Jurisprudence : TA Pau, du 12-07-2024, n° 2202794


Références

Tribunal Administratif de Pau

N° 2202794

CHAMBRE 2
lecture du 12 juillet 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 décembre 2022, le 16 décembre 2022, le 13 mai 2023 et le 2 juillet 2023, M. B A, représenté par Me Lopes, demande au tribunal :

1°) d'annuler l'arrêté du 2 août 2022 par lequel le maire de Boucau a accordé à la société à responsabilité limitée Promobat un permis de construire en vue de la démolition d'une construction existante et de l'édification d'un bâtiment comportant 46 logements, ensemble la décision du 11 octobre 2022 par laquelle cette même autorité a rejeté son recours gracieux formé contre cet arrêté ;

2°) de mettre à la charge de la partie perdante une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Il soutient que :

- le maire s'est estimé à tort en situation de compétence liée par l'avis la communauté d'agglomération du Pays basque ;

- le dossier de demande de permis est entaché d'insuffisances au regard des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme🏛🏛 ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les articles UC 6, UC 7, UC 9, UC 10, UC 11 et UC 13 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Boucau ;

- il méconnaît les articles R. 111-27 et R. 431-24 du code de l'urbanisme🏛🏛.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 mars 2023 et le 25 mai 2023, la société à responsabilité limitée Promobat, représentée par Me Rousseau, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit fait application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme🏛🏛, et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A une somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête a été présentée en méconnaissance de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme🏛 ;

- la requête est tardive ;

- M. A ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- les moyens soulevés par M. A ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2023, la commune de Boucau, représentée par Me Cambot, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente d'une régularisation, et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête a été présentée en méconnaissance de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- la requête est tardive ;

- M. A ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- les moyens soulevés par M. A ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diard,

- les conclusions de Mme Réaut, rapporteure publique,

- et les observations de Me Lopes, représentant M. A, de Me Coto, substituant Me Cambot, représentant la commune de Boucau, et de Me Rousseau, représentant la société Promobat.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 2 août 2022, le maire de Boucau a accordé à la société Promobat un permis de construire en vue de la démolition d'une construction existante et de l'édification d'un bâtiment comportant 46 logements. Par une décision du 11 octobre 2022, cette même autorité a rejeté le recours gracieux formé par M. A contre cet arrêté. M. A demande l'annulation de cet arrêté et de cette décision.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative🏛 : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / () ". Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. / () ". Aux termes de l'article R. 600-2 du même code : " Le délai de recours contentieux à l'encontre () d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code🏛 : " Mention du permis explicite () doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté () et pendant toute la durée du chantier. () / Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. / () Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage. ". Aux termes de l'article A. 424-17 du même code : " Le panneau d'affichage comprend la mention suivante : / " Droit de recours : / " Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme🏛). / " Tout recours administratif ou tout recours contentieux doit, à peine d'irrecevabilité, être notifié à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. Cette notification doit être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours (art. R. 600-1 du code de l'urbanisme). " ".

3. L'article R. 600-1 du code de l'urbanisme vise, dans un but de sécurité juridique, à permettre au bénéficiaire d'une autorisation d'urbanisme, ainsi qu'à l'auteur de cette décision, d'être informés à bref délai de l'existence d'un recours gracieux ou contentieux dirigé contre elle. Si, à l'égard du titulaire de l'autorisation, cette formalité peut être regardée comme régulièrement accomplie dès lors que la notification lui est faite à l'adresse qui est mentionnée dans l'acte attaqué, la notification peut également être regardée comme régulièrement accomplie lorsque, s'agissant d'une société, elle lui est adressée à son siège social.

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de constat établi par un huissier de justice le 9 août 2022, le 9 septembre 2022 et le 10 octobre 2022, que l'arrêté attaqué a fait l'objet d'un affichage sur le terrain d'assiette du projet durant une période continue de deux mois à compter du 9 août 2022, que cet affichage comportait les informations prévues par les dispositions précitées des articles R. 424-15 et A. 424-17 du code de l'urbanisme🏛, notamment la mention des voies et délais de recours, et que M. A a formé, le 29 septembre 2022, un recours gracieux auprès du maire de Boucau à l'encontre de cet arrêté. Ce recours gracieux n'a pas été notifié à l'adresse du siège social de la société Promobat située à Pessac, mentionnée sur l'arrêté attaqué, mais à l'adresse de l'un des nombreux établissements secondaires de la société Promotion Pichet située à Bayonne. Si le siège social de la société Promotion Pichet est identique à celui de la société Promobat, que les activités de ces deux sociétés sont complémentaires et qu'elles ont également le même gérant et le même actionnaire majoritaire, la notification du recours gracieux formé par M. A à la société Promobat, seule titulaire de l'autorisation, ne peut toutefois être regardée comme régulièrement accomplie. Ce recours gracieux n'a donc pas eu pour effet de proroger le délai de recours contentieux de deux mois qui a commencé à courir à compter du 9 août 2022. Dès lors, les conclusions de la requête aux fins d'annulation de l'arrêté attaqué, enregistrée le 11 décembre 2022, soit postérieurement à l'expiration de ce délai, sont tardives. Par suite, la fin de non-recevoir opposée à ce titre par la commune de Boucau et la société Promobat doit être accueillie.

5. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation de la requête de M. A doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

7. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. A doivent dès lors être rejetées. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier des sommes de 750 euros au titre des frais exposés respectivement par la commune de Boucau et la société Promobat et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera respectivement à la commune de Boucau et à la société Promobat une somme de 750 (sept cent cinquante) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. B A, à la commune de Boucau et à la société à responsabilité limitée Promobat.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. de Saint-Exupéry de Castillon, président,

Mme Genty, première conseillère,

M. Diard, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juillet 2024.

Le rapporteur,

F. DIARDLe président,

F. DE SAINT-EXUPERY DE

CASTILLON

La greffière,

P. SANTERRE

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

Pour expédition,

La greffière,

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