Cour de Cassation
Chambre sociale
Audience publique du 20 Février 1997
Rejet
N° de pourvoi 95-15.274
Président M. GELINEAU-LARRIVET
Demandeur société des eaux minérales d'Evian, société anonyme et autres
Défendeur Union de recouvrement des cotisations de sécurité et autres
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu
l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par
1°/ la société des eaux minérales d'Evian, société anonyme, usine d'Amphion et usine d'Evian, dont le siège est Evian les Bains,
2°/ le comité d'entreprise de la société des eaux minérales d'Evian, dont le siège est Evian les Bains,
en cassation d'un arrêt rendu le 27 avril 1995 par la cour d'appel de Chambéry (Chambre sociale), au profit
1°/ de l' Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de la Haute-Savoie, dont le siège est Annecy,
2°/ de la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales Rhône-Alpes, dont le siège est Lyon , défenderesses à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt;
LA COUR, en l'audience publique du 9 janvier 1997, où étaient présents M. Gélineau-Larrivet, président, M. Ollier, conseiller rapporteur, MM ..., ..., ..., Mme ..., conseillers, Mme ..., MM. ... ... ... ..., ..., conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, M. Richard, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. Ollier, conseiller, les observations de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société des eaux minérales d'Evian et du comité d'entreprise de la société des eaux minérales d'Evian, de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de l'URSSAF de la Haute-Savoie, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le moyen unique
Attendu que la société des eaux minérales d'Evian a adhéré le 20 décembre 1984 à un contrat de groupe souscrit auprès de la compagnie UAP et prévoyant, afin de garantir à certains membres du personnel d'encadrement une pension de retraite égale à un pourcentage déterminé de leur salaire, la constitution d'un fonds collectif garantissant le versement par la compagnie d'un complément de retraite à ceux de ses salariés, en activité dans l'entreprise lors de leur départ en retraite, dont la pension versée par les régimes obligatoires ou facultatifs serait inférieure à ce montant; qu'à la suite d'un contrôle, l'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale dues par la société pour les années 1988 à 1990 la fraction des versements effectués à l'UAP excédant 85 % du plafond de la sécurité sociale prévu par l'article D 242-1 du Code de la sécurité sociale; que la cour d'appel (Chambéry, 22 avril 1995) a rejeté le recours formé contre cette décision par la société des eaux minérales d'Evian;
Attendu que celle-ci fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, que ne sont assujettis à cotisations sociales sur le fondement de l'article L 242-1 du Code de la sécurité sociale que les versements effectués par l'employeur destinés au financement de prestations complémentaires de retraite ou ayant pour objet de conférer un avantage direct et certain aux salariés; qu'en l'espèce, les versements effectués par la société des eaux minérales d'Evian par l'intermédiaire de l'association Eparinter faisaient l'objet d'une gestion collective par l'UAP, en vue de couvrir le cas échéant l'employeur contre un risque futur; que les personnes visées par ce dispositif ne contresignaient pas de bulletin d'adhésion, ne disposaient d'aucun droit direct sur le fonds, dont l'employeur conserve la propriété, leur droit à prestation éventuel étant non seulement subordonné à certaines conditions suspensives -maintien dans une société du groupe à un poste de direction, cumul des pensions inférieur à 65 % de la rémunération perçue pendant la dernière année d'activité- mais entièrement déterminé par l'existence et le montant des versements effectués par l'employeur à la date de départ en retraite de l'intéressé; qu'en l'état de ces constatations, ne caractérisant ni l'octroi d'avantages directs et certains au profit de salariés au sens du 1er alinéa de l'article L 242-1, ni une contribution à un régime de prestations de retraites au sens du dernier alinéa de cet article, la cour d'appel a violé par fausse application le texte précité ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la convention conclue par l'employeur avec la compagnie d'assurance avait pour objet de procurer aux salariés concernés un avantage consistant en la garantie du versement d'une pension de retraite de nature à leur assurer un revenu égal à une fraction déterminée de leur salaire d'activité, la cour d'appel a retenu que cet avantage complémentaire, financé exclusivement par l'employeur, était consenti aux salariés bénéficiaires en contrepartie du travail accompli pour la société; qu'elle en a exactement déduit que les primes versées par cette société constituaient une contribution au financement de prestations complémentaires de retraite, individualisées lors de leur règlement, et que la fraction de ces primes dépassant les limites prévues par l'article D 242-1 était soumise à cotisations ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société des eaux minérales d'Evian et le comité d'entreprise de la société des eaux minérales d'Evian aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.