous forme de tableau, selon l'art antérieur, par un affichage au regard de l'horaire appelé Timeline, soit un axe temporel servant de support à la représentation de multiples données, les mêmes informations étant ainsi présentées au pilote mais sous une forme différente, étant précisé que ces informations ne sont pas calculées en temps réel mais correspondent à des « prédictions » d'heures de passage aux différents points caractéristiques, avec une connaissance précise des capacités de l'aéronef (page 6 de la description ligne 1 suivantes).
Le brevet se propose ainsi de faciliter la lecture et la corrélation des données relatives aux étapes d'une mission d'aéronef grâce à l'échelle temps. Il est ainsi clairement noté dans la description que l'invention permet d'obtenir une représentation cohérente et intégrée de la mission de l'aéronef et offre aux équipages techniques des vues concises et efficaces de leur mission, leur permettant entre autres de comprendre, d'anticiper et de prendre les décisions en toute connaissance de l'état de l'avion et de son environnement.
L'objet du brevet est donc le suivant « comment appréhender au mieux les informations nécessaires à l'accomplissement de la mission de l'aéronef ' »
Pour mémoire, la revendication 1 se lit comme suit : « Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef sur un écran d'un dispositif de visualisation, la mission étant un plan de vol, chaque étape correspondant à un point de passage du plan de vol ou « waypoint », caractérisé en ce que les différentes étapes sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou «timeline» (TL), les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement, la longueur de la «timeline» étant supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, la fenêtre graphique n'affichant alors qu'une partie de la « timeline », partie imposée par l'utilisateur du dispositif de visualisation. »
Ainsi, la revendication 1 décrit une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou « time line » par laquelle sont présentées au pilote les différentes étapes au regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement, incluant comme mentionné dans la description les données relatives au point de passage, à l'heure de passage, à la vitesse et à l'altitude (figure 6). Or, force est de constater que cette caractéristique ne porte que sur une présentation spécifique, en fonction d'une ligne de temps, de certaines informations, sans revendiquer de moyens techniques distincts de cette présentation d'information, l'utilisation d'un moyen générique tel un éventuel écran de visualisation n'étant pas de nature à caractériser l'existence d'une contribution technique, rien n'étant dit quant aux moyens techniques utilisés pour générer ce simple affichage de données au pilote, ni, au demeurant, quant au rôle de ces dits moyens techniques.
La revendication 1 prévoit également que la longueur de la time line étant supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, le pilote peut n'afficher qu'une partie de la « timeline » dans la fenêtre graphique, et a ainsi la possibilité de « zoomer » sur l'information mais ne décrit ni n'explique en quoi le moyen revendiqué a le caractère de moyen technique, distinct de la simple présentation d'informations pour ce dernier, ni au demeurant la tache technique qui s'en trouve ainsi facilitée et pas davantage les moyens d'interaction homme-machine.
Ainsi, si la société Thalès soutient que l'affichage d'une partie seulement de la timeline serait obtenu au travers de moyens techniques tels qu'un trackball ou un écran tactile ou que cette caractéristique « nécessite nécessairement des moyens techniques de sélection », il n'en demeure pas moins, comme le souligne le directeur de l'INPI, qu'aucun dispositif de cette sorte ne figure dans le brevet, ce document ne divulguant pas davantage les moyens techniques d'interaction entre l'utilisateur et le dispositif d'affichage lui permettant de zoomer et de dézoomer, et alors qu'il est constant qu'aucune opération de saisie n'est par ailleurs réalisée par le pilote et qu'il n'est fait état d'aucun effet technique qui émergerait des interactions homme-machine décrites dans la demande. Sur ce point, la société Thalès ne peut se contenter, s'agissant précisément de l'examen de la seule brevetabilité, de soutenir que l'homme du métier, par ses connaissances générales, sait réaliser cette fonction technique sans qu'il ait besoin d'autres indications, critère étranger au présent débat.
De plus, contrairement à ce que soutient la requérante, le directeur de l'INPI en procédant à l'examen de la brevetabilité ainsi circonscrit de la demande de brevet ne s'est nullement livré à un contrôle de son activité inventive, de sa nouveauté ou de la suffisance de sa description, qui obéissent tous à des critères différents, s'étant contenté de déterminer si elle portait sur une invention relevant du champ des brevets ou, au contraire, sur une présentation d'informations non brevetable.
