Jurisprudence : CA Fort-de-France, 21-01-2025, n° 23/00457, Autres décisions constatant le dessaisissement en mettant fin à l'instance et à l'action

CA Fort-de-France, 21-01-2025, n° 23/00457, Autres décisions constatant le dessaisissement en mettant fin à l'instance et à l'action

A28586TZ

Référence

CA Fort-de-France, 21-01-2025, n° 23/00457, Autres décisions constatant le dessaisissement en mettant fin à l'instance et à l'action . Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/115386418-ca-fortdefrance-21012025-n-2300457-autres-decisions-constatant-le-dessaisissement-en-mettant-fin-a-l
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ARRET N°


N° RG 23/00457


N° Portalis DBWA-V-B7H-CNOB


[X] [U]


[R] [D]


[B] [D]


[T] [D]


S.A.R.L. LE A


C/


S.A.S. SOREDOM


COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE


CHAMBRE CIVILE


ARRET DU 21 JANVIER 2025


Décision déférée à la cour : jugement du tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre du 27 juin 2017, après cassation de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Basse-Terre le 14 décembre 2020 par la Cour de cassation⚖️ en date du 12 janvier 2023 enregistré sous le n° 65 F-D



APPELANTS :


Madame [X] [U]

[Adresse 6]

[Localité 4]


Représentée par Me Caroline CHAMBRUN, avocat au barreau de MARTINIQUE


Madame [R] [D]

[Adresse 11]

[Localité 3]


Représentée par Me Caroline CHAMBRUN, avocat au barreau de MARTINIQUE


Monsieur [B] [D]

[Adresse 8]

[Localité 4]


Représenté par Me Caroline CHAMBRUN, avocat au barreau de MARTINIQUE


Monsieur [T] [D]

[Adresse 10]

[Localité 2]


Représenté par Me Caroline CHAMBRUN, avocat au barreau de MARTINIQUE


S.A.R.L. LE ROTABAS prise en la personne de son représentant légal domicilié au-dit siège

[Adresse 7]

[Localité 4]


Représentée par Me Caroline CHAMBRUN, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

Me Sarah SEBAG, avocat plaidant au barreau de GUADELOUPE


INTIMEE :


S.A.S. SOREDOM venant aux droits de la SOCIETE FINANCIERE ANTILLES GUYANE - SOFIAG

[Adresse 1]

[Localité 5]


Représentée par Me Régine CELCAL-DORWLING-CARTER de la SELARL DORWLING-CARTER-CELCAL, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

Me Harry J. DURIMEL de la SELARL DURIMEL ET BANGOU, avocat plaidant au barreau de GUADELOUPE



COMPOSITION DE LA COUR :


L'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 novembre 2024 sur le rapport de Monsieur Thierry PLUMENAIL, devant la cour composée de :


Présidente : Madame Christine PARIS, présidente de chambre

Assesseur : Monsieur Thierry PLUMENAIL, conseiller

Assesseur : Madame Claire DONNIZAUX, conseillère


qui en ont délibéré.


Greffière lors des débats : Madame Aa B C,


Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile🏛, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 21 Janvier 2025.


ARRÊT : contradictoire


prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'alinéa 2 de l'article 450 du code de procédure civile.



EXPOSE DU LITIGE


Suivant acte authentique du 29 juin 1982, la SODEGA, aux droits de laquelle est venue par la suite la SOFIAG, a consenti à la SARL Le Rotabas un crédit à long terme n°0316801 d'un montant de 1.892.000 [Localité 9], soit 288.433,54 euros, destiné à la construction d'un ensemble immobilier touristique.


Par acte authentique des 7 août et 24 octobre 1984, la SODEGA a accordé à la SARL Le Rotabas un prêt à long terme n°0316807 d'un montant de 700.000 [Localité 9], soit 106.714,31 euros.


Les engagements de la SARL Le Rotabas étaient garantis par les cautionnements solidaires de Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D], M. [G] [D] et M. [T] [D].


Par courrier du 19 août 2004, la SODEGA a prononcé la déchéance du terme des deux prêts.


Par acte du 15 novembre 2004, la SARL Rotabas ainsi que Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D], ont sollicité en référé la désignation d'un expert chargé de déterminer de quelle façon les paiements avaient été affectés par la SODEGA au remboursement des prêts et quelles étaient les sommes restant dues.


L'expert, désigné par ordonnance du 06 janvier 2006, a déposé son rapport le 31 janvier 2009.


Par actes d'huissier des 1, 2,3, 11 et 12 juin 2013, la SAS SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, a fait signifier à la SARL Rotabas, à Mme [X] [U], à Mme [R] [D], à M. [B] [D] et à M. [T] [D] un commandement de payer aux fins de saisie vente afin de recouvrer le solde restant dû au titre du prêt de 1982.


