COUR DE CASSATION
L.G.
CHAMBRE MIXTE
Audience publique du 21 février 2003
Cassation
M. CANIVET, premier président
Pourvoi n° K 99-18.759
Arrêt n° 218 P
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, siégeant en CHAMBRE MIXTE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par Mme Micheline Z, demeurant Villeneuve-Loubet,
en cassation d'un arrêt rendu le 8 juin 1999 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre civile, section A), au profit de la Banque La Hénin, société anonyme, dont le siège est Paris ,
défenderesse à la cassation ;
Par arrêt du 18 juin 2002, la Première chambre civile a renvoyé le pourvoi devant une Chambre mixte. Le premier président a, par ordonnance du 10 février 2003, indiqué que cette Chambre mixte sera composée des Première, Deuxième, Troisième chambres civiles et de la Chambre commerciale, économique et financière ;
La demanderesse invoque, devant la Chambre mixte, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;
Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de Cassation par Me Choucroy, avocat de Mme Z ;
Un mémoire en défense a été déposé au greffe de la Cour de Cassation par la SCP Defrenois et Levis, avocat de la Banque La Hénin aux droits de laquelle vient la société Entenial ;
Le rapport écrit de M. U, conseiller et le projet d'avis de M. T T, premier avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;
Sur quoi, LA COUR, siégeant en Chambre mixte, en l'audience publique du 14 février 2003, où étaient présents M. S, premier président, MM. R, R, R, R, présidents, M. U, conseiller rapporteur, MM. Renard-Payen, Guerder, Chemin, Mme Aubert, MM. Cachelot, Dintilhac, Mmes Bezombes, Pinot, MM. Gridel, Croze, Petit, conseillers, M. T T, premier avocat général, Mme Q, greffier en chef ;
Sur le rapport de M. U, conseiller, assisté de M. P, greffier en chef, les observations de Me O, de la SCP Defrenois et Levis, l'avis de M. T T, premier avocat général, auquel les parties, invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Vu les articles 4, 64, 68 et 71 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte notarié, Mme Z s'est portée caution solidaire, pour l'acquisition d'une maison, d'un prêt consenti à M. N par la Banque La Hénin (la banque), aux droits de laquelle vient la société Entenial ; qu'à la suite de la défaillance du débiteur principal, la banque a mis ce dernier en demeure de payer, ainsi que la caution, puis a fait réaliser la garantie hypothécaire qu'elle détenait par la vente aux enchères publiques de l'immeuble ; que le prix obtenu n'ayant pas permis de couvrir la totalité de la dette, la banque a fait délivrer un commandement de payer à la caution, laquelle a formé opposition ;
Attendu que, pour rejeter cette opposition, l'arrêt retient que, en dehors du champ d'application de l'article 2037 du Code civil, la caution n'est recevable à agir en responsabilité pour faute à l'encontre du banquier que par voie de demande reconventionnelle et que les prétentions de Mme Z, fondées sur de prétendues fautes de la banque dans le recouvrement de sa créance, constituent un simple moyen de défense au fond ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les demandes reconventionnelles et les moyens de défense sont formés de la même manière à l'encontre des parties à l'instance, la cour d'appel, qui devait répondre à la demande de Mme Z quelle qu'en fût la qualification procédurale, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juin 1999, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société Entenial aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Entenial ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, siègeant en Chambre mixte, et prononcé par le premier président en son audience publique du vingt-et-un février deux mille trois.
Moyen produit par Me Choucroy, avocat aux Conseils pour Mme Z.
Moyen annexé à l'arrêt n 218 P (Chambre mixte)
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Mme Z de son opposition et d'AVOIR constaté la créance de la Banque La Hénin à hauteur de la somme de 271 170,74 francs ;
AUX MOTIFS QUE Mme Z invoquait plusieurs fautes qui auraient été commises par la Banque La Hénin dont l'attitude serait de nature à la décharger de toute obligation à son égard ; qu'en dehors du cadre de l'article 2037 du Code civil, la caution ne pouvait agir en responsabilité pour faute à l'encontre du banquier que par voie de demande reconventionnelle et non, comme en l'espèce, par voie d'exception ; que les prétentions de Mme Z, fondées sur de prétendues fautes de la Banque La Hénin dans le recouvrement de sa créance, constituaient en l'espèce un simple moyen de défense au fond ; qu'elles sont par suite irrecevables ;
ALORS QUE les demandes reconventionnelles sont formées à l'encontre des parties à l'instance comme sont présentés les moyens de défense ; qu'ainsi, en jugeant irrecevable la demande en responsabilité formée contre la banque qui pouvait avoir pour objet la décharge de la caution à l'égard de la banque au titre de la réparation du préjudice subi et qui se trouvait valablement formée entre les parties à l'instance par voie de conclusions, la cour d'appel a violé les articles 4, 64 et 68 du nouveau Code de procédure civile.