Aussi, faute pour la société Thalès d'expliciter en quoi cet affichage partiel de la timeline sur un écran constitue une solution technique à un problème technique distinct de la simple présentation d'informations fournies au pilote, c'est à juste titre que le directeur de l'INPI a retenu son défaut de brevetabilité.
Revendication 2
La société Thalès ne fait pas de commentaire sur cette revendication.
Le directeur de l'INPI relève que cette revendication consiste en une simple présentation d'informations. Il souligne que dans l'invention les données ne sont pas mesurées en temps réel mais préenregistrées pour un type de vol, la description de la demande ne faisant état d'aucune mesure en temps réel.
La revendication 2 porte sur un procédé d'affichage selon la revendication 1 caractérisé en ce que la première fenêtre comporte un symbole représentatif de l'aéronef, situé l'échelle graduée à l'heure courante.
La simple lecture de cette revendication permet de constater qu'elle ne porte que sur une présentation d'informations, soit le positionnement d'un symbole représentant un avion sur la Timeline, sans solution technique apportée à un problème technique.
Revendication 3
La société Thalès précise que la revendication 3 est dépendante d'une des revendications 1 ou 2. Elle décrit un procédé qui permet à l'utilisateur, par le biais d'une action mécanique, de recentrer automatiquement la vue temporelle sur l'heure courante et la position courante de l'avion, de sorte que l'utilisateur effectue une tâche technique au moyen d'un processus d'interaction homme-machine qui lui permettra de comprendre, d'anticiper et prendre les meilleures décisions en toute connaissance de l'état de l'avion et de son environnement. Contestant la critique de l'INPI en ce que l'action prédéterminée ne serait pas suffisamment techniquement décrite, la société Thalès considère que cette action implique implicitement des moyens techniques d'interaction avec l'écran.
Elle retient en conséquence que les moyens supplémentaires de la revendication 3 ont le caractère de moyens techniques qui apportent une contribution technique en produisant un effet technique consistant à interagir sur le symbole représentant l'aéronef, pour le recentrer sur l'heure courante dans l'affichage de la fenêtre graphique sur l'écran du cockpit concerné, moyens distincts de la simple présentation d'informations en tant que telle puisqu'ils impliquent nécessairement l'utilisation d'un écran tactile ou d'un écran muni d'un dispositif d'interaction homme-machine du type trackball, et, ce pour répondre au problème technique se posant soit, « comment appréhender au mieux les informations nécessaires à l'accomplissement d'une mission de vol ' ».
Le directeur de l'INPI relève que ni la description ni les revendications ne précisent la manière dont la vue temporelle est recentrée, de sorte qu'aucune contribution technique n'est caractérisée.
La cour constate que cette revendication divulgue la possibilité pour l'utilisateur, lorsque l'heure courante est située hors de la fenêtre graphique, le symbole représentatif de l'avion étant affiché en haut ou en bas de la fenêtre, par « une action prédéterminée » de centrer automatiquement la « timeline » sur l'heure courante et la position courante de l'avion. ( page 8 lignes 20 à 22 de la description).
Comme l'a relevé le directeur de l'INPI, rien dans la description et la revendication ne précise la manière dont la vue temporelle est ainsi recentrée, ni davantage les moyens permettant d'interagir sur le symbole représentant l'aéronef, la société Thalès se contentant de soutenir de manière générale que « l'utilisateur effectue une tache technique au moyen d'un processus d'interaction homme-machine qui lui permettra de comprendre, d'anticiper et de prendre les décisions en toute connaissance de l'état de son avion et de son environnement », et que cette action « implique en effet implicitement des moyens techniques d'interaction avec l'écran », sans expliciter en quoi ce procédé d'affichage précis constitue une solution technique à un problème technique, distinct de la simple présentation des informations sur l'heure courante ainsi offerte au pilote.