Au terme d'une longue procédure, la cour d'appel de Basse-Terre, par arrêt du 26 novembre 2018, a confirmé le jugement du juge de l'exécution de Pointe-à-Pitre du 04 novembre 2014 qui avait annulé ce commandement.


Par acte du 1er juillet 2013, la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] ont assigné la SAS SOFIAG devant le tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre afin de voir annuler l'expertise et de voir condamner la défenderesse au remboursement de sommes trop-perçues au titre du remboursement des prêts.


Par acte du 11 septembre 2013, la SAS SOFIAG a assigné la SARL Le Rotabas devant le tribunal mixte de commerce afin de la voir condamner à lui payer une somme restant due au titre des prêts.


La jonction de ces deux procédures ayant été ordonnée, le tribunal mixte de commerce a, par jugement du 27 juin 2017:

'- rejeté la fin de non recevoir soulevée par la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] contre la SAS SOFIAG tirée de la prescription de sa créance,

- rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise de M. [Y] déposé le 30 janvier 2009,

- rejeté la demande de la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] tendant à la désignation d'un nouvel expert,

- rejeté la demande de la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] tendant à la déchéance du droit aux intérêts de la SAS SOFIAG,

- débouté la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de leurs demandes tendant à la nullité de l'avenant au prêt du 23 juin 1995,

- condamné solidairement la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] à payer à la SAS SOFIAG venant aux droits de la SODEGA la somme de 247.127 euros avec intérêts au taux de 12% à compter de l'assignation et jusqu'à parfait paiement,

- constaté que la SAS SOFIAG venant aux droits de la SODEGA se trouvait débitrice à l'égard de la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de la somme de 7.677 euros au titre d'un trop perçu sur le prêt n°0316807,

- ordonné la compensation entre les deux créances réciproques, exigibles, certaines et fongibles,

- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

- condamné in solidum la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement.'


La SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] ont interjeté appel total à l'encontre de cette décision par déclaration remise au greffe de la cour par voie électronique le 21 juillet 2017.



Par arrêt rendu le 14 décembre 2020, la cour d'appel de Basse-Terre a statué comme suit:

'Déclare recevable l'appel interjeté par la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D],

Déboute Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de leur demande tendant à être mis hors de cause,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- rejeté la fin de non recevoir soulevée par la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] contre la SAS SOFIAG tirée de la prescription de sa créance,

- condamné solidairement la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] à payer à la SAS SOFIAG venant aux droits de la SODEGA la somme de 247.127 euros avec intérêts au taux de 12% à compter de l'assignation et jusqu'à parfait paiement,

- constaté que la SAS SOFIAG venant aux droits de la SODEGA se trouvait débitrice à l'égard de la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de la somme de 7.677 euros au titre d'un trop perçu sur le prêt n°0316807,

- ordonné la compensation entre les deux créances réciproques, exigibles, certaines et fongibles,

- condamné in solidum la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] aux entiers dépens,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Constate la prescription de la créance invoquée par la SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, à l'encontre de la SARL Rotabas et des cautions, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D], au titre du prêt professionnel n°0316801,

Déboute la SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, de sa demande en paiement formée à l'encontre de la SARL Rotabas, de Mme [X] [U], de Mme [R] [D], de M. [B] [D] et de M. [T] [D],

Condamne la SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, à payer à la SARL Le Rotabas la somme de 7.677 euros au titre d'un trop perçu sur le prêt n°0316807, outre intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2013,

Y ajoutant,

Déboute la SARL Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de leurs demandes de dommages-intérêts,

Ordonne la mainlevée de l'hypothèque prise par la société SODEGA sur le terrain de la société Le Rotabas, ainsi que la mainlevée des privilèges et nantissement sur le fonds de commerce,

Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte,

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres frais,

Condamne la SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire,

Dit que les dépens pourront être recouvrés par Maître Sarah Charbit'Sebag conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile🏛.'


Sur pourvoi de la société Soredom, la Cour de cassation, par arrêt du 12 janvier 2023, a statué comme suit:

'CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société Le Rotabas, de Mme [U], de Mme [R] [D], de M. [B] [D] et de M. [T] [D] tendant à voir condamner la société Soredom au paiement de dommages-intérêts pour manquement de la banque à son devoir d'information au titre des contrats de prêt et pour défaut de communication des tableaux d'amortissement, l'arrêt rendu le 14 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France.'


Par déclaration enregistrée le 26 décembre 2023 au greffe de la cour, la société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] ont saisi la cour d'appel de renvoi.


M. [B] [D] est décédé en cours de procédure.


Dans des conclusions d'appelant n° 2 en date du 18 septembre 2024, la société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D] et M. [T] [D] demandent à la cour d'appel de renvoi de:

'RECEVOIR la société ROTABAS et les consorts [U] [D] en leur saisine de la cour d'appel de renvoi après cassation, et les déclarer bien fondés

IN LIMINE LITIS

JUGER que la société SOREDOM, ex SOFIAG, a attendu 20 ans pour invoquer pour la première fois devant la juridiction de céans la fin de non recevoir tirée de la prescription de la demande d'indemnisation du fait de la violation des obligations d'information du banquier

CONDAMNER la société SOREDOM, précédemment SOFIAG venant aux droits de SODEGA à verser à la société ROTABAS la somme de 20 000 euros de dommages et intérêts pour abus de procédure

REJETER la fin de non recevoir tirée de la prescription invoquée par la société SOREDOM

DECLARER la demande de la société ROTABAS bien fondée.

CONSTATER que la SOREDOM, précédemment SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA n'a pas respecté les obligations d'information qui lui incombait , ainsi que ses obligations contractuelles notamment relatives aux taux d'intérêts, TEG, relevés d'intérêts et tableaux d'amortissement

A TITRE PRINCIPAL

CONDAMNER la société SOREDOM précédemment nommée SOFIAG, venant aux droits de la société SODEGA, à verser à la société ROTABAS des dommages et intérêts pour violation de l'obligation d'information au titre des contrats de prêt et pour violation des obligations contractuelles, soit 'à la somme de 447 879 euros correspondant aux intérêts versés par la société ROTABAS

SUBSIDIAIREMENT

CONDAMNER la société SOREDOM précédemment nommée SOFIAG, venant aux droits de la société SODEGA, à payer à la société ROTABAS des dommages et intérêts pour violation de l'obligation d'information au titre des contrats de prêt et pour violation des obligations contractuelles, soit à la somme de 81 639 .97 euros correspondant à la subsitution des intérêts au taux conventionnel par les intérêts au taux légal,

CONDAMNER la société SOREDOM précédemment nommée SOFIAG, venant aux droits de SODEGA, au paiement à chacune des cautions soit [X] [U], [R] [D], [T] [D], de la somme de 10 000 euros a titre de dommages et intérêts

CONDAMNER La SOFIAG devenue SOREDOM au paiement à la société ROTABAS de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts

CONDAMNER la société SOREDOM précédemment SOFIAG, venant aux droits de SODEGA, au paiement à ROTABAS de 15 000 euros au titre de l'article 700 du NCPC.'


La société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D] et M. [T] [D] exposent que, pour la première fois en 20 ans de procédure, la Sofiag invoque le fait que la demande de réparation de la violation de l'obligation d'information et de conseil du banquier, formulée par la société Le Rotabas serait prescrite, ce qui constitue un abus de procédure en application de l'article 123 du code de procédure civile🏛. Ils précisent que, alors que la violation de l'obligation d'information du banquier était invoquée par la société Le Rotabas dans l'assignation en référé du 15 novembre 2004, ce qu'a rappelé le tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre dans l'ordonnance de référé du 6 janvier 2006, la société Sofiag n'a pas invoqué la prétendue prescription de la demande dans ses conclusions du 29 avril 2005. Ils ajoutent que, alors que la violation de l'obligation d'information du banquier était invoquée à nouveau par la société Le Rotabas dans son assignation du 1er juillet 2013, puis devant la cour d'appel de Basse-Terre, la société Sofiag n'invoquait toujours pas la prétendue prescription de la demande dans ses écritures au cours de ces deux procédures. La société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D] et M. [T] [D] font valoir également que le point de départ de la prescription doit être fixé à la date du premier incident de paiement, soit le premier commandement de payer délivré par la Sofiag le 12 juin 2013, dès lors que, en l'absence d'un acte de recouvrement antérieur, la date du premier incident de paiement est restée de ce fait indéterminée. Ils prétendent que, dans ces conditions, aucune prescription ne peut être invoquée à l'encontre de la demande de la société Le Rotabas.


Par ailleurs, la société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D] et M. [T] [D] exposent que la banque a engagé sa responsabilité dès lors que, sur le prêt n° 0316 801, il manque le montant des intérêts différés, les variations du taux d'intérêt, le taux effectif global, les tableaux d'amortissement du prêt et, dans le contrat de prêt n° 0316807, il manque la composition du taux effectif global, les tableaux d'amortissement du prêt et les relevés des intérêts. Ils précisent que les cautions n'ont jamais reçu les lettres d'information annuelles. Ils rappellent que c'est à la banque de démontrer qu'elle a communiqué à la société Le Rotabas lesdites informations. La société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D] et M. [T] [D] ajoutent que la Sodega a violé toutes ses obligations d'information et de conseil, ainsi que ses obligations contractuelles, de sorte qu'il y a lieu de sanctionner la banque sur le fondement de l'ancien article 1147 du code civil🏛.