Revendication 4
Selon la société Thalès, la revendication 4 divulgue un moyen technique qui apporte une contribution technique en produisant un effet technique à savoir dilater l'échelle des temps dans une plage horaire déterminée à l'aide d'un outil faisant office de loupe, dans l'affichage de la fenêtre graphique sur l'écran du cockpit concerné, moyens distincts de la simple présentation d'information en ce qu'elle implique nécessairement l'utilisation d'un écran tactile muni d'un dispositif d'interaction homme machine du type trackball, pour répondre au même problème technique.
Le directeur de l'INPI souligne que si la demande fait bien état d'un résultat à atteindre, elle n'explique pas la solution technique adoptée pour atteindre le résultat attendu, en l'espèce, la possibilité de dilater l'échelle de temps, de sorte que seul est revendiqué le résultat à atteindre et que la contribution technique n'est pas étayée.
Sur ce, la revendication 4 divulgue l'existence d'une fonction loupe au sein de la première fenêtre graphique permettant de dilater l'échelle des temps sur un instant choisi par le pilote.
La cour retient, comme le directeur de l'INPI, que si le brevet fait état d'un résultat à atteindre, soit le fait de « dilater » l'échelle du temps, rien dans la demande de brevet n'évoque ni n'explique le moyen technique adopté pour atteindre ce résultat, ni, au demeurant, la tache technique qui s'en trouve ainsi facilitée pour le pilote, autre que la présentation d'information centrée sur un instant donné.
Aussi, faute d'établir l'existence d'une solution technique à un problème technique et ainsi l'existence d'une contribution technique, la brevetabilité de cette revendication n'est pas établie.
Revendication 5 et 6
Selon la société Thalès, les revendication 5 et 6 présentent des moyens techniques qui apportent une contribution technique en produisant un effet technique, en ce que le procédé d'affichage comprend une deuxième fenêtre graphique représentant une vue cartographique du plan de vol comportant un second symbole de l'avion placé à l'heure courante, les deux fenêtres pouvant être disposées sur un même écran ou sur deux écrans de visualisation différents, caractéristiques distinctes de la simple présentation d'information en ce qu'elles impliquent nécessairement le recours à un ou plusieurs écrans d'affichage qui sont des moyens techniques, permettant de répondre au même problème technique dégagé précédemment.
S'agissant des revendications 5 et 6, le directeur de l'INPI constate que précédemment, la société Thalès ne défendait pas leur caractère technique. Elle ajoute que ces deux revendications ont seulement trait à des présentations d'informations, la présence d'écran sur lequel sont visualisées ces informations ne permettant pas de caractériser l'existence d'une contribution technique apportée par le brevet.
La revendication 5 décrit un procédé d'affichage comprenant une seconde fenêtre graphique (ND) représentant une vue cartographique du plan de vol comportant un symbole représentatif de l'avion situé sur la vue cartographique à l'heure courante.
La revendication 6 divulgue un procédé d'affichage dans lequel la première et la seconde fenêtre sont disposées sur le même écran de visualisation juxtaposées ou sur des écrans différents.
Ces revendications portent donc sur une présentation d'informations, et plus précisément sur l'affichage des étapes d'une mission d'un avion, visant à la fois le contenu cognitif de l'information et la manière dont celle-ci est présentée, sans revendiquer cependant de moyens techniques utilisés pour générer une telle présentation d'informations.
Ainsi, faute de caractériser l'existence de la contribution technique apportée par cette revendication et d'expliquer en quoi les moyens revendiqués dans cette demande ont le caractère de moyens techniques distincts de la simple présentation d'informations, la brevetabilité de ces revendications n'est pas justifiée, la seule mention de la présence d'un écran de visualisation ou d'écrans différents étant insuffisante à cet égard.
La brevetabilité des revendications 5 et 6 n'est donc pas établie.
Revendication 7
Selon la société Thalès, la revendication 7 divulgue des moyens techniques qui apportent une contribution technique en produisant un effet technique en ce qu'ils consistent à manier un outil loupe sur la première fenêtre pour déplacer le symbole de l'aéronef ce qui entrainera, sur la deuxième fenêtre, l'affichage du déplacement du second symbole de l'aéronef sur la vue cartographique et ce, sur un même écran ou deux écrans de visualisation différents, ces caractéristiques étant distinctes de la simple présentation d'informations en ce qu'elles impliquent le recours à un dispositif d'affichage et à un dispositif d'interaction homme-machine qui sont des moyens techniques et qui répondent au problème technique déjà exposé.
Le directeur de l'INPI relève que la synchronisation entre le déplacement de la loupe sur la barre temporelle et la vue cartographique permet seulement une présentation plus conviviale des informations préenregistrées relatives au plan de vol. Il ajoute que la position cartographique affichée après le déplacement de la loupe ne correspond pas au positionnement réel de l'aéronef à l'instant indiqué, mais au positionnement qu'il devrait avoir au vu des données préenregistrées. Rappelant que l'affichage du résultat d'une simulation constitue une présentation d'informations exclue en tant que telle de la brevetabilité, il maintient le bien-fondé de sa décision. Contestant la position de la société Thalès faisant état d'un processus d'interaction homme-machine produisant un effet technique, il souligne que cette interaction n'est pas continue et qu'elle n'est pas davantage guidée puisque l'utilisateur n'est pas aidé pour obtenir un effet spécifique.
La revendication 7 divulgue un procédé d'affichage dans lequel le déplacement de la loupe sur la barre temporelle ou Timeline entraîne le déplacement concomitant du symbole représentant l'avion sur la vue cartographique, la position de ce dernier étant représentative de la position que l'aéronef occuperait effectivement à l'instant indiqué par la loupe.
Comme justement analysé par le directeur de l'INPI, la synchronisation entre le déplacement de la loupe sur la barre temporelle et de l'avion sur la vue cartographique permet une présentation plus conviviale des informations, la position cartographique ainsi affichée ne correspondant pas au positionnement réel de l'avion mais au positionnement qu'il devrait avoir au vu des données préenregistrées. Ainsi, cet affichage résultant d'une simulation constitue, en tout état de cause, une simple présentation d'informations au pilote.
L'interaction homme-machine revendiquée par la société Thalès qui n'est au demeurant pas guidée, l'utilisateur n'étant pas aidé pour obtenir un effet spécifique, ne permet pas d'établir l'existence d'une contribution technique et ce alors qu'il n'est pas davantage décrit en quoi les moyens revendiqués ont le caractère de moyen technique aboutissant à une solution technique et non à une simple présentation améliorée d'informations pour le pilote de l'avion.
En conséquence, il convient de débouter la société Thalès de sa demande tendant à voir annuler la décision de l'INPI.
Sur l'impossibilité d'établir un rapport de recherches
La société Thalès conteste l'impossibilité pour l'INPI d'avoir pu réaliser le rapport de recherche préliminaire en raison de l'absence de caractéristiques techniques suffisantes, alors même que l'Office des Etats Unis (USPTO) a pu l'établir. Par ailleurs, elle souligne avoir déposé des demandes de brevets similaires qui ont pu faire l'objet d'un rapport de recherche. Elle ajoute que la demande de brevet a pu être classifiée, de sorte que l'objet de la demande peut faire l'objet d'une comparaison avec l'état de la technique et peut ainsi faire l'objet d'un rapport de recherche.
Le directeur de l'INPI maintient que faute de caractéristiques techniques suffisantes l'objet de la demande ne pouvait faire l'objet d'une comparaison avec l'état de la technique et ne permettait donc pas l'établissement du rapport de recherche prévu par l'
article L. 612-14 du code de la propriété intellectuelle🏛.
En vertu de l'article L. 612-14 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction applicable à la cause, « Sous réserve des dispositions prévues à l'article L. 612-15 et si elle a reçu une date de dépôt, la demande de brevet donne lieu à l'établissement d'un rapport de recherche sur les éléments de l'état de la technique qui peuvent être pris en considération pour apprécier, au sens des articles L. 611-11 et L. 611-14, la brevetabilité de l'invention. Ce rapport est établi dans des conditions fixées par décret. »
Dans la mesure où le défaut de brevetabilité de la demande de brevet a été retenu, il n'y a pas lieu d'examiner le grief tiré de l'impossibilité de l'établissement du rapport de recherche.