Dans des conclusions d'intimée en date du 05 avril 2024, la société Soredom, venant aux droits de la société financière Antilles - Guyane - Sofiag, demande à la cour d'appel de renvoi de:

'Statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel formé par la SARL Le Rotabas et les consorts [U], [D] suivant déclaration en date du 26 décembre 2023.

Déclarer les demandes de la SARL Le Rotabas et des consorts [U], [D] irrecevables, étant prescrites.

À titre subsidiaire,

Débouter la société Le Rotabas et les consorts [U], [D] de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions.

Condamner solidairement la société Le Rotabas et les consorts [U], [D] à payer à la Sofiag, venant aux droits de la Sodega, la somme de 3500 €, en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens qui seront recouvrés par la SELARL Durimel § Bangou, conformément à l'article 699 du même code🏛.'


La société Soredom, venant aux droits de la société financière Antilles - Guyane - Sofiag, rappelle que les deux prêts ont été contractés respectivement les 29 joints 1982 et 27 août, 24 octobre 1984, alors que la responsabilité de la Sodega, devenue Sofiag, a été mis en cause par les appelants pour la première fois par la délivrance d'une assignation le 1er juillet 2013, soit plus de 10 ans après la conclusion des contrats, de sorte que leurs demandes sont manifestement prescrites en application de l'article L. 110 ' 4 ancien du code de commerce. Elle fait valoir également que si la SARL Le Rotabas et les consorts [D] ne visent plus les dispositions du code de la consommation, ils demandent néanmoins à la cour de condamner la banque à leur rembourser les intérêts payés, ce qui correspond à une demande implicite de déchéance des intérêts, alors que les prêts consentis aux appelants ne sont pas soumis aux exigences des articles L. 312 ' 1 et suivants du code de la consommation. La société Soredom précise que les fonds prêtés à la SARL Le Rotabas étaient destinés à financer la construction d'un complexe hôtelier, de sorte qu'il s'agit de prêts consentis à un commerçant pour les besoins de son activité commerciale et qui, de ce fait, ne sont pas soumis aux règles protectrices du droit de la consommation. Elle ajoute que les demandes des appelants ne sauraient davantage prospérer sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil, dès lors que la banque a informé l'emprunteur sur le montant des intérêts différés, les variations desdits intérêts, le taux effectif global et lui a communiqué les tableaux d'amortissement. Enfin, la société Soredom indique que l'expertise judiciaire ordonnée par le juge des référés a permis non seulement de reconstituer les tableaux d'amortissement, mais aussi de faire les comptes entre les parties qui se sont révélés créditeurs en faveur de la Sodega devenue Sofiag. Elle conclut que l'action en paiement de la Sofiag ayant été déclarée prescrite par la cour d'appel de Basse-Terre et aucune somme ne pouvant dès lors être recouvrée auprès des appelants, ces derniers ne peuvent invoquer un quelconque préjudice.


La clôture de l'instruction est intervenue le 17 octobre 2024.


Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, il sera fait expressément référence à la décision déférée à la cour et aux dernières conclusions déposées.


L'affaire a été plaidée à l'audience du 29 novembre 2024. La décision a été mise en délibéré au 21 janvier 2025.



MOTIFS


Sur la cassation partielle.


Selon l'article 623 du code de procédure civile🏛, la cassation peut être totale ou partielle. Elle est partielle lorsqu'elle n'atteint que certains chefs dissociables des autres. L'article 624 précise que la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui le prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.


Selon l'article 625 alinéa 1er du code de procédure civile🏛, sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant le jugement cassé.


Le dispositif de l'arrêt de cassation du 12 janvier 2023 est un arrêt de cassation partielle précisant son objet limité aux chefs de l'arrêt de la cour d'appel ayant débouté la société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de leurs demandes de dommages et intérêts.


Il résulte de l'exposé des motifs de l'arrêt rendu le 14 décembre 2020 que la cour d'appel de Basse-Terre a débouté la société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de leur demande de condamnation au paiement de la somme de 81.639,97 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la substitution des intérêts au taux conventionnel par les intérêts au taux légal et de leur demande de condamnation au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de communication des tableaux d'amortissement.


Force est de constater également que, alors que dans l'exposé du litige, la société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] avaient sollicité notamment la condamnation de la Sofiag au paiement de la somme de 81.639,97 euros pour violation de l'obligation d'information au titre des contrats de prêt et pour violation des obligations contractuelles et au paiement à chacune des cautions de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts, le tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre a répondu aux moyens et prétentions des parties dans son exposé des motifs, mais n'a pas statué sur ces demandes dans le dispositif de son jugement rendu le 27 juin 2017.


La Cour de cassation a également:

-remis, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France;

- condamné la société Soredom aux dépens;

- en application de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté les demandes.


La cour de renvoi relève également que, en première instance, la société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] avaient fait valoir que la Sodega n'a pas respecté les obligations d'information qui lui incombaient, et, que, en cause d'appel, ils ont présenté leurs demandes de dommages et intérêts, au titre du manquement à l'obligation d'information et au défaut de communication des tableaux d'amortissement, soit sur le fondement des articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation🏛 et L. 314-1 et suivants du code de la consommation🏛, soit sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil.


Dès lors, la cour d'appel de renvoi doit statuer sur les chefs de l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 14 décembre 2020, objet de la cassation partielle, ayant débouté la société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de leurs demandes de dommages et intérêts.


Le jugement rendu le 27 juin 2017 par le tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre est donc devenu définitif en ce qu'il a:

- rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise de M. [Y] déposé le 30 janvier 2009,

- rejeté la demande de la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] tendant à la désignation d'un nouvel expert,

- rejeté la demande de la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] tendant à la déchéance du droit aux intérêts de la SAS SOFIAG,

- débouté la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de leurs demandes tendant à la nullité de l'avenant au prêt du 23 juin 1995,

- condamné solidairement la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] à payer à la SAS SOFIAG venant aux droits de la SODEGA la somme de 247.127 euros avec intérêts au taux de 12% à compter de l'assignation et jusqu'à parfait paiement,

- constaté que la SAS SOFIAG venant aux droits de la SODEGA se trouvait débitrice à l'égard de la SARL Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D] de la somme de 7.677 euros au titre d'un trop perçu sur le prêt n°0316807,

- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement.


Dans ces conditions, il n'y a pas lieu pour la cour d'appel de renvoi de statuer sur les demandes des parties visant à voir confirmer ou infirmer ces chefs de jugement.


L'arrêt rendu le 18 février 2020, qui a infirmé le jugement du 27 juin 2017 en ses autres dispositions, est donc devenu définitif, après cassation partielle, en ce qu'il a:

- constaté la prescription de la créance invoquée par la SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, à l'encontre de la SARL Rotabas et des cautions, Mme [X] [U], Mme [R] [D], M. [B] [D] et M. [T] [D], au titre du prêt professionnel n°0316801;

- débouté la SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, de sa demande en paiement formée à l'encontre de la SARL Rotabas, de Mme [X] [U], de Mme [R] [D], de M. [B] [D] et de M. [T] [D];

- condamné la SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, à payer à la SARL Le Rotabas la somme de 7.677 euros au titre d'un trop perçu sur le prêt n°0316807, outre intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2013;

- ordonné la mainlevée de l'hypothèque prise par la société SODEGA sur le terrain de la société Le Rotabas, ainsi que la mainlevée des privilèges et nantissement sur le fonds de commerce;

- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte;

- dit que chaque partie conservera la charge de ses propres frais;

- condamné la SOFIAG, venant aux droits de la SODEGA, aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire,

- dit que les dépens pourront être recouvrés par Maître Sarah Charbit'Sebag conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.


Dans ces conditions, il n'y a pas lieu pour la cour d'appel de renvoi de statuer sur les demandes des parties visant à voir confirmer ou infirmer ces chefs de décision.


Sur la prescription.


. Sur l'obligation d'information.


L'article 122 du code de procédure civile🏛 dispose que :

Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.


Aux termes des dispositions de l'article 123 du code de procédure civile les fins de non- recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il n'en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts celui qui se serait abstenu, dans une intention dilatoire, de les soulever plutôt.


Il est constant que les fins de non recevoir peuvent être soulevées pour la première fois en cause d'appel, y compris devant la cour d'appel de renvoi.


La banque fait valoir que, s'agissant de l'obligation d'information, le point de départ de la prescription doit être fixé au jour où l'obligation du débiteur a été mise à exécution, c'est à dire à la date de la conclusion du contrat de prêt. Elle rappelle que les deux prêts en cause ont été contractés respectivement les 29 juin 1982 et 27 août, 24 octobre 1984.


En réponse, les appelants exposent que le délai de prescription de l'action en indemnisation du dommage résultant d'un manquement au devoir de mise en garde débute, non pas à la conclusion du contrat de prêt, mais à la date d'exigibilité des sommes au paiement desquelles l'emprunteur n'est pas en mesure de faire face.


Il n'est pas contesté que les actes de prêt litigieux s'analysent en des actes de commerce soumis en conséquence à la prescription de l'article L. 110-4 du code de commerce🏛, qui était de dix ans jusqu'au 18 juin 2008, puis fixée à cinq ans.


Selon l'article 2224 du code civil🏛, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.


L'article 26, II de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008🏛 prévoit que les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.


L'article 2241 du code civil🏛 dispose que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.


Il est de jurisprudence constante que la prescription d'une action en responsabilité engagée par l'emprunteur contre la banque, au titre de son devoir de conseil et d'information, se prescrit par cinq ans à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance (arrêts Cour de cassation, 1re Civ., 28 juin 2023, pourvoi n° 22-13.969⚖️; 3e Civ., 8 juin 2023, pourvoi n° 22-11.675⚖️).


Dès lors, il incombe à la cour d'appel de renvoi de rechercher la date à laquelle l'emprunteur avait eu une connaissance effective du dommage résultant du manquement de la banque à son obligation d'information.


Force est de constater que:

- par courrier adressé le 07 juin 2004 au directeur général de la Sodega, la société Le Rotabas a informé l'établissement de crédit que, s'agissant des deux prêts litigieux, les variations de taux de réescompte décidées par l'IEOM ne lui ont pas été notifées et n'ont pas été prises en compte dans le calcul des intérêts;

- par courrier adressé le 05 juillet 2004 à la SARL Le Rotabas, la Sodega a avisé l'emprunteur que les variations de taux de réescompte décidées par l'IEOM ne s'appliquent pas aux prêts qui lui ont été consentis et l'a également mis en demeure de lui rembourser la somme de 274'760,20 représentant ses impayés arrêtés au 5 juillet 2004;

- par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 30 juillet 2004, la société Le Rotabas a informé la banque que, pour les différents prêts souscrits, l'établissement de crédit a le devoir et l'obligation de fournir annuellement un relevé détaillé à l'emprunteur justifiant le montant du capital restant dû en principal, des intérêts réglés (intérêts d'après tableau d'amortissement), des pénalités et impayés détaillés et des assurances;

- par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 19 août 2004, la Sodega a prononcé la déchéance du terme du prêt n° 00000316801.


Il résulte également des pièces de la procédure que, par assignation en référé en date du 15 novembre 2004, les appelants ont fait appeler à comparaître la Sodega devant le tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre aux fins de solliciter la désignation d'un expert ayant pour mission de faire les comptes de tous les prêts consentis, en faisant valoir que la SARL Le Rotabas n'a jamais pu obtenir le décompte des sommes effectivement dues en distinguant les sommes qui étaient dues en capital, les sommes dues au titre des intérêts normés normaux, des intérêts majorés, des pénalités, des assurances, ainsi que le taux d'intérêt réellement appliqué.


Dès lors, il y a lieu de retenir que c'est à compter d'un courrier recommandé avec accusé de réception en date du 30 juillet 2004 dans lequel la société Le Rotabas invoquait une opacité et des écarts très importants dans le solde de la dette à régler à la banque, ainsi que l'obligation d'information à laquelle est tenue l'établissement de crédit, que l'emprunteur avait ou aurait dû avoir connaissance de l'existence d'un manquement de la banque à son devoir d'information et des conséquences éventuelles d'un tel manquement.


La cour d'appel de renvoi en déduit que la prescription n'était pas acquise à la date de l'assignation en référé du 15 novembre 2004, puis à la date de l'assignation délivrée le 1er juillet 2013, et que l'action en responsabilité engagée par les appelants à l'encontre de la Sodega est recevable.


. Sur le défaut d'information annuelle.


Il résulte des articles 71 du code de procédure civile🏛 et L. 341-6 du code de la consommation🏛, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016🏛, que la prétention de la caution fondée sur le défaut d'information annuelle , lorsqu'elle tend seulement au rejet de la demande en paiement des intérêts au taux contractuel formée par la banque à son encontre, constitue un moyen de défense au fond sur lequel la prescription est sans incidence (arrêt Cour de cassation, 1re Civ., 24 janvier 2024, pourvoi n° 22-23.940⚖️).


Force est de constater que, dès l'assignation délivrée le 1er juillet 2013 à la Sodega, les appelants ont sollicité la déchéance du droit aux intérêts de la banque.


Après avoir rappelé les dispositions de l'article L. 341-6 ancien du code de la code de la consommation, le premier juge a pourtant retenu, à tort, que, si la société Sofiag ne justifie par aucune pièce avoir adressé aux cautions l'information annuelle, la demande des cautions présentée pour la première fois devant le tribunal mixte de commerce, soit plus de dix ans après la souscription des prêts litigieux, est prescrite.


La cour d'appel de renvoi relève que, alors que les appelants avaient fait valoir à nouveau le défaut d'information annuelle à l'égard des cautions, la cour d'appel de basse-Terre est restée taisante sur ce point.


Force est de constater que, devant la cour d'appel de renvoi, les cautions invoquent le défaut d'information annuelle mais présentent une demande en paiement de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi et non pas au titre du manquement de la banque à son obligation d'information annuelle.


La cour en déduit que la prétention des cautions fondée sur le défaut d'information annuelle est recevable devant la cour d'appel de renvoi, dès qu'elle constitue uniquement un moyen de défense au fond, qui peut être proposé en tout état de cause, et sur lequel la prescription est sans incidence.


Sur l'exécution par la banque de ses obligations particulières d'information à l'égard de l'emprunteur et des cautions.


L'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.


Dans son exposé des motifs de l'arrêt rendu le 12 janvier 2023, la Cour de cassation a rappelé qu'il incombait à la société Soredom d'établir qu'elle avait exécuté ses obligations particulières d'information auprès de la société Le Rotabas et des cautions.


La société Le Rotabas et les cautions font valoir que les tableaux d'amortissement n'ont pas été communiqués par la banque, ainsi que des informations essentielles portant sur le montant des intérêts différés et le taux effectif global.


En réponse, la banque fait valoir que ces informations ont bien été portées à la connaissance de l'emprunteur.


Force est de constater que tant en première instance qu'en cause d'appel et devant la cour d'appel de renvoi, la banque n'a pas produit les tableaux d'amortissement, de sorte que l'emprunteur n'a pas été mis en mesure de prendre connaissance à la fois de manière globale et pour chaque échéance de remboursement, s'agissant des prêts n° 0316801 et 0316807, le montant en principal, le montant des intérêts contractuels, le montant des intérêts différés et le montant de l'assurance.


La cour relève également que la banque ne s'est pas conformée à son devoir d'information annuelle à l'égard des cautions, dès lors qu'elle ne leur a pas fait connaître au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts (normaux et différés), commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie.


La cour d'appel de renvoi en déduit que la société Soredom, anciennement dénommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, a engagé sa responsabilité contractuelle envers la société Le Rotabas, emprunteur, et Mme [X] [U], Mme [R] [D] et M. [T] [D], cautions.


Sur la perte de chance.


La société Le Rotabas, Mme [X] [U], Mme [R] [D] et M. [T] [D] sollicitent:

- à titre principal, la condamnation la société Soredom précédemment nommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, à verser à la société Rotabas des dommages et intérêts pour violation de l'obligation d'information au titre des contrats de prêt et pour violation des obligations contractuelles, soit 'à la somme de 447 879 euros correspondant aux intérêts versés par la société Rotabas;

- à titre subsidiaire, la condamnation de la société Soredom précédemment nommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, à payer à la société Rotabas des dommages et intérêts pour violation de l'obligation d'information au titre des contrats de prêt et pour violation des obligations contractuelles, soit à la somme de 81 639 .97 euros correspondant à la subsitution des intérêts au taux conventionnel par les intérêts au taux légal.


Il résulte des articles 4 et 1147, devenu 1231-1, du code civil🏛 que le juge ne peut refuser d'indemniser une perte de chance de ne pas subir un dommage, dont il constate l'existence, en se fondant sur le fait que seule une réparation intégrale de ce dommage lui a été demandée (arrêt Cour de cassation, Com., 9 novembre 2022, pourvoi n° 21-11.753⚖️).


Or, le préjudice résultant du manquement de la banque à son obligation d'information s'analyse en une perte de chance d'échapper aux risques qui se sont réalisés, en l'occurence l'impossibilité pour la société Le Rotabas d'honorer les échéances de remboursement aux dates prévues et d'être contrainte dans ces conditions de supporter des intérêts de retard.


La Cour de cassation retient de manière constante que la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée . Il en résulte que le préjudice de l'emprunteur ne peut en principe être égal au montant des intérêts de retard réclamés par la banque.


Dans son rapport d'expertise judiciaire clos le 31 janvier 2009, M. [P] [Y] a relevé que, s'agissant du prêt n° 0316801, le montant des intérêts de retard s'élève à la somme totale de 37.555,27 euros et, s'agissant du prêt n° 0316807, le montant des intérêts de retard s'élève à la somme totale de 11.766,09 euros, soit un total de 49.321,36 euros.


Il convient d'appliquer à cette somme le pourcentage de perte de chance pour la société Le Rotabas de ne pas avoir été contrainte au paiement d'intérêts de retard réclamés par la banque.


Cette perte de chance sera évaluée à 90 %, au regard du manquement de la banque à son obligation d'information et en particulier l'absence de remise à l'emprunteur des tableaux d'amortissement et des relevés faisant apparaître distinctement les intérêts normaux, les intérêts différés et les intérêts de retard dus.


Le préjudice de la société Le Rotabas résultant de la perte de chance de ne pas avoir été contrainte au paiement d'intérêts de retard réclamés par la banque sera calculé de la manière suivante: 90% x 49.321,36 euros = 44.389,22 euros.


En conséquence, la société Soredom, anciennement dénommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, sera condamnée à payer à la société Le Rotabas la somme de 44.389,22 euros à titre de dommages et intérêts.


Sur l'intention dilatoire.


Aux termes de l'article 123 du code de procédure civile , les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages - intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire , de les soulever plus tôt.


Force est de constater que la banque a évoqué pour la première fois la prescription après 20 ans de procédure, de sorte que l'intention dilatoire est avérée.


Toutefois, le moyen tiré de la prescription ayant été déclaré inopérant, la preuve d'un préjudice subi par les appelants, qui ne sollicitent pas de dommages et intérêts à ce titre, n'est pas rapportée.


Sur le préjudice moral.


L'article 1382, devenu 1240 du code civil🏛, dispose: «'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer».


Les cautions font valoir que, ayant été actionnées de manière oppressante par la banque, elles ont subi un préjudice moral.


Force est de constater qu'elles ne démontrent pas en quoi la banque aurait commis une faute.


En conséquence, Mme [X] [U], Mme [R] [D] et M. [T] [D] seront déboutées de leurs demandes respectives de dommages et intérêts.


Sur les demandes accessoires.


Force est de constater que la procédure devant le juge du fond a débuté en juillet 2013.


Dans ces conditions, il sera alloué aux appelants la somme de 12.000 euros au titre des frais irrépétibles.


La société Soredom, anciennement dénommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, sera déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.


Succombant, la société Soredom, anciennement dénommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, sera condamnée aux dépens de la présente instance.



PAR CES MOTIFS


La cour,


Statuant par arrêt contradictoire, sur renvoi après cassation partielle et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,


Vu l'arrêt rendu le 12 janvier 2023 par la Cour de cassation,


Statuant à nouveau dans la limite de sa saisine sur renvoi après cassation partielle,


Condamne la société Soredom, anciennement dénommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, à payer à la société Le Rotabas la somme de 44.389,22 euros à titre de dommages et intérêts;


Y ajoutant,


Déboute les parties de leurs plus amples demandes;


Condamne la société Soredom, anciennement dénommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, à payer à la société Le Rotabas et aux cautions la somme de 12.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;


Condamne la société Soredom, anciennement dénommée Sofiag, venant aux droits de la société Sodega, aux dépens de la présente instance.


Signé par Madame Christine PARIS, présidente de chambre et par Mme Béatrice PIERRE-GABRIEL, greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.


LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,

Article, 122, CPC Article, 1147, C. civ. Article, 2224, C. civ. Article, 2241, C. civ. Article, 623, CPC Ordonnance, 2016-301, 14-03-2016 Loi, 2008-561, 17-06-2008 Article, 71, CPC Article, 123, CPC Article, L341-6, C. consom. Article, L110-4, C. com. Article, L313-1, C. consom. Article, 625, alinéa 1, CPC Article, L314-1, C. consom. Lien d'indivisibilité Dommages-intérêts Intérêt au taux conventionnel Tableau d'amortissement Cour de renvoi Respect d'obligation Manquement à l'obligation d'information Jugement définitif Expertise Désignation d'un expert Trop perçu Exécution provisoire Prescription d'une créance À titre professionnel Taux légal Fonds de commerce Charge des frais Fin de non-recevoir Durée du délai Intention dilatoire Point de départ de la prescription Date du contrat Prêt Prescription de l'action Acte de commerce Action personnelle Titulaire d'un droit Durée prévue Interruption d'un délai Établissement de crédit Assignation en référé Intérêt normal Devoir d'information Prescription acquise Action en responsabilité Défaut d'information Moyen de défense Préjudice moral Obligation annuelle d'information Inexécution d'une obligation Cause étrangère Mauvaise foi du débiteur Obligation particulière d'information Taux effectif Intérêts contractuels Responsabilité contractuelle Réparation intégrale Réparation d'un préjudice Intérêts de retard Perte de chance Intérêts Preuve d'un préjudice Faute du banquier Frais répétibles